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Keffieh palestinien

Le keffieh palestinien (en arabe : ÙƒÙˆÙÙŠŰ© ) est une Ă©charpe Ă  carreaux noir et blanc. Cet habit se porte gĂ©nĂ©ralement autour du cou ou de la tĂȘte. Le keffieh est devenu un symbole du nationalisme palestinien, remontant Ă  la rĂ©volte arabe de 1936–1939 en Palestine. En dehors du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord, le keffieh a d'abord gagnĂ© en popularitĂ© parmi les militants soutenant les Palestiniens dans le conflit avec IsraĂ«l. Le keffieh est devenu une icĂŽne de la solidaritĂ© palestinienne.

Une femme portant un keffieh Ă  motif, Paris.

Histoire

Yasser Arafat dans son keffieh emblématique, 1974.

Traditionnellement porté par les agriculteurs palestiniens pendant la période ottomane, le keffieh signalait que le porteur était rural, contrairement au tarbouche porté par les classes urbaines[1].

Le keffieh noir et blanc porté par les Palestiniens de tous grades est devenu un symbole du nationalisme palestinien surtout pendant la révolte arabe des années 1930[2] - [3]. Le keffieh a pris une grande ampleur et atteint un sommet en 1938, lorsque la direction de la révolte a ordonné que les classes urbaines remplacent leurs coiffures traditionnelles par le keffieh. Le mouvement avait pour but de créer l'unité ainsi que de permettre aux rebelles de se fondre dans les cités[4].

Son importance s'est accrue au cours des années 1960 avec le début du mouvement de résistance palestinien et son adoption par le politicien palestinien Yasser Arafat[2].

Le keffieh Ă  carreaux noir et blanc deviendra plus tard le symbole d'Arafat et il sera rarement vu sans lui. Il ne portait qu'occasionnellement une casquette militaire ou, dans les climats plus froids, un chapeau ouchanka Ă  la russe. Arafat portait son keffieh d'une maniĂšre semi-traditionnelle, enroulĂ© autour de sa tĂȘte via un agal . Il portait Ă©galement un morceau de tissu aux motifs similaires dans le dĂ©colletĂ© de ses treillis militaires. DĂšs le dĂ©but, il s'Ă©tait fait une marque de fabrique de poser le foulard sur son Ă©paule droite uniquement, en l'arrangeant en forme de triangle grossier, pour ressembler aux contours du territoire revendiquĂ© par la Palestine. Cette façon de porter le keffieh est devenue un symbole d'Arafat en tant que personne et dirigeant politique. Cette maniĂšre de porter le keffieh n'a pas Ă©tĂ© imitĂ©e par d'autres dirigeants palestiniens.

Une autre figure palestinienne associĂ©e au keffieh est LeĂŻla Khaled, une femme membre de la branche armĂ©e du Front populaire de libĂ©ration de la Palestine. Plusieurs photographies de Khaled ont circulĂ© dans les journaux occidentaux aprĂšs le dĂ©tournement du vol TWA 840 et les dĂ©tournements de Dawson's Field. Ces photos incluaient souvent Khaled portant un keffieh dans le style du hidjab d'une femme musulmane, enroulĂ© autour de la tĂȘte et des Ă©paules. C'Ă©tait inhabituel, car le keffieh est associĂ© Ă  la masculinitĂ© arabe et beaucoup pensent qu'il s'agit d'une dĂ©claration de mode de Khaled. Cette dĂ©claration de mode dĂ©noterait l'Ă©galitĂ© de Leila Khaled, une femme, avec les hommes dans la lutte armĂ©e palestinienne.

Les couleurs des coutures d'un keffieh sont également vaguement associées aux sympathies politiques des Palestiniens. Les keffiehs traditionnels en noir et blanc sont devenus associés au Fatah. Plus tard, des keffiehs rouges et blancs ont été adoptés par des marxistes palestiniens, comme le FPLP[5].

La solidarité palestinienne

Le port du keffieh s'accompagne souvent de critiques de la part de diverses factions politiques dans le conflit israĂ©lo-palestinien en cours. L'argot « keffieh kinderlach » fait rĂ©fĂ©rence aux jeunes juifs amĂ©ricains de gauche, en particulier aux Ă©tudiants, qui arborent un keffieh autour du cou comme une dĂ©claration politique/mode. Ce terme est peut-ĂȘtre apparu pour la premiĂšre fois dans la presse Ă©crite dans un article de Bradley Burston (en), dans lequel il Ă©crit « le kaffiyeh kinderlach de banlieue exilĂ© de Berkeley, de loin plus palestinien que les Palestiniens » dans leur critique d'IsraĂ«l. Certains militants europĂ©ens ont Ă©galement portĂ© le keffieh[6] - [7].

Alors que les manifestants occidentaux portent des styles et des nuances de keffieh, le plus important est le keffieh en noir et blanc. Celui-ci est généralement porté autour du cou comme un foulard, simplement noué à l'avant avec le tissu autorisé à se draper sur le dos. D'autres styles populaires incluent des foulards de forme rectangulaire avec le motif de base en noir et blanc dans le corps, et des extrémités tricotées sous la forme du drapeau palestinien. Depuis l'Intifada Al-Aqsa, ces foulards rectangulaires sont de plus en plus apparus avec une combinaison du drapeau palestinien et de la mosquée al-Aqsa, imprimée sur les extrémités du tissu.

