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Colette Marin-Catherine

Colette Marin-Catherine est une résistante française, née le à Bretteville-l'Orgueilleuse. Elle entre dans la Résistance durant l'été 1944 où elle est agent de reconnaissance puis infirmière après le débarquement de Normandie ; aussi résistant, son frère Jean-Pierre Catherine est arrêté en 1943 et meurt au camp de concentration de Dora en 1945.

Colette Marin-Catherine
Colette Marin-Catherine

Naissance
Bretteville-l'Orgueilleuse
Origine France
Allégeance Résistance intérieure française
Grade Agente d'information
Infirmière
Années de service 1944
Conflits Seconde Guerre mondiale

Elle poursuit après-guerre un travail mémoriel. Elle accède à la notoriété lorsque le court-métrage documentaire Colette d'Anthony Giacchino, qui la suit lors de la visite du camp de Dora où est mort son frère, obtient l’Oscar dans sa catégorie aux Oscars 2021.

Famille

Colette Catherine naît en avril 1929 dans le Calvados en Normandie[1] - [2], dans le village de Bretteville-l'Orgueilleuse où sa famille réside[3]. Elle décrit la commune comme « un gros bourg, avec un notaire, un médecin, un pharmacien, quatre châtelains. Et des fermes et des ouvriers agricoles autour ». Ses parents dirigent une entreprise de vente, réparation et transport automobile[4].

Engagement au sein de la RĂ©sistance

LycĂ©enne[5] et âgĂ©e de 16 ans[6], Colette Marin-Catherine s'engage dans la RĂ©sistance autour de Caen[7] en tant qu'agente de reconnaissance[6]. Son père, son frère et sa mère sont aussi rĂ©sistants[4] - [8]. Durant l'Ă©tĂ© 1944[5], elle aide Ă  soigner les civils blessĂ©s[7]. Sa mère dirige une sorte de poste de secours Ă  l'arrière de leur maison. Le , jour J du dĂ©barquement, alors qu'elles Ă©vacuent le village en direction de Bayeux, elles sont rĂ©quisitionnĂ©es par un mĂ©decin de l'hĂ´pital militaire temporaire du sĂ©minaire de Bayeux (appelĂ© Robert-Lion après le dĂ©barquement). Pendant quatre mois, Colette Marin-Catherine y travaille en tant qu'infirmière, sans diplĂ´me ni formation, de jour comme de nuit. Elle tĂ©moigne : « Mon boulot, c'Ă©tait du nettoyage, du soin, du pansement. Il n'Ă©tait pas question de dire que je ne pouvais pas ou que j'avais peur. Si ma mère me donnait un ordre, je devais l'exĂ©cuter immĂ©diatement[3]. »

Son frère Jean-Pierre Catherine, nĂ© en 1926 et Ă©lève Ă  l'Ă©cole des aspirants de la Marine marchande de Caen, entre dans la RĂ©sistance en 1940 — il a 13 ans — avec un groupe de camarades de Bretteville-l'Orgueilleuse et de Putot-en-Bessin[6]. Au sein du Front national de lutte pour la libĂ©ration et l'indĂ©pendance de la France[9], ils distribuent journaux, tracts, cachent des armes et aident des opposants Ă  se camoufler. Le , ils fleurissent les monuments aux morts. Pour ce fait, Jean-Pierre Catherine est arrĂŞtĂ© huit mois plus tard. Il est emprisonnĂ© Ă  Caen, oĂą il est condamnĂ© aux travaux forcĂ©s. D'abord envoyĂ© au camp de concentration de Natzweiler-Struthof en Alsace annexĂ©e[6], il est dĂ©portĂ© alors qu'il a 17 ans au camp de concentration de Dora en Allemagne, un camp spĂ©cialisĂ© dans la fabrication de missiles V2[10] aux conditions de travail extrĂŞmement dures[6]. Il meurt d'Ă©puisement[11] le , Ă  tout juste 19 ans. Un autre frère, prĂ©nommĂ© Gaston, de treize ans l'aĂ®nĂ© de Colette Marin-Catherine, meurt Ă  son retour de dĂ©portation[6].

