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Isabelle de France (1389-1409)

Isabelle de France, ou Isabelle de Valois, née le à Paris et morte le à Blois, est une des filles du roi Charles VI de France et d'Isabeau de Bavière. Elle est successivement reine d'Angleterre, puis duchesse d'Orléans. Dès son enfance, Isabelle suscite l'intérêt de Richard II d'Angleterre, veuf depuis 1394 et qui désire établir une alliance avec Charles VI. Les négociations, entamées en 1395, aboutissent l'année suivante à un contrat de mariage accordant une énorme dot à Isabelle et instituant une paix durable entre la France et l'Angleterre. Isabelle se rend ensuite à Calais pour ses noces, puis dans son nouveau royaume.

Isabelle de France
Illustration.
Le mariage d'Isabelle de France avec Richard II d'Angleterre. Détail d'une miniature tirée des Chroniques de Jean Froissart, vers 1470-1472.
Fonctions
Reine consort d'Angleterre et dame d'Irlande
–
(2 ans, 10 mois et 30 jours)
Couronnement
en l'abbaye de Westminster
Prédécesseur Anne de Bohême
Successeur Jeanne de Navarre
Duchesse consort d'Orléans et de Valois, comtesse consort de Blois et de Soissons
–
(1 an, 9 mois et 21 jours)
Prédécesseur Valentine Visconti
Successeur Bonne d'Armagnac
Biographie
Dynastie Maison de Valois
Date de naissance
Lieu de naissance Palais du Louvre (Paris, France)
Date de décès
Lieu de décès Blois (France)
SĂ©pulture Couvent des CĂ©lestins de Paris
Père Charles VI de France
Mère Isabeau de Bavière
Conjoint Richard II d'Angleterre
(1396 – 1400)
Charles Ier d'Orléans
(1406 – 1409)
Enfants Jeanne d'Orléans
Religion Catholicisme

Isabelle de France (1389-1409)
Reines consorts d'Angleterre

En dépit de l'important écart d'âge avec son époux, Isabelle entretient de très bonnes relations avec Richard II jusqu'à sa déposition en 1399. Séparée de son conjoint et privée de son titre royal par le nouveau roi Henri IV, elle est retenue en Angleterre par ce dernier, qui espère la marier à son fils aîné. Pressé par Charles VI, Henri IV accepte qu'Isabelle retourne en France en 1401, sans pour autant restituer sa dot. Informée de la mort de Richard II en captivité, Isabelle réside auprès de sa mère avant de se remarier en secondes noces en 1406 avec son cousin Charles d'Orléans. Elle meurt en 1409, après trois ans de mariage, en donnant naissance à leur unique enfant.

Biographie

Enfance et projets de mariage

Isabelle de France est la deuxième fille et le troisième enfant de Charles VI de France et de son épouse Isabeau de Bavière[1], mais n'est que le premier enfant du couple royal à survivre à l'enfance : en effet, son frère le dauphin Charles est mort à l'âge de trois mois en 1386, tandis que sa sœur aînée Jeanne trépasse avant d'atteindre deux ans en 1390. Isabelle voit le jour le 9 novembre 1389 au Palais du Louvre à Paris, et non le 9 novembre 1387, comme il a été longtemps suggéré : la documentation précise des naissances des enfants de Charles VI et d'Isabeau de Bavière souligne que sa sœur Jeanne voit le jour le 14 juin 1388 et qu'une naissance d'Isabelle au mois de novembre précédent aurait été impossible. Contrairement à des rumeurs récurrentes accusant Isabeau de Bavière d'avoir négligé ses enfants, les historiens modernes démontrent en réalité qu'elle est restée proche de ces derniers pendant leur enfance[2] : elle les fait voyager avec elle, leur achète des présents et des textes de dévotion et fait en sorte que ses filles soient éduquées. Enfin, elle maintient une correspondance étroite avec Isabelle après ses mariages[3].

