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Lycurgue (législateur)

Lycurgue (en grec ancien ΛυÎșÎżÏÏÎłÎżÏ‚ / LykoĂșrgos, « celui qui tient les loups Ă  l’écart ») est un lĂ©gislateur mythique de Sparte.

Lycurgue
Peinture de Merry-Joseph Blondel (1828).
Biographie
Naissance
DĂ©cĂšs
Activité
Période d'activité
VIIIe siĂšcle av. J.-C.
Autres informations
Mouvement
Portrait imaginaire de Lycurgue.

Plutarque, dans ses Vies parallĂšles, consacre une Vie Ă  Lycurgue, mis en parallĂšle avec le roi romain Numa Pompilius. Il situe son existence au IXe siĂšcle av. J.-C. ou au tout dĂ©but du VIIIe siĂšcle, mais il avertit au tout dĂ©but de son Ɠuvre que :

« On ne peut absolument rien dire sur le lĂ©gislateur Lycurgue qui ne soit sujet Ă  controverse : son origine, ses voyages, sa mort, l’élaboration enfin de ses lois et de sa constitution ont donnĂ© lieu Ă  des rĂ©cits historiques trĂšs divers[1]. »

De fait, les historiens modernes, voire antiques, utilisent son nom pour dĂ©finir l'ensemble de la lĂ©gislation mise en Ɠuvre Ă  Sparte et qui lui est attribuĂ©e, sans s'engager sur l'historicitĂ© du personnage ou le fait qu'un seul homme ait Ă©tĂ© Ă  l'origine de ces mesures.

Biographie

Prince et régent de Sparte

Selon Simonide de CĂ©os, il est le fils du roi spartiate Prytanis, de la dynastie des Eurypontides. Plutarque tĂ©moigne cependant que la majoritĂ© des auteurs en fait le fils d'Eunomos, lui-mĂȘme fils de Prytanis et de sa deuxiĂšme femme, DionassĂ©. Il a pour demi-frĂšre Polydecte, nĂ© d'un premier lit, qui devient roi quand leur pĂšre meurt. À la mort de Polydecte, Lycurgue est destinĂ© Ă  ĂȘtre roi, quand on s’aperçoit que la femme de son dĂ©funt frĂšre est enceinte. Celle-ci fait appeler Lycurgue, devenu rĂ©gent, en secret. Elle lui propose alors de tuer l’enfant Ă  naĂźtre si lui, Lycurgue, accepte de l’épouser. Celui-ci feint d’accepter et, lorsque l’enfant — un garçon — naĂźt, le proclame roi de Sparte et le baptise Charilaos (littĂ©ralement, « joie du peuple »).

En exil

Furieux, les parents de la reine rĂ©pandent sur son compte des rumeurs qui l’obligent Ă  s’exiler. Lycurgue se rend d’abord en CrĂšte, oĂč il Ă©tudie les institutions locales et rencontre le poĂšte ThalĂ©tas. Il se dirige ensuite vers l’Ionie, rĂ©putĂ©e alors indolente et dĂ©cadente, afin d’analyser les mƓurs et les institutions locales.

Selon HĂ©rodote[2], il se rend ensuite en Égypte, d’oĂč il prend l’idĂ©e de sĂ©parer les guerriers des travailleurs. Selon AristocratĂšs (en) dans son Histoire des Spartiates, il pousse jusqu’en Inde, oĂč il rencontre les gymnosophistes.

La Constitution de Sparte

Lycurgue et les deux chiens, gravure d'Otto van Veen, Emblemata Horatiana (1607).

RappelĂ© par ses concitoyens, Lycurgue rentre Ă  Sparte et dĂ©cide de composer une constitution. Il se rend donc Ă  Delphes pour interroger Apollon, dispensateur de la justice, par son oracle. La Pythie le salue alors comme « aimĂ© du dieu, et dieu lui-mĂȘme plutĂŽt qu’ĂȘtre humain[3] ». De retour Ă  Sparte, Lycurgue convoque les trente citoyens les plus importants sur l’agora, qui l’aident Ă  composer sa constitution, la « Grande RhĂȘtra » (ÎŒÎ”ÎłÎŹÎ»Î· áż„ÎźÏ„ÏÎ± / megĂĄlĂȘ rháșżtra).

Sa premiĂšre mesure est d’établir la gĂ©rousie pour compenser le pouvoir des rois. La deuxiĂšme est la redistribution des terres : la Laconie est divisĂ©e en 30 000 lots (klĂ©roi) et le territoire civique de Sparte, en 9 000 lots. Il dĂ©crĂšte ensuite la cessation du cours de la monnaie d’or et d’argent, et les remplace par de lourds lingots de fer — trempĂ© au vinaigre afin d’en augmenter le cassant et d’en diminuer la mallĂ©abilitĂ©. De la sorte, Lycurgue espĂšre mettre fin Ă  la thĂ©saurisation. De mĂȘme, il instaure l’autarcie et bannit les arts jugĂ©s inutiles, c’est-Ă -dire l’artisanat du luxe. Il oblige les Spartiates Ă  prendre leurs repas en commun (syssities) et Ă  se nourrir frugalement. Enfin, il met en place l’éducation spartiate, obligatoire et dispensĂ©e par l’État.

