Luisa Ortega DĂaz
Luisa Ortega DĂaz est une avocate et femme politique vĂ©nĂ©zuĂ©lienne, nĂ©e le Ă Valle de la Pascua. Proche d'Hugo Chávez, elle occupe de 2007 Ă 2017 le poste de procureur gĂ©nĂ©ral de la rĂ©publique bolivarienne du Venezuela.
Luisa Ortega DĂaz | |
Luisa Ortega Diaz en 2017. | |
Fonctions | |
---|---|
Procureur général de la République | |
– (9 ans, 7 mois et 23 jours) |
|
PrĂ©dĂ©cesseur | IsaĂas RodrĂguez DĂaz |
Successeur | Tarek William Saab |
Biographie | |
Nom de naissance | Luisa Marvelia Ortega DĂaz |
Date de naissance | |
Lieu de naissance | Valle de la Pascua (Venezuela) |
Nationalité | vénézuélienne |
Conjoint | Germán Ferrer |
Diplômée de | université de Carabobo université Santa Maria |
Profession | avocate |
Résidence | Caracas Colombie (exil depuis août 2017) |
À partir de , elle s'oppose au président Nicolás Maduro, dénonçant l'action de ce dernier lors de la crise politique que traverse le pays et l'accuse de corruption. En , une procédure de destitution est engagée à son encontre par la Cour suprême. C'est finalement l'Assemblée constituante qui décide de cette révocation le suivant. Elle se réfugie en Colombie, accompagnée de son époux, le député chaviste Germán Ferrer.
Biographie
Jeunesse
Luisa Ortega Diaz est née à Valle de la Pascua dans l'État de Guárico au Venezuela, le . Elle a obtenu son diplôme en droit de l'université de Carabobo, située dans l'État de Carabobo. Elle s'est spécialisée en droit pénal à l'université Santa Maria (où elle a enseigné) et en droit procédural à l'université catholique Andrés Bello, toutes deux situées à Caracas.
Carrière professionnelle et engagement politique
Luisa Ortega a été conseillère juridique auprès de la chaîne de télévision nationale Venezolana de Televisión, après quoi elle a rejoint le ministère public en [1].
Pendant la campagne prĂ©sidentielle de 1998, Luisa Ortega DĂaz est aux cĂ´tĂ©s d'Hugo Chávez[2]. Elle est la sĹ“ur du militaire Humberto Ortega DĂaz, qui a Ă©galement participĂ© Ă la tentative de coup d'État de 1992 et a Ă©tĂ© ministre de la Banque publique. Luisa Ortega DĂaz est mariĂ©e Ă Germán Ferrer, dĂ©putĂ© du Parti socialiste unifiĂ© du Venezuela, fondĂ© par Hugo Chávez[3].
Luisa Ortega est nommée procureur général de la république bolivarienne du Venezuela par l'Assemblée nationale le pour la période 2008-2014. À cette dernière date, les élus, alors majoritairement proches de Nicolás Maduro, l’ont prolongé dans ses fonctions pour sept ans, jusqu’en 2021[4].
En 2014, Luisa Ortega soutient Nicolás Maduro lors des manifestations contre le gouvernement indiquant que ces manifestations « sont violentes, agressives et mettent en danger la liberté de ceux qui n’y participent pas ». La magistrate laisse entendre un financement de ces manifestations par les États-Unis[5].