L'intérêt que peut apporter la main d'Isabelle se manifeste très tôt. Ainsi, dès le 15 décembre 1391, alors qu'elle a tout juste deux ans, elle est fiancée à Jean, le fils aîné et héritier de Pierre II d'Alençon. Mais ce projet de mariage n'aboutit pas et est définitivement abandonné après la mort le 7 juin 1394 d'Anne de Bohême, l'épouse de Richard II d'Angleterre[4]. Privé d'héritier, Richard recherche immédiatement une nouvelle épouse et envoie dès le mois d'août 1394 des émissaires à la cour de Charles VI, bien qu'ils ne sollicitent pas encore explicitement une épouse pour leur souverain[5]. En mars 1395, cependant, une délégation anglaise se rend auprès du roi Jean Ier d'Aragon avec pour mission de rechercher une épouse pour Richard II. Charles VI, dont le pays est officiellement en trêve avec l'Angleterre depuis le 18 juin 1389, s'inquiète de la possibilité d'une alliance anglo-aragonaise dirigée contre la France pouvant réinitialiser la guerre de Cent Ans[6] et envoie immédiatement des ambassadeurs en Irlande afin d'y rencontrer Richard II, alors en campagne militaire afin de réduire l'agitation de ses vassaux turbulents[6].

Lors des négociations de mariage qui sont entreprises au milieu de l'année 1395, Richard II, qui a alors 28 ans, exprime son souhait d'épouser Isabelle de France, qui n'en a que cinq[6]. L'écart d'âge entre Richard et Isabelle est discuté pendant les négociations, mais le roi d'Angleterre déclare que chaque jour qui passe rectifie le problème de la jeunesse d'Isabelle, que le jeune âge de celle-ci lui permet de modeler sa future épouse selon son idéal, ce que lui recommande le diplomate français Philippe de Mézières, et qu'il est lui-même encore assez jeune pour attendre des héritiers. En raison des crises de folie récurrentes de Charles VI depuis 1392, les négociations de mariage sont réalisées par son oncle Philippe II de Bourgogne, très attaché à une alliance franco-anglaise par souci de sécuriser le commerce de ses domaines avec l'Angleterre. Quant à Richard II, cette alliance lui permet d'afficher ses velléités de conclure une paix définitive avec la France[7]. Toutefois, le projet de mariage rencontre de nombreux opposants, en particulier Louis Ier d'Orléans, le frère de Charles VI, et Thomas, duc de Gloucester, l'oncle de Richard II.

Mariage avec Richard II d'Angleterre

En juillet 1395, une dĂ©lĂ©gation anglaise conduite par Thomas de Mowbray, comte de Nottingham, se rend Ă  Paris afin d'approfondir les nĂ©gociations du mariage[6]. Selon le chroniqueur Jean Froissart, la jeune Isabelle de France aurait exprimĂ© aux envoyĂ©s anglais de manière indĂ©pendante et spontanĂ©e sa joie de devenir l'Ă©pouse de Richard II, car elle serait alors une grande dame[8]. L'annĂ©e suivante, une seconde dĂ©lĂ©gation anglaise arrive Ă  la cour de France, oĂą le contrat de mariage dĂ©finitif est signĂ© le 9 mars 1396[4], dont les clauses prĂ©voient la renonciation d'Isabelle Ă  ses Ă©ventuels droits au trĂ´ne de France et fixent le montant de sa dot Ă  la somme colossale de 800 000 livres, ce qui Ă©quivaut alors au montant annuel des recettes de l'État[9]. Une première tranche de 300 000 livres doit ĂŞtre immĂ©diatement payĂ©e, tandis que le reste doit ĂŞtre rĂ©glĂ© par tranches annuelles de 100 000 livres[9]. Seules les 300 000 livres immĂ©diatement remises sont versĂ©es dans le TrĂ©sor anglais, tandis que le reste de la somme doit ĂŞtre restituĂ© si Richard II vient Ă  mourir avant qu'Isabelle ait atteint ses douze ans. Le cas Ă©chĂ©ant, Isabelle pourra retourner en France avec toutes ses possessions[9]. Étant donnĂ© qu'aucun accord de paix durable ne peut ĂŞtre nĂ©gociĂ© entre la France et l'Angleterre en raison de la question insoluble du statut de Calais, alors sous contrĂ´le anglais, une trĂŞve de 28 ans est convenue, afin de dĂ©montrer le dĂ©sir sincère de paix des deux parties.

