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Jeanne Anctil

Jeanne Anctil, nĂ©e le Ă  Saint-Anne-de-la-PocatiĂšre et morte le Ă  MontrĂ©al (Ă  50 ans), est une institutrice d’économie domestique, directrice des Écoles mĂ©nagĂšres quĂ©bĂ©coises de 1906 Ă  sa mort[1]. Elle est perçue comme une pionniĂšre du droit des femmes au QuĂ©bec au tournant du XXe siĂšcle, en raison de sa grande implication dans l’éducation des jeunes filles quĂ©bĂ©coises.

Jeanne Anctil
Jeanne Anctil en 1917.
Biographie
Naissance
DĂ©cĂšs
Nationalité

Biographie

NĂ©e Ă  Saint-Anne-de-la-PocatiĂšre, Jeanne Anctil est la onziĂšme enfant d’une famille de douze. Son pĂšre, Barthelemi Anctil, est un cultivateur[2]. Il se marie une premiĂšre fois en 1853 avec AdĂšle Hudon, avec laquelle il n’aura pas d’enfant. Ce premier mariage ne dure que 3 mois. En 1858, il se marie pour une deuxiĂšme fois avec ZĂ©lie Pelletier, sa petite-cousine, qui sera la mĂšre de tous ses enfants, dont celle de Jeanne Anctil.La famille Anctil habitent sur la terre familiale que Barthelemi Anctil avait hĂ©ritĂ©e de ses propres parents : Jean-Marie Anctil et Mathilde Hudon[3].

Jeanne frĂ©quente le couvent de Coaticook de 1886 Ă  1893. En 1904, elle part avec Marie de Beaujeu, faire un stage en Europe pour observer les formules pĂ©dagogiques utilisĂ©es et ainsi apprendre l’économie domestique[4]. Ces deux femmes sont sĂ©lectionnĂ©es par les directeurs de l’école mĂ©nagĂšre de MontrĂ©al. Ce stage permet ainsi aux deux jeunes femmes d’apprendre une formation alors presque inexistante au QuĂ©bec et ainsi leur permettre de devenir les premiĂšres enseignantes d’économie domestique du QuĂ©bec[2].

Marie de Beaujeu rentrera au pays en , aprĂšs cinq mois d’études, pour donner des confĂ©rences dans des Ă©coles. De son cĂŽtĂ©, Jeanne suit des cours Ă  Paris durant une annĂ©e, puis elle part Ă©tudier en Suisse avec une nouvelle stagiaire du nom d’Antoinette GĂ©rin-Lajoie[2], future tante[5] de Marie Lacoste GĂ©rin-Lajoie, qui sera une des plus importantes pionniĂšres du mouvement fĂ©ministe quĂ©bĂ©cois. Ces deux femmes Ă©tudient Ă  l’école mĂ©nagĂšre de Fribourg jusqu’en 1906 et reviennent au Canada avec leur diplĂŽme en main. Ce diplĂŽme leur permet d’occuper le poste de directrice d’école mĂ©nagĂšre[2]. Jeanne Anctil et Antoinette GĂ©rin-Lajoie deviennent codirectrices de l’école mĂ©nagĂšre de MontrĂ©al en 1907. Jeanne y enseignera toute sa vie[2].

Outre son implication en tant qu’enseignante, Jeanne Anctil est reconnue comme Ă©tant une confĂ©renciĂšre et une Ă©crivaine. Elle participera d’ailleurs Ă  diverses confĂ©rences et elle Ă©crira un livre de cuisine en 1915 nommĂ© « 350 recettes de cuisine ». Jeanne Anctil dĂ©cĂšde cĂ©libataire le , Ă  l’ñge de 50 ans, d’une courte maladie[2].

Mouvement de l'enseignement ménager au Québec

Ce mouvement rĂ©pond au nouveau besoin crĂ©Ă© par l’augmentation du nombre de jeunes filles qui travaillent Ă  l’extĂ©rieur de la maison. Il prĂŽne l’accessibilitĂ© Ă  des cours publics d’économie domestique. Il s’inscrit dans le mouvement de la professionnalisation du travail mĂ©nager et dans la montĂ©e du mouvement hygiĂ©niste[2].

Dans la province de QuĂ©bec, le mouvement de l’enseignement mĂ©nager dĂ©bute en 1882 avec la fondation de l’école mĂ©nagĂšre de Roberval par Malvina GagnĂ©[2].

Il faudra attendre encore vingt ans pour que d’autres Ă©tablissements scolaires de ce genre voient le jour. Entre 1905 et 1907, deux nouvelles Ă©coles ouvriront leurs portes en milieu rural. Une premiĂšre Ă  Saint-Pascal, prĂšs de Kamouraska et une deuxiĂšme Ă  Sainte-Anne-de-Bellevue. Une autre sera crĂ©Ă©e Ă  MontrĂ©al, l’école mĂ©nagĂšre de MontrĂ©al[2].

