Claude Lebois
Claude Lebois (-), élève de l'école de Cluny puis professeur de sciences, est un pionnier de l'enseignement technique.
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(à 73 ans) Saint-Étienne |
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Il devint inspecteur général, après avoir été fondateur, directeur et organisateur d'écoles professionnelles, appelées « écoles pratiques », à l'époque de la deuxième révolution industrielle.
Il est l'auteur d'ouvrages scolaires, en particulier relatifs à l'électricité industrielle.
Son action s'est longtemps exercée dans le département de la Loire et ses alentours, puis a pris une dimension nationale.
Biographie
Origines
Claude Lebois est né le 6 décembre 1845 à Chissey-lès-Mâcon (Saône-et-Loire).
Dans cette commune bourguignonne, sa famille habite le hameau de Prayes[1]. En 1846, elle est composée de son père, François, meunier ; de sa mère Pierrette ; de sa sœur, Catherine (5 ans) et de son frère, Joseph (3 ans)[2]. Claude Lebois passe sa jeunesse à Chissey-lès-Mâcon, comme l'établissent les recensements jusqu'en 1861[3].
Il a probablement connu les instituteurs dont les noms apparaissent dans les recensements de cette petite localité : Pierre Charcosset (1851), André Després (1856), Claude Berthier (1861)[4].
Sa scolarité secondaire n'est pas connue. Il est possible qu'il l'ait effectuée à Chalon-sur-Saône ou à Mâcon[5].
Parcours
En 1865, il est nommé maître élémentaire au collège de Chalon-sur-Saône[6]. Le maître élémentaire enseignait dans les classes élémentaires des lycées et collèges aux élèves destinés à poursuivre leurs études, contrairement à ceux des écoles primaires, qui quittaient l'école à treize ans[7].
On trouve la trace du passage de Claude Lebois à Chalon-sur-Saône dans le recensement de 1866 qui le mentionne comme «maître d'études»[8]. Le principal du collège s'appelait Benoît Duparay[8]. Le personnel enseignant comptait un professeur et cinq autres maîtres d'études[8].
Formation Ă l'Ă©cole de Cluny
En 1866, à l'âge de 21 ans, Claude Lebois entre à l'École normale d'enseignement spécial de Cluny[9] qui est une école technique nouvellement créée par le ministre Victor Duruy[10] faisant suite à la loi du 21 juin 1865 organisant l'enseignement secondaire spécial[11].
Ce dernier se distingue de l'enseignement des «humanités» et se destine à ceux qui sont « pressés d'entrer dans la vie active »[12]. Victor Duruy le définit de cette manière : « Cet enseignement particulier fut secondaire, parce qu'il s'élevait fort au-dessus des préoccupations de l'école primaire, et je l'appelai spécial, mot qu'on ne comprend plus aujourd'hui, bien que la circulaire d'exécution établisse nettement que, si l'enseignement classique est le même partout, l'enseignement spécial doit varier dans beaucoup de localités, selon le caractère de l'industrie dominante. C'est pour cela que les programmes furent très étendus, afin que chaque école pût y prendre ce qui convenait le mieux à ses besoins : par exemple, à Chartres, centre agricole, les applications de la chimie, de la physique et de la mécanique, utiles “au bon ménage des champs” ; à Saint-Étienne, l'exploitation des mines, la métallurgie et la teinturerie ; à Lyon, le travail de la soie et les opérations commerciales »[12].
- Les fonds manquant pour les créations qu'appelait ce nouvel enseignement, on ne put installer la première école à Paris mais seulement à Cluny, « petite ville morte de Bourgogne, à 23 km de Mâcon, loin de toute voie ferrée (...) mais on lui offrit là l'ancienne abbaye des bénédictins »[11]. La plupart des élèves devaient bénéficier d'une bourse leur permettant de séjourner à Cluny une fois leur recrutement assuré. Le ministre, Victor Duruy demanda aux préfets d'intéresser à son œuvre les conseils généraux pour que chaque département crée une ou deux bourses destinées à ces élèves[11].