Ayant Ă©tabli toutes ces lois (rhetrai), Lycurgue souhaite demander l'avis d'Apollon, Ă  Delphes, et dĂ©fend aux Spartiates de modifier les lois nouvelles avant qu'il soit revenu de Delphes. Il part donc pour la ville sacrĂ©e, et demande Ă  Apollon si les lois qu’il a Ă©dictĂ©es sont bonnes. Le dieu acquiesce. Estimant son Ɠuvre accomplie, et ne voulant pas dĂ©lier ses compatriotes de leur serment, il se suicide en se laissant mourir de faim.

Le lieu de sa sĂ©pulture n’est pas connu. Selon certains auteurs, il se suicide Ă  Cirrha, port du golfe de Corinthe oĂč dĂ©barquent les pĂšlerins pour Delphes. D’autres, comme TimĂ©e de TauromĂ©nion et AristoxĂšne, le font plutĂŽt mourir en CrĂšte. AristocratĂšs prĂ©cise mĂȘme qu’à sa demande, son corps est brĂ»lĂ© et ses cendres rĂ©pandues en mer : il veut Ă©viter que les Spartiates ne rapportent ses restes Ă  LacĂ©dĂ©mone, et se tiennent pour dĂ©liĂ©s de leur serment.

Symbolique

Lycurgue est, selon Plutarque, borgne. Il reçoit cette infirmitĂ© lors d’une altercation avec de riches citoyens, indignĂ©s par les mesures Ă©dictĂ©es contre le luxe :

« L’un [de ses adversaires], Alcandros, jeune homme violent et emportĂ© qui par ailleurs n’était pas dĂ©pourvu de qualitĂ©s, le poursuivit et le rejoignit : comme Lycurgue se retournait, il le frappa de son bĂąton et lui creva un Ɠil. »

Loin de s’abandonner Ă  la douleur, Lycurgue fait face Ă  ses adversaires. Honteux, ceux-ci baissent les armes. Alcandros, livrĂ© par les siens, est pris par Lycurgue Ă  son service. À force de vivre en compagnie du lĂ©gislateur, le jeune homme s’amende. Plutarque conclut : « Pour rappeler le traitement qu’il avait subi, il Ă©difia un sanctuaire Ă  AthĂ©na qu’il nomma OptillĂ©tis : car les Doriens de ce pays appellent les yeux optilloĂŻ. »

Pour Georges DumĂ©zil, cet Ă©pisode revĂȘt une grande importance. S’appuyant sur l’étymologie du nom « Lycurgue » (*Lyko-vorgos, « celui qui tient les loups Ă  l’écart »), il compare le lĂ©gislateur lĂ©gendaire Ă  d’autres figures tutĂ©laires indo-europĂ©ennes. Il Ă©tablit ainsi un parallĂšle avec la lĂ©gende ossĂšte de FĂŠlvĂŠra, protecteur des moutons, et de Tutyr, le berger des loups. Le motif de l’aveuglement se retrouve Ă©galement dans la lĂ©gende du dieu nordique Odin, qui abandonne son Ɠil en Ă©change de la sagesse, et du sage Zoroastre, aveuglĂ© par ses disciples quand il veut les quitter, et dĂ©vorĂ© par les loups.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Georges DumĂ©zil, « Le brutal et le borgne », Ultra Ponticos fluctus (Esquisse de mythologie), Gallimard, coll. « Quarto », 1982 (ISBN 2-07-076839-2).
  • Moses Finley, « Sparte et la sociĂ©tĂ© spartiate », Économie et sociĂ©tĂ© en GrĂšce ancienne, Seuil, coll. « Points Histoire », Paris, 1997 (ISBN 2-02-014644-4).
  • Henri Jeanmaire, Couroi et CourĂštes : essai sur l'Ă©ducation spartiate et sur les rites d'adolescence dans l'AntiquitĂ© hellĂ©nique, Lille, BibliothĂšque universitaire, 1939.
  • Pierre Vidal-Naquet, Le Chasseur noir. Formes de pensĂ©e et formes de sociĂ©tĂ© dans le monde grec, MaspĂ©ro, 1981 (ISBN 2-7071-4500-9).

Notes

  1. Les extraits de Plutarque sont issus de la traduction d'Anne-Marie Ozanam, 1991.
  2. Hérodote, Histoires [détail des éditions] [lire en ligne], II, 164.
  3. Propos rapportés par Plutarque, Lycurgue, V, 4 ; comparer avec Hérodote (I, 65) qui livre un récit similaire, avant d'indiquer que Lycurgue apporta ses lois de CrÚte sous le rÚgne de son neveu LéobotÚs.
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