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Encéphalopathie traumatique chronique

L’encéphalopathie traumatique chronique (ETC) (en anglais : Chronic traumatic encephalopathy, CTE) ou encéphalite traumatique des pugilistes est une forme d'affection cérébrale progressant vers les maladies neurodégénératives, habituellement diagnostiquées post mortem, après une pratique sportive prolongée émaillée de nombreuses commotions cérébrales[1] - [2] - [3].

Encéphalopathie traumatique chronique
Classification et ressources externes
CIM-10 GroupMajor.minor
CIM-9 ?
eMedicine 2500042
MeSH D000070627

Wikipédia ne donne pas de conseils médicaux Mise en garde médicale

L’encéphalite traumatique des pugilistes associe une détérioration intellectuelle avec des troubles de la mémoire[4]. Il existe différentes sortes de lésions traumatiques selon le type de sport pratiqué ainsi que la durée de la pratique. Cette inflammation peut être présente aussi chez les boxeurs, les joueurs de rugby, football américain et d’autres sports où la tête peut être soumise à des chocs importants.

Histoire

Alors qu'il est devenu évident depuis les années 1920 que certaines pratiques sportives, notamment la boxe[5] ou bien le football américain, étaient à risque de troubles cognitifs, comportementaux et psychomoteurs, le terme de dementia pugilistica en décrit le tableau clinique[1].

En 1928, le Dr Harrison Martland (en) a examiné des boxeurs professionnels à la retraite. Ces boxeurs sont à un stade avancé de la maladie de Parkinson et ne montrent pas de déficience cognitive.

En 1934, Parker décrit la carrière en boxe et l’historique médical de trois professionnels de boxe. Il montre que des problèmes neurocomportementaux et des problèmes neurologiques sérieux voire graves, se développent pendant et vers la fin de leur carrière sportive. Ces syndromes neuropsychiatriques seront plus tard appelés encéphalite traumatique pugiliste (Parker, 1934), démence pugiliste (Millspaugh, 1937) et encéphalite traumatique chronique (Critchley)[6].

En 1969, Roberts publie un livre entièrement consacré à cette maladie. Il est intitulé Brain Damage in Boxers : A study of the Prevalence of Traumatic Encephalopathy Among Ex-Professional Boxer. 224 ex-boxeurs professionnels en Angleterre de 1929 à 1955 ont été suivis. Ces boxeurs étaient énormément exposés à des traumas neurologiques. Beaucoup d’entre eux ont eu plus d’une centaine de combats professionnels pour une carrière d’au moins 20 ans. 11 % d’entre eux avaient une encéphalopathie traumatique chronique modérée. 6 % avaient un syndrome modéré, voire sévère.

Dans les années 1970, la cohorte de boxeurs étudiée est suffisamment large pour permettre d'établir un cadre descriptif spécifique[1].

L'encéphalopathie traumatique chronique a été mise en évidence chez les joueurs de football américain en 2002 par le docteur Omalu, en autopsiant le corps de Mike Webster, célèbre joueur[7].

Dans la seconde moitiĂ© des annĂ©es 2010, des Ă©tudes mettent en Ă©vidence l’importance du problème pour les joueurs de foot, notamment au Royaume-Uni. On Ă©value qu’un footballeur professionnel effectue de l’ordre de 70 000 tĂŞtes par an, avec des sĂ©quences d’entrainement spĂ©cifiques au cours desquels les joueurs peuvent avoir Ă  enchaĂ®ner une centaine de tĂŞtes. Le Royaume-Uni, Ă  la suite de ce constat, dĂ©cide d’interdire les tĂŞtes pour les jeunes de moins de 12 ans[8].

En 2013, McKee et al. introduisent la notion de quatre phases neuropathologiques de la CTE (Chronic traumatic encephalopathy). Pour la première fois ils démontrent que la CTE peut être diagnostiquée chez un patient qui ne présente aucun signe clinique[9].

