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Guerre d'indépendance turque

La guerre d’indépendance turque (en turc : Kurtuluş Savaşı, « guerre de libération ») est le nom donné aux conflits qui se déroulèrent en Turquie du au , date de la signature de l'armistice : guerre civile turque puis conflits franco-turc, arméno-turc et gréco-turc, qui opposèrent la résistance nationaliste turque menée par Mustafa Kemal aux puissances alliées victorieuses de l'Empire ottoman à la suite de la Première Guerre mondiale, et à l'armée du sultan ottoman.

Guerre d'indépendance turque
Description de cette image, également commentée ci-après
L'Armée turque entrant dans Izmir.
Informations générales
Date
(3 ans, 4 mois et 22 jours)
Lieu Anatolie, Nord de la Mésopotamie, Thrace.
Casus belli

Défaite de l'Empire ottoman lors de la Première Guerre mondiale

Issue

Victoire turque

Batailles

Guerre gréco-turque


Guerre arméno-turque


Campagne de Cilicie

Par leur détermination et leurs victoires face aux Grecs et aux Arméniens, les armées kémalistes contraignirent les Alliés à une révision du traité de Sèvres et à une renégociation à travers le traité de Lausanne qui s'y substituera en . La guerre d'Indépendance aura pour conséquence de provoquer la chute du sultanat turc et du système ottoman antérieur, lequel sera remplacé par la république de Turquie. Ce changement radical de régime, largement préparé par le gouvernement des Jeunes-Turcs des années 1908 et suivantes, sera une étape déterminante du processus révolutionnaire connu dans les années qui suivront sous le terme de kémalisme.

Histoire

Les frontières de la Turquie redessinées par le traité de Sèvres.
Char d'assaut français à Beyazıt, Istanbul (vers 1920).

À l'issue de la Première Guerre mondiale, l'Empire ottoman étant l'un des Empires centraux, se retrouve dans le camp des pays vaincus, comme ses alliés l'Empire allemand, l'empire d'Autriche-Hongrie et le royaume de Bulgarie. Le , le traité de Sèvres, signé entre les alliés et les mandataires du sultan Mehmed VI, ampute l'Empire turc d'une grande partie de ses territoires qui deviennent soit indépendants (Arménie), soit autonomes (Kurdistan turc), soit sont placés sous l'influence et l'occupation des puissances victorieuses (accords Sykes-Picot).

Ainsi, les régions arabophones du Proche-Orient s'émancipent et sont placées pour certains d'entre elles, sous mandat de la Société des Nations qui les confie à la France (Liban et Syrie) et au Royaume-Uni (Irak et Palestine). Les vilayets de Van, Bitlis, Trébizonde et Erzurum doivent être intégrés à la république indépendante d'Arménie, la détermination de la frontière étant soumise à l'arbitrage du président américain (articles 88 à 94 du traité). Un « territoire autonome des Kurdes » englobant le Sud-Est de l'Anatolie est également constitué (articles 62 à 64 du traité), placé sous zone d'influence française pour la partie occidentale et britannique pour la partie orientale.

De plus, d'autres zones d'influence sont également octroyées :

Enfin, Istanbul, les côtes de la mer de Marmara et les Dardanelles sont démilitarisées. Les détroits sont placés sous le contrôle d'une commission internationale.

Il ne reste à l'Empire ottoman que 783 562 km2 kilomètres carrés (soit environ 23 % des 3 400 000 km2 d'avant la guerre)[16], et un système de « garanties » vient limiter sa souveraineté sur ce territoire restant et notamment sur les détroits stratégiques du Bosphore et des Dardanelles. Entre autres, les finances du pays doivent être administrées par des commissions étrangères, et une grande part des ressources doit être affecté en priorité aux frais d'occupation et au remboursement des indemnités dues aux Alliés. Des commissions sont aussi créées afin de dissoudre intégralement l'armée ottomane pour la remplacer par une force de gendarmerie. Par ailleurs, la police, le système fiscal, les douanes, la poste, les eaux et forêts, la flotte marchande, les écoles privées et publiques doivent être soumis au contrôle permanent des Alliés.

Le sultan Mehmed VI, voyant son autorité s'effriter, met à prix la tête de Mustafa Kemal Pacha dont la popularité ne cesse de grandir en raison de son refus intransigeant de ce traité. Dès lors, Mustafa Kemal considère le sultan comme une marionnette des Alliés et propose l'abolition du régime monarchique. Les nouveaux députés élus lors d'un scrutin organisé par Mustafa Kemal se réunissent à Ankara et le , un nouveau pas vers la création de la république de Turquie est accompli avec la fondation de la Grande assemblée nationale de Turquie (Türkiye Büyük Millet Meclisi). Le , un Comité exécutif est élu. Ce comité déclare que le nouveau parlement est le gouvernement légal et provisoire du pays. Celui-ci refuse alors catégoriquement les clauses du traité de Sèvres. Menacé, le sultan signe avec les Alliés un accord secret plaçant l'Empire ottoman tout entier sous mandat britannique et stipulant que le sultanat « met la puissance morale et spirituelle du Califat au service du Royaume-Uni dans tous les pays musulmans où s'exerce son influence. »[17].