En 2006, le Premier ministre espagnol, José Luis Rodríguez Zapatero, a prononcé un discours dans lequel il a critiqué durement Israël, puis a accepté un keffieh des membres du public et s'est fait photographier en le portant[8].

L'imprimĂ© « keffieh » a Ă©tĂ© plusieurs fois utilisĂ© dans la mode par des marques telles que Topshop, ASOS, Cecilie Copenhagen, Boohoo ou la marque Isreali Dodo Bar Or, suscitant polĂ©miques et dĂ©bats sur l'appropriation culturelle[9]. En 2007, la chaĂźne de magasins de vĂȘtements amĂ©ricaine Urban Outfitters a cessĂ© de vendre des keffiehs (vendus sous le nom de « foulards anti-guerre »)[2] aprĂšs avoir Ă©tĂ© critiquĂ© par « un activiste pro-israĂ©lien ... [qui] s'est plaint des articles ». La sociĂ©tĂ© a dĂ©clarĂ© qu’elle n’avait pas eu l’intention « d’impliquer la sympathie ou le soutien des terroristes ou du terrorisme »[10] et que cette infraction « n’était en aucun cas [leur] intention ».

La rappeuse hip-hop anglo-palestinienne Shadia Mansour a dénoncé l'appropriation culturelle du keffieh, le défendant comme un symbole de solidarité palestinienne, dans son premier single, al-Kƫfīyah 'Arabīyah (« Le keffieh est arabe »). Elle joue avec un thawb palestinien traditionnel et proclame dans sa chanson : « This is how we wear the keffiyeh/The Arab keffiyeh » et « I'm like the keffiyeh/However you rock me/Wherever you leave me/I stay true to my origins/Palestinian ». Sur scÚne à New York, elle a présenté la chanson en disant : « You can take my falafel and hummus, but don't fucking touch my keffiyeh »[11].

Production en Palestine

Un métier à tisser en train de fabriquer un keffieh palestinien dans l'usine d'Hirbawi

.

Aujourd'hui, ce symbole de l'identité palestinienne est importé de Chine. Avec la popularité croissante du foulard dans les années 2000, les fabricants chinois sont entrés sur le marché, chassant les Palestiniens de l'entreprise[12].

Pendant cinq dĂ©cennies, Yasser Hirbawi Ă©tait le seul fabricant palestinien de keffiehs et les fabriquait sur seize mĂ©tiers Ă  tisser Ă  l'usine textile Hirbawi Ă  HĂ©bron. En 1990, les seize mĂ©tiers fonctionnaient, faisant environ 750 keffiehs par jour. En 2010, seuls deux mĂ©tiers Ă©taient utilisĂ©s, soit Ă  peine 300 keffiehs par semaine. Contrairement aux produits fabriquĂ©s en Chine, Hirbawi n'utilise que du coton. Le fils de Hirbawi, Izzat, a dĂ©clarĂ© l'importance de crĂ©er le symbole palestinien en Palestine : « Le keffieh est une tradition de la Palestine et il devrait ĂȘtre fabriquĂ© en Palestine. Nous devrions ĂȘtre ceux qui le fabriquent »[13].

Références

  1. William Roseberry et Jay O'Brien, Golden Ages, Dark Ages: Imagining the Past in Anthropology and History, Univ of California Press, , 170– (ISBN 978-0-520-32744-3, lire en ligne).
  2. Kibum Kim, « Where Some See Fashion, Others See Politics », The New York Times,‎ (lire en ligne [archive du ] Inscription nĂ©cessaire)
  3. Rebecca Torstrick, Culture and Customs of Israel, Greenwood, (ISBN 978-0-313-32091-0), p. 117
  4. Ted Swedenburg, Golden Ages, Dark Ages: Imagining the Past in Anthropology and History, Univ of California Press, , 170– (ISBN 978-0-520-32744-3), « Popular Memory and the Palestinian National Past » :
    « In August 1938, at the height of the insurgency, the rebel leadership commanded all townsmen to discard the tarbush and don the kufiya. The order was issued to help the rebels blend in when they entered the cities, but it was also a move in the wider social struggle... Official colonial sources, which noted that the fashion spread with lightning rapidity, saw this more as the result of a conspiracy than as a manifestation of the spirit of unity (Palestine Post, 2 September 1938). Once the rebellion ended, the effendis of the town reassumed the tarnish, owing in part to British pressure (Morton 1957:98-100). »
    .
  5. Yoram Binur, My Enemy, My Self, Penguin, , xv
  6. Frank B. Tipton, A History of Modern Germany Since 1815, Continuum International Publishing Group, (ISBN 0-8264-4910-7), p. 598
  7. Cas Mudde, Racist Extremism in Central and Eastern Europe, Routledge, (ISBN 0-415-35594-X, lire en ligne), 34
  8. Spanish Minister Objects – Says Criticism of Israel Not anti-Semitic, International Herald Tribune, 20 juillet 2006
  9. Ellie Violet Bramley, « The keffiyeh: symbol of Palestinian struggle falls victim to fashion », The Guardian,‎ (lire en ligne [archive du ])
  10. "US chain pulls 'anti-war' keffiyehs" Jerusalem Post
  11. Janne Louise Andersen, « The Passion, Politics and Power of Shadia Mansour », Rolling Stone,‎ (lire en ligne [archive du ], consultĂ© le )
  12. Sonja Sharp, « Your Intifada: Now Made in China! », Mother Jones,‎ (lire en ligne)
  13. « The Last Keffiyeh Factory In Palestine », Palestine Monitor,‎ (lire en ligne [archive du ])

Voir aussi

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