Le 12 mars 1396, Ă  la Sainte-Chapelle, le comte de Nottingham Ă©pouse Isabelle par procuration au nom de Richard II[10]. Six mois plus tard, la jeune fille, magnifiquement vĂŞtue et suivie par un imposant cortège, se rend Ă  Calais afin d'y Ă©pouser solennellement le roi d'Angleterre[4]. Elle est alors accompagnĂ©e par son père et une centaine de personnes de haut rang, dont le duc de Bourgogne. Avant la cĂ©rĂ©monie, Richard II et Charles VI se rencontrent Ă  Ardres une première fois le 27 octobre 1396[10], puis une seconde fois le lendemain en prĂ©sence d'Isabelle[11], qui est confiĂ©e aux soins de Katherine Swynford, duchesse de Lancastre, et d'ÉlĂ©onore de Bohun, duchesse de Gloucester. Elle est cependant accompagnĂ©e par une importante suite française dirigĂ©e par Philippa de Coucy. Le 31 octobre, le mariage de Richard II et d'Isabelle de France est cĂ©lĂ©brĂ© par Thomas Arundel, archevĂŞque de Canterbury, en l'Ă©glise Notre-Dame de Calais[4]. Après avoir reçu les 300 000 livres convenues, le roi d'Angleterre retraverse la Manche, accompagnĂ© par son Ă©pouse, et s'Ă©tablit quelque temps avec elle Ă  Douvres. Le 23 novembre 1396, le couple royal fait son entrĂ©e solennelle Ă  Londres et, un mois et demi plus tard, le 8 janvier 1397, Isabelle est couronnĂ©e reine d'Angleterre en l'abbaye de Westminster par l'archevĂŞque Thomas Arundel au cours d'une cĂ©rĂ©monie fastueuse, lors de laquelle plusieurs badauds meurent dans des bousculades.

Bien que le mariage soit purement politique, Richard II et Isabelle de France développent progressivement une relation de respect mutuel. La jeune reine vit séparée de son époux et a pour résidence principale le château de Windsor. Décrite comme jolie et préparée à assumer son rôle de reine par son entourage, Isabelle reçoit régulièrement Richard II à Windsor, où il la divertit elle et ses dames d'honneur par des conversations humoristiques, et attend souvent avec impatience ses visites. À l'occasion de son départ pour l'Irlande à la fin du mois de mai 1399 afin d'y apaiser les troubles locaux, Richard II organise auparavant de magnifiques tournois à Windsor en l'honneur de sa jeune épouse et lui fait ensuite ses adieux. Avant son départ, il fait démettre de ses fonctions Philippa de Coucy au profit d'Aliénor Holland, épouse de Roger Mortimer, renvoie une bonne partie de la suite française de son épouse, qui n'a désormais pour compatriotes qu'une seule dame de compagnie et son confesseur, et fait déplacer pour sa protection Isabelle du château de Windsor vers celui de Portchester, situé dans le Hampshire. Ce remaniement brusque au sein de la suite de sa fille suscite l'indignation de Charles VI et de la cour de France, qui se dissipe pourtant rapidement. Ayant nommé son oncle Edmond, duc d'York, régent en son absence, Richard II embarque ensuite pour l'Irlande le 1er juin 1399, tandis qu'Isabelle demeure à Portchester : les deux époux ne se reverront jamais.

Chute de Richard II et retour en France

En l'absence de Richard II, son cousin Henri Bolingbroke, banni depuis octobre 1398 et privé de son héritage à la mort de son père Jean, duc de Lancastre, le 3 février 1399, revient de son exil en France avec quelques partisans et débarque le 4 juillet 1399 sur la côte du Yorkshire. Proclamant son intention de se faire restaurer dans son héritage, il reçoit un soutien inattendu au sein de la noblesse locale et conduit son armée vers Bristol, où s'est établi le duc d'York. Ce dernier fait parallèlement déplacer par sécurité Isabelle vers le château de Wallingford, plus fortifié que celui de Portchester, avant de rencontrer Henri le 27 juillet et de se rallier à sa cause. Abandonné par ses soutiens, Richard II revient en Angleterre seulement le 24 juillet et se réfugie au château de Conwy, avant de négocier avec son cousin et de le rencontrer au château de Flint le 19 août. Devenu effectivement le prisonnier d'Henri, il est ramené sous haute escorte à Londres et est enfermé à la Tour de Londres, avant d'être forcé d'abdiquer en faveur de son cousin le 29 septembre 1399[12]. Après sa déposition, le roi déchu est secrètement conduit en captivité au château de Pontefract[13], souffrant selon le chroniqueur Jean Creton de sa séparation avec son épouse. Isabelle de France est quant à elle brièvement installée au château de Leeds, avant de recevoir l'ordre du nouveau roi Henri IV de s'établir dans la résidence de Richard Mitford, évêque de Salisbury, à Sonning.

