Fédéralisme asymétrique
Le fédéralisme asymétrique est un mode d'organisation de l'État fédéral selon lequel les institutions ne sont pas les mêmes dans les différentes collectivités politiques qui composent cet État. Les compétences qui sont reconnues à chacune d’elles ne sont pas identiques. Les moyens financiers varient en fonction des choix qui sont pratiqués dans les collectivités fédérées et accrédités par la collectivité fédérale.
Le fédéralisme asymétrique est un fédéralisme « à la carte » où les collectivités égales ne se ressemblent pas en tous points.
En , dans un article publié dans la Revue générale, le sénateur belge Francis Delpérée a suggéré d'approfondir le fédéralisme asymétrique en Belgique.
Fédéralisme asymétrique au Canada
Le Canada est composé de dix provinces et trois territoires. La répartition des pouvoirs entre les instances fédérales et les instances provinciales est déterminée par les articles 91 et 92 de la Loi constitutionnelle de 1867 ; elle est restée inchangée à l'adoption de la Loi constitutionnelle de 1982. Selon la Constitution du Canada, toutes les provinces sont sur un pied d'égalité, et les mêmes pouvoirs sont conférés également aux dix provinces.
Cependant, le courant nationaliste a amené les différents gouvernements québécois, au fil de l'histoire, à élargir le champ d'intervention de l'État provincial d'une manière inconnue dans les autres provinces. Dans la mesure où la Constitution ne l'interdit pas, ces sphères d'activité ont été prises en charge par les instances provinciales, soit de façon unilatérale, ou le plus souvent à l'issue de négociations politiques ou d'ententes administratives avec les instances fédérales.
- On peut penser par exemple à l'instauration d'un impôt provincial sur le revenu par Maurice Duplessis en 1954, le Québec devenant ainsi la seule province au Canada dont les citoyens doivent produire deux déclarations de revenus, soit une provinciale et une fédérale. (Cette double imposition est reconnue et ses effets atténués par un abattement accordé sur l'impôt fédéral.)
- On peut aussi citer le cas du Régime de rentes du Québec, créé en 1965 parallèlement au Régime de pensions du Canada. Ainsi, les Québécois sont les seuls Canadiens à ne pas cotiser à ce deuxième régime et à avoir leur propre régime provincial.
- On peut également citer diverses ententes administratives conclues entre le Canada et le Québec, par lesquelles le Québec peut fixer certaines règles et formalités qui lui sont propres, notamment en matière d'immigration, de formation de la main-d'œuvre et de santé.
- La politique internationale du Québec, fondée sur la doctrine Gérin-Lajoie édictant le principe du « prolongement international des compétences internes du Québec», rend également les instruments politiques québécois particuliers aux autres provinces canadiennes.
Du point de vue du Canada anglais, la notion de fédéralisme asymétrique se heurte généralement à une fin de non-recevoir, la vision canadienne exprimée par la majorité des intervenants politiques et des médias du reste du pays étant que toutes les provinces sont égales politiquement et doivent le rester. Ainsi, au-delà de l'évolution politique et administrative décrite ci-dessus, des démarches plus audacieuses visant à instaurer un fédéralisme asymétrique officiel en l'inscrivant dans la Constitution ont échoué (voir Accord du lac Meech et Accord de Charlottetown). Plus récemment, le gouvernement conservateur de Stephen Harper a fait adopter en 2006 une motion au Parlement fédéral reconnaissant le Québec comme une « nation », ce qui n'a toutefois qu'une valeur symbolique et non constitutionnelle, aucune incidence concrète de cette motion sur les pouvoirs du Québec n'ayant été observée jusqu'ici (voir l'article Motion sur la nation québécoise).
Officiellement, le terme « fédéralisme asymétrique » n'a été utilisé pour la première fois qu'en 2004 dans une entente fédérale-provinciale sur la santé signée par Stephen Harper et Jean Charest, ce que ce dernier a présenté comme une percée[1].
Références
- Bernard Descôteaux, « Philippe Couillard, le fédéraliste », dans Le Devoir, 19 avril 2014.