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Jean-Marie Delavay

Le pĂšre Jean-Marie Delavay, nĂ© aux Gets en Haute-Savoie le et mort en Chine le , est un prĂȘtre missionnaire des Missions Ă©trangĂšres de Paris, botaniste et grand collecteur de nouvelles espĂšces de plantes en Chine.

Jean-Marie Delavay
Biographie
Naissance
DĂ©cĂšs
(Ă  61 ans)
Chine (en)
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Abréviation en botanique
Delavay
Jean-Marie Delavay (1834-1895)

Il rassembla une des collections botaniques les plus importantes de la fin du XIXe siÚcle, dans une région limitée du Yunnan pour le compte du Muséum national d'histoire naturelle. De nombreuses espÚces lui ont été dédiées comme Abies delavayi, Aster delavayi, Clethra delavayi, lncarvillea delavayi, Geranium delavayi, Lonicera delavayi, Magnolia delavayi, Meconopsis delavayi, Osmanthus delavayi, Paeonia delavayi, Philadelphus delavayi, Pyrus delavayi, Schefflera delavayi, Thalictrum delavayi, Wikstroemia delavayi..

Biographie

Jean-Marie Delavay est nĂ© aux Gets, le 28 dĂ©cembre 1834, dans une famille de huit enfants dont deux garçons devinrent prĂȘtres et une fille religieuse. Il entra au petit sĂ©minaire de MĂ©lan puis au Grand SĂ©minaire d’Annecy[1]. DĂšs sa sortie du Grand SĂ©minaire en 1860, le jeune abbĂ© herborise dans les grandes stations botaniques de la Savoie du Nord. De ses premiĂšres annĂ©es passĂ©es dans la haute montagne savoyarde, il garda une passion pour la flore alpine.

Le 19 novembre 1866, il entre au SĂ©minaire des Missions Ă©trangĂšres de Paris, sociĂ©tĂ© ayant pour but l’évangĂ©lisation des pays non chrĂ©tiens.

Premier séjour en Chine 1867-1880

En juillet 1867, la SociĂ©tĂ© des Missions Ă©trangĂšres l’envoya en Chine Ă  l’est de Canton oĂč il put herboriser dans cette rĂ©gion et dans le Guangxi. À cette Ă©poque, il donnait toutes ses rĂ©coltes botaniques au Britannique Henry Fletcher Hance, consul de Canton et Ă©minent botaniste, qui les envoyait en Angleterre. On sait qu’il s’occupa aussi du rachat de femmes annamites (vietnamiennes) enlevĂ©es par des pirates chinois et vendues sur les frontiĂšres du Guangdong.

Le travail des missionnaires catholiques en Chine avait Ă©tĂ© rendu possible dans les rĂ©gions intĂ©rieures de la Chine Ă  la suite des guerres de l’opium et du traitĂ© de Tianjin de 1858 qui garantissait leur sĂ©curitĂ© s’ils Ă©taient munis de passeports rĂ©guliers. Toutefois les traitĂ©s inĂ©gaux obtenus par la force ne firent qu’exacerber au plus haut point l’hostilitĂ© de l’administration chinoise vis-Ă -vis des missionnaires et des Ă©trangers. Les religieux Ă©loignĂ©s de la politique, semblaient ignorer qu’ils avaient Ă©tĂ© imposĂ©s par les canonniĂšres - eux, seulement animĂ©s par la foi, Ă©taient convaincus qu’ils Ă©taient lĂ  pour sauver des Ăąmes de la damnation Ă©ternelle.

