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Fritz Beckhardt

Le Vizefeldwebel Fritz Beckhardt, né le à Wallertheim (Grand-duché de Hesse) et mort le à Wiesbaden (Hesse), est un pilote de chasse allemand de la Première Guerre mondiale. As de l'aviation avec 17 victoires aériennes, il est expurgé de l'histoire de la Luftstreitkräfte par les nazis car il est juif. Son courage démentait leurs théories raciales selon lesquelles les Juifs sont intrinsèquement des lâches. Curieusement, l'emblème personnel de Fritz Beckhardt est une Svastika, à l'époque symbole mystique porte-bonheur, bien avant la fondation du parti nazi qui l'adopte comme emblème politique.

Fritz Beckhardt
Fritz Beckhardt
Fritz Beckhardt en uniforme de Vizefeldwebel, 1918

Naissance
Wallertheim (Grand-duché de Hesse)
Décès
Wiesbaden (Hesse)
Allégeance Empire allemand
Arme Luftstreitkräfte
Unité Jagdstaffel 26
Grade Vizefeldwebel
Années de service 1914 – 1918
Conflits Première Guerre mondiale

Biographie

Avant-guerre

Fritz Beckhardt est né le à Wallertheim (Rhénanie-Palatinat), en Allemagne. Son père se nommait Abraham Beckhardt. Avant la Première Guerre mondiale, il a travaillé dans une épicerie, puis dans un entrepôt de vêtements pour hommes à Hambourg. Dans le cadre de son apprentissage du textile, il a travaillé à Bingen am Rhein, Hadamar et Hambourg. Durant cette période d'avant-guerre, il servit dans le 143e régiment d'infanterie de 1907 à 1909.

Première Guerre mondiale

Fritz Beckhardt à l'extrême droite de la photo, avec Bruno Loerzer (au centre), son frère Fritz Loerzer, et d'autres membres de la Jasta 26. Mai 1918.

En 1914, il travaillait dans la fabrique de vêtements d'un oncle à Marseille, en France, lorsque la guerre éclate. Il rentre en Allemagne pour servir à nouveau dans l'infanterie jusqu'en 1916. Le , Beckhardt se porte volontaire pour servir dans la 12e compagnie du 31e régiment d'infanterie (de). Le , il est muté au 86e régiment d'infanterie de réserve. Au cours de son service dans ce régiment, il obtient une croix de fer de première et de seconde classe.

Passé dans l'aviation, il suit un entraînement de pilote à la FEA 5 à Hanovre en . Sa première affectation en escadrille opérationnelle, du au , était avec le Fliegerabteilung 3, qui effectuait des missions de reconnaissance exceptionnellement longues. Muté à la Schusta 11, il suit les cours de la Jastaschule 1 pour passer au statut de pilote de chasse. Il est ensuite affecté au Jagdstaffel 26, où il servit du au . Hermann Göring, le futur numéro 2 du Troisième Reich, a également servi à la Jasta 26. Beckhardt et Göring ont été stationnés sur les mêmes aérodromes pendant huit mois et se connaissaient bien.

Le , Beckhardt revendique sa première victoire aérienne sur un Royal Aircraft Factory S.E.5a mais elle ne lui est pas homologuée. Le , il remporte sa première victoire confirmée sur un Royal Aircraft Factory R.E.8. Ironiquement, l'insigne personnel du Vizefeldwebel (sergent-chef) Beckhardt, qui figurait sur au moins trois de ses avions, était une swastika. Cependant, la croix gammée à cette époque n'était pas encore un symbole politique, et la croix gammée de Beckhardt était tournée dans la direction opposée à celle de la croix du parti nazi.

Fritz Beckhardt dans son chasseur Siemens-Schuckert D.III.

Lorsque les combats se terminent avec l'armistice du 11 novembre 1918, Beckhardt refusa de livrer aux Alliés son chasseur. Au lieu de cela, deux jours plus tard, il s'enfuit en Suisse avec son Siemens-Schuckert D.III, et il y fut interné jusqu'en 1919. À la fin de la guerre, Beckhardt était membre de la Ligue des soldats juifs du front. Beckhardt fut l'un des dix-huit seuls militaires à avoir reçu l'ordre de la maison de Hohenzollern pendant la Première Guerre mondiale, et l'un des deux seuls Juifs allemands à avoir reçu cette distinction, le second étant Edmund Nathanael (en). Les noms de Nathanael et Beckhardt ont été retirés de la liste des récipiendaires à l'époque nazie. Il a été personnellement félicité deux fois par l'empereur d'Allemagne Guillaume II pour ses victoires en tant que pilote de chasse.

