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Der Krieg (série de gravures)

Der Krieg (La Guerre) est une sĂ©rie de cinquante estampes de l'artiste allemand Otto Dix. RegroupĂ©es en cinq portfolios de dix estampes, elles sont publiĂ©es Ă  Berlin en 1924 par Karl Nierendorf en 70 exemplaires. Ce travail relève de la Nouvelle ObjectivitĂ©, un prolongement du mouvement expressionniste.

Der Krieg (La Guerre)
Artiste
Date
Type
Gravure en taille-douce sur zinc
Technique
Dimensions (H Ă— L)
19,6 Ă— 29,1 cm
Commentaire
série de cinquante estampes

Liminaire

Le portfolio est en relation avec le traumatisme qu'a vécu l'artiste alors qu'il était engagé dans l'armée allemande lors de la Première Guerre mondiale. Pour la réalisation de cette série, Dix est principalement influencé par la série Les Désastres de la guerre et le tableau Tres de mayo de Goya, mais aussi Les misères de la guerre de Jacques Callot.

Historique

Après avoir Ă©tĂ© libĂ©rĂ© de ses obligations militaires, Otto Dix retourne Ă  Dresde, ville oĂą il suivait les cours avant la guerre, Ă  l'École des arts appliquĂ©s. Il reprend ses Ă©tudes artistiques, mais le thème de la guerre se glisse bientĂ´t dans son travail. Dix est continuellement hantĂ© par la brutalitĂ© de la guerre et les scènes vĂ©cues et observĂ©es. Otto Dix va voir les Ĺ“uvres de Urs Graf, de Jacques Callot (Les Grandes Misères de la guerre) et surtout admire Ă  Bâle une des sĂ©ries de l'Ĺ“uvre emblĂ©matique de Francisco de Goya, Les DĂ©sastres de la guerre, une sĂ©rie de 82 planches ayant pour sujet la pĂ©riode troublĂ©e qui a suivi l'invasion de l'Espagne par les troupes napolĂ©oniennes. InspirĂ© par cette dernière Ĺ“uvre dĂ©crivant l'atrocitĂ© du conflit avec des scènes d'exĂ©cutions et de famine, il tente de capter et de rendre les paysages et les champs dĂ©solĂ©s de Flandre et de la Somme, sculptĂ©s de tranchĂ©es et jonchĂ©s de cadavres. Dix souligne Ă©galement la disproportion de charge entre les soldats de diffĂ©rentes armes. Les fantassins sont mutilĂ©s, blessĂ©s, souffrent, deviennent fous et meurent alors que les marins font la bringue avec des prostituĂ©es. Au fil de ses cinquante planches d'une beautĂ© tragique, Otto Dix dĂ©crit sans complaisances cadavres dĂ©charnĂ©s et en dĂ©composition, squelettes grimaçants ou semblant sourire, corps crucifiĂ©s ou empalĂ©s sur des barbelĂ©s, blessĂ©s aux yeux exorbitĂ©s et chairs ouvertes et autres soldats en train de mourir, le tout formant une hallucinante danse macabre rĂ©alisĂ©e sur base de ses quelque 600 croquis pris sur le vif et envoyĂ©s par Dix Ă  une connaissance en Allemagne depuis le théâtre des champs de bataille.

En 1921, Otto Dix rencontre Karl Nierendorf, un marchand d'art berlinois des plus influents qui publiera en 1924 le couronnement de l'œuvre de Dix, la farde de cinquante gravures en cinq portefeuilles qu'il intitule Der Krieg (La Guerre). L'artiste titre, situe et décrit chaque gravure et ordonne la séquence des gravures en ne tenant pas compte de l'ordre chronologique, ni temporelle, ni de la réalisation des planches. La série confronte l'inhibition de masse envers le traumatisme à la mémoire limitée sur cette guerre et est un anathème sur le mythe de la guerre comme étant une cause glorieuse. Il n'y avait pas de « coup de poignard dans le dos », seulement « la boue, les mutilations, la mort et la futilité ».

