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Hello Girls

Les Hello Girls sont les opératrices téléphoniques américaines de la Première Guerre mondiale, officiellement connues comme la Signal Corps Female Telephone Operators Unit, fondée en 1917.

Un groupe de Hello Girls à Chaumont (France), durant la Première Guerre mondiale.

Souvent anciennes standardistes ou employées d'entreprise de télécommunication, elles ont principalement été choisies pour leur bilinguisme français-anglais afin de faciliter les communications militaires sur le front en Europe. Bien que soumises aux mêmes obligations militaires que les soldats hommes engagés dans l'armée américaine, elles n'obtiennent le statut de vétéran qu'à la fin des années 1970, sur décision du président Jimmy Carter[1].

Origine du terme

Le terme d'Hello Girl est antérieur à la Première Guerre mondiale. Il désigne tout d'abord les femmes opératrices téléphoniques aux États-Unis. La première mention qui en est faite figure dans le récit de Mark Twain A Connecticut Yankee in King Arthur's court écrit en 1889[2]

Contexte et création

À partir de son arrivée en France en 1917, l'American Expeditionary Force (AEF) fait face à des problèmes de communication importants en matière d'installations et de barrière linguistique[3]. Le réseau téléphonique français est en effet dévasté, ce qui amène l'armée américaine à établir son propre réseau de communication[4]. Elle embauche pour cela des opératrices téléphoniques françaises, qui s'avèrent cependant limitées dans leur compréhension des instructions en anglais et moins efficaces que les opératrices téléphoniques américaines, ce qui oblige à se tourner vers des opératrices américaines[4].

Le général John J. Pershing lance donc un appel, publié dans les journaux américains et intitulé Emergency Appeal, invitant toutes les femmes standardistes à s'engager dans l'armée[3] - [5]. Il est persuadé que les femmes ont davantage de patience et de persévérance pour les tâches pénibles et précises, et que les hommes ont plus de difficulté à manier le matériel dédié aux opérations téléphoniques[3].

Caractéristiques

Recrutement

Remise de décorations militaires le à des opératrices de la Signal Corps Female Telephone Operators Unit de l'US Army, dites les « Hello Girls ».

Plus de 7 600 femmes se portent candidates jusqu'au printemps 1918 auprès de la United States Army Signal Corps et environ 500 sont retenues. Parmi elles, 223 femmes sont envoyĂ©es en Europe entre mars et , les autres faisant office de rĂ©serve[5] - [6] - [7].

Parmi les critères de sĂ©lection, les opĂ©ratrices candidates doivent ĂŞtre bilingues anglais-français, avoir une bonne condition physique, et pour la plupart, avoir au moins 25 ans mĂŞme si certaines femmes engagĂ©es sont plus jeunes[3] - [5]. Elles doivent passer des tests psychologiques, destinĂ©s Ă  vĂ©rifier qu'elles sont capables de supporter la pression tout en rĂ©alisant leur travail rapidement, et font chacune l'objet d'une enquĂŞte de la part des services secrets amĂ©ricains[5]. Elles sont Ă©galement soumises Ă  un examen de français difficile[8] qui dĂ©termine si elles sont retenues ou Ă©liminĂ©es[9].

Parmi leurs obligations, figurent les mêmes que celles appliquées aux hommes : elles doivent notamment prêter serment et respecter le protocole militaire, et peuvent être traduites en cour martiale[6] - [3].

Profil des recrues

La plupart des Hello Girls sont des femmes blanches, plutôt éduquées pour cette époque et d'origine urbaine, majoritairement originaires des États-Unis[10].

Parmi 330 opĂ©ratrices dont le lieu de naissance est connu, la majoritĂ© (57 % soit 214 femmes) sont nĂ©es aux États-Unis. Parmi les autres, 60 sont nĂ©es en France, 24 au Canada, 9 en Belgique, 3 en Suisse, 2 en Italie, 2 en Suède et figurent Ă©galement une femme nĂ©e au Danemark, une nĂ©e en Allemagne, une nĂ©e en Roumanie, une en Russie, une en Écosse et une en Turquie[11]. Six femmes afro-amĂ©ricaines figurent aussi parmi ces recrues. Parmi 373 Hello Girls dont l'origine gĂ©ographique est connue, une majoritĂ© vient des États-Unis (360), mais sont Ă©galement dĂ©nombrĂ©es treize standardistes originaires du Canada[12]. Certaines sont issues de la mĂŞme famille, comme c'est le cas d'au moins trente femmes ayant une sĹ“ur s'Ă©tant engagĂ©e en mĂŞme temps, ou sont d'anciennes collègues de travail[13].

