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La Lune est blanche

La Lune est blanche est une bande dessinée documentaire des frères Emmanuel et François Lepage, publiée en chez Futuropolis. L'ouvrage, qui mêle narration, dessin et photographie, raconte le voyage des deux artistes en Terre-Adélie dans le cadre d'une mission scientifique et se compose de 256 pages. Il reçoit un accueil critique favorable et le prix France Info lui est décerné.

La Lune est blanche
One shot
Scénario Emmanuel Lepage et François Lepage
Dessin Emmanuel Lepage
Couleurs Emmanuel Lepage
Lettrage Stevan Roudaut
Genre(s) bande dessinée documentaire

Thèmes voyage en Terre-Adélie
Personnages principaux les deux frères Lepage
Lieu de l’action France, Tasmanie, Océan Austral, L'Astrolabe, base Dumont d’Urville
Époque de l’action 2012-2013

Éditeur Futuropolis
Première publication septembre 2014
ISBN 978-2-7548-1028-9
Nb. de pages 256
Albums de la série
Prix France Info 2015
Prix de la bande dessinée maritime 2015

Synopsis

En , Ă  Brest, Yves FrĂ©not, directeur de l’Institut Polaire Français, propose Ă  Emmanuel Lepage de s'embarquer pour la Terre-AdĂ©lie et accepte que son frère François, photographe, l'accompagne afin d'Ă©laborer une bande dessinĂ©e documentaire. FrĂ©not leur propose de participer, en tant que chauffeurs[1], au convoi de ravitaillement ralliant, en tracteur, la base Dumont d’Urville Ă  celle de Concordia, soit un voyage de 1 200 kilomètres en douze jours : le Raid[2]. En a lieu un sĂ©minaire de prĂ©paration pour la mission no 63 en Terres australes et antarctiques françaises, oĂą les frères Lepage rencontrent les membres scientifiques et techniques de la mission (les « hivernants »). L'embarquement est annoncĂ© pour Ă  bord du navire L'Astrolabe, au dĂ©part de Hobart (Tasmanie)[3]. NĂ©anmoins, le bateau est retardĂ© par les glaces et Emmanuel Lepage hĂ©site Ă  reporter ; son frère le convainc de maintenir la mission[4]. En , tous deux rejoignent le groupe et entament la traversĂ©e. Outre le relatif inconfort de ce voyage[5], l'Ă©quipage rencontre des difficultĂ©s pour traverser le « pack Â», la mer gelĂ©e autour de la Terre-AdĂ©lie[6]. Après plusieurs Ă©checs, L'Astrolabe arrive Ă  la base Dumont-d'Urville ; nĂ©anmoins, ces retards cumulĂ©s reprĂ©sentent trois semaines : l'organisation de plusieurs missions scientifiques en est bouleversĂ©e[4]. Le chef de l'expĂ©dition annonce aux frères que seul le photographe partira avec le Raid[6]. FrustrĂ©s, les deux frères dĂ©battent de cette situation puis François Lepage dĂ©clare au chef d'expĂ©dition qu'ils partiront ensemble[5] ; il s'agit d'un « coup de poker Â», qui aboutit au rĂ©sultat dĂ©sirĂ©[4]. Les frères intègrent le convoi et parviennent, non sans mal en raison des conditions climatiques extrĂŞmes[5], jusqu'Ă  Concordia.

Genèse de l'œuvre

Emmanuel et François Lepage sont frères, nés respectivement en 1966 et 1970, originaires de Saint-Brieuc. Emmanuel Lepage, formé en architecture, devient auteur de bande dessinée : son premier album est publié en 1987. François Lepage accomplit des études de lettres[7] puis il devient photographe et travaille pour l'agence Sipa Press[8] en menant des reportages à l'international[7].