Depuis 2015, le National Institutes of Health finance le programme DIAGNOSE C.T.E. Research Project sur sept ans à hauteur de 17 millions de dollars afin de diagnostiquer l'encéphalopathie traumatique chronique sur un patient vivant[10]. En 2019, un groupe de recherche identifie des protéines tau spécifiques à l'encéphalopathie traumatique chronique, distinctes que celles des autres malades neurodégénératives et observables par tomographie par émission de positons[10].

Épidémiologie

Des estimations Ă©pidĂ©miologiques Ă©valuent Ă  2 % de la population amĂ©ricaine le taux de personnes vivant avec un handicap persistant après un traumatisme crânien[2]. Les traumatisĂ©s qui ont perdu connaissance ont 50 % de risques de plus que les autres d'Ă©voluer vers un Ă©tat dĂ©mentiel. Dans une Ă©tude menĂ©e parmi 1 776 anciens combattants, ce risque est Ă©valuĂ© Ă  quatre fois plus[2].

Les boxeurs sont la principale population Ă  risque[11] - [12] - [13]. Mais pas seulement, une dĂ©couverte faite Ă  l'École de mĂ©decine de Boston (Massachusetts, nord-est), a montrĂ© que de nombreux athlètes ont dĂ©veloppĂ© une encĂ©phalite traumatique de pugilistes avant leur dĂ©cès. D'autres recherches dĂ©montrent que le football amĂ©ricain est le sport Ă  l'origine du plus grand nombre de traumatismes crâniens. La frĂ©quence de cet accident est estimĂ© Ă  0,37 / 1 000 expositions. Au baseball, on relève 0,07 commotions cĂ©rĂ©brales pour 1 000 expositions. En gymnastique artistique : 0,16 pour 10 000 expositions. En basket-ball : 0,16/1 000 pour les hommes et 0,22/1 000 pour les femmes. En hockey sur glace, ces lĂ©sions sont courantes, pour les hommes moins que pour les femmes. Les joueurs de rugby sont Ă©galement une population Ă  risque[14].

Les hommes, les femmes, l'âge, le mode de pratique des activités sportives ou le calcul de l'impact peuvent varier.

Anatomopathologie

Les analyses histopathologiques post mortem de 85 masses cĂ©rĂ©brales de sportifs avec une longue histoire de traumatismes rĂ©pĂ©tĂ©s ont permis de trouver des signes de taupathie au sein de 68 pièces analysĂ©es[9]. De plus, de multiples foyers des varicositĂ©s axonales et de dĂ©fects axonaux ont Ă©tĂ© dĂ©celĂ©s dans tous les cas d'encĂ©phalopathie traumatique chronique[9]. Des inclusions et des neurites immunorĂ©actives Ă  la TAR DNA-binding protein 43 (en), dĂ©celĂ©es dans 85 % des cas, permettent de dĂ©finir les stades I Ă  III quand elles restent focales, et IV quand elles sont trouvĂ©es dans l'ensemble du cerveau[9].

LĂ©sions

  • LĂ©sions aiguĂ«s[15]
  • Traumatismes de la face : surtout des fractures du nez. Des lĂ©sions oculaires graves mais rares (dĂ©collement de rĂ©tine).
  • LĂ©sions cĂ©rĂ©brales mineures : rĂ©sulte d’un double mĂ©canisme « postural et cĂ©rĂ©bral » occasionnĂ© par la brusque rotation de la tĂŞte ou par son brusque rejet en arrière. RĂ©sulte d’une collision du cortex contre la table interne de la voĂ»te crânienne et sidĂ©ration des appareils d’équilibration vestibulaire, visuel et proprioactif.
  • LĂ©sions cĂ©rĂ©brales graves : provoquĂ©s par deux mĂ©canismes : accĂ©lĂ©ration et la dĂ©cĂ©lĂ©ration linĂ©aires et surtout angulaires avec violentes rotations de la tĂŞte : Ă©crasement avec compression suivi de rĂ©traction.
  • LĂ©sions chroniques : Elle associe de façon variable une dĂ©tĂ©rioration intellectuelle avec troubles de la mĂ©moire pouvant aller jusqu’à la dĂ©mence, un syndrome extra-pyramidal, des troubles de l’équilibre en rapport avec un syndrome cĂ©rĂ©belleux et/ou vestibulaire, des troubles de la coordination motrice.
  • Le tableau clinique observĂ© dans les encĂ©phalopathies post-traumatiques chroniques des boxeurs avec atrophie. L’IRM fait Ă©galement Ă©voquer les encĂ©phalopathies dĂ©gĂ©nĂ©ratives de la maladie de Parkinson ou d’Alzheimer.