Peu après son avènement, Henri IV envoie plusieurs ambassadeurs auprès de Charles VI afin de requĂ©rir son accord pour le mariage d'Isabelle avec son fils aĂ®nĂ© et hĂ©ritier Henri, prince de Galles, mais le roi de France refuse de le reconnaĂ®tre comme roi d'Angleterre et renvoie ses Ă©missaires[12]. Au dĂ©but du mois de janvier 1400, des partisans de Richard II tentent d'assassiner Henri IV et de restaurer l'ancien souverain : ils rendent visite Ă  Isabelle de France Ă  Sonning et lui promettent la libĂ©ration imminente de son Ă©poux. Toutefois, la rĂ©volte est Ă©touffĂ©e promptement par Henri IV et les conjurĂ©s sont exĂ©cutĂ©s. Aux alentours du 14 fĂ©vrier 1400, l'ancien roi meurt en captivitĂ© Ă  Pontefract, peut-ĂŞtre assassinĂ© sur ordre de son successeur[13], mais son trĂ©pas est pour l'instant cachĂ© Ă  Isabelle. Cette dernière est transfĂ©rĂ©e au village de Havering-atte-Bower, situĂ© dans l'Essex, et est tenue sous haute surveillance sur ordre d'Henri IV. Charles VI exige Ă  prĂ©sent le retour de sa fille et le remboursement d'une partie de sa dot, Ă  l'exception des 300 000 livres versĂ©es Ă  Richard II en 1396, mais Henri IV refuse cette seconde demande et rappelle le paiement dĂ» pour la colossale rançon du roi de France Jean II, capturĂ© Ă  la bataille de Poitiers en 1356. Bien qu'il retarde au fil des mois suivants les nĂ©gociations avec Charles VI, Henri IV n'ose pas ignorer complètement les demandes formulĂ©es par la France et hĂ©site Ă  rĂ©pudier la trĂŞve conclue par Richard II en 1396[12].

Finalement, le 27 mai 1401, Henri IV accepte de renvoyer Isabelle en France avec ses effets personnels, mais reporte la restitution de sa dot à une date ultérieure, qui ne sera en fait jamais retournée à Charles VI[9], malgré ses demandes répétées par la suite. Le 27 juin suivant, Thomas Percy, comte de Worcester, escorte Isabelle à Winchester, où elle rencontre Henri IV. Informée auparavant de la mort de son époux, elle s'affiche en deuil en présence du roi d'Angleterre et est conduite le lendemain à Douvres, où elle demeure pendant un mois. Finalement, le 28 juillet, elle traverse la Manche et, trois jours plus tard, elle fait à Leulinghem ses adieux en larmes à ses dames de compagnie anglaises et est reçue par Waléran III de Luxembourg-Ligny. Sur le chemin de retour en direction de Paris, Isabelle est accueillie avec jubilation dans les villes qu'elle traverse et, à son arrivée dans la capitale, elle est remise aux soins de sa mère Isabeau de Bavière et retrouve ses frères et sœurs. Pourtant, les chroniqueurs contemporains rapportent qu'elle n'a jamais plus été heureuse par la suite. Au cours des années suivantes, en Angleterre, des rumeurs se propagent quant à la survie de Richard II, qui se serait échappé et enfui en Écosse, et à la préparation en 1403 d'un débarquement conduit par Isabelle en personne pour restaurer son époux sur le trône, tandis que des pirates français débarquent en 1404 sur l'île de Wight pour demander un tribut en son nom.