Vie après-guerre

Le , Colette Marin-Catherine et sa mère quittent l'hôpital militaire de Bayeux et retournent chez elles pour la première fois depuis le débarquement. Elles rentrent à pied sur quinze kilomètres. Elles retrouvent leur maison squattée, pillée et en piteux état[8].

Le garage familial, sans employĂ©, est fermĂ©. Afin de subvenir Ă  ses besoins et Ă  ceux de sa mère âgĂ©e de 60 ans et malade, Colette Marin-Catherine exerce les mĂ©tiers d'infirmière et de couturière dans le village, vend des lĂ©gumes, des poules et des lapins. Elle gagne peu et doit rĂ©parer la maison, qui n'a plus de vitres et qui a des trous dans la toiture. En , elles sont toujours sans nouvelles du père et des fils. Lorsqu'elles apprennent le dĂ©cès de Jean-Pierre Catherine : « On Ă©tait tellement fermĂ©es sur notre chagrin qu'on s'est repliĂ©es sur nous-mĂŞmes. Au village, plus personne n'avait envie de frĂ©quenter une famille en deuil[8]. »

Elle assiste aux élections municipales de 1945, où les femmes peuvent pour la première fois voter en France. Soixante-dix ans après l'évènement, elle décrit les électrices « intimidées » devant « l'aristocratie du village » : « C'était la fête, et en même temps, c'était impressionnant. Beaucoup avaient un bulletin plié dans la main. Le curé ou le mari avaient donné des consignes. » Une femme est élue à la tête du village en 1947. Colette Marin-Catherine vote pour la première fois aux élections législatives de 1951 à Caen, et participe à chaque scrutin depuis, affirmant s'être « battue pour ça »[4]. Tout en refusant de dévoiler ses opinions politiques, elle déclare admirer le général de Gaulle et avoir été pendant une dizaine d’années vice-présidente d'une association liée à Pierre Messmer[12].

Colette Marin-Catherine tĂ©moigne avoir « commencĂ© Ă  bien gagner [sa] vie » après avoir appris Ă  remailler les bas. Elle s'occupe de sa mère jusqu'Ă  son dĂ©cès. Elle a alors 40 ans et elle ne se marie pas ensuite[8]. Elle exerce la profession de directrice d'Ă©tablissements hĂ´teliers[4].

Travail mémoriel

À partir des années 2010, Colette Marin-Catherine donne régulièrement des conférences durant des visites de la Normandie organisées par le National WWII Museum de La Nouvelle-Orléans en Louisiane aux États-Unis[6] - [13], principalement à Caen au Mémorial et au Café Mancel[14] et reçoit des Américains à chaque anniversaire du débarquement[6].

En 2018, le rĂ©alisateur amĂ©ricain Anthony Giacchino et la productrice française Alice Doyard sont en Normandie pour rĂ©aliser des portraits de rĂ©sistants. Ils rencontrent Colette Marin-Catherine[5], Ă©tablie Ă  Caen[1], par l'intermĂ©diaire du guide Christophe Gosselin[14]. DĂ©couvrant « son aura face Ă  la camĂ©ra, mais aussi sa volontĂ© de transmettre la mĂ©moire de son frère », d'après les propos d'Alice Doyard[5], il leur naĂ®t l'idĂ©e de faire un film. Dans le mĂŞme temps, ils font la connaissance de l'historien Laurent Thierry, prĂ©sent au centre mĂ©morial de la Coupole d'Helfaut dans le Pas-de-Calais et coordinateur du dictionnaire biographique Livre des 9 000 dĂ©portĂ©s de France Ă  Mittelbau-Dora, et de l'Ă©tudiante Lucie Fouble, chargĂ©e de rĂ©diger la fiche biographique de Jean-Pierre Catherine[10].