À la fin de la première année de fonctionnement, Ferdinand Roux, directeur de l'École normale de Cluny, rend compte au ministre Victor Duruy[13] des résultats obtenus par les élèves. Il fait référence à deux séries d'épreuves qui ont fourni un classement : celles de la rentrée et celles de fin d'année. Claude Lebois est d'abord modestement classé 70e sur 83, puis finalement 38e bien que pour des raisons de santé il n'a pu participer aux examens généraux[14].
Professeur en Ă©coles normales
À l'issue de sa formation, pourvu du « brevet de Cluny », Claude Lebois est nommé professeur de science à l’École normale de Montbrison[17] de 1868 à 1875, où il profita des monts du Forez pour herboriser et découvrir quelques plantes rares[18], puis à celle de Grenoble de 1875 à 1879[6] - [9] - [19].
Entre ces deux affectations, il a fait campagne avec les Mobiles de Saône-et-Loire en 1870[6], lors de la guerre franco-prussienne. Il a participé à des opérations liées au siège de Paris, selon le Bulletin mensuel de l'Association amicale des anciens élèves de l'École normale spéciale rédigé, juste après les faits, en juillet 1871[20].
Famille
Le 28 septembre 1871, à Brancion[21] en Saône-et-Loire, Claude Lebois épouse Jeanne Boyaud (née le 4 juillet 1853, à Brancion)[22] - [23] - [24].
Ils ont trois filles : Jeanne (8 ans en 1881 : née en 1873 ?)[23], Claudine (née le 25 mars 1878 à Grenoble)[25] et Lucie (née le 2 mai 1889 à Saint-Étienne)[26].
- La famille a habité route d'Eybens à Grenoble (en 1878) ; à côté de l'école pratique d'industrie à Saint-Chamond (1879-1882) ; à l'école professionnelle, rue Fontainebleau[27], à Saint-Étienne dans les années 1880-1890.
Une carrière dans l'enseignement technique
C'est quatorze ans après son entrée dans l'Instruction publique (1865), où il a exercé principalement comme professeur de science en école normale d'instituteurs, que commence la carrière de Claude Lebois dans l'enseignement technique.
Saint-Chamond
En 1879, il répond à l'appel du maire de Saint-Chamond, Marius Chavanne, qui souhaite fonder une école professionnelle municipale[9] destinée à former des ouvriers pour les usines de la vallée du Gier. L'école est créée avec trois professeurs. Claude Lebois la dirige pendant trois ans.
- « L'école ouvrait ses portes le 3 novembre 1879, sous le nom d'École professionnelle et avec un programme d'enseignement nettement pratique, bien qu'elle n'eût d'existence légale que dans le cadre des écoles primaires supérieures. Son but était ainsi défini ; préparer d'une part des candidats aux écoles d'Arts et métiers, à l'École centrale lyonnaise, et d'autre part des contremaîtres et des dessinateurs pour les différentes industries locales », explique un historique de l'école[28].
- « Cette école a débuté simplement, elle a ouvert ses portes modestement. Une affiche placée 5 ou 6 jours seulement avant le avisait la population de sa création et, au jour dit, 22 élèves se présentaient. Ils étaient reçus par le directeur entouré de 3 professeurs et de 4 contremaîtres », témoignait le doyen des Anciens élèves de l'école en 1929[28].
En 1950, l'instituteur Mathieu Fournier (1868-1963), qui a connu Claude Lebois avant même d'avoir été admis à l'école normale d'instituteurs de Montbrison en 1885, a laissé un témoignage de l'école naissante ainsi qu'un portrait de l'homme :
- « Comme elle était modeste et pauvre, à ses débuts, cette École professionnelle, dont nous admirons aujourd'hui les vastes bâtiments, le bel outillage et qui regorge d'élèves ! Oui, mais il y avait là MM. Lebois, Dailloux, Paccard, Garapon, qui logeaient alors dans de petites maisons situées dans le Jardin public, à la place des serres. Une école est avant tout une âme et ces maîtres brûlaient alors du désir de répandre la science qu'ils détenaient. J'ai connu, à ses débuts, M. Lebois. Tête pesante, penchée, des yeux d'un beau noir, une chevelure ample qui lui tombait presque sur les épaules, toujours en redingote et gibus, il avait l'allure lente du penseur, mais un air de modestie, un sourire parfois, faisaient oublier sa gravité. Homme de grande classe, ferme et tenace dans ses volontés, bravant la décision d'un ministre, s'il le fallait, il avait des dons incomparables d'organisateur. Il ne resta que trois ans à Saint-Chamond, mais il y avait laissé des traces de sa valeur. Sa gloire est d'avoir été, dans le domaine de l'électricité, ce que fut Paul Bert, dans celui des sciences naturelles : un vulgarisateur de génie »[29].