En 2010, la journaliste Caroline Britz et les deux artistes embarquent pour un reportage à bord du navire Marion Dufresne, qui assure le ravitaillement des Terres australes et antarctiques françaises du sud de l’océan Indien, par exemple à l'île Kerguelen, dans l'archipel Crozet... À partir de cette expérience, chacun a publié un ouvrage documentaire : pour Emmanuel Lepage, il s'agit du Voyage aux îles de la Désolation, en 2011 (éditions Futuropolis)[9], mêlant bande dessinée, croquis et illustrations ; pour François Lepage et Caroline Britz, le recueil Marion Dufresne, ravitailleur du bout du monde (Marines Éditions). Lors de cette mission, ils rencontrent Yves Frénot, directeur de l’Institut Polaire Français, grand amateur de bande dessinée[4]. Frénot propose à Emmanuel Lepage de publier un nouveau livre dépeignant la base antarctique Dumont-d'Urville, avec un éventuel trajet jusqu'à la base antarctique Concordia. Le dessinateur annonce aussitôt son souhait d'être accompagné de son frère : tous deux rêvent depuis longtemps de partir ensemble dans une aventure et ils souhaitent écrire un livre à quatre mains[5] - [10] ; par ailleurs, le franc succès de l'aîné avec Voyage aux îles de la Désolation pèse sur leur relation.

Emmanuel Lepage a rédigé cinq versions du scénario avant de parvenir à un résultat lui donnant satisfaction[11]. En raison d'un problème à la main, il a dû changer sa technique de dessin[10], passant notamment au lavis noir et blanc ; cette méthode lui permet de terminer l'album en un an[11].

Choix artistiques

Le livre compte 256 pages[12]. L'album articule narration, photographies, croquis et illustrations ; Emmanuel Lepage adopte un trait réaliste[8]. Les dessins sont parfois en couleurs et parfois en noir et blanc[10]. Plusieurs images apparaissent en pleine page, voire en double pleine page[10] ; certaines séquences sont muettes[3].

Les deux frères avaient dĂ©cidĂ© que le narrateur principal serait Emmanuel Lepage ; toutefois, la prĂ©sence de François Lepage s'exprime Ă  travers les photos ainsi que les messages qu'il envoie Ă  sa compagne[5], Marile[8]. François Lepage sĂ©lectionne quelque soixante-dix clichĂ©s de la mission ; son frère nĂ©anmoins ne suit pas toujours son avis, car la qualitĂ© de la narration doit l'emporter sur l'esthĂ©tique pure[10]. Ces clichĂ©s « portent Â» le rĂ©cit[5].

Le dessinateur rĂ©alise les croquis et illustrations en utilisant plusieurs procĂ©dĂ©s : crayon[13], aquarelle[2], gouache[10], pastel[13], fusain[2], encres de couleur[2]. Les clichĂ©s sont introduits progressivement et, en gĂ©nĂ©ral, ils servent de « pause contemplative Â»[10] - [11], Ă  quelques exceptions près. Pour les rĂ©cits racontant la conquĂŞte historique de la Terre AdĂ©lie, l'artiste emploie un lavis en tons sĂ©pia grisĂ©s, allusions aux anciennes photographies[13] - [11].

Thèmes

Le récit insiste « sur l’expérience fraternelle autant que sur l’expérience aventurière »[3]. Les relations entre les personnes à la conquête de ce territoire hostile sont au cœur du livre.

La Terre-Adélie

Le continent antarctique a été aperçu pour la première fois en 1820 et c'est en 1840 qu'un drapeau y est planté, par le Français Jules Dumont d'Urville[14]. D'autres expéditions ont suivi, malgré les dangers ; certaines ont connu une fin tragique. En 1911, les humains parviennent à le conquérir[14]. Ces évènements sont relatés dans l'ouvrage[11].