« Ces gravures explorent les thèmes macabres d'une abominable chronique quotidienne. Les thèmes des destructions, déformations et mutilations du corps humain émergent d'un clair-obscur ambiant dans une vision apocalyptique. Une grande partie de ces scènes où se reflète le désespoir objectif de la mort sont situées dans la Somme ou en Picardie, où Otto Dix a combattu[1]. »

Otto Dix faisant partie des centaines d'artistes stigmatisĂ©s par les Nazis comme producteurs d'un « art dĂ©gĂ©nĂ©rĂ© », ceux-ci ont fait disparaĂ®tre la presque totalitĂ© des 70 exemplaires Ă©ditĂ©s.

En plus de leur grande richesse artistique, Der Krieg et Les Désastres de la guerre sont unanimement considérés comme étant les témoignages les plus convaincants sur et contre la guerre.

Le cycle d'Otto Dix s'inscrit à la suite d'autres cycles gravés par des artistes allemands en lien avec la Première Guerre mondiale, tels ceux de : Otto Schubert, Leiden der Pferde im Krieg (Souffrances des chevaux pendant la guerre), 1917 ; Adolf Uzarski, Der Totentanz (La Danse macabre), 1916-1917 ; Max Pechstein, Somme 1916, 1918 ; Käthe Kollwitz, Der Krieg (La Guerre), 1918-1922 ; Max Beckmann, Die Hölle (L’Enfer), 1919[2].

Technique de gravure

Otto Dix s'est inspiré de la technique de gravure de Goya qui associait l'eau-forte et l'aquatinte.

Édition et diffusion

L'Ĺ“uvre a Ă©tĂ© Ă©ditĂ©e par le galeriste berlinois Karl Nierendorf et imprimĂ©e chez Otto Felsing Ă  Berlin. Les eaux-fortes mesurent approximativement 22 Ă— 23 cm et les feuilles, de couleur crème, Ă©galement approximativement, 39,8 Ă— 42,1 cm.

En collaboration avec l'organisation pacifiste Nie wieder Krieg (de), le galeriste a fait circuler un portfolio dans toute l'Allemagne, bien que Dix lui-mĂŞme ait doutĂ© que ses tirages puissent avoir une incidence sur les guerres futures. MalgrĂ© la publicitĂ© intensive, Nierendorf n'a vendu qu'un seul portfolio complet sur les soixante-dix Ă©ditĂ©s.

Liste des estampes

(Œuvres référencées dans le catalogue raisonné de Florian Karsch K. 70-K. 119[3])

Portfolio I

  1. Soldats entre les lignes (Soldatengrab zwischen den Linien), eau-forte, aquatinte, 19,3 Ă— 28,9 cm
  2. Soldats ensevelis (Janvier 1916, Champagne) (VerschĂĽttete (Januar 1916, Champagne)), aquatinte, 14 Ă— 19,7 cm
  3. Morts gazĂ©s (Templeux-La-Fosse, Somme, aoĂ»t 1916) (Gastote (Templeux-La-Fosse, August 1916)), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 19,4 Ă— 28,9 cm
  4. Champ de trous d'obus près de Dontrien, Champagne, Ă©clairĂ©s par des fusĂ©es (Trichterfeld bei Dontrien, von Leuchtkugeln erhellt), eau-forte, 19,5 Ă— 26 cm
  5. Cadavre de cheval (Pferdekadaver), aquatinte, pointe-sèche, 14,5 Ă— 197 cm
  6. Un BlessĂ© (automne 1916, Bapaume), Pas-de-Calais (Verwundeter (Herbst 1916, Bapaume)), eau-forte, aquatinte, 19,7 Ă— 29 cm
  7. Près de Langemarck, Flandre, Belgique, (fĂ©vrier 1918) (Bei Langemark (Februar 1918)), aquatinte, pointe-sèche, 24,7 Ă— 29,3 cm
  8. Poste de rassemblement (campagne d'automne en Champagne) (Relaisposten (Herbstschlacht in der Champagne)), aquatinte, pointe-sèche, 14,8 Ă— 19,8 cm
  9. TranchĂ©e de combat s'Ă©croulant (Zerfallender Kampfgraben), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 30 Ă— 24 cm
  10. BlessĂ© en fuite (Bataille de la Somme, 1916) (Fliehender Verwundeter (Sommeschlacht 1916)), aquatinte, pointe-sèche, 19,7 Ă— 14 cm

