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Les Actes des ApĂ´tres

Les Actes des ApĂ´tres est un journal pamphlĂ©taire français crĂ©Ă© le Ă  Paris par Jean-Gabriel Peltier. Ce pamphlet pĂ©riodique, qui tient une place notable dans l’histoire de la presse contre-rĂ©volutionnaire française, Ă©tait vouĂ© Ă  la dĂ©fense de la monarchie et surtout Ă  la satire des hommes et des institutions de la RĂ©volution : il est considĂ©rĂ© comme l'un des plus importants journaux royalistes de cette pĂ©riode[1] - [2] - [3].

Les Actes des ApĂ´tres
Pays Drapeau de la France France
Langue Français
Périodicité trihebdomadaire
Genre critique littéraire
Date de fondation novembre 1789
Ville d’édition Paris

Directeur de la rédaction Jean-Gabriel Peltier

Histoire

Sans avoir toute la régularité d’un journal, les Actes des Apôtres étaient publiés à raison d’environ trois numéros par semaine[4]. Ils ne furent pas servis d’abord par abonnement, mais ils devinrent, grâce à leur succès, l’objet d’une telle contrefaçon que l’on dut ouvrir des listes de souscripteurs. D'où la question mise en épigraphe et extraite des Bucoliques de Virgile[5] :

Quid domini facient, audent cum talia fures ? (que peuvent faire les maîtres quand des coquins osent de telles choses ?)
RĂ©ponse : une souscription.

Le titre d’Actes des ApĂ´tres a Ă©tĂ© l’objet d’explications contradictoires : soit les rĂ©dacteurs entendaient par « apĂ´tres Â» les hommes de la RĂ©volution dont ils tournaient les actes en ridicule, soit ils se dĂ©signaient eux-mĂŞmes ironiquement sous ce nom en tant qu'« apĂ´tres de la libertĂ© et de la dĂ©mocratie royale Â»[6].

Les rĂ©dacteurs s’occupaient moins de propagande que de petite guerre : « buveurs, bretteurs, coureurs de ruelles et de tripots, ils possĂ©daient une jolie collection de vices ; Champcenetz Ă  lui seul les rĂ©unissait tous. Â»[7]. Les cibles prĂ©fĂ©rĂ©es Ă©taient Mirabeau et le duc d’OrlĂ©ans, les Jacobins appelĂ©s « jacobites Â»[8].

Ces rédacteurs, pour la plupart rémunérés par la liste civile – sauf Suleau dont le désintéressement semble prouvé –, de la monarchie et de l’Église se sont beaucoup inspirés de la manière de Voltaire, l’auteur qu’ils citaient d’ailleurs le plus volontiers. Ils empruntaient même un certain nombre de leurs épigraphes aux ouvrages les plus risqués, aux Contes, à la Pucelle, etc[9].

Les Actes des Apôtres utilisaient l'arme de la presse politique, dont l'essor était remarquable dans cette période, en employant les méthodes de la parodie et du burlesque[10] - [11]. Ils admettaient toutes les formes de la plaisanterie, l’épigramme, les vers badins, la chanson, le calembour et quelquefois les gauloiseries[9]. Cette publication riait de tout, même des choses les plus sinistres. Ils cherchèrent à étouffer la Terreur naissante sous le ridicule. C’est ainsi qu’ils persiflèrent, en vers et en prose, l’innovation de la guillotine, trouvant que « M. Guillotin tranche un peu dans le vif », et lui prêtant même… une arrière-pensée d’aristocratie : celle d’ennoblir le crime[9].

S’étendant sur la dĂ©nomination de Guillotine, ils disaient la juger « douĂ©e et coulante Â», mais ils proposaient aussi de donner Ă  la machine le nom d’un des prĂ©sidents de l’AssemblĂ©e, de CoupĂ© ou de Tuault. L’honneur de la rebaptiser leur paraissait bien convenir encore Ă  Mirabeau : la guillotine devenait ainsi la « Mirabelle Â». La prose cĂ©dait ensuite la place aux vers[9] :

Guillotin,
MĂ©decin,
Politique,
Imagine un beau matin
Que pendre est inhumain
Et peu patriotique.
AussitĂ´t
II lui faut
Un supplice.
Qui sans corde ni poteau
Supprime de bourreau
L’office.
C’est en vain que l’on publie
Que c’est pure jalousie
D’un suppôt
Du tripot
D’Hippocrate,
Qui d’occire impunément,
MĂŞme exclusivement,
Se flatte.

Les noms des collaborateurs aux Actes des ApĂ´tres ne sont pas tous connus. Quelques rĂ©dacteurs sont cependant identifiĂ©s : Jean-Gabriel Peltier[12], Rivarol[13], Champcenetz[13], le vicomte de SĂ©gur[14], Mirabeau-Tonneau[13]Suleau[13], Montlosier, Lauraguais[13], Bergasse[13], etc. Pour vilipender les patriotes, les rĂ©dacteurs de cette feuille tenaient conseil chez la marquise de Chambonas. Ensuite, ils faisaient ordinairement leur journal chez le restaurateur Beauvilliers, ou chez Mafs, au Palais-Royal. Dans ces dĂ®ners, dits Ă©vangĂ©liques, les « apĂ´tres » Ă©coutaient attentivement les initiĂ©s, seuls admis, qui se mettaient Ă  causer entre eux, et transcrivaient la conversation en cours sur un coin de table. Ainsi se trouvait rĂ©digĂ©, mystĂ©rieusement, le numĂ©ro du journal dont le numĂ©ro Ă©tait alors laissĂ© sur la carte du restaurateur de chez qui il passait aussitĂ´t chez un libraire, du nom de Gathey, dont la boutique avoisinait l’établissement de Beauvilliers[1] - [9].

