Accueil🇫🇷Chercher

Louis René Quentin de Richebourg de Champcenetz

Louis RenĂ© Quentin de Richebourg, « chevalier de Champcenetz Â», nĂ© le Ă  Paris oĂą il a Ă©tĂ© guillotinĂ© le , est un journaliste français.

Louis René Quentin de Richebourg de Champcenetz
Portrait du chevalier de Champcenetz par Thomas Gainsborough.
Titre de noblesse
Chevalier
Biographie
Naissance
Décès
(Ă  34 ans)
Paris
SĂ©pulture
Nationalité
Activité
RĂ©dacteur Ă 
Père
Fratrie
Autres informations
Arme
Lieu de détention

Biographie

Fils du gouverneur du Louvre et neveu du gouverneur des Tuileries[1], lui-même servait comme officier aux gardes-françaises[2], mais tout en s’occupant beaucoup plus de ses plaisirs que de ses devoirs militaires. Homme à la mode, faiseur de chansons, de bons mots, de petits vers, il faisait partie d’une société de jeunes gens qui se cotisaient d’esprit pour jeter le ridicule sur tout ce qui occupait l’attention publique[3], et il était cité dans le monde pour son esprit et son élégance[4]. Ses couplets satiriques, d’une légèreté de principes recouverte par l’élégance et les formes de l’esprit, étaient aussi réputés que leur auteur[4]. Ses chansons portent la marque de ses mœurs fort libres[5].

Son premier petit Ă©crit, l’un des plus gros, restĂ© presque cĂ©lèbre, Ă  cause de son titre, Petit TraitĂ© de l’amour des femmes pour les sots, dĂ©diĂ© « Ă  Mad… P[6] Â»[7], raille le mariage de son père avec la baronne de Nieukerque, intrigante cĂ©lèbre par sa beautĂ©. BrouillĂ© avec son père pour ces vers très piquants contre sa belle-mère, il a Ă©tĂ© arrĂŞtĂ© par lettre de cachet et enfermĂ©, sur la demande de celui-ci[8]. Du fond de sa prison, il en a fait de plus piquants encore, qu’il a trouvĂ© plaisant de lui adresser, et qui se terminaient par ces quatre vers passĂ©s Ă  la postĂ©ritĂ© :

Vieux parents, en vain vous prĂŞchez :
Vous êtes d’ennuyeux apôtres :
Vous nous fites pour vos péchés,
Et vous vivez trop pour les nĂ´tres[9].

Le traitement auquel il était soumis excusant cette imprudence peu morale, elle a fait rire le ministre qui, en conséquence, l’a relaxé[8]. Les épigrammes qu’il ne ménageait pas à autrui lui ont également attiré des représailles. Ainsi Rulhière a écrit :

ĂŠtre haĂŻ, mais sans se faire craindre,
ĂŠtre puni, mais sans se faire plaindre,
Est un fort sot calcul : Champcenetz s’est mépris :
En recherchant la haine, il trouve le mépris[10].

Officier aux gardes-françaises, au dĂ©but de la RĂ©volution[2], occupant un logement aux Tuileries jusqu’à l’installation du roi Ă  Paris, en [8], il a prĂ©fĂ©rĂ© quitter le service, Ă  la dissolution de son rĂ©giment, plutĂ´t que de suivre ses compagnons qui, pour la plupart, se sont enrĂ´lĂ©s dans la garde nationale soldĂ©e de la municipalitĂ© de Paris[3]. LiĂ© intimement avec Rivarol[n 1], antĂ©rieurement Ă  cette Ă©poque, il Ă©tait sorti de cette collaboration le petit Almanach des grands hommes (1788, in-12), satire sous forme d'Ă©loge des Ă©crivains Ă©phĂ©mères et sans talent[5], dont l’idĂ©e originale lui appartient tout entière[8]. RangĂ© parmi les adversaires les plus dĂ©clarĂ©s de la RĂ©volution et de ses principes, il a changĂ©, en 1789, de matière, pour s’attacher Ă  la politique, et fronder la RĂ©volution comme il avait frondĂ© l’Ancien RĂ©gime, avec l’arme du ridicule et toute la fĂ©conditĂ© de sa verve mordante, Ă  laquelle la gravitĂ© croissante des Ă©vĂ©nements ne pouvait en imposer. Maniant la plume avec la mĂŞme audace que l’épĂ©e[2], il n’a cessĂ© de plaisanter, dans le Journal de la cour et de la ville, la Feuille du jour, la Chronique scandaleuse, des ridicules de la RĂ©volution. Il a surtout activement collaborĂ©, avec Rivarol, Suleau, Jean-Gabriel Peltier, Bergasse, Mirabeau-Tonneau, aux Actes des ApĂ´tres, pamphlet politique, en vers et en prose accompagnĂ© de caricatures, paru de – l’an zĂ©ro de la libertĂ©, proclame le titre â€“ Ă  1792, qui prenait pour cible l’AssemblĂ©e nationale et Lafayette. On y trouve des dĂ©tails piquants et des anecdotes assez curieuses[11].