Portfolio II

  1. Position abandonnĂ©e près de Neuville, Nord (Verlassene Stellung bei Neuville), eau-forte, pointe-sèche, 19,7 Ă— 14,6 cm
  2. Bataillon d'assaut Ă  l'attaque sous les gaz (Sturmtruppe geht unter Gas vor), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 19,6 Ă— 29,1 cm
  3. Repas dans la sape (Hauts de Lorette, Pas-de-Calais) (Mahlzeit in der Sappe (Lorettohöhe)), eau-forte, aquatinte, 19,6 Ă— 29 cm
  4. Compagnie au repos (Ruhende Kompanie), eau-forte, aquatinte, 26 Ă— 19,8 cm
  5. Position abandonnĂ©e près de Vis-en-Artois) (Verlassene Stellung bei Vis-en-Artois), eau-forte, pointe-sèche, 19,6 Ă— 26 cm
  6. Cadavre dans les barbelĂ©s (Flandre, Belgique) (Leiche im Drahtverhau (Flandern)), eau-forte, aquatinte, 30 Ă— 24,3 cm
  7. FusĂ©e Ă©clairant la ferme de Monacu, près de PĂ©ronne, Somme (Leuchtkugel erhellt die Monacu), eau-forte, 14,8 Ă— 19,8 cm
  8. Mort dans la sape (Toter Sappenposten), eau-forte, pointe-sèche, 19,8 Ă— 14,7 cm
  9. Danse macabre, anno 1917 (Mort-Homme) (Totentanz anno 1917 (Höhe Toter Mann)), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 24,6 Ă— 30 cm
  10. La deuxième compagnie est relevĂ©e cette nuit (Die II. Kompanie wird heute nacht abgelöst), eau-forte, aquatinte, 19,8 Ă— 25,8 cm

Portfolio III

  1. Retour de la troupe Ă©puisĂ©e (bataille de la Somme (Abgekampfte Truppe geht zuruck (Sommeschlacht)), eau-forte, 19,8 Ă— 28,9 cm
  2. Rencontre nocturne avec un fou (Nachtliche Begegnung mit einem Irrsinnigen), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 30 Ă— 24,6 cm
  3. Un mort dans la boue (Toter im Schlamm), eau-forte, aquatinte, 19,5 Ă— 25,8 cm
  4. Trous d'obus avec fleurs (Printemps 1916) (Granattrichter mit Blumen (Fruhling 1916)), aquatinte, pointe-sèche, 14,8 Ă— 19,8 cm
  5. Les ruines de Langemarck (Die Trummer von Langemarck), eau-forte, aquatinte, 20 Ă— 24,6 cm
  6. Soldat mourant (Sterbender Soldat), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 19,8 Ă— 14,8 cm
  7. Le soir dans la plaine de Wijtschaete (Abend in der Wijtschaete-Ebene), eau-forte, aquatinte, 24,6 Ă— 30 cm
  8. Vu sur les pentes de ClĂ©ry-sur-Somme (Gesehen am Steilhang von Clery-sur-Somme), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 26 Ă— 19,6 cm
  9. Ce que j'ai trouvĂ© en creusant une sape (Auberive) (Gefunden beim Grabendurchstich - Auberive), eau-forte, aquatinte, 19,5 Ă— 29 cm
  10. RĂ©seau de barbelĂ©s devant la tranchĂ©e de combat (Drahtverhau vor dem Kampfgraben), aquatinte, pointe-sèche, 26 Ă— 19,5 cm

