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Infraction en droit pénal français

Une infraction est un comportement strictement interdit par la loi pénale et sanctionné par une peine prévue par celle-ci. On distingue trois catégories d'infractions dont la nature détermine la sanction qui lui est applicable : la contravention, le délit et le crime.

Définition

Le pénaliste italien Francesco Carrara (1805-1888)[1] définit l'infraction comme la violation d'une loi de l'État, résultant d'un acte externe de l'homme, positif ou négatif, socialement imputable, ne se justifiant pas par l'accomplissement d'un devoir ou l'exercice d'un droit, et qui est puni d'une peine prévue par la loi.

Elle résume bien les règles :

  • violation d'une loi de l'état : l'infraction doit être prévue par un texte légal (voir élément légal) ;
  • acte externe de l'homme : La simple pensée n'est pas condamnable, même une pensée de meurtre. L'acte doit être extérieur à l'homme (voir élément matériel) ;
  • positif ou négatif :
    • un acte positif est une action qui est interdite par la loi, comme une agression,
    • un acte négatif est l'omission d'effectuer une action que la loi commande, telle que la non assistance à personne en danger (la loi commande d'aider cette personne) ;
  • ne se justifiant pas par l'accomplissement d'un devoir ou l'exercice d'un droit : les faits justificatifs d'une infraction, comme de casser une vitre pour sauver un enfant oublié dans une voiture au soleil (on ne vous reprochera pas le bris de la vitre, car vous avez porté assistance à une personne en danger) ;
  • et qui est puni d'une peine par la loi : pas de peine, sans loi… aucune peine ne peut être appliquée si elle n'a pas été prévue par un texte légal.

Pour qu'il y ait infraction, il faut la réunion de trois éléments, appelés éléments constitutifs :

  • un élément légal ;
  • un élément matériel ;
  • un élément moral.

Les infractions pénales sont classées en trois catégories (contraventions, délits et crimes) depuis le Code pénal de 1810 dont l'article 1 qui disposait :

« L'infraction que la loi punit de peines de police est une contravention, l'infraction que la loi punit de peines correctionnelles est un délit, l'infraction que la loi punit de peines afflictives et infamantes est un crime ».

Cette classification a souvent fait l'objet de débats en faveur de classements autres, en particulier pour un classement biparti : infraction intentionnelle et infraction non intentionnelle.

Classification selon la nature de l'infraction :

  • les infractions de droit commun : toutes sauf les autres ;
  • les infractions politiques : celles qui portent atteinte à l'ordre public et social, aux institutions politiques, à la sûreté de l'État ; on peut inclure parmi celles-ci les infractions terroristes, qui ont pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur ;
  • les infractions militaires : toute transgression de la discipline militaire ;
  • les infractions d'affaires : celles qui touchent à la matière fiscale, douanière ou économique en général.

Cependant, depuis 1958 les crimes et délits relèvent du domaine de la loi (article 34 de la Constitution), alors que les contraventions font partie du domaine règlementaire (article 37 de la Constitution). Pour cette dernière classe d'infractions, il n'existe actuellement pas de peines privatives de liberté.

Les classes d'infractions

Les crimes

Les crimes sont des infractions pour lesquelles la peine minimale est de 15 ans de réclusion criminelle (prison). Ils sont jugés devant une cour d'assises (avec jury populaire), ou à titre expérimental, devant une cour criminelle départementale (sans jury populaire).

Les délits

Les délits sont des infractions sanctionnées au maximum par 10 ans d'emprisonnement. Ils sont jugés devant un tribunal correctionnel.

Les contraventions

Les contraventions sont traitées par un tribunal de police. Une condamnation peut mener à une amende forfaitaire (1e à 4e classe) ou pénale (5e classe) allant de 11 à 1 500 euros (3 000 en cas de récidive), comme le précise le Code pénal français en son article 131-13. Amende auxquelles peuvent venir s'ajouter des peines complémentaires (une suspension de permis par exemple)[2].

Les éléments constitutifs des infractions

Ces trois éléments doivent obligatoirement être réunis pour qualifier les crimes et les délits. En revanche, en matière de contravention, l'élément moral n'est pas à rechercher.