Mariage avec Charles Ier d'Orléans et mort

Dès le retour de sa fille en France, Isabeau de Bavière prĂ©voit de la remarier. Ainsi, Ă  l'Ă©tĂ© 1403, Jean Marie Visconti, seigneur de Milan, envisage de l'Ă©pouser[14] afin d'Ă©tablir des relations correctes avec la cour de France après une sĂ©rie de tensions entre la France et Milan sous le règne de son père Jean GalĂ©as Visconti, mais il finit par abandonner ce projet. Finalement, le 4 juin 1404, Isabelle est fiancĂ©e Ă  son cousin germain Charles[15] - [16], fils aĂ®nĂ© de Louis Ier d'OrlĂ©ans. Ce dernier, rĂ©solument hostile Ă  l'alliance matrimoniale franco-anglaise, a ardemment nĂ©gociĂ© avec Henri IV son retour en France en 1401 et lui alloue Ă  prĂ©sent un revenu annuel de 6 000 livres ainsi que les revenus du bailliage de CrĂ©cy-en-Brie. Le pape en Avignon BenoĂ®t XIII accorde la dispense nĂ©cessaire Ă  l'union le 5 janvier 1405[17]. Au dĂ©but de l'annĂ©e 1406, Henri IV insiste une nouvelle fois auprès de la cour de France pour qu'Isabelle soit mariĂ©e Ă  son hĂ©ritier[18], mais la proposition est dĂ©finitivement rejetĂ©e par Charles VI, qui continue Ă  rĂ©clamer la restitution de sa dot[9] et relance sporadiquement les hostilitĂ©s avec les Anglais en Guyenne[18]. Le 5 juin 1406, le contrat de mariage d'Isabelle et de Charles d'OrlĂ©ans est Ă©tabli et, le 29 du mĂŞme mois, leurs noces sont cĂ©lĂ©brĂ©es en prĂ©sence de la cour Ă  Compiègne[18]. Toutefois, selon l'historien et prĂ©lat Jean II Jouvenel des Ursins, Isabelle pleure abondamment au cours de cette cĂ©rĂ©monie qui l'unit Ă  un garçon de cinq ans son cadet[18].

Un an et demi après la célébration de ses noces, Isabelle de France devient subitement duchesse d'Orléans et de Valois, et comtesse de Blois et de Soissons, après l'assassinat le 23 novembre 1407 de son beau-père Louis Ier d'Orléans à l'instigation de Jean Ier de Bourgogne, cousin de Charles VI et de Louis. Le 28 août 1408, accompagnée de sa belle-mère Valentine Visconti[19], Isabelle se rend vêtue de noir à Paris afin de défendre devant son père la mémoire du défunt duc d'Orléans[19], accusé le 8 mars précédent par le théologien Jean Petit d'être devenu, en raison de la maladie de son frère, un tyran, et de réclamer justice en son nom. Charles VI, à nouveau lucide, est persuadé de casser le pardon qu'il a précédemment accordé au duc de Bourgogne[20]. Finalement, par la paix de Chartres signée le 9 mars 1409, ce dernier avoue sa responsabilité concernant le meurtre de Louis Ier d'Orléans « par sa volonté et par ses ordres, pour le bien du royaume » et présente des excuses à ses enfants, qui lui accordent en larmes leur pardon en la cathédrale Notre-Dame de Chartres et prêtent serment sur les Évangiles de respecter cette paix. Mais l'immixtion grandissante de Jean Ier de Bourgogne dans les affaires du royaume irritent ses adversaires et, le 15 avril 1410, se forme à Gien une ligue destinée à contrer son influence[21], précipitant ainsi la calamiteuse guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons qui va s'étendre jusqu'en 1435.

Mais Isabelle de France n'assistera pas à l'éclatement de cette guerre civile. Devenue enceinte de son tout premier enfant, elle accouche le 13 septembre 1409 à Blois d'une fille, prénommée Jeanne et qui épousera ultérieurement en 1424 Jean II d'Alençon[22] - [21], fils et héritier du premier fiancé d'Isabelle. Isabelle meurt toutefois le jour même de la naissance de sa fille[21], à l'âge de 19 ans seulement, et est inhumée peu après dans la chapelle Notre-Dame-des-Bonnes-Nouvelles, située dans l'église Saint-Nicolas-Saint-Laumer de Blois[23], pendant que son époux donne ses robes les plus luxueuses aux moines de la basilique de Saint-Denis pour en faire des chasubles et des dalmatiques. Ses restes sont retrouvés dans un très bon état de conservation en 1624, curieusement enveloppés dans des bandelettes de lin, et transférés vers le couvent des Célestins de Paris. En dépit de ses remariages successifs avec Bonne d'Armagnac en 1410, puis avec Marie de Clèves en 1440, Charles Ier d'Orléans semble avoir sincèrement été amoureux de sa première épouse et, pendant sa captivité de 25 ans en Angleterre à la suite de sa capture à la bataille d'Azincourt en 1415, il compose plusieurs poèmes en son hommage. La descendance de Charles Ier d'Orléans par Isabelle de France s'éteint à la mort de leur unique fille Jeanne le 19 mai 1432, son mariage avec Jean II d'Alençon n'ayant produit aucun enfant.