Entre-deux-guerres

En 1926, Beckhardt épouse Rosa Emma Neumann à Wiesbaden. Il dirige ensuite l'épicerie de son beau-père jusqu'en 1934. Lorsque les nazis commencèrent à boycotter les entreprises juives, il quitte le la banlieue de Sonnenberg, où il exerçait son activité, pour s'installer dans le centre de Wiesbaden. Il y dirigeait une entreprise spécialisée dans les huiles et les graisses alimentaires.

En 1936, il conduisit deux frères juifs du nom de Frohwein à la frontière belge afin de leur permettre de fuir la Gestapo. Les Frohwein ont ensuite ouvert une boucherie casher à Golders Green, à Londres. En 1937, Beckhardt fut accusé d'avoir des relations sexuelles avec une femme aryenne. À l'issue du procès, tenu le , il fut condamné à une peine d'emprisonnement d'un an et neuf mois. Après son séjour en prison, il a été placé en détention préventive dans une entreprise pénitentiaire du camp de concentration de Buchenwald en tant que prisonnier numéro 8135. À sa libération, en , les SS lui ont écrit qu'il avait remporté 17 victoires en tant que pilote de chasse au cours de la Première Guerre mondiale.

La libération de Fritz Beckhardt semble avoir été facilitée par l'intervention personnelle d'Hermann Göring, qui avait conservé de l'amitié envers son ancien camarade de combat. De plus, l'avocat de Beckhardt, Berthold Guthmann, avait également servi avec Göring et Beckhardt pendant la Première Guerre mondiale. Guthman, qui était lui aussi juif, n'aura pas autant de chance et mourut au camp d'extermination d'Auschwitz le .

Seconde Guerre mondiale

Fritz et Rosa Emma Beckhardt ont fui leur pays pour rejoindre Lisbonne, au Portugal neutre, puis sont passés en Angleterre. Après un bref internement sur l'île de Man, les Beckhardt ont emménagé avec l'un des frères Frowein. À Londres, ils ont retrouvé leurs deux enfants, Kurt et Sue Hilde, qui avaient été amenés en Angleterre par le Kindertransport (organisation du voyage des enfants des réfugiés). Cette organisation avait son siège à Bloomsbury House, à Londres, et comprenait de nombreuses associations juives et chrétiennes.

Après guerre

Fritz Beckhardt dans les années 1950.

En 1950, Fritz Beckhardt rentre à Wiesbaden et récupère sa maison, son magasin et une partie de ses autres biens par le biais d'une action en justice. Lui et son fils Kurt ont ensuite ouvert la première épicerie en libre-service de Wiesbaden. Fritz Beckhardt a dirigé l'épicerie jusqu'à sa mort, le , due à plusieurs accidents vasculaires cérébraux. Son épouse et lui sont enterrés au cimetière juif de Wiesbaden.

Famille

Son fils Kurt a vécu dans un camp à Barham, près d'Ipswich, puis dans différents auberges à Sheffield et à Golders Green, à Londres, jusqu'à son retour en Allemagne avec son père. Il vit maintenant à Bonn, en Allemagne. Sa fille Suse Hilde est devenue sujet britannique en et a vécu à Londres.

Kurt Beckhardt n'a pas révélé les origines juives de la famille à son propre fils, Lorenz, pour l'épargner du genre de persécution qu'ils ont connue à l'époque nazie, lui donnant plutôt un enseignement religieux catholique. Lorenz Beckhardt a découvert à l'âge de 18 ans la vérité et l'histoire de son grand-père. Il a publié un livre à ce sujet, intitulé Der Jude mit dem Hakenkreuz. Meine deutsche Familie (en français : Le Juif à la croix gammée. Ma famille allemande).

Distinctions

Notes et références

    Voir aussi

    Bibliographie

    • (en) Tim Grady, A Deadly Legacy : German Jews and the Great War, Yale University Press, , 304 p. (ISBN 978-0-300-23123-6 et 0-300-23123-7, EAN 978-0-30023-123-6, lire en ligne), p. 189.
    • (en) Greg VanWyngarden, Harry Dempsey et Mark Postlethwaite, Aces of Jagdgeschwader Nr 3, Bloomsbury Publishing, , 96 p. (ISBN 978-1-4728-0844-8 et 1-4728-0844-4, EAN 978-1-47280-844-8, lire en ligne), p. 26-28.
    • (en) Derek J. Penslar, Jews and the Military : A History, Princeton University Press, , 376 p. (ISBN 978-0-691-16809-8 et 0-691-16809-1, EAN 978-0-69116-809-8, lire en ligne), p. 167-168.
    • (de) Lorenz S. Beckhardt (de), Der Jude mit dem Hakenkreuz : Meine deutsche Familie, Aufbau Digital, , 480 p. (ISBN 978-3-8412-0811-8 et 3-8412-0811-8, EAN 978-3-84120-811-8, lire en ligne).

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