Relation fraternelle

Après la mission Ă  bord du Marion Dufresne, chacun des frères a publiĂ© un ouvrage : pour Emmanuel Lepage, il s'agit du Voyage aux Ă®les de la DĂ©solation ; pour François Lepage, en collaboration avec la journaliste Caroline Britz, le recueil Marion Dufresne, ravitailleur du bout du monde. Or, ces deux Ĺ“uvres n'ont pas rencontrĂ© un succès identique[4]. Le photographe souffre parfois d'ĂŞtre « le frère du dessinateur Â»[6] - [11] et il apprĂ©hende donc les rĂ©actions des autres membres de la mission[4]. Les deux frères vivent, dans l'intimitĂ© de voyage, des moments forts par cette expĂ©rience artistique commune[5]. Le positionnement de chaque frère envers l'autre reprĂ©sente un thème essentiel. L'ouvrage est « un rĂ©cit Ă  deux voix »[4]. Ă€ terme, le photographe estime que ce voyage et ce livre ont rendu leur relation plus Ă©quilibrĂ©e[11].

Aventure

Emmanuel Lepage se dit profondĂ©ment influencĂ© depuis l'enfance par les rĂ©cits d'aventure, Ă  commencer par ceux de Tintin[1], mais aussi d'autres classiques comme les Ĺ“uvres de Jules Verne et Jack London ou L'ĂŽle au trĂ©sor de Robert Louis Stevenson[11]. L'aventure est un thème rĂ©current dans l'Ĺ“uvre[5]. Les passages documentaires sur l'arrivĂ©e des humains en Terre-AdĂ©lie reflètent l'admiration du narrateur pour ces explorateurs curieux et audacieux, comme Roald Amundsen, Robert Falcon Scott[13] et surtout Ernest Shackleton[6] - [11]. Ces rĂ©fĂ©rences sont illustrĂ©es en tons sĂ©pia ou grisĂ©s[3]. La mer est un thème qui l'intĂ©resse depuis longtemps[5]. Cette mission constitue pour les deux frères une grande aventure, Ă  la fois « esthĂ©tique et humaine Â»[10].

Participer au convoi présente un aspect répétitif, voire ennuyeux[6] : en effet, il s'agit de conduire plusieurs jours d'affilée le même tracteur dans un désert blanc où il n'existe pas de point de repère. L'auteur se réfère, à ce sujet, au film Un jour sans fin[4] - [11].

Mission scientifique

La dimension humaine est fondamentale dans la narration. Le directeur de l’Institut Polaire Français a sollicitĂ©, auprès d'Emmanuel Lepage, un ouvrage pour rendre compte « des programmes scientifiques qui […] sont menĂ©s, les diffĂ©rents corps de mĂ©tier, la vie quotidienne Ă  la base de Dumont d’Urville Terre-AdĂ©lie »[13]. L'album s'appuie sur une solide documentation et l'auteur a demandĂ© Ă  ses interlocuteurs de vĂ©rifier ses explications[10]. Ă€ travers les « galeries de portraits Â»[8] sur le personnel scientifique et technique de la mission[2], cette « communautĂ© du savoir Â»[3], Emmanuel Lepage explique l'histoire et les enjeux autour de la prĂ©sence humaine en Antarctique[5], ce qui confère Ă  l'album une dimension didactique[6] - [3]. En particulier, les effets sur le climat constituent un fil rouge tout au long de la narration[10] - [14].

Attente

L'attente est un thème rĂ©current dans l'Ĺ“uvre[11] : le climat extrĂŞme impose des contraintes et des incertitudes permanentes sur le dĂ©part lui-mĂŞme, sur la date du dĂ©part, sur les tentatives pour traverser le « pack Â»[4]... Dans ActualittĂ©, Emmanuel Lepage souligne la difficultĂ© Ă  illustrer cette attente[5].

Contraintes de création

Emmanuel Lepage montre à plusieurs reprises les obstacles pour dessiner dans les conditions extrêmes où il se trouve : il doit conduire son tracteur et, en outre, il faut porter des moufles ; par grand froid, il est impossible d'employer l'aquarelle et les crayons pastel se brisent. Par moments, il ne peut donc pas tracer aisément ; ce sont alors les photos qui prennent le relai[10]. François Lepage rencontre également des problèmes techniques avec son matériel photo en raison du climat[11]. Il trouve délicat de photographier un immense paysage blanc[4] ; en outre, il est impossible de demander au convoi de s'arrêter pour prendre des clichés[4] : les collègues ne l'ont accepté qu'une seule fois, avec réticence[11]. Par ailleurs, les vents modifient en un instant le paysage qu'il souhaite capturer.