La plupart des Hello Girls, soit 324 de 377 opĂ©ratrices, se dĂ©marquent soit par leur capacitĂ© Ă  parler le français, soit par leur maĂ®trise du standard tĂ©lĂ©phonique, soit par leur maĂ®trise des deux en mĂŞme temps. Cependant, seules 85 d'entre elles sont Ă  la fois des standardistes expĂ©rimentĂ©es et bilingues[8]. Certaines Hello Girls sont ou ont Ă©tĂ© standardistes de mĂ©tier, mais parmi les 160 opĂ©ratrices professionnelles, moins de quatre-vingt parlent le français. Devant le manque de standardistes parlant assez bien français pour la tâche, l'AEF recrute au moins 169 femmes parlant couramment français et les soumet Ă  une formation d'opĂ©ratrices[9].

Parmi les professions occupĂ©es par ces recrues, on retrouve principalement les mĂ©tiers de standardiste tĂ©lĂ©phonique (116 femmes sur 303 femmes dont la profession est identifiĂ©e), de professeur (53 femmes) dont un certain nombre de professeures de français, de personnel clĂ©rical (34 femmes), ce qui correspond aux professions les plus occupĂ©es par des femmes Ă  cette Ă©poque[14].

Motivations

La première motivation de ces femmes est d'ordre patriotique, mais se retrouvent aussi le souhait de voyager et l'envie d'aventure[15].

Formation

Les Hello Girls sont formées à New York, Chicago, San Francisco, Philadelphie et Atlantic City[5]. Les recrues parlant suffisamment bien le français mais n'ayant pas de connaissance en standard téléphonique suivent une formation dédiée.

Services

La Chef opératrice Grace Banker recevant la Distinguished Service Medal.

Après leur formation, les premières opératrices arrivent en Europe en 1918 et sont dirigées par la chef opératrice Grace Banker (en).

Les membres de cette unité réalisent les connexions des appels des American Expeditionary Force à Paris, Chaumont et soixante-quinze autres endroits français comme britanniques[16]. Certaines sont stationnées très près des zones de conflit, à moins de 25 km du front vers la fin de la guerre, et travaillent équipées de masques à gaz[6] - [7].

Contrairement aux autres femmes membres de l'AEF, qui interviennent davantage en support et sont éloignées du front, les Hello Girls jouent un rôle actif dans les opérations militaires[8]. Le travail des opératrices consiste à faciliter les communications entre les unités et à servir d'interprètes lors des échanges avec les unités françaises[7]. Deux types de standards téléphoniques sont utilisés. Le premier est destiné aux appels logistiques entre Alliés, sur de courtes ou de longues distances, et le second aux messages entre les unités de commandement situées dans les ports de Bordeaux et du Havre et les unités combattantes situées dans les tranchées[5] - [7]. Les opératrices américaines doivent également utiliser des codes militaires[7].

Au plus fort des combats, les Hello Girls connectent près de 150 000 appels par jour[6].

Fin du conflit et reconnaissance

À la fin du conflit, les Hello Girls sont rapatriées et leur unité est dissoute[5].

MalgrĂ© le fait qu'elles portent l'uniforme, qu'elles soient soumises au règlement de l'armĂ©e et qu'elles aient prĂŞtĂ© serment Ă  celle-ci[17], les Hello Girls ne disposent pas du statut rĂ©servĂ© aux militaires (« military discharge ») après l'armistice, Ă  cause de leur sexe. Elles sont en effet considĂ©rĂ©es pour cette raison comme de simples volontaires et du personnel militaire[6] - [5]. Elles ne bĂ©nĂ©ficient ainsi pas des avantages accordĂ©s aux vĂ©tĂ©rans masculins comme l'assurance mĂ©dicale, le droit de porter leur uniforme ou le droit Ă  des funĂ©railles militaires[6]. Pour elles, cette situation est injuste[18]. La bataille pour leur reconnaissance est menĂ©e par Merle Egan Anderson, ancienne Hello Girl, durant soixante ans[5]. AidĂ©e par un avocat Ă  titre gracieux, elle est Ă©galement soutenue dans son combat par certains membres du Congrès, comme Hubert Humphrey ou Margaret Chase Smith, Barry Goldwater, ainsi que des associations comme la Women's Overseas Service League (en), la National Organization for Women et les vĂ©tĂ©rans de la Première Guerre mondiale[18].