Son positionnement Ă©volue lors des manifestations de 2017. En effet, Luisa Ortega considère que « des groupes armĂ©s ne doivent pas attaquer des manifestations pacifiques » et prĂ©cise que des investigations sont en cours Ă l'Ă©gard de ces groupes paramilitaires qui contrĂ´lent les quartiers populaires. Par ailleurs, elle estime que la convocation d’une AssemblĂ©e constituante « aggraverait la crise ». Enfin, elle dĂ©nonce le recours aux tribunaux militaires Ă l'encontre des civils arrĂŞtĂ©s lors des manifestations[6]. En rĂ©action Ă ces prises de position, des proches de Nicolás Maduro demandent la dĂ©mission de Luisa Ortega, l'accusant notamment d'ĂŞtre corrompue[7]. L'ancienne ministre de l'Environnement d'Hugo Chavez, Ana Elisa Osorio, apporte son soutien Ă Luisa Ortega DĂaz dans son opposition Ă la convocation de l'AssemblĂ©e constituante[8]. Le , elle dĂ©pose un recours contre la convocation de l'AssemblĂ©e constituante, recours qui est rejetĂ© le 12 juin par le Tribunal suprĂŞme de justice[9]. En rĂ©action, elle dĂ©pose un autre recours contre la nomination des juges du TSJ, en , par la lĂ©gislature sortante dominĂ©e par les chavistes[10]. Ensuite des dĂ©putĂ©s proche du prĂ©sident Maduro rĂ©clamèrent au TSJ une expertise mĂ©dicale Ă son encontre, dans la but de la destituer[11].
Le , plusieurs anciens ministres d'Hugo Chávez se réunissent autour d'elle pour évoquer la défense de la Constitution[12].
Fin , le Tribunal suprême engage des poursuites à son encontre[13] pour « mensonges » au sujet des juges de l'institution et son audition est fixée au 4 juillet[14]. Elle boycotte celle-ci, dénonçant un « cirque » et une « décision connue d'avance » en évoquant sa possible destitution qu'elle juge jouée d'avance, alors que la cour s'est donnée cinq jours pour statuer sur son sort[15]. La Cour suprême n'a finalement pas décidé du devenir de Luisa Ortega. Le délai légal est de 30 jours pour traiter ce type de dossier[16].
Accusations de corruption envers Nicolás Maduro
Luisa Ortega DĂaz accuse le prĂ©sident Nicolás Maduro d'avoir reçu 35 millions de dollars de la sociĂ©tĂ© brĂ©silienne Odebrecht et d'autres entreprises dans le cadre de l'OpĂ©ration Lava Jato[17]. Le , lors d'une rĂ©union de procureurs d'AmĂ©rique latine Ă Puebla au Mexique, elle renouvelle ses accusations par un message audio et affirme dĂ©tenir les preuves de la culpabilitĂ© du prĂ©sident Maduro[18] : « Nous avons le dĂ©tail de toute la coopĂ©ration, les montants et les personnes qui se sont enrichies, et cette enquĂŞte implique monsieur Nicolás Maduro et son entourage »[19].
Par ailleurs, elle accuse Diosdado Cabello, numéro deux du régime, d'être impliqué dans des dossiers de corruption et d'avoir reçu 100 millions de dollars (85 millions d’euros) de pots-de-vin grâce à une entreprise espagnole appartenant à sa famille. Cet argent serait en lien avec les marchés obtenus au Venezuela par une société brésilienne[20].
Destitution, poursuites judiciaires et exil
Le , Luisa Ortega DĂaz demande aux tribunaux de bloquer l'installation de l’AssemblĂ©e constituante, considĂ©rant la possibilitĂ© d'irrĂ©gularitĂ©s lors du scrutin du [21]. Le , elle est finalement « suspendue » de son poste de procureur gĂ©nĂ©ral de la RĂ©publique par l'AssemblĂ©e constituante[22]. Le bâtiment du ministère public est assiĂ©gĂ© par la garde nationale[23] et elle dĂ©clare « dĂ©noncer cet acte arbitraire devant la communautĂ© nationale et internationale [...] C’est une dictature ! »[24]. Elle est remplacĂ©e par Tarek William Saab, dĂ©fenseur du peuple et proche de Nicolás Maduro[21]. Elle rejette son Ă©viction dans la foulĂ©e[25]. Ses comptes bancaires sont gelĂ©s et il lui est interdit de quitter le Venezuela[26]
Le suivant, le Tribunal suprĂŞme lance des poursuites Ă son encontre pour « irrĂ©gularitĂ©s »[27]. En fuite, Luisa Ortega DĂaz, dĂ©nonce la persĂ©cution dont elle est l'objet par le rĂ©gime de Nicolás Maduro[28].