Signes et symptĂ´mes

L'encéphalopathie traumatique chronique est considérée comme une maladie progressive conduisant à diverses manifestations somatiques et cognitives. Le principal symptôme de la maladie, ainsi que la plus grave, est la démence précoce. S'ensuivent des difficultés à gérer ses émotions, des comportements agressifs, une hypersexualité, des troubles amnésiques, de la dépression, des maux de tête, des troubles mentaux, des hallucinations auditives, des vertiges, des nausées et d'autres symptômes variant selon les personnes malades[16].

Ces symptĂ´mes incluent :

  • des maux de tĂŞte
  • des Ă©tourdissements
  • des vertiges ou des dĂ©sĂ©quilibres
  • des nausĂ©es
  • des troubles visuels (souvent une vision floue)
  • la dĂ©ficience auditive (acouphènes ou bourdonnements dans les oreilles, et la diminution d'audition)
  • des problèmes de mĂ©moire ou de concentration
  • des dĂ©ficits cognitifs, comme une altĂ©ration du jugement, lenteur dans le traitement de l'information
  • des troubles du sommeil
  • labilitĂ© Ă©motionnelle
  • l'irritabilitĂ© ou la dĂ©pression
  • la fatigue
  • une photophobie (hypersensibilitĂ© Ă  la lumière, de peur morbide et l'Ă©vitement de la lumière)
  • phonophobie (sensibilitĂ© au bruit morbide)
  • changements de personnalitĂ©.

Le patient peut avoir beaucoup ou peu de ces symptômes, sans compter d’autres manifestations moins fréquentes. Certains symptômes sont similaires à ceux du syndrome d’Alzheimer ou encore Parkinson.

Diagnostic

L'ETC ne peut être diagnostiqué qu'à la mort du malade, mais on peut penser qu'une personne en est atteinte lorsqu'elle a pratiqué des sports ou hobbys provoquant de nombreux chocs cérébraux ou hémorragies de la boîte crânienne et qu'elle est atteinte des principaux symptômes décrits dans la section ci-dessus.

Par analyse du profil neurochimique, la démence pugiliste peut également être diagnostiquée. C’est ce que rapporte l’article Neurochimical Profile of Dementia pugilistica publié dans le Journal of neurotroma.

Prévention

Il n'existe aucun traitement contre cette maladie. La meilleure prévention est de s'abstenir de pratiquer des sports violents, occasionnant des chocs cérébraux et des hémorragies internes dans la boîte crânienne. La prévention des traumatismes porte aussi sur le port obligatoire de protège-dents ou d’un casque.

Traitements

Comme le syndrome d’Alzheimer, l’encéphalite traumatique des pugilistes est une forme de démence où il n’y a pas un remède idéal. Certains produits utilisés pour le traitement du syndrome d'Alzheimer peuvent être utilisés. Ces produits permettent de contrôler les tremblements associés à l'encéphalite traumatique des pugilistes. Il s’agit de traitements palliatifs. Il n’y a pas de traitement curatif.