Le statut de vĂ©tĂ©ran n'est accordĂ© aux dernières Hello Girls survivantes qu'en 1977 par le prĂ©sident Jimmy Carter[3], par le G.I Bill Improvement Act et par le Congrès en 1978, après plusieurs dizaines d'annĂ©es de lobbying de la part de Merle Egan-Anderson[5]. Seulement 19 des 223 Hello Girls sont alors encore en vie[18].

Un uniforme de Hello Girl, appartenant à Louise Ruffe est exposé à l'U.S. Army Signal Museum[19].

Inez Crittenden, l'une des cadres des Hello Girls, est enterrée au cimetière américain de Suresnes[20] - [21] - [22].

Références

  1. « L'histoire peu connue des Hello Girls, les premières femmes soldats américaines », sur Shinshu Navi (consulté le ).
  2. Citation exacte « The humblest hello-girl along ten thousand miles of wire could teach gentleness, patience, modesty, manners, to the highest duchess in Arthur's land ».
  3. (en) « The Hello Girls of World War I », sur armedforcesmuseum.com (en), (consultĂ© le ).
  4. Frahm 2004, p. 273.
  5. (en) « The “Hello Girls” – How the U.S. Army’s All-Female Telephone Corps Answered the Call in WW1 », sur militaryhistorynow.com, (consulté le ).
  6. (en) « 'The Hello Girls' Chronicles The Women Who Fought For America — And For Recognition », sur npr.org, (consulté le ).
  7. Frahm 2004, p. 274.
  8. Frahm 2004, p. 275.
  9. Frahm 2004, p. 276.
  10. Frahm 2004, p. 292-293.
  11. Frahm 2004, p. 287.
  12. Frahm 2004, p. 285.
  13. Frahm 2004, p. 291.
  14. Frahm 2004, p. 277.
  15. Frahm 2004, p. 290-291.
  16. (en) Getting the Message Through: A Branch History of the U.S. Army Signal Corps by Rebecca Robbins Raines pg 169, voir en ligne.
  17. (en) Christopher H. Sterling, Military Communications : From Ancient Times to the 21st Century, Santa Barbara (Californie), ABC-CLIO, , 565 p. (ISBN 978-1-85109-732-6, lire en ligne), p. 55.
  18. Gavin 1997, p. 92.
  19. (en) « Hello Girls », U.S. Army Signal Museum, sur U.S. Army Signal Museum (consulté le ).
  20. Matthieu Frachon, avec le concours de la Société d'histoire de Suresnes, « Grippe espagnole : l’épidémie cachée », Suresnes Mag no 317,‎ , p. 50-51 (lire en ligne).
  21. (en) Elizabeth Cobbs, The Hello Girls: America’s First Women Soldiers (Harvard University Press 2017) : 92-93, 135-136, 272. (ISBN 9780674978546).
  22. (en) Inez Ann Crittenden, American Battle Monuments Commission.

Bibliographie

  • (en) Elizabeth Cobbs, The Hello Girls : America’s First Women Soldiers, Harvard University Press, (ISBN 978-0-674-97147-9 et 0-674-97147-7).
  • [Frahm 2004] (en) Jill Frahm, « The Hello Girls: Women Telephone Operators with the American Expeditionary Forces during World War I », The Journal of the Gilded Age and Progressive Era (en), vol. 3, no 3,‎ , p. 271-293 (lire en ligne). Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article
  • [Gavin 1997] (en) Lettie Gavin, American Women in World War I : They Also Served, University Press of Colorado (en), , 310 p. (ISBN 978-0-87081-825-7, lire en ligne), p. 77-100.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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