Accueil critique

L'album reçoit en 2015 le 21e Prix France Info de la bande dessinĂ©e d'actualitĂ© et de reportage[7]. Le jury souligne que cet album rĂ©sonne avec la confĂ©rence de Paris sur le climat[7]. La Lune est blanche fait Ă©galement partie des cinq finalistes au grand prix de la critique[15]. Le festival de bande dessinĂ©e de Perros-Guirec lui dĂ©cerne le prix de la bande dessinĂ©e maritime[16]. Ă€ Rochefort en Charente-Maritime, le Centre international de la mer-Corderie Royale et l'association Hermione-La Fayette, en dĂ©cernant les prix « MĂ©moires de la mer Â» 2015, rĂ©compensent les frères Lepage dans la catĂ©gorie bande dessinĂ©e[17].

Expositions

Dans le sillage de l'œuvre se tiennent plusieurs expositions sur les travaux d'Emmanuel et François Lepage, par exemple au Palais de la Découverte[18] ainsi que dans le Morbihan[19].

Notes et références

  1. La rédaction, « Chronique BD. La lune est blanche : voyage à l'autre bout du monde », programme-tv.net,‎ (lire en ligne).
  2. A. Perroud, « Australes - Deux récits du monde au bout du monde 2. La Lune est blanche », sur BD Gest', .
  3. Didier Quella-Guyot, « « La Lune est blanche » par Emmanuel Lepage et François Lepage », sur BDZoom, .
  4. Laurence Le Saux, Emmanuel Lepage (int.) et François Lepage (int.), « Emmanuel et François Lepage, aventuriers en Antarctique », BoDoï,‎ (lire en ligne).
  5. Cécile Pellerin, Emmanuel Lepage (int.) et François Lepage (int.), « François et Emmanuel Lepage : Vous pouvez leur demander la lune ! », ActuaLitté,‎ (lire en ligne).
  6. Laurence Le Saux, « La Lune est blanche », BoDoï,‎ (lire en ligne).
  7. Agathe Auproux, « Le Prix France Info de la BD d'actualité et de reportage 2015 pour "La lune est blanche" », Livreshebdo,‎ (lire en ligne).
  8. David Taugis, « La Lune est blanche - Par François & Emmanuel Lepage - Futuropolis », sur BDZoom, .
  9. Laurence Le Saux, « Voyage aux îles de la Désolation », BoDoï,‎ (lire en ligne).
  10. Charles-Louis Detournay et Emmanuel Lepage (int.), « L’aventure esthétique et humaine d’Emmanuel et François Lepage », sur BDZoom, .
  11. Laurence Le Saux, Emmanuel Lepage (int.) et François Lepage (int.), « La bédéthèque idéale #71 : Les frères Lepage à l’assaut du grand désert de glace », Télérama,‎ (lire en ligne).
  12. Bernard Launois, « La Lune est blanche », Auracan,‎ (lire en ligne).
  13. Sarah Dehove, « La Lune est blanche », sur Planète BD, .
  14. Lysiane Ganousse, « La Lune est blanche… et froide », L'Est républicain,‎ (lire en ligne).
  15. Marie Pujolas, « "La lune est blanche", le voyage en Antarctique des frères Lepage », culturebox.francetvinfo.fr,‎ (lire en ligne).
  16. Marcel Quiviger, « La Lune est blanche. Prix BD maritime 2015 », Le Télégramme,‎ .
  17. « Les lauréats des Mémoires de la mer ont été désignés », Sud Ouest,‎ .
  18. « Exposition Lepage au Palais de la Découverte » (consulté le ).
  19. « Exposition. « La Lune est blanche » au Patio », Le Télégramme,‎ (lire en ligne).

Annexes

Ressources audiovisuelles

Liens externes

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