Le 18 août, son domicile est perquisitionné alors que Saab, son successeur au poste de procureur général a demandé l'arrestation de son mari, Germán Ferrer, député du PSUV[29], dont l'immunité a été levée par l'Assemblée constituante[30]. Elle fuit en le soir même[31], accompagnée de son mari[32], et de deux collaborateurs, Gioconda González Sánchez et Arturo Vilar Estévez [33]. Le groupe rejoint incognito la péninsule de Paraguaná, au nord du Venezuela. Là , un bateau les prend en charge pour rejoindre Aruba, une île néerlandaise située au large du Venezuela. Puis un avion privé les conduit à Bogota en Colombie[34]. Après son arrivée, le président colombien Juan Manuel Santos indique qu'elle est « sous sa protection » et souhaite lui donner l'asile politique si elle le demande[35].
DĂ©placements Ă l'Ă©tranger
Le , elle rejoint le Brésil[36], où elle participe à une rencontre des procureurs des pays du Mercosur, ces derniers lui apportent leurs soutiens. Elle y évoque la « mort du droit » au Venezuela et considère que la « stabilité de la région est en danger ». Après un retour en Colombie, elle se rend au Costa Rica, elle y indique craindre pour sa vie et affirme que le régime de Nicolás Maduro a « engagé des tueurs pour attenter à sa vie »[26]. Lors d'un déplacement au Mexique, début septembre, elle remet des informations sur les « crimes commis au Venezuela » au procureur général du Mexique Raúl Cervantes. Elle déclare « Mon pays, mon peuple, souffre d'une série de problèmes, d'une grave crise de nourriture, de santé et d'insécurité. Je dénonce également ces événements dans le monde »[37].
Accusation de corruption
Lors de son procès Ă Miami en avril 2021, l'homme d'affaires vĂ©nĂ©zuĂ©lien Carlos Urbano Fermin reconnait avoir versĂ© des pots-de-vin d'environ un million de dollars Ă Luisa Ortega DĂaz dĂ©but 2017 en Ă©change de sa protection dans le cadre d'une enquĂŞte pour corruption le visant. Le bureau du procureur gĂ©nĂ©ral avait ouvert une enquĂŞte concernant des faits de corruption entourant l'attribution de contrats par la compagnie pĂ©trolière PDVSA Ă des entreprises dont Carlos Urbano Fermin est propriĂ©taire. Ce dernier aurait ensuite Ă©tĂ© contactĂ© par un proche de Luisa Ortega DĂaz lui promettant l'abandon de l’enquĂŞte en Ă©change du versement d'un million de dollars dans plusieurs comptes bancaires aux États-Unis, ce qu'il a acceptĂ©. L’enquĂŞte a cependant Ă©tĂ© relancĂ©e par le nouveau procureur gĂ©nĂ©ral après que Luisa Ortega DĂaz a Ă©tĂ© dĂ©mise de sa fonction, conduisant Ă l'inculpation de Carlos Urbano Fermin et Ă son exil aux États-Unis, oĂą il a acceptĂ© de collaborer avec les autoritĂ©s amĂ©ricaines[38].