Élément légal

Une règle coutumière française veut que : « nullum crimen, nulla poena sine lege » (« pas de crime, pas de peine sans loi »). Cette règle, héritée du pénaliste italien Cesare Beccaria, est fondamentale dans le droit français.

Elle est d'ailleurs reprise par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dans les articles 7 et 8 WWY. Article 7 - Nul homme ne peut être accusé, arrêté ou détenu que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la loi doit obéir à l'instant ; il se rend coupable par la résistance.

Article 8 - La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée.

Cette déclaration étant intégrée dans le bloc de constitutionnalité de la constitution française, elle a donc une valeur constitutionnelle.

Elle fut introduite dans le Code pénal de 1994, dans l'article 111-3 :

  • « Nul ne peut être puni pour un crime ou pour un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi, ou pour une contravention dont les éléments ne sont pas définis par le règlement. » ;
  • « Nul ne peut être puni d'une peine qui n'est pas prévue par la loi si l'infraction est un crime ou un délit, ou par le règlement si l'infraction est une contravention. »

Tout cela signifie que, pour qu'il y ait infraction, il faut qu'il y ait une incrimination prévue dans les textes de loi. Ce texte doit prévoir les éléments constitutifs de l'infraction et la peine encourue de façon claire en évitant les tournures vagues et ambiguës. C'est ce que l'on appelle le principe de légalité des délits et des peines.

Ce texte de loi doit forcément émaner des organes étatiques compétents. Ainsi, les règles d'un ordre professionnel n'ont pas de valeur légale pour créer une infraction. Ce sont les articles 34 et 37 de la constitution de la Cinquième République (1958) qui prévoient et délimitent les compétences des différents organes étatiques. Jusqu'à ce texte, seule la loi (loi ordinaire, référendaire ou ordonnances) pouvait créer une infraction ; mais depuis, l'exécutif peut lui aussi réglementer dans le domaine des contraventions. Néanmoins, seul un décret pris en conseil d'État peut en créer une nouvelle. Les arrêtés préfectoraux, ministériels ou municipaux ne peuvent avoir la valeur d'une sanction pénale, mais leur transgression est sanctionnée par l'amende prévue pour les contraventions de 1re classe en vertu de l'article R 610-5 du Code pénal (CP).

Même s'il y a dualité des sources du droit pénal entre la loi et le règlement, il faut noter l'infériorité manifeste de la norme réglementaire. De plus un principe renforce cette infériorité, celui de l'appréciation de la légalité des actes administratifs par le juge pénal reconnu par l'article 111-5 du CP. En effet celui-ci permet au juge pénal, sur demande du justiciable, d'apprécier la légalité d'un acte et de refuser de l'appliquer si celui-ci l'estime illégal. Cette décision n'engage que le seul juge qui la prend et n'annule pas l'acte pour l'avenir, et que le juge ne peut, par contre, en aucun cas juger de la constitutionnalité d'une loi.

Éléments matériels

Le droit pénal français ne punit pas la simple pensée : pour exister l'infraction doit être matérialisée par un acte. Le plus souvent, il s'agit d'un acte interdit par la loi (infraction de commission), mais il peut aussi s'agir de l'omission de commettre un acte prescrit par la loi (l'infraction d'omission).

Infraction de commission

Exemples : meurtre, vol, dégradation...

Cette infraction suppose trois choses :

  • une action physique de la part de l'auteur ;
  • un résultat qui constitue le dommage ;
  • un lien de causalité entre cette action et ce dommage.

Infraction d'omission

  • omission simple (ex. : omission de porter secours, non témoignage en faveur d'un innocent...)

L'individu omet un acte prescrit par la loi. L'infraction sera réprimée indépendamment de tout dommage.

  • commission par omission (ex. : privation de soins et d'aliments sur un mineur de 15 ans[3])

L'individu omet un acte prescrit par la loi. De cette omission, il résulte un dommage.

À noter qu'à dommage égal, une infraction de commission sera tout de même plus réprimée qu'une infraction d'omission.