Portfolio IV

  1. Crâne (Schädel), eau-forte, 25,7 Ă— 19,5 cm
  2. Matelots Ă  Anvers (Matrosen in Antwerpen), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 28,8 Ă— 19,8 cm
  3. Lens sous les bombes (Lens wird mit Bomben belegt), eau-forte, pointe-sèche, 29,8 Ă— 24,6 cm
  4. Soldat du front Ă  Bruxelles (Frontsoldat in BrĂĽssel), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 28,8 Ă— 19,8 cm
  5. La folle de Sainte-Marie-Ă -Py (Die Irrsinnige von Sainte-Marie-Ă -Py), eau-forte, pointe-sèche, deux Ă©tats, 28,8 Ă— 19,8 cm
  6. Visite Ă  Madame Germaine Ă  MĂ©ricourt (Besuch bei Madame Germaine in MĂ©ricourt), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 26,1 Ă— 19,8 cm
  7. Cantine Ă  Haplincourt (Kantine in Haplincourt), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 14,9 Ă— 20,1 cm
  8. CriblĂ© de balles (Zerschossene), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 14,9 Ă— 20,1 cm
  9. Maison dĂ©truite par les bombardements (Tournai) (Durch Fliegerbomben zerstörtes Haus Tournai), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, deux Ă©tats, 29,8 Ă— 24,4 cm
  10. Transplantation (Transplantation), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, quatre Ă©tats, 19,9 Ă— 14,9 cm

Portfolio V

  1. Section de mitrailleuses Ă  l'assaut (Somme, novembre 1916) (Maschinengewehrzug geht vor (Somme, November 1916)), eau-forte, aquatinte, 24,5 Ă— 30 cm
  2. Mort (Saint-ClĂ©ment) (Toter (St. ClĂ©ment)), eau-forte, aquatinte, quatre Ă©tats, 29,9 Ă— 25,9 cm
  3. On va manger Ă  Pilkem (Essenholer bei Pilkem), eau-forte, aquatinte, 24,5 Ă— 29,8 cm
  4. Un commando attaque un poste de tranchĂ©e (Ăśberfall einer Schleichpatrouille), eau-forte, aquatinte, 20 Ă— 15 cm
  5. Cagna (Unterstand), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 19,8 Ă— 29 cm
  6. Les endormis du Fort de Vaux (gazĂ©s) (Die Schlafenden von Fort Vaux (Gas-Tote)), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 24,8 Ă— 29,8 cm
  7. Transport d'un blessĂ© Ă  Houthulster Wald (Verwundetentransport im Houthulster Wald), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 19,8 Ă— 25,4 cm
  8. Les postes de sape doivent entretenir le feu la nuit (Die Sappenposten haben nachts das Feuer zu unterhalten), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, deux Ă©tats, 24,7 Ă— 30 cm
  9. L'appel de ceux qui sont revenus (Appell der ZurĂĽckgekehrten), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 19,8 Ă— 28,8 cm
  10. Morts devant la position de Tahure (Tote vor der Stellung bei Tahure), eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, 19,7 Ă— 25,8 cm

Conservation et expositions

Ĺ’uvre homonyme

À la suite de cet ensemble, Otto Dix réalise entre 1929 et 1932 un triptyque qui porte également le même titre original allemand (Der Krieg). Cette œuvre est exposée à la Galerie Neue Meister à Dresde.

Notes et références

  1. Présentation sur le site de l'Historial de la Grande Guerre.
  2. Frédérique Gœrig, Musée Unterlinden, Otto Dix : le retable d'Issenheim, Paris, Hazan, (ISBN 978-2-7541-0958-1 et 2-7541-0958-7, OCLC 960915915), p. 144.
  3. (de) Florian Karsch, Das graphische Werk., Hanovre, Fackelträger-Verlag Schmidt-Küster, (ISBN 3-7716-1213-6 et 978-3-7716-1213-9, OCLC 560333).
  4. (en) Otto Dix (German, 1891–1969). The Portfolio: The War (Der Krieg), sur le site du MoMA

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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