Jusqu’en 1929, les Ă©coles mĂ©nagĂšres relĂšvent du ministĂšre de l’Agriculture. En effet, c’est ce ministĂšre qui permet Ă  ces Ă©coles de fonctionner grĂące Ă  des subventions. Au dĂ©part, il y avait une certaine proximitĂ© entre l’enseignement agricole destinĂ© aux garçons et l’enseignement mĂ©nager destinĂ© aux filles[4].

En 1937, l’enseignement mĂ©nager est revu en profondeur au QuĂ©bec. Il est restructurĂ© et dĂšs la fin des annĂ©es 1940, tout un rĂ©seau d’écoles mĂ©nagĂšres existe. C’est aussi en 1937 que l’enseignement mĂ©nager devient obligatoire, ce qui permet un allongement de la scolaritĂ© des filles, qui va au-delĂ  du primaire[4].

La fondation de l'école ménagÚre de Montréal

L’école mĂ©nagĂšre de MontrĂ©al voit le jour, grĂące Ă  quelques femmes de la bourgeoisie francophone montrĂ©alaise qui dĂ©cident de fonder la section fĂ©minine de l’Association Saint-Jean-Baptiste de MontrĂ©al en 1907, qui portera le nom de FĂ©dĂ©ration Saint-Jean-Baptiste de MontrĂ©al[2]. Son inauguration officielle aura lieu le , sous la prĂ©sidence d’honneur de Lomer Gouin, Premier ministre de la province de QuĂ©bec de l’époque. Cette nouvelle Ă©cole aura la particularitĂ© d’ĂȘtre laĂŻque[2].

Les cours commencent cependant en , dĂšs le retour de Jeanne Anctil et Antoinette GĂ©rin-Lajoie au QuĂ©bec, nouvelles directrices de cette institution. Ils ont lieu dans un local de la Cour de circuit du district de MontrĂ©al, rue Saint-Jacques, un local prĂȘtĂ© par le gouvernement provincial. Les fonds qui permettent d’opĂ©rer l’école proviennent principalement des membres de l’Association Saint-Jean-Baptiste de MontrĂ©al. De plus, s’y ajoutent des dons de provenances diverses, ainsi qu’une subvention de 1 000 $ du ministĂšre provincial de l’Agriculture. Bien que l’école mĂ©nagĂšre de MontrĂ©al soit privĂ©e, elle recevra des subventions de ce ministĂšre jusqu’en 1929[2].

Au tout dĂ©but, 36 personnes Ă©taient inscrites au cours du jour et 23 Ă  ceux du soir.À ces cours s’ajoute le un cours normal de trois mois, en vue de former des nouvelles institutrices d’économie domestique[2].

L’intĂ©rĂȘt grandissant envers cette nouvelle formation d’économie domestique force l’école Ă  trouver de nouveaux locaux plus grands. L’école s’installe dĂšs au 22, rue Sherbrooke Ouest, oĂč elle logera pendant trois ans.Le programme de l’école mĂ©nagĂšre de MontrĂ©al s’inspire de celui de l’école de Fribourg, Ă©tablissement oĂč ont Ă©tudiĂ© Jeanne et Antoinette en Suisse. Les Ă©lĂšves inscrits au cours normal reçoivent des leçons de comptabilitĂ©, de tenue de la maison, de confection et d’entretien de vĂȘtements, de choix et de prĂ©paration des aliments, d’hygiĂšne, de soins des malades et de soins des jeunes enfants[2].

Antoinette GĂ©rin-Lajoie s’occupe des cours publics, destinĂ©s Ă  diverses clientĂšles fĂ©minines. De son cĂŽtĂ©, Jeanne Anctil dirige le cours normal, offert Ă  des Ă©lĂšves qui ont dĂ©jĂ  un diplĂŽme d’enseignement. Des Ă©tudiantes avancĂ©es et des confĂ©renciers invitĂ©s aident les codirectrices dans l’accomplissement de leurs tĂąches[2].

Pendant la PremiĂšre Guerre mondiale, l’école collabore avec diffĂ©rents organismes privĂ©s et publics. GrĂące Ă  ces collaborations, elle rĂ©ussit ainsi Ă  rejoindre une toute nouvelle clientĂšle. De 1915 Ă  1917, par exemple, Mlle Anctil donne des confĂ©rences toutes les semaines en milieu rural. Ces activitĂ©s permettent ainsi d’attirer des milliers de femmes[2].

En 1910, les locaux Ă©tant encore une fois devenus trop petits, l’école mĂ©nagĂšre de MontrĂ©al signe un bail de neuf ans pour loger dans l’édifice nouvellement construit de l’école technique de MontrĂ©al. Ses nouveaux locaux seront utilisĂ©s par l’école pendant une quinzaine d’annĂ©es[2].

L’école est affiliĂ©e Ă  l’universitĂ© de MontrĂ©al en 1937[2].