Ascendance

Postérité artistique

Dans la pièce Richard II de William Shakespeare, écrite vers 1595, l'épouse de Richard II apparaît en étant simplement désignée comme « la Reine »[28]. Ce personnage synthétise à la fois celui d'Anne de Bohême et celui d'Isabelle de France : en effet, la reine est une adulte, mais elle est originaire de France. Ses interventions dans la pièce sont limitées, mais la plus mémorable est celle de la scène 1 de l'acte V, lorsque Richard II et son épouse se séparent avec déchirement après qu'il a été annoncé que le roi déchu sera enfermé au château de Pomfret, tandis que la reine sera reconduite en France, sa terre natale. Dans l'adaptation cinématographique de Rupert Goold en 2012, le rôle d'Isabelle est tenu par Clémence Poésy.

Références

  1. Williams 2016, p. 28.
  2. Gibbons 1996, p. 51–74.
  3. Adams 2010, p. 230–3.
  4. Autrand 1986, p. 330.
  5. Autrand 1986, p. 338.
  6. Autrand 1986, p. 339.
  7. Hamilton 2010, p. 205.
  8. Williams 2016, p. 32–3.
  9. Stratford 2012, p. 18, 114.
  10. Autrand 1986, p. 340.
  11. Autrand 1986, p. 341.
  12. Autrand 1986, p. 331.
  13. Autrand 1986, p. 345.
  14. Autrand 1986, p. 398.
  15. Knecht 2007, p. 51.
  16. Autrand 1986, p. 401.
  17. Autrand 1986, p. 399.
  18. Autrand 1986, p. 402.
  19. Autrand 1986, p. 432.
  20. Autrand 1986, p. 357.
  21. Autrand 1986, p. 442.
  22. Goodrich 1967, p. 112.
  23. Goodrich 1967, p. 107.
  24. Anselme 1726, p. 105–6.
  25. Anselme 1726, p. 109–10.
  26. Anselme 1726, p. 111–4.
  27. Tuchman 1978, p. 145.
  28. DĂ©prats et Venet 2008, p. 1476.

Bibliographie

  • (en) Tracy Adams, The Life and Afterlife of Isabeau of Bavaria, Baltimore, Johns Hopkins University Press, coll. « Rethinking Theory », (ISBN 978-0-8018-9625-5, prĂ©sentation en ligne).
  • Père Anselme, Histoire gĂ©nĂ©alogique et chronologique de la Maison Royale de France, des pairs, grands officiers de la Couronne et de la Maison du roi, et des anciens barons du royaume, t. 1, Paris, Compagnie des Libraires associĂ©s, (1re Ă©d. 1674) (lire en ligne).
  • Françoise Autrand, Charles VI : la folie du roi, Paris, Fayard, (ISBN 978-2213017037, prĂ©sentation en ligne).
  • Jean-Michel DĂ©prats et Gisèle Venet, Histoires : La tragĂ©die du roi Richard II, L’histoire d’Henry IV, La deuxième partie d’Henry IV, La vie d’Henry V, La cĂ©lèbre histoire de la vie du roi Henry VIII, t. 2, Paris, Gallimard, , 1743 p. (ISBN 978-2-07-011365-1).
  • (en) Rachel Gibbons, « Isabeau of Bavaria, Queen of France (1385-1422): The Creation of an Historical Villainess », Transactions of the Royal Historical Society, 6e sĂ©rie, vol. 20,‎ (DOI 10.2307/3679229, JSTOR 3679229).
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  • (en) Jenny Stratford, Richard II and the English Royal Treasure, Woodbridge, The Boydell Press, .
  • (en) Barbara W. Tuchman, A Distant Mirror: The Calamitous 14th Century, New York, Ballantine, (ISBN 978-0-345-34957-6).
  • (en) Deanne Williams, « Isabelle de France, Child Bride », French Connections in the English Renaissance, Routledge,‎ .

Liens externes

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