Références
- Fiscal General de la RepĂşblica - CurrĂculo « Copie archivĂ©e » (version du 24 juin 2014 sur Internet Archive) Ministerio PĂşblico
- Venezuela : qui sont les opposants Ă Nicolas Maduro France Culture, 20 juillet 2017
- Luisa Ortega, la Fiscal chavista que se convirtiĂł en la enemiga de Maduro El Financiero, 15 juin 2017
- Gilles Biassette Venezuela : Luisa Ortega, une conscience au cœur du pouvoir chaviste La Croix, 30 mai 2017
- Le Venezuela tente de se faire entendre Le Temps, 17 mars 2014
- Paulo A. Paranagua La procureure générale du Venezuela critique la répression de l’oppositionLe Monde, 26 mai 2017
- Reuters - Marco Bello Venezuela: les partisans de Maduro réclament la démission de Luisa Ortega RFI, 3 juin 2017
- Ex-ministra del Ambiente Ana Elisa Osorio pidiĂł al pueblo rechazar la Constituyente: "es muy riesgoso" Aporrea, 7 juin 2017
- Le Point, magazine, « Venezuela: la Cour suprême rejette le recours contre la Constituante », sur Le Point (consulté le )
- « Venezuela: rejet du recours de la procureure générale - Amériques - RFI », sur RFI (consulté le )
- « Passe d'armes entre procureure et chavistes », sur tdg.ch/ (consulté le )
- Ex ministros de Chávez se reunieron con Luisa Ortega DĂaz El Nacional, 12 juin 2017
- « A la Une: Au Venezuela, la procureure Luisa Ortega sera poursuivie - Amériques - RFI », sur RFI (consulté le )
- « Venezuela : Maduro promeut le chef des services de renseignement, accusé de « violations » des droits de l’homme », sur Le Monde, (consulté le )
- « Venezuela: verdict dans 5 jours pour la procureure Luisa Ortega » (consulté le )
- Pas de décision de la Cour suprême sur Ortega Tribune de Genève, 13 juillet 2017
- Venezuela: une élection pour dissimuler la corruption ? Mediapart, 1 août 2017
- Venezuela : l'ex-procureure générale s'enfuit en Colombie et accuse Nicolas Maduro de corruption Europe 1, 19 août 2017
- Venezuela: l'ex-procureure générale accuse Maduro de corruption Le Figaro, 19 août 2017
- Au Venezuela commence le grand déballage sur la corruption Le Monde, 24 août 2017
- La procureure générale démise de ses fonctions Le Devoir, 5 août 2017
- La nueva Asamblea Constituyente destituye a la fiscal general de Venezuela, El PaĂs, 5 aoĂ»t 2017.
- Venezuela: le parquet général "assiégé" par l'armée, Le Figaro, 5 août 2017.
- Venezuela : à peine installée, l’Assemblée constituante démet de ses fonctions la procureure générale, Le Monde, 5 août 2017.
- « Venezuela : le pouvoir dénonce une rébellion », sur Franceinfo (consulté le )
- Le parcours de Luisa Ortega, procureure générale au Venezuela contrainte à l’exil Libération, 29 août 2017
- LIBERATION, « Venezuela : à peine élue, la Constituante renforce les pouvoirs de Maduro », sur Libération, (consulté le )
- Luisa Ortega DĂaz: Han amenazado con privarme mi vida El National, 10 aoĂ»t 2017
- « Venezuela : perquisition au domicile de l'ex-procureure générale, demande d'arrestation de son mari », sur Europe 1 (consulté le )
- « La Colombie « protège » l'ex-procureure générale vénézuélienne Luisa Ortega », sur Radio-Canada.ca (consulté le )
- « Venezuela: l'ex-procureure générale s'est réfugiée en Colombie », sur La Presse (consulté le )
- Au Venezuela, la Constituante s’arroge les pouvoirs du Parlement Le Monde, 18 août 2017
- Luisa Ortega DĂaz y Germán Ferrer salieron de Venezuela en lancha El Nacional, aoĂ»t 2017
- Fuite rocambolesque au Venezuela France Inter
- Venezuela : l'opposante Luisa Ortega "sous la protection" de la Colombie France 24, 21 août 2017
- L'ex-Procureure du Venezuela a trouvé refuge au Brésil L'Express, 22 août 2017
- Luisa Ortega DĂaz entregĂł a MĂ©xico "informaciĂłn importante" sobre la corrupciĂłn en Venezuela Infobae, 3 septembre 2017
- (en) « Venezuela prosecutor who defied Maduro implicated in bribery », sur Associated Press,