Notes et références

  1. (en) Gavett BE, Stern RA, McKee AC, « Chronic traumatic encephalopathy: a potential late effect of sport-related concussive and subconcussive head trauma », Clin Sports Med, vol. 30, no 1,‎ , p. 179-88, xi. (PMID 21074091, PMCID PMC2995699, DOI 10.1016/j.csm.2010.09.007).
  2. (en) Shively S, Scher AI, Perl DP, Diaz-Arrastia R, « Dementia resulting from traumatic brain injury: what is the pathology? », Arch Neurol, vol. 69, no 10,‎ , p. 1245-51. (PMID 22776913, PMCID PMC3716376).
  3. (en) Randolph C, « Is chronic traumatic encephalopathy a real disease? », Curr Sports Med Rep, vol. 13, no 1,‎ , p. 33-7. (PMID 24412888, résumé).
  4. Emmanuel-Alain Cabanis et al., « Définition encéphalite traumatique des pugilistes », Bulletin de l’Académie nationale de médecine, t. 194, no 7,‎ (lire en ligne).
  5. (en) Martland HS, « Punch drunk », JAMA, vol. 91, no 15,‎ , p. 1103-7. (DOI 10.1001/jama.1928.02700150029009, résumé).
  6. (en) A critical review of chronic traumatic encephalopathy, L. Grant Iverson, Andrew J.Gardner, Paul McCrory, Ross Zafonte, Rudy J. Castellani, Neuroscience and Behavioral Reviews, Elsevier.
  7. (en) Omalu BI, DeKosky ST, Minster RL, Kamboh MI, Hamilton RL, Wecht CH, « Chronic traumatic encephalopathy in a National Football League player », Neurosurgery, vol. 57, no 1,‎ , p. 128-34; discussion 128-34. (PMID 15987548).
  8. « Des lésions au cerveau, le revers de la médaille pour les footballeurs anglais du Mondial 66 », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  9. (en) McKee AC, Stern RA, Nowinski CJ, Stein TD, Alvarez VE, Daneshvar DH, Lee HS, Wojtowicz SM, Hall G, Baugh CM, Riley DO, Kubilus CA, Cormier KA, Jacobs MA, Martin BR, Abraham CR, Ikezu T, Reichard RR, Wolozin BL, Budson AE, Goldstein LE, Kowall NW, Cantu RC, « The spectrum of disease in chronic traumatic encephalopathy », Brain, vol. 136, no Pt 1,‎ , p. 43-64. (PMID 23208308, PMCID PMC3624697, DOI 10.1093/brain/aws307).
  10. (en) Ken Belson, « A Test for C.T.E. in the Living May Be Closer Than Ever » Accès payant, The New York Times, (consulté le ).
  11. (en) R.A. Wennberg et C.H. Tator, « National Hockey League Reported Concussions, 1986-87 to 2001-02 », Journal Canadien Des Sciences Neurologiques, vol. 30, no 3,‎ , p. 206-209 (lire en ligne).
  12. AFP, « Des troubles neurologiques liés à des chocs crâniens chez les sportifs », sur La Presse, .
  13. « Colloque sur la commotion cérébrale liée aux activités physiques et sportives », sur Comité National Olympique et Sportif Français, .
  14. Jérémy Fadat, « Commotions : une action collective inédite », Midi Olympique, no 777,‎ , p. 22.
  15. Emmanuel-Alain Cabanis, Marie-Thérèse Iba-Zizen, Georges Perez, Xavier Senegas, Julien Furgoni, Jean-Claude Pineau, Jean-Louis Louquet et Roger Henrion, « La boxe, sport de combat, de la traumatologie à la prévention », Bulletin de l'Académie nationale de médecine, vol. 194, no 7,‎ , p. 1219-1236 (lire en ligne, consulté le ).
  16. Brandon E. Gavett, Robert A. Stern et Ann C. McKee, « Chronic Traumatic Encephalopathy: A Potential Late Effect of Sport-Related Concussive and Subconcussive Head Trauma », Clinics in sports medicine, vol. 30, no 1,‎ , p. 179–xi (ISSN 0278-5919, PMID 21074091, PMCID PMC2995699, DOI 10.1016/j.csm.2010.09.007, lire en ligne, consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

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