Disfluence verbale
Une disfluence verbale, dysfluence verbale ou disfluiditĂ© verbale[1] consiste en toute sorte de rupture, dâirrĂ©gularitĂ©, ou d'Ă©lĂ©ment non lexical qui apparaĂźt dans un discours normalement fluide. Y sont compris les « faux-dĂ©parts » (mots coupĂ©s Ă mi-propos), les phrases rĂ©pĂ©tĂ©es ou recommencĂ©es, les syllabes rĂ©pĂ©tĂ©es, les tics de langage, tels que les grommellements, propos non lexicaux tels que « euh », « hum », « hem », ou propos « rĂ©parĂ©s », quand le locuteur corrige ses propres erreurs de parole et de prononciation avant que quelquâun dâautre nâaie pu le faire. Le son « euh » est considĂ©rĂ© comme une syllabe universelle.
Tics de langage
Les tics de langage sont des Ă©lĂ©ments de langage qui sont gĂ©nĂ©ralement reconnus comme dĂ©pourvus de sens ou de finalitĂ©. Ils s'expriment gĂ©nĂ©ralement par des ruptures telles que « ah », « genre », « euh », qui tendent à « rĂ©parer » la communication (exemple : « Il portait une chemise bleue - euh, noire je veux dire. ») et aussi par des bĂ©gaiements. Leur utilisation est gĂ©nĂ©ralement mal vue dans les mĂ©dias de masse (actualitĂ©s, cinĂ©ma etc.), bien quâils se produisent rĂ©guliĂšrement dans les conversations normales, dont ils reprĂ©sentent jusquâĂ 20 % des mots utilisĂ©s[2]. Les tics de langage peuvent Ă©galement ĂȘtre utilisĂ©s comme pauses pour se donner le temps de rĂ©flĂ©chir (exemple : « Je suis arrivĂ© Ă - euh +15h. »).
Variabilité selon les langues
Les recherches en linguistique informatique ont rĂ©vĂ©lĂ© une corrĂ©lation entre la langue maternelle des locuteurs et le type de disfluences qu'ils emploient dans le langage spontanĂ©[3]. En complĂ©ment de ces recherches, il existe dans la littĂ©rature dâautres comptes-rendus subjectifs relevĂ©s individuellement.
Les AmĂ©ricains font des pauses telles que um ou em, les Britanniques disent uh ou eh, les francophones euh, les germanophones Ă€h, les japonophones Ä, anĆ, Äto, et les hispanophones ehhh (Ă©galement utilisĂ© en hĂ©breu), como (signifiant normalement « comme »), et en AmĂ©rique latine mais pas en Espagne, este (signifiant normalement « ceci »). Les lusophones disent er, uh ainsi que hĂŁ, Ă©. En mandarin, on emploie nĂ gĂš et zhĂš ge (« ceci » et « cela »). En bosnien, serbe et croate, on utilise ovaj, onaj ou to jest. Les arabophones disent ÙŰčÙÙ, dont la prononciation est proche de yaaâni â [jĂŠÊni] ou [jaÊni] â (littĂ©ralement « ça veut dire »). En turc, on dit Ćey en plus de yani empruntĂ© Ă l'arabe (sans le [Ê]) et ııı.
Ătat de la recherche
De rĂ©centes recherches en linguistique ont mis en exergue que les disfluences non pathologiques peuvent avoir une grande variĂ©tĂ© de sens; la frĂ©quence dâutilisation du « euh » et du « hum » reflĂšte souvent l'Ă©tat Ă©motionnel ou de vigilance du locuteur. Certaines hypothĂšses suggĂšrent que le temps utilisĂ© pour produire ces sons sert Ă prĂ©parer le mot suivant. Dâautres avancent quâils doivent ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des mots Ă part entiĂšre, des mots-outils, plutĂŽt que des accidents, indiquant ainsi un laps de temps variable au cours duquel le locuteur souhaite faire une pause sans pour autant laisser le contrĂŽle du dialogue. Il existe un dĂ©bat sur le fait de les considĂ©rer comme une forme de bruit blanc ou comme une composante du langage porteuse de sens.
Les disfluences ont Ă©galement pris de lâimportance au cours des derniĂšres annĂ©es avec lâapparition de programme de reconnaissance automatique de la parole, et dâautres tentatives permettant aux ordinateurs d'interprĂ©ter le langage humain.
« Euh », syllabe partagée
Des études ont montré que le mot/syllabe « euh » est probablement la syllabe la plus reconnue à travers le monde, avec les variantes de « maman » et « papa »[4], indépendamment de la géographie, de la langue, de la culture ou de la nationalité[5].
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de lâarticle de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « Speech disfluency » (voir la liste des auteurs).
- « Les champs dâintervention de lâorthophonie », Orthophonie AcadĂ©mie,
- (en) J. E. Fox Tree, « The effects of false starts and repetitions on the processing of subsequent words in spontaneous speech », Journal of Memory and Language, vol. 34, no 6,â , p. 709-738 (lire en ligne)
- (en) L. Lamel, M. Adda-Deckes, J.L. Gauvain et G. Adda, Spoken language processing in a multilingual context, vol. 4, , 2203â2206 p. (DOI 10.1109/ICSLP.1996.607242)
- (en) Jennifer Schuessler, « The Syllable that Everyone Understands », The New York Times,â (lire en ligne, consultĂ© le )
- (en) Mark Dingemanse, Francisco Torreira et N. J. Enfields, « Is "Huh?" a Universal Word? Conversational Infrastructure and the Convergent Evolution of Linguistic Items », PLoS ONE, vol. 8, no 11,â , e78273 (DOI 10.1371/journal.pone.0078273).
Annexes
Bibliographie
- HH. Clark et JE. Fox Tree, « Using uh and um in spontaneous speaking. », Cognition, vol. 84, no 1,â , p. 73-111 (PMID 12062148, DOI 10.1016/S0010-0277(02)00017-3, lire en ligne)
- Martin Corley et Oliver W. Stewart, « Hesitation Disfluencies in Spontaneous Speech: The Meaning of um », Language and Linguistics Compass, vol. 2, no 4,â , p. 589â602 (ISSN 1749-818X, DOI 10.1111/j.1749-818X.2008.00068.x, lire en ligne)
- Robert Eklund, « Disfluency in Swedish human-human and human-machine travel booking dialogues », Linköping Studies in Science and Technology Dissertation No. 882, (consulté le )
Articles connexes
Liens externes
- (en) Michael Erard, « Just Like, Er, Words, Not, Um, Throwaways », (consulté le )
- (en) Jennifer Schuessler, « The Syllable that Everyone Understands », The New York Times,â (lire en ligne, consultĂ© le )