Le sultan, relayé par les hodja et les religieux, exhorte alors les Turcs à prendre les armes contre les nationalistes de Mustafa Kemal, présentés comme les « ennemis de Dieu ». L'inévitable guerre civile éclate dans toute sa brutalité. À Konya, les loyalistes arrachent les ongles et écartèlent les partisans de Mustafa Kemal. En représailles, les notables de la ville sont pendus publiquement par les forces kémalistes.

Au début, les nationalistes essuient plusieurs défaites, et l'armée du Sultan se rapproche d'Ankara, siège du nouveau parlement. Des désertions ont lieu dans les troupes de Mustafa Kemal. Ce dernier se voit contraint de se replier. Des militaires nationalistes qui devaient reprendre la ville d'Hendek aux loyalistes, fraternisent avec ceux-ci. Quelques jours plus tard, une division kémaliste entière est exterminée par l'Armée du Calife qui vient de conquérir une douzaine de grandes villes turques. Une mutinerie éclate au sein d'une milice kémaliste qui passe sous le contrôle du sultan. De son côté le général kémaliste Kâzım Karabekir a du mal à tenir son armée.

Les commandants turcs İsmet Pacha et Mustafa Kemal Pacha.

Face à l'avancée des forces gouvernementales, Mustafa Kemal se replie avec ses gardes du corps dans les bâtiments d'une ancienne école d'agriculture, où il vit en état d'alerte permanente, pour se protéger des agents du sultan voulant l'assassiner.

Mais à mesure que les clauses du traité de Sèvres, signé l'été 1920 et qui consacre le dépècement de l'Empire, sont connues (et aussi à mesure que les armées alliées et les Commissions de contrôle prennent position dans le pays), le gouvernement du sultan perd le soutien des Turcs qui sont de plus en plus nombreux à se tourner vers les nationalistes. Le mouvement s'inverse, et les soldats de l'Armée du Calife décident l'arrêt des combats. Mustafa Kemal amnistie tout militaire qui se joindrait (ou qui reviendrait) à lui, charge ses généraux d'organiser la défense nationale et constitue un gouvernement de « salut public ». L'Armée du Calife se désagrège d'elle-même et l'on assiste dans certaines unités à des violences où des chefs se font égorger par leurs propres hommes qui estiment avoir été trahis. Début , elle a pratiquement disparu, sauf à Izmit où elle sert de couverture à la garnison britannique.

La désagrégation de l'Armée du Calife réduit à néant le pouvoir du sultan en Turquie, met fin à la guerre civile et inaugure les débuts de la guerre d'indépendance contre les troupes d'occupation.

Notes et références

  1. (en) Barbara Jelavich, History of the Balkans : Twentieth century, Cambridge University Press, , 492 p. (ISBN 978-0-521-27459-3, lire en ligne), p. 131
  2. (en) Anthony D'Agostino, The Russian Revolution, 1917-1945, Santa Barbara, ABC-CLIO, , 171 p. (ISBN 0313386226 et 9780313386220, lire en ligne), p. 78
  3. (ru) « Внешняя политика Азербайджана в годы cоветской власти » [archive du ] (consulté le )
  4. (tr) « Atatürk, Nerimanov ve Kurtuluş Savaşımız », sur turksolu.com.tr (version du 24 décembre 2014 sur Internet Archive)
  5. (en) Ahat Andican (tr), Turkestan Struggle Abroad: From Jadidism to Independence, Sota Publications, , 776 p. (ISBN 9080740365 et 9789080740365), p. 78–81
  6. (tr) Özbekistan'dan Gelen Bir Haber
  7. (tr) Abdulvahap Kara (tr), « Türkistan Türklerinin Kurtuluş Savaşı'na ve Cumhuriyet'e Katkıları », sur abdulvahapkara.com, (consulté le )
  8. The Place of the Turkish Independence War in the American Press (1918-1923) par Bülent Bilmez (en)
  9. Mütareke Döneminde Mustafa Kemal Paşa-Kont Sforza Görüşmesi par Mevlüt Çelebi (tr)
  10. Mustafa Kemal Paşa – Kont Sforza ve İtalya İlişkisi (tr)
  11. (tr) Son Güncelleme, « Türk İstiklal Savaşı’nda Ekonomik Sıkıntılar (10) Dış Ülkelerden Yapılan Para ve Silah Yardımları (b) Fransa’nın Yardımları », sur rekabet.net, (consulté le )
  12. (tr) Erhan Afyoncu, « Madagaskar Müslümanları İstiklal Savaşı’nda yanımızdaydı », sur sabah.com.tr, (consulté le )
  13. (tr) « İki Halk Kahramanı M. Kemal Atatürk ve M. Ali Cinnah » [archive du ], sur ekitap.kulturturizm.gov.tr (consulté le )
  14. (tr) Adnan Güllü, « Hindistan Müslümanlarının Milli Mücadelede Türkiye'ye Yardımları », sur elbistankaynarca.com, Elbistan Kaynarca, (version du 13 décembre 2017 sur Internet Archive)
  15. « Atatürk in the Nazi Imagination — Stefan Ihrig | Harvard University Press », sur www.hup.harvard.edu (consulté le )
  16. Klaus Kreiser, Der Osmanische Staat 1300–1922. Oldenbourg, Munich, 2008, (ISBN 3-486-58588-6), S. 8.
  17. Jacques Ancel, La Question d'Orient, p. 287.

Annexes

Bibliographie

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