Dès l'annĂ©e suivante, Colette Marin-Catherine, âgĂ©e de 92 ans, accompagnĂ©e de Lucie Foulbe, part en Allemagne pour la première fois. Elle se rend sur les traces de son frère, en particulier Ă  Dora[10]. Elle tĂ©moigne de sa visite du camp[13] :

« Tout était dur. J'ai repris ça en pleine gueule, ou en plein cœur, c'est plus élégant. Quand je suis entrée dans le crématoire, vous avez cet espèce de brancard seulement fait de métal sur lequel on mettait les corps dans le four. C’est vraiment là que j'ai vu partir mon frère. J'ai vu beaucoup de documents sur cette guerre là, mais quand j'étais dans le tunnel j'entendais des milliers de voix. Je ne suis pas Jeanne d'Arc, mais c'est tellement écrasant que vous avez l'impression que quelqu'un vous pousse tout autour. »

Le film, d'une durée de vingt-cinq minutes[11], sort en 2020 sur la plateforme numérique du Guardian[10]. Il est primé dans plusieurs festivals américains avant d'être récompensé de l'Oscar du meilleur court métrage documentaire à la 93e cérémonie des Oscars[15] - [16].

L'équipe du film offre à Colette Marin-Catherine un pavé commémoratif à la mémoire de son frère, appelé Stolperstein et réalisé par l'artiste allemand Gunter Demnig[6]. Il est scellé le devant la maison familiale de Bretteville-l'Orgueilleuse[13]. Il s'agit de la première Stolperstein apposée en Normandie[6].

Notes et références

  1. Marie-Eve Nadaud, « Normandie : Colette Marin-Catherine, héroïne malgré elle jusqu'à la cérémonie des Oscars », sur Ouest-France, (consulté le ).
  2. Tables décénnales de Bretteville-l'Orgueilleuse, Archives départementales du Calvados
  3. LĂ©a Quinio, « Calvados. : Ă  16 ans, Colette Marin-Catherine soignait les blessĂ©s », sur Tendance Ouest, (consultĂ© le ).
  4. « Vote des femmes : La première fois qu'elles ont voté... », sur dunkerque.maville.com v, Ouest-France, (consulté le ).
  5. Antoine Flandrin, « Une ancienne résistante française en lice pour les Oscars », sur Le Monde, (consulté le ).
  6. Émilie Flahaut, « Seconde Guerre mondiale : un hommage inédit réservé à un résistant du Calvados », sur France 3 Normandie, (consulté le ).
  7. (en) John Nichol (en), Lancaster, Simon & Schuster UK, , 400 p. (ISBN 978-1-4711-8048-4).
  8. Nathalie Travadon, « « Nous avons dû prouver que c'était notre maison » », sur Ouest-France, (consulté le ).
  9. « Jean Pierre Catherine », sur Mémoire des hommes, Ministère des Armées (consulté le ).
  10. Jennifer-Laure Djian, « Colette, un peu de l'Audomarois dans un court-métrage documentaire nominé aux Oscars », sur La Voix du Nord, (consulté le ).
  11. Marie Pujolas, « Colette, ancienne rĂ©sistante âgĂ©e de 92 ans, hĂ©roĂŻne d'un documentaire nommĂ© aux Oscars », sur France Info, (consultĂ© le ).
  12. Entretien avec Colette Marin Catherine, par Mouloud Achour, dans Clique sur Canal+ ().
  13. Justine Saint-Sevin, « Colette : l'histoire d'une normande et de son frère, anciens résistants, en lice pour les Oscars », sur France 3 Normandie (consulté le ).
  14. Mathieu Girard, « À 93 ans, Colette porte l’histoire de son frère mort dans les camps jusqu’aux Oscars », sur Liberté - Le Bonhomme libre, Actu.fr, (consulté le ).
  15. Michaël Mélinard, « Oscars 2021. Colette Marin-Catherine, une résistante à Hollywood », sur L'Humanité, (consulté le ).
  16. Maxence Gorregues, « Oscars 2021 : avec Colette, une habitante de Caen remporte une statuette pour la Mémoire », sur Liberté - Le Bonhomme libre, Actu.fr, (consulté le ).

Voir aussi

Bibliographie

  • Lucie Fouble, « Colette Marin-Catherine », dans Laurent Thiery (dir.), Le livre des 9 000 dĂ©portĂ©s de France Ă  Mittelbau-Dora, Le Cherche-Midi, , 2456 p. (ISBN 2-7491-6473-7)

Liens externes

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