La nuit de NoĂ«l 1868, le pĂšre Delavay disait la messe dans sa chapelle de Leizhou lorsque le calme de la soirĂ©e fut brisĂ© par une grĂȘle de briques et de pierres lancĂ©es contre le bĂątiment. Il trouva la sortie barrĂ©e et la chapelle entourĂ©e par une foule hostile. Le gĂ©nĂ©ral responsable des soldats stationnĂ©s dans la ville refusa de leur porter secours et lorsque la congrĂ©gation tenta de s'Ă©chapper, beaucoup furent blessĂ©s ou tuĂ©s. Les responsables locaux rĂ©ussirent Ă  extraire le pĂšre de l’échauffourĂ©e mais il fut gravement blessĂ©[2]. On ne sait pas prĂ©cisĂ©ment l’origine de l’émeute, mais toutes sortes de ragots couraient sur le dos des missionnaires les accusant de tuer les enfants.

Lors d’un voyage en France en 1881, il rencontra le pĂšre David, un missionnaire botaniste rĂ©putĂ©, qui le convainquit d’envoyer dĂ©sormais ses collections au MusĂ©um de Paris pour ĂȘtre Ă©tudiĂ©es par le botaniste Adrien Franchet.

Second séjour en Chine 1882-1891

De retour en Chine, il fut envoyĂ© en mission dans les montagnes du nord-ouest du Yunnan (Cangshan), une des rĂ©gions du monde les plus riches sur le plan botanique. En 1882, lors de la remontĂ©e en barque du fleuve Bleu, le YangtsĂ©, il herborisait dans tous les ports oĂč il s’arrĂȘtait. Il mettra six mois pour rejoindre sa destination. Il s’établit Ă  Dapingzi, au chef-lieu d’un district missionnaire s’étendant du nord du lac Erhai, è€łæ”· (prĂšs de Dali 性理) jusqu’à Lijiang 䞜江, rĂ©gion occupĂ©e par les minoritĂ©s tibĂ©to-birmanes. Cette bourgade se trouve dans une cuvette trĂšs chaude entourĂ©e de montagnes qu’il parcourut avec plaisir pour fuir la moiteur des vallĂ©es auxquelles il attribue ses accĂšs de paludisme.

Il fit une soixantaine de fois l’ascension du mont Heishanmen (Ă  l’ouest de Dapingzi), le « Mont Blanc du Yunnan » qu’il appelait aussi son jardin. Il effectuait les ascensions seul, sans porteurs pour transporter son matĂ©riel, dans une rĂ©gion oĂč les vents peuvent ĂȘtre violents et le froid terrible.

Rhododendron delavayi
Rhododendron yunnanense

Il parcourut aussi des montagnes qui dominent Dali, les Cang shan è‹ć±±, un de ses terrains de prospections prĂ©fĂ©rĂ©s. De ces expĂ©ditions, dans les annĂ©es 1884, il ramena un grand nombre de rhododendrons : Rhododendron delavayi, R. yunnanense, R. decorum, R. fastigatum, R. taliense, etc. L’envoi des caisses de spĂ©cimens pour la France sera Ă  cette Ă©poque gravement perturbĂ© en raison de la guerre entre la France et la Chine au Tonkin. AprĂšs le retour au calme, il envoie ses caisses par « deux chevaux jusqu’à Yunnasen (Kunming) et, de lĂ , Ă  Soui fou (Shuifu) » (lettre du )[3].

En 1886, ses longues marches vers le plateau du Tibet l'amenĂšrent Ă  dĂ©couvrir des pavots d'un bleu lumineux maintenant connus sous le nom de Meconopsis betonicifolia, et peut-ĂȘtre dĂ©crits avant lui sous le nom de Meconopsis napaulensis[n 1].

Dans une lettre du , il annonce une terrible maladie qui allait affecter le reste de ses jours « J’ai Ă©tĂ© tellement accablĂ© et anĂ©anti par la peste que j’ai bien de la peine Ă  me relever. Je ne sais quand je pourrai me remettre sĂ©rieusement Ă  la besogne ». L’annĂ©e suivante, il peut cependant reprendre ses prospections et ses envois de paquets de plantes. Au printemps 1888, son ami et voisin le pĂšre Proteau meurt et il doit dĂ©sormais s’occuper de deux districts alors que sa santĂ© se dĂ©grade par suite d’accĂšs de paludisme. En , il commence Ă  recevoir les fascicules de Planta Delavayanae Ă©crits par son correspondant du MusĂ©um, Adrien Franchet. Toute l’annĂ©e 1890 est perturbĂ©e par la maladie. AprĂšs un sĂ©jour au sanatorium de Hong Kong, il repart pour le Yunnan par le fleuve Rouge.