Saint-Étienne
Nommé ensuite, en 1882, directeur, de l'École primaire supérieure professionnelle de Saint-Étienne qui devient l'École Pratique d'Industrie, en 1892, Claude Lebois reste à ce poste jusqu’en 1897[6] - [9].
Cette Ă©cole avait ouvert ses portes le 10 septembre 1882 dans un site temporaire, comme le raconte l'instituteur Mathieu Fournier :
- « La destinée voulut, qu'en 1884, je revisse M. Lebois, à Saint-Étienne, dans l'école provisoire fondée par lui, rue Michelet[30], dans un immeuble bourgeois, aujourd'hui disparu. L'atelier, qui comprenait un tour, une perceuse, une raboteuse, mus par un moteur à huile lourde, et quelques étaux, était installé dans un ancien salon orné de belles glaces scellées dans le mur, qui nous renvoyaient nos images et celle du contremaître, M. César, beau comme un dieu, dans sa barbe d'or ! C'était un ancien mécanicien de la marine qui avait conservé la démarche propre aux matelots »[29].
Un nouvel établissement fut construit en 1885, au Chantegrillet, rue Fontainebleau [actuelle rue Étienne-Mimard][31], pouvant accueillir trois cents élèves qui étudiaient le forgeage, l'ajustage, le tournage des métaux, l'armurerie, l'électricité industrielle, le modelage, la sculpture[32].
En août 1888, le conseil général de la Loire dresse un tableau de l'école professionnelle de garçons de la rue Fontainebleau :
- « Cette école a pleinement réussi. À son ouverture, le 17 novembre 1882, elle comptait 54 élèves ; un an après, elle en avait 107 ; au 1er janvier dernier, le nombre des élèves était de 282, dont 8 boursiers. En principe, l'école ne prépare des candidats à aucun examen ; elle a pour but de donner aux jeunes gens les connaissances théoriques et pratiques nécessaires pour entrer soit dans l'industrie, soit dans le commerce. Exceptionnellement, elle présente quelques candidats aux Écoles d'arts et métiers »[33].
Le fonctionnement et le contenu des études sont décrits avec précision :
- « Le personnel se compose d'un directeur et de 10 maîtres, dont 6 s'occupent plus spécialement de l'enseignement et 4 de la surveillance. Pour l'enseignement des travaux manuels, il y a un chef d'ateliers, 5 contre-maîtres complètement attachés à l'école et 2 contre-maîtres ne donnant que quelques heures de leçons par semaine. Le dessin artistique est confié à un professeur spécial. Tout ce personnel est capable et en général très dévoué à la prospérité de l'établissement. Les élèves de l'école sont tous externes et se répartissent en quatre années d'études. Ils se montrent en général dociles, soumis et studieux. La discipline est solidement établie ; les punitions sont rares et peu importantes. L'assiduité est très satisfaisante ; les absences sont de 3 à 5%. Les absences non justifiées n'atteignent pas 1%. Installée dans un local vaste et parfaitement aménagé, l'école possède tout ce qui lui est nécessaire au point de vue matériel. Les collections scientifiques et l'outillage sont aussi complets qu'on puisse le désirer. En résumé, la situation est très satisfaisante sous tous les rapports »[33].
Autres Ă©coles
Claude Lebois est également le fondateur des écoles professionnelles de Firminy, Rive-de-Gier, Le Puy, Thiers, Roanne, Clermont et Vienne[28]. Il n'y a pas enseigné mais en a été l'organisateur.
- Firminy, Ă©cole pratique.
- Rive-de-Gier, Ă©cole pratique.
- Roanne, Ă©cole pratique, 1902.
- Roanne, Ă©cole pratique.
- Le Puy, Ă©cole d'industrie.
- Vienne, Ă©cole pratique.