Outre ses articles, il a publiĂ© divers Ă©crits de circonstance, dont : Parodie du Songe d’Athalie (1787, in-8°)[n 2] ; les Gobe-Mouches au Palais-Royal (1788, in-8°) oĂą il fait son portrait sous le nom du Gobe-Mouches sans-souci ; Petit traitĂ© de l’amour des femmes pour les sots (1788, in-8°) ; RĂ©ponse aux lettres (de Mme de StaĂ«l) sur le caractère et les Ĺ“uvres de J.-J. Rousseau, bagatelle que vingt libraires ont refusĂ© de faire imprimer (Genève [Paris], 1789, in-8°). Deux ans plus tard, ils ont rĂ©itĂ©rĂ©, avec un autre Petit dictionnaire des grands hommes de la RĂ©volution, par un citoyen actif, ci-devant rien[12], dĂ©diĂ© « Ă  la baronne de StaĂ«l, ambassadrice de Suède auprès de la Nation Â»[13]. Il a Ă©galement Ă©tĂ© l’un des acteurs de la campagne de calomnies dont a Ă©tĂ© victime ThĂ©roigne de MĂ©ricourt[14]. Dans Quatrevingt-treize, Victor Hugo Ă©crit que « Champcenetz Ă©tait arrĂŞtĂ© pour s’être Ă©criĂ© en plein Palais-Royal : « Ă€ quand la rĂ©volution de Turquie ? Je voudrais voir la rĂ©publique Ă  la Porte. »[15]»

Ayant rĂ©ussi Ă  sortir de Paris, après la journĂ©e du 10 aoĂ»t 1792, qui a consommĂ© la chute de la monarchie constitutionnelle et marquĂ© le dĂ©but de la première Terreur, il s’est rĂ©fugiĂ© dans une ville voisine[16], il a passĂ© les annĂ©es 92 et 93 sans ĂŞtre inquiĂ©tĂ©, jusqu’à ce qu’une imprudence le fasse arrĂŞter, juger et exĂ©cuter[17]. Son ami et collègue du Journal de la cour et de la ville, Journiac de Saint-MĂ©ard, rescapĂ© des massacres de l’Abbaye et qui avait su se faire quelques protections influentes, lui ayant obtenu un certificat de civisme, il a eu l’imprudence de revenir Ă  Paris. LiĂ©, vers la fin de 1792, avec le girondin Vergniaud, dont il aimait la personne et admirait le talent, jusqu’à la proscription des Girondins, il s’est obstinĂ©, après cela, Ă  demeurer Ă  Paris, malgrĂ© les conseils de ses amis qui ne cessaient de le presser de s’éloigner. Ă€ Saint-MĂ©ard qui Ă©tait allĂ© le voir et lui reprocher son imprudence, il a rĂ©pliquĂ© : « VoilĂ  les seuls amis qui me restent », en montrant ses livres, « je ne peux me rĂ©soudre Ă  les abandonner ». Sa bibliothèque, son insouciance naturelle, l’espoir de n’être pas aperçu des tyrans, l’ayant emportĂ© sur tous les efforts de ses amis, il Ă©tait agrĂ©ablement logĂ© rue du Mail, dans une maison appartenant Ă  Juliette RĂ©camier, et ne sortait plus de son cabinet, lorsque le , au moment oĂą il s’y attendait le moins, Ă  quatre heures du matin, le comitĂ© rĂ©volutionnaire de la section du Mail s’est rendue chez lui, et l’a constituĂ© prisonnier. Ă€ peine Ă©veillĂ©, affectant de prendre gaiement la chose, il leur dit : « Citoyens, je ne suis pas dans l’habitude de monter ma garde en personne ; j’ai un très bon remplaçant, voudriez-vous me permettre de le faire appeler ? ». IncarcĂ©rĂ© Ă  la prison des Carmes, il y Ă©tait dĂ©tenu depuis huit mois et onze jours, lorsqu’il a Ă©tĂ© dĂ©noncĂ© par les espions des comitĂ©s et du tribunal rĂ©volutionnaire, comme complice de la conspiration des Carmes, accusĂ©s d’avoir formĂ© le projet de s’évader. TransfĂ©rĂ© Ă  la Conciergerie, aussitĂ´t traduit au tribunal rĂ©volutionnaire, il a Ă©tĂ© condamnĂ© Ă  mort, le 5 thermidor an II. Après avoir entendu sa condamnation, il a rĂ©pĂ©tĂ© au tribunal la plaisanterie de son arrestation, en demandant Ă  Fouquier-Tinville : « En est-il de ceci comme du service de la garde nationale, peut-on se faire remplacer[8] ? »