Il rentre en France en 1891 pour aller se soigner au sanatorium de Montbeton. Une attaque de paralysie locale le laissa invalide d’un bras. Mais la nostalgie de la Chine le pousse Ă  repartir au Yunnan. « On voit la splendide inconscience de cet homme devenu fou d’un pays, le Yunnan, et d’un travail scientifique, la recherche botanique. Il semble qu’il y ait eu une conjuration du MusĂ©um et Ă©galement des Missions Ă©trangĂšres pour lui permettre de rĂ©aliser dans son Ă©tat ce rĂȘve insensĂ©. Lui-mĂȘme lucide dans ce rĂȘve, connaĂźt parfaitement son Ă©tat et sait qu’il ne peut plus prendre d’engagement sĂ©rieux. Il veut repartir sans allocation et sans programme et travailler jusqu’à la limite de ses forces » (Jean Lennon[3])

TroisiÚme et ultime séjour en Chine, 1894-1895

Il remonta Ă  nouveau le fleuve Bleu mais l’état dĂ©gradĂ© de sa santĂ© l’obligea Ă  s’arrĂȘter Ă  Longqi (nord-ouest du Yunnan) oĂč il rĂ©colta encore 1 200 spĂ©cimens. Malheureusement, prĂšs de la moitiĂ© de cette collection fut dĂ©truite par l’extrĂȘme humiditĂ© qui rĂ©gnait dans la rĂ©gion.

En , il atteint Kunming d’oĂč il envoie des graines de Primula malacoides via San Francisco et finit par rejoindre le village qui lui avait Ă©tĂ© assignĂ© comme mission. Il reprend ses herborisations et ses envois de paquets de plantes. Le , il expĂ©die ses sept derniers paquets et aprĂšs une ultime herborisation, il s’éteint le .

Contribution scientifique

À sa mort, Adrien Franchet, son correspondant au MusĂ©um, lui rendit un vibrant hommage[4] :

« De 1885 Ă  1896, le MusĂ©um a reçu du R. P. Delavay 7 300 numĂ©ros de plantes, reprĂ©sentant prĂšs de 3 500 espĂšces, en plus de 100 000 parts d'herbier ; on doit Ă©valuer Ă  2 500 le nombre des espĂšces nouvelles pour la flore de Chine dĂ©couvertes par lui, et Ă  prĂšs de 1 800 le chiffre des types absolument nouveaux. Aucune exploration n'a donnĂ© un semblable rĂ©sultat, surtout si l'on considĂšre que le champ d'exploration visitĂ© par M. Delavay Ă©galait Ă  peine en Ă©tendue la moitiĂ© d'un de nos dĂ©partements.
D'autre part, l'état des échantillons, toujours admirablement choisis pour l'étude, c'est-à-dire récoltés en fleurs, en fruits et souvent avec racines ; les soins apportés à la rédaction des étiquettes, portant toutes un numéro et mentionnant toujours la provenance exacte, l'indication du terrain, l'altitude, la couleur de la fleur, etc., etc., font des collections du R. P. Delavay le plus parfait modÚle qu'on puisse citer d'une collection d'herbier.
Mais le R. P. Delavay ne fut pas seulement un grand collecteur ; c'était aussi un observateur d'une grande sagacité, un véritable savant, tirant de ce qu'il voyait des inductions souvent profondes. Sa correspondance botanique, qui sera sans doute un jour publiée, en fournit de nombreuses preuves. »

— A. Blanchet, Hommage au R.P. Delavay

Adrien Franchet publia Plantae Delavayanae (P. Klincksieck, 1889-1890) oĂč il loua les qualitĂ©s remarquables de collecteur du PĂšre Delavay. L’Arboretum des Barres dans le Cher possĂšde encore des plantes issues des graines collectĂ©es par le PĂšre et envoyĂ©es Ă  Maurice de Vilmorin. Parmi ses introductions rĂ©ussies, on peut citer Rhododendron racemosum ou Rhododendron yunnanense. Plusieurs germinations eurent lieu aussi au Jardin des plantes de Paris : R. scabrifolium (1885), R. rubiginosum (1889), R. delavayi (1884).