Implication dans l'Ă©mancipation des femmes

Jeanne Anctil a Ă©tĂ© un modĂšle important pour les jeunes filles en ce qui concerne leur Ă©ducation, puisqu’elle leur a permis d’obtenir une formation scolaire au niveau provincial mais aussi au niveau international. Elle a Ă©tĂ© un modĂšle pour plusieurs. En effet, elle a Ă©tĂ© l’une des premiĂšres Canadiennes françaises Ă  recevoir une formation internationale dans la discipline de l’économie domestique[2]. Ainsi, « l’enseignement mĂ©nager a non seulement pu s’implanter Ă  MontrĂ©al, milieu urbain oĂč ce genre de formation n’avait jusqu’alors pas trouvĂ© sa raison d’ĂȘtre, mais a Ă©galement essaimĂ© ailleurs dans la province »[2]

Ce mouvement d’enseignement mĂ©nagĂ©, grandement influencĂ© par Jeanne Anctil, a perpĂ©tuĂ© le rĂŽle traditionnel des femmes en enseignant Ă  ces derniers des mĂ©tiers en lien avec ce qu’on associe naturellement Ă  ces derniĂšres. En effet, « Leurs dispositions « naturelles » font des femmes des « ĂȘtres familiaux »; « domestique » et « fĂ©minin » deviennent synonymes. »[6]

L’école mĂ©nagĂšre de MontrĂ©al a ainsi donnĂ© aux jeunes filles la chance d’acquĂ©rir une formation professionnelle dans un milieu laĂŻque[2].Cela permet ainsi aux femmes de s’intĂ©grer graduellement dans le monde du travail et ainsi leur permettre de devenir indĂ©pendantes financiĂšrement de leurs maris[6].

Jeanne Anctil a aussi Ă©tĂ© influente politiquement, puisqu’elle s’est prononcĂ©e publiquement sur la question des femmes dans le milieu du travail, en Ă©mettant des vƓux, ou plutĂŽt des conseils au Gouvernement.

« Permettez-moi d’émettre les vƓux suivants :

18 – Je considĂšre opportun et dĂ©sirable que le Gouvernement, dans les deux dĂ©partements du Conseil de l’Instruction Publique et du MinistĂšre de l’Agriculture, requiĂšre les services permanents comme conseillĂšres autorisĂ©es des femmes, qui ont donnĂ© dans l’enseignement, pour le bien de leur pays, les fruits de longues annĂ©es d’expĂ©rience et le meilleur de leur vie.

28 – Que des femmes inspectrices soient adjointes aux Commissaires d’écoles, qu’un comitĂ© spĂ©cial de maĂźtresses d’enseignement MĂ©nager soit nommĂ©, pour dĂ©terminer le mode ou le type d’installation des locaux affectĂ©s aux sciences mĂ©nagĂšres [...].

48 – Que le Gouvernement rĂ©serve une certaine somme d’argent plutĂŽt grasse que mince et l’approprie Ă  celles de ses vaillantes officiĂšres, qui par leurs travaux ou leurs aptitudes spĂ©ciales dĂ©sireraient complĂ©ter leurs Ă©tudes et Ă©largir l’horizon de leurs idĂ©es. « Les voyages instruisent », cet axiome restera toujours vrai; mais quand on le met au service de son pays et qu’il s’inspire du plus pur patriotisme il devient un apĂŽtre. » [7].

Notes et références

  1. « Fondation de l’École mĂ©nagĂšre provinciale de MontrĂ©al », sur Bilan du siĂšcle : site encyclopĂ©dique sur l’histoire du QuĂ©bec depuis 1900, Bilan du siĂšcle : site encyclopĂ©dique sur l’histoire du QuĂ©bec depuis 1900 (consultĂ© le )
  2. Louise Fradet, « Anctil, Jeanne », sur Dictionnaire biographique du Canada, (consulté le )
  3. « Les familles Anctil en AmĂ©rique : cinquiĂšme gĂ©nĂ©ration », sur GĂ©nĂ©alogie du QuĂ©bec et d’AmĂ©rique française (consultĂ© le )
  4. Marilyne Brisebois, « L’enseignement mĂ©nager au QuĂ©bec : entre « mystique » fĂ©minine et professionnalisation, 1930-1960 », Recherches fĂ©ministes,‎ , p. 23
  5. Karine HĂ©bert, « Marie-GĂ©rin Lajoie : un nom, deux Ɠuvres », sur La fondation Lionel-Groulx, (consultĂ© le )
  6. Catherine Charron, « La question du travail domestique au dĂ©but du XXe siĂšcle au QuĂ©bec : un enjeu Ă  la FĂ©dĂ©ration nationale Saint-Jean Baptiste, 1900-1927 », sur MĂ©moire prĂ©sentĂ© Ă  la FacultĂ©Ì des Ă©tudes supĂ©rieures de l’UniversitĂ© Laval dans le cadre du programme de maĂźtrise en histoire pour l’obtention du grade de maĂźtre Ăšs arts (M.A.), (consultĂ© le )
  7. Jeanne Anctil, « « Les Écoles MĂ©nagĂšres provinciales : Formation des maĂźtresses d’enseignement mĂ©nager et de leurs relations avec les commissions scolaires », La Bonne Parole,‎ , p. 8
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