Élément moral

Pour qu'une infraction soit constituée, il faut que l'acte provienne de la volonté de l'auteur, qu'il s'agisse d'une faute intentionnelle ou non-intentionnelle. Il faut faire la différence entre la volonté et le mobile. La volonté détermine l'infraction alors que le mobile tente d'en justifier la commission, d'y apporter une raison, un motif. En matière criminelle, l'intention « criminelle » est obligatoire pour caractériser l'infraction. En matière correctionnelle, l'intention n'existe qu'intentionnellement : dégradations volontaires, violences volontaires avec ITT de moins de 8 jours En matière de contravention, généralement l'élément moral n'est pas à démontrer puisqu'il est issu du règlement et non de la loi.

La faute intentionnelle

L'intention est la conscience et la volonté d'accomplir ou de s'abstenir d'accomplir un acte. En droit pénal, on parle alors de dol.

Le dol général

C'est l'intention de commettre un acte que l'on sait interdit par la loi. Il existe une intention d'enfreindre la loi. L'auteur a l'intention de commettre une faute, dans un sens général.

Le dol spécial

C'est la volonté d'accomplir un acte, tel qu'il est décrit par la loi[4]. Pour plus de clarté, on peut employer l'expression de « dol spécifique ». L'auteur a l'intention de commettre une infraction bien précise. Le but étant d'en rechercher le résultat dommageable.

Par exemple : volonté de s'approprier la chose d'autrui (vol), volonté de donner la mort (meurtre)

Le dol spécial ne varie pas, pour une même infraction, quel que soit le ou les auteurs. Comme dit plus haut, il convient de le différencier du mobile. Le mobile, lui, varie suivant l'auteur.

En conséquence, le mobile importe peu, il n'est pas un élément constitutif de l'infraction. Par contre, il va influer sur la décision de justice et peut même devenir une circonstance aggravante par décision du législateur. Le dol spécial connaît aussi plusieurs aspects :

  • simple

Il est issu de la volonté immédiate de l'auteur. Il entraîne une peine ordinaire.

  • aggravé

Issu de la volonté mûrement réfléchie de l'auteur (préméditation). La peine sera plus sévère.

  • dol déterminé

Quand l'auteur a voulu un acte précis, au préjudice précis, contre une victime précise

  • dol éventuel

L'auteur a conscience d'un possible résultat dommageable de son action, mais il agit néanmoins ou ne fait pas ce qui est en son pouvoir pour l'éviter ou en atténuer les conséquences.

  • dol dépassé

Le résultat produit est plus grave que celui envisagé

La faute non intentionnelle

On pourrait parler de « dol sans intention dolosive » mais autant la « faute » dolosive était auparavant synonyme de faute intentionnelle (source : le Vocabulaire juridique de Cornu), autant l' « intention » dolosive n'est pas l'équivalent de faute intentionnelle : la première désigne l'état psychologique d'une personne qui entend nuire à autrui, tandis que la seconde est le fait matériel préjudiciable lui-même.

Pour simplifier :

Deux cas : la faute d'imprudence et l'imprudence volontaire. La faute d'imprudence ne comporte pas de désir de résultat (article 121-3 alinéa 2 et suivants du CP).

Il peut s'agir d'une imprudence, d'une négligence ou d'un manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou un règlement. Donc cette faute n'est réprimée que si elle est à l'origine directe d'un dommage.

L'imprudence volontaire (art. 121-3 al4CP) est une violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité. Mais il peut s'agir également d'une faute caractérisée qui a exposé autrui à un risque grave.

Références

  1. Francesco Carrara, 1805-1888, in « Opuscoli di diritto criminale »
  2. Direction de l'information légale et administrative (Premier ministre), Ministère chargé de la justice, « Infraction pénale : peines complémentaires », sur https://www.service-public.fr, (consulté le )
  3. en droit, « mineur de quinze ans » signifie « individu de moins de quinze ans »
  4. https://www.droit.fr/definition/2763-dol-special/

Bibliographie

  • Xavier Pin, Droit pénal général 2015, Paris, Dalloz, , 483 p. (ISBN 978-2-247-13693-3)

Articles connexes

Liens externes

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