Parmi les plantes remarquables récoltées, on peut mentionner : Deutzia dicolor, Deutzia purpurascens, Aster delavayi, Rhododendron ciliicalyx, Rhododendron irroratum, Rhododendron racemosum, Primula forbesii, Primula poissonii, Osmanthus delavayi, lncarvillea delavayi, Meconopsis betonicifulia, Paeonia lutea, P.delavayi, Rosa sericea pteracantha (syn. Rosa omeiensis pteracantha ), Rhododendron ciliicalyx, R. fastigiatum, R. irroratum, R. racemosum et R.yunnanense.

D'aprĂšs le professeur GĂ©rard Aymonin, 15 000 spĂ©cimens rĂ©coltĂ©s par Delavay se trouvent actuellement dans l'Herbier "Asie" du Laboratoire de PhanĂ©rogamie du MNHN Ă  Paris[3].

Voir aussi

Articles connexes

Les missionnaires botanistes en Chine (par ordre de date de naissance)[5] :

Liens externes

Notes et références

Notes

  1. La Recherche, Numéro 316 ;Numéros 318 à 322 ;Numéros 324 à 326, p. 48 : « Jamais plante n'aura demandé tant d'efforts. Des semaines de marche vers le plateau du Tibet, cerné de pics à 6 500 m. Des jours entiers dans le brouillard épais, à perdre son chemin au raz du précipice, puis le soleil cuisant, brûlant les yeux, au bout des nuits de gel. Un monde irréel, pour l'Européen égaré à l'ouest de la Chine, en 1886. Et la surprise, tout là-haut, parmi les derniers arbres, de pavots d'un bleu lumineux. Origines. Au lieu de pencher vers le sol, les tiges se dressaient comme des hallebardes ; la fleur comportait quatre pétales, comme pavots (Papaver) et coquelicots (P. rheas). L'abbé Jean-Marie Delavay, natif de Haute-Savoie, botaniste à ses heures, ensachait des graines minuscules pour Paris. Si le pavot d'azur daignait fleurir au Muséum, il détrÎnerait bientÎt l'edelweiss des Alpes qui comptait tant de morts à son actif. Toutefois le pavot était-il bien un inconnu ? Une autre papavéracée du toit du monde, sÚche et décolorée, était parvenue à GenÚve, d'un voyageur anglais. On l'y avait nommée Meconopsis napaulensis (du Népal). Delavay l'ignorait. »

Références

  1. AcadĂ©mie florimontane, « Le botaniste Delavay », Revue savoisienne : journal publiĂ© par l'Association florimontane d'Annecy,‎ (lire en ligne)
  2. (en) Jane Kilpatrick, Fathers of Botany – The discovery of Chinese plants by European missionaries, Kew Publishing Royal Botanic Gardens, The University of Chicago Press, , 254 p.
  3. La correspondance du pĂšre Delavay a Ă©tĂ© analysĂ©e par Jean Lennon, « Le pĂšre Jean-Marie Delavay (1834-1895), un grand naturaliste français », Bulletin de l’Association des Parcs botaniques de France, vol. 38,‎
  4. Adrien Franchet, « Hommage au R.P. Delavay », Journal de Botanique,‎
  5. (en) Jane Kilpatrick, Fathers of Botany – The discovery of Chinese plants by European missionaries, Kew Publishing Royal Botanic Gardens, The University of Chicago Press, , 254 p.

Delavay est l’abrĂ©viation botanique standard de Jean-Marie Delavay.

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