Cette publication s'arrêta au mois d’octobre 1791. Elle cessa de paraître, dit-on, sur le vœu formel du roi, non sans inspirer toute une série de petits journaux tels que les Sabats jacobites de Marchant ou la Rocambole des journaux[9]. Pour Alphonse de Lamartine : « Les Actes des Apôtres, espèce de satire Ménipée du temps, étaient la parodie quotidienne de la Révolution, parodie plus propre à irriter sa colère et à la pousser au-delà qu'à la faire rougir de ses égarements »[15].

Collection

La collection des Actes des Apôtres comprend 311 numéros, réunis en dix ou onze volumes in-8°, dont chacun est appelé version ; et contient 30 numéros, une introduction et une planche gravée. La onzième et dernière version, volume resté incomplet, ne contient que 11 numéros, et des Petits paquets, formant comme les suppléments du recueil. Il en existe une édition en dix-huit volumes in-12. Des Morceaux choisis des Actes des Apôtres étaient publiés à l’étranger avec des notes explicatives (Londres, 1790, in-12)[16].

Notes

  1. Annie Duprat, « Un réseau de libraires royalistes à Paris sous la Terreur », Annales historiques de la Révolution française, vol. 3, no 321,‎ , p. 45-68 (lire en ligne)
  2. Jacques Guilhaumou, « La guerre des mots : on dit, nouvelles et dialogues dans la presse révolutionnaire (1791-1793) », dans Michel Biard, Annie Crépin et Bernard Gainot, La plume et le sabre, Publications de la Sorbonne, (lire en ligne), p. 101-110
  3. Jean-Clément Martin, Nouvelle histoire de la Révolution française, Place des éditeurs, (lire en ligne)
  4. Pascal Dupuy, « Annie Duprat (dir.), Révolutions et mythes identitaires. Mots, violence, mémoire », Annales historiques de la Révolution française, no 366,‎ (lire en ligne)
  5. Eugène Hatin, Histoire politique et littéraire de la presse en France avec une introduction historique sur les origines du journal ..., Poulet-Malassis et De Broise, (lire en ligne), « Actes des Apôtres », p. 7-77
  6. Eugène Hatin, Histoire politique et littéraire de la presse en France avec une introduction historique sur les origines du journal ..., Poulet-Malassis et De Broise, (lire en ligne), « Actes des Apôtres », p. 11-13
  7. Marcellin Pellet, Un journal royaliste en 1789. Les Actes des apĂ´tres, 1789-1791, p. 24
  8. Eugène Hatin, Histoire politique et littéraire de la presse en France avec une introduction historique sur les origines du journal ..., Poulet-Malassis et De Broise, , « Actes des Apôtres », p. 55-57
  9. « Actes des ApĂ´tres », dans Gustave Vapereau, Dictionnaire universel des littĂ©ratures  , Hachette, (lire en ligne), p. 24
  10. Pierre RĂ©tat, « Le dĂ©but du combat politique dans les journaux de 1789 », dans Michel Biard, Annie CrĂ©pin et Bernard Gainot, La plume et le sabre  , Publications de la Sorbonne, (lire en ligne), p. 39-48
  11. Jules Michelet, Histoire de la Révolution française, vol. 1, (lire en ligne), p. 330
  12. Hélène Maspéro-Clerc, Un journaliste contre-révolutionnaire. Jean-Gabriel Peltier (1760-1825), Paris, Société des études robespierristes, 1973, 341 p.
  13. Eugène Hatin, Histoire politique et littéraire de la presse en France avec une introduction historique sur les origines du journal ..., Poulet-Malassis et De Broise, (lire en ligne), « Actes des Apôtres », p. 7
  14. Louis-Philippe de Ségur, Souvenirs et anecdotes sur le règne de Louis XVI, , « Préface, », p. 23
  15. Alphonse de Lamartine, Histoire des Constituants, vol. 3, (lire en ligne)
  16. Denis Reynaud 2015.

Bibliographie

  • Gustave Vapereau, Dictionnaire universel des littĂ©ratures, Paris, Hachette, 1876, p. 24.
  • Marcellin Pellet, Un Journal royaliste en 1789. Les Actes des apĂ´tres, 1789-1791, Paris, Armand Le Chevalier, 1873.
  • Jean-Paul Bertaud, Les Amis du roi : journaux et journalistes royalistes en France de 1789 Ă  1792, Paris, Perrin (collection « Pour l'histoire Â»), 1984, 283 p. (ISBN 2-262-00319-X) Lire en ligne.
  • Pierre Retat, « L'annĂ©e 1789 vue par les journaux : problèmes et propositions Â», dans Dix-huitième Siècle, n° 20, 1988, p. 83-98 Lire en ligne.
  • Antoine de Baecque, « Les ridicules de l'homme nouveau. Un groupe de satiristes sous la RĂ©volution Â», dans Mots, n° 48, , p. 15-32 Lire en ligne.
  • Denis Reynaud, « Les Actes des ApĂ´tres », sur Le Gazetier rĂ©volutionnaire. Ressources numĂ©riques sur la presse rĂ©volutionnaire, .

Liens externes

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