Notes

  1. Rivarol disait de lui : « C’est un gros garçon que j’ai bourrĂ© d’esprit. Â» Voir Biographie nouvelle des contemporains, op. cit., p. 291.
  2. Également attaqué par Rulhière, op. cit., pour « En jeux de mots grossiers parodier Racine ».

Références

  1. L’Intermédiaire des chercheurs et curieux, Paris (lire en ligne), p. 443.
  2. Revue des deux mondes, t. 4, Paris, (lire en ligne), p. 306.
  3. Antoine-Vincent Arnault, Étienne de Jouy et Jacques Marquet de Norvins, Biographie nouvelle des contemporains : ou dictionnaire historique et raisonné de tous les hommes qui, depuis la révolution française, ont acquis de la célébrité par leurs actions, leurs écrits, leurs erreurs ou leurs crimes, soit en France, soit dans les pays étrangers, t. 4, Paris, Librairie historique, , 468 p. (lire en ligne), p. 290.
  4. Ferdinand Höfer, Nouvelle biographie universelle : depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours avec les renseignements bibliographiques et l’indication des sources à consulter, t. 9, Paris, Firmin-Didot, , 957 p. (OCLC 311357798, lire en ligne), p. 623.
  5. Gustave Vapereau, Dictionnaire universel des littératures, Paris, xvi-2096, 25 cm (OCLC 500040555, lire en ligne sur Gallica), p. 418.
  6. L’Ermitage : revue littéraire, t. 17, Paris, (lire en ligne), p. 8.
  7. Albertine Elisabeth de Nyvenheim, dite la baronne de Nieukerque, avait épousé, en premier mariage, le riche négociant, M. Pater.
  8. Pierre Louis Pascal Jullian, Philippe Lesbroussart et Gerrit Van Lennep, Galerie historique des contemporains : ou Nouvelle biographie, t. 3, Bruxelles, Auguste Wahlen, , 472 p. (lire en ligne), p. 293.
  9. Jean-François de La Harpe, Œuvres de La Harpe : correspondance littéraire, Paris, , 469 p. (lire en ligne), p. 258.
  10. François Joseph Marie Fayolle, Les Quatre Saisons du Parnasse : ou choix de poésies légères depuis le commencement du XIXe siècle, avec des notices des principaux ouvrages de poésie, romans, et pièces de théâtre, t. 10, Paris, Dubois, , 334 p., in-12 (OCLC 460903339, lire en ligne), p. 16.
  11. Louis-Mayeul Chaudon et Antoine-François Delandine, Nouveau Dictionnaire historique : ou histoire abrĂ©gĂ©e de tous les hommes qui se sont fait un nom par des talens, des vertus, des forfaits, des erreurs, etc. depuis le commencement du monde jusqu’à nos jours : dans laquelle on expose avec impartialitĂ© ce que les Ă©crivains les plus judicieux ont pensĂ© sur le caractère, les mĹ“urs et les ouvrages des hommes cĂ©lèbres dans tous les genres ; avec des tables chronologiques, pour rĂ©duire en corps d’histoire les articles rĂ©pandus dans ce dictionnaire, t. 10, Lyon, Bruyset AinĂ©, , 599 p. (OCLC 1069995953, lire en ligne), p. 455.
  12. Palais-royal, impr. nationale, 1790, v. ; in-12.
  13. Revue universelle : bibliothèque de l’homme du monde et de l’homme politique au XIXe siècle, t. 19, Bruxelles, Louis Hauman, 432 p. (lire en ligne), p. 310.
  14. Olivier Blanc, « Théroigne de Méricourt : l’amazone de la liberté », Féministes en tous genre,‎ (lire en ligne).
  15. Victor Hugo, Ĺ’uvres de Victor Hugo, t. 6, Paris, J. Hetzel, (lire en ligne), chap. 11.
  16. Joigny, selon les uns, Meaux, selon les autres, écrit Höfer, op. cit.
  17. Paul-Louis Courier et Geneviève Viollet-le-Duc (dir.), Correspondance générale, t. 2, Paris, Klincksieck, (lire en ligne), p. 104.

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.