Lemme de Cesà ro
En analyse réelle ou complexe, la moyenne de Cesà ro d'une suite (an) est la suite obtenue en effectuant la moyenne arithmétique des n premiers termes de la suite.
Le nom de Cesà ro provient du mathématicien italien Ernesto Cesà ro (1859-1906), mais le théorème est déjà démontré dans le Cours d'Analyse (en) (1821) de Cauchy[1].
Le théorème de Cesà ro ou lemme de Cesà ro précise que, lorsque la suite (an) a une limite, la moyenne de Cesà ro possède la même limite.
Il existe cependant des cas où la suite (an) n'a pas de limite et où la moyenne de Cesà ro est, elle, convergente. C'est cette propriété qui justifie l'utilisation de la moyenne de Cesà ro comme procédé de sommation de séries divergentes.
Moyenne de Cesà ro
Soit une suite . Alors la suite des moyennes de Cesà ro est la suite de terme général :
Le terme d'indice n est ainsi la moyenne arithmétique des n premiers termes de .
Une suite dont la suite des moyennes de Cesà ro converge est dite "convergente au sens de Cesà ro", ou "en moyenne de Cesà ro".
Lemme de Cesà ro
Suites convergentes
Théorème de Cesà ro[2] — Soit une suite de nombres réels ou complexes. Si elle converge vers ℓ, alors la suite de ses moyennes de Cesà ro, de terme général
- ,
converge également, et sa limite est ℓ.
Limite infinie
Si une suite de réels a pour limite +∞ ou –∞, il en est de même de la suite de ses moyennes de Cesà ro.
Suites divergentes
La réciproque du lemme de Cesà ro est fausse : il existe des suites divergentes pour lesquelles la moyenne de Cesà ro converge. C'est par exemple le cas de la suite périodique
divergente mais qui a pour limite au sens de Cesà ro 1/2.
Lemme de l'escalier
Un énoncé équivalent au théorème de Cesà ro (également dans le cas ℓ infini ci-dessus) est : pour toute suite , si un – un–1 → ℓ alors un/n → ℓ (on passe d'un énoncé à l'autre par télescopage, en posant et inversement, an = un – un–1). C'est cet énoncé qui figure dans Cauchy 1821, p. 59.
Application aux séries divergentes
La moyenne de Cesà ro donne un procédé de sommation de certaines séries divergentes au sens usuel.
Exemple de la série de Grandi
La série de Grandi est la série associée à la suite
dont les sommes partielles sont
- .
La série de Grandi est divergente mais la moyenne de Cesà ro des sommes partielles converge vers 1/2 (voir plus haut).
On associe alors à la série de Grandi la somme .
Euler proposa le résultat 1/2 avec une autre méthode : si l'on suppose que la somme est bien définie, notons-la , alors
donc
et donc
- .
Le point non prouvé est alors l'existence de , i.e. la pertinence des calculs menés. L'enjeu du travail sur les séries divergentes consiste justement à montrer que la valeur attribuée a un sens mathématique (par exemple, qu'elle ne dépend pas de la méthode employée).
Utilisations
Une utilisation notable de la moyenne de Cesà ro est faite dans le cadre des séries de Fourier : les sommes de Fejér sont les moyennes de Cesà ro des sommes partielles de la série de Fourier. Pour la série de Fourier, les théorèmes de convergence sont délicats ; au contraire, les sommes de Fejér vérifient des résultats de convergence très forts, décrits par le théorème de Fejér.
Le produit de Cauchy de deux séries convergentes est une série convergente pour le procédé de sommation de Cesà ro.
La moyenne de Cesà ro est un procédé de sommation de séries divergentes particulièrement appliqué dans la théorie des séries de Dirichlet[4].
Si une suite (xn) de réels strictement positifs possède une limite ℓ ∈ [0, +∞], le lemme de Cesà ro appliqué à an = log(xn) montre que la suite de ses moyennes géométriques n√x1…xn tend vers ℓ. Ce qui se réécrit : si une suite (yn) de réels strictement positifs est telle que yn+1/yn → ℓ alors n√yn → ℓ.
Généralisation
Il existe plusieurs généralisations de la moyenne de Cesà ro, au travers du théorème de Stolz-Cesà ro et de la moyenne de Riesz. Le procédé de Cesà ro est souvent appelé moyenne (C,1). Pour chaque entier k, il existe une moyenne de Cesà ro d'ordre k, permettant de sommer certaines séries divergentes que les procédés (C, n) ne somment pas pour n < k.
Il existe beaucoup d'autres procédés de sommation[5] - [6] - [7], dont celui de Borel.
Notes et références
- Augustin-Louis Cauchy, Cours d'Analyse de l'École royale polytechnique, 1re partie : Analyse algébrique, (lire en ligne), p. 48-52, 1er théorème et p. 59, 3e théorème.
- Pour une démonstration, voir par exemple Cauchy 1821, p. 48-50 ou la .
- Voir aussi Cauchy 1821, p. 50-52.
- (en) Hardy et Riesz, The General Theory of Dirichlet's Series.
- (en) Godfrey Harold Hardy, Divergent Series, Oxford University Press, (1re éd. 1949) (lire en ligne)
- Marc Zamansky, « La sommation des séries divergentes », Mémorial des sciences mathématiques, no 58,‎ (lire en ligne).
- Ervand Kogbetliantz, « Sommation des séries et intégrales divergentes par les moyennes arithmétiques et typiques », Mémorial des sciences mathématiques, no 51,‎ (lire en ligne).