L'inauguration de l'école pratique de Firminy a vu la présence de trois ministres, le 13 janvier 1902 : Millerand (Commerce), de Lanessan (Marine), général André (Guerre)[34] - [35]. La présence de Claude Lebois est notée par certains journaux.
Ainsi, le quotidien du soir Le Petit Parisien écrit : « Devant l'école sont groupés les élèves et les membres du conseil de perfectionnement : MM. Lebois, Chomienne, Marcheras ; les professeurs, les contremaîtres et l'architecte, M. Rousset»[34]. Le journal Le Stéphanois rapporte qu'en réponse au maire, Marcellin Souhet, Millerand évoque «une inauguration d'école professionnelle, écoles encore nouvelles en France, mais dont on fait le plus vif éloge »[36].
Claude Lebois a préparé ces créations par des visites «aux écoles professionnelles françaises les plus importantes et même quelques écoles allemandes. Un peu plus tard, il va à Crefeld[37]», selon Edmond Labbé (1868-1944), directeur général de l'enseignement technique dans les années 1920 et 1930[28].
La précocité de son action (Saint-Chamond, 1879), sa réussite à Saint-Étienne (1882-1897) et son rayonnement dans la région sont reconnus[38] et valent à Claude Lebois une promotion à l'échelon national.
Paris
En 1898, il est nommé au poste d’inspecteur des écoles pratiques de la ville de Paris. En 1904, il est promu inspecteur général des écoles pratiques de commerce et d'industrie[6] - [9] et, en 1908, inspecteur général de l'enseignement technique[39], « chargé de la direction des sections normales de l'enseignement technique »[40]. Il faut noter qu'à cette époque, et jusqu'en 1920, cette inspection ne dépend pas du ministère de l'Instruction publique mais du ministère du Commerce et de l'Industrie[41].
Malgré ses responsabilités nationales, Claude Lebois a été autorisé à résider à Saint-Étienne. Il prend sa retraite en 1911[28] - [40].
La guerre et la rééducation des blessé, la mort
Pendant la guerre, il est chargé de mission dans le département de la Loire et départements limitrophes par le ministère du Commerce et de l'Industrie. Le 9 mars 1915, ce dernier a publié une circulaire sur le droit à la rééducation pour les blessés militaires : « Il s'agit là d'une œuvre de justice sociale destinée à fournir aux invalides de la guerre les moyens de recouvrer leur indépendance par le travail »[42].
À ce titre Claude Lebois fonde, à Saint-Étienne, une école de rééducation des mutilés[43] - [44].
Il meurt le 28 mars 1919, à Saint-Étienne[45].
Le manuel d'électricité industrielle (1902)
En 1902, Claude Lebois fait paraître son Cours élémentaire d'électricité industrielle. Dans la préface, il évoque cette science nouvelle, l'électrotechnique, dans le contexte de la deuxième révolution industrielle, et la nécessité de son apprentissage scolaire.
- « Depuis une trentaine d’années, les applications de l’électricité industrielle ont pris un développement si considérable qu’on peut dire que dans presque toutes les usines, fabriques ou ateliers, on utilise maintenant l’électricité. L’étude élémentaire de ce merveilleux agent, qui se prête avec tant de commodité à tous les besoins, s’est donc imposée dans nos écoles, car si dans les machines à eau et à vapeur, l’ouvrier intelligent voit et peut comprendre, tout reste mystérieux pour lui dans une machine électrique, s’il se borne à en examiner les organes. Sans connaissances spéciales, on peut copier une machine à vapeur, mais non une dynamo. Mais l’étude de l’électricité est difficile pour des jeunes gens peu habitués aux choses abstraites. Contrairement à ce qu’on croit souvent, on ne peut l’apprendre par la pratique seule. On n’en découvre pas les lois en démontant et en remontant une machine ou un appareil électrique ; il faut les étudier sur des livres ou avec un professeur »[46].
Son manuel, basé sur une longue expérience de formation à l'École pratique de Saint-Étienne, a connu un large succès avec au moins quatorze éditions jusqu'en 1919.
- « Le modeste ouvrage que nous présentons aujourd’hui au public et aux professeurs des écoles pratiques et professionnelles est la reproduction, avec quelques modifications, du cours des dernières années, que j’ai fait depuis 1887 jusqu’en 1902 aux élèves de 3e et 4e années de l’École pratique d’industrie de Saint-Étienne et du cours public professé le soir à des ouvriers ou monteurs électriciens. Cette expérience déjà longue m’a montré ce qu’on pouvait enseigner en un an ou deux, et comment on devait présenter ces notions à des jeunes gens qui ne possèdent que des connaissances très élémentaires en mathématiques. À défaut d’autre mérite, on accordera du moins à ce cours celui d’avoir été pratiqué pendant l’intéressante période du développement de la science électrotechnique »[46].
La pédagogie de l'enseignement technique
Un enseignement spécial
Dans le dernier quart du XIXe siècle et jusqu'en 1914, l'essor de l'enseignement technique s'est manifesté par les demandes croissantes de création d'écoles pratiques ou professionnelles faites par les municipalités. Souvent associés, au départ, à des écoles primaires supérieures mais s'en distinguant par le contenu des études, ces établissements délivrent un enseignement spécial :
- Leurs maîtres proviennent d'origine très diverses : sections normales, enseignement primaire, secondaire ou supérieur. Ils ont dû s'adapter à un enseignement inédit et appliquer dans leurs leçons des méthodes nouvelles[47].
- Leurs élèves «sont souvent moins privilégiés que leurs camarades des écoles primaires supérieures, des lycées ou des collèges»[47].
Selon Claude Lebois, les élèves : « doivent, en trois ou quatre années, acquérir tous les éléments nécessaires à leur instruction générale et à leur éducation professionnelle. Le nombre des heures d'études est très réduit. Après avoir passé la majeure partie de sa journée à l'atelier, l'enfant est peu disposé à travailler encore chez lui, où parfois il ne trouve d'ailleurs pas le calme et le confort indispensables à tout effort de l'esprit. Les leçons d'enseignement général doivent donc être réduites à leur strict minimum. Nous sommes cependant loin de penser que l'instruction générale doive être négligée ; mais, dans nos écoles, cette instruction n'apparaît pas comme une fin : elle est subordonnée au but même de notre enseignement et doit tendre uniquement à faciliter, en l'éclairant, l'apprentissage de la profession »[47].
Des méthodes nouvelles
Claude Lebois évoque le cas de l'enseignement de la mécanique qui : « offre de sérieuses difficultés dans nos écoles» (...) «il est à craindre que nos élèves, attirés d'abord par cet enseignement, qui paraît devoir leur donner l'explication de tout ce qui se passe sous leurs yeux à l'atelier, ne soient rebutés, dès les premières leçons, par des raisonnements théoriques qu'ils ne peuvent généralement pas s'assimiler »[47].
- « Il est donc nécessaire de supprimer les démonstrations qui pourraient offrir quelque difficulté. Une vérification expérimentale, faite sous les yeux de l'élève, frappe, d'ailleurs, davantage son imagination et grave plus profondément dans son esprit les principes qu'il doit connaître. Les démonstrations, jugées indispensables par le professeur, doivent être faites sur des exemples numériques simples, avant d'être généralisées par l'emploi des notations algébriques. De nombreuses applications, portant sur les machines de l'atelier ou sur des faits que les élèves ont pu observer, préciseront les formules trouvées et leur feront comprendre, mieux que toute explication, si claire qu'elle soit, l'importance relative des diverses grandeurs figurant dans ces formules qui sont l'expression des lois de la mécanique »[47].
Le recours au dessin est considéré comme un opérateur pédagogique par Claude Lebois :
- « De plus, l'emploi des méthodes graphiques facilitera beaucoup la tâche du professeur. Ces méthodes lui permettront, en effet, de traiter un certain nombre de questions dont la solution mathématique est au-dessus du niveau de nos élèves ; elles obligeront aussi ces derniers à dessiner exactement, à raisonner le dessin qu'ils ont à faire et à mieux se rendre compte des rapports qui existent entre les données et les résultats »[47].
Bilan de son Ĺ“uvre
Lors de la session de 1914 du conseil supérieur de l'enseignement technique, Henri Gabelle, directeur au ministère du commerce, de l'industrie[48] fait le constat suivant témoignant du rôle éminent de Claude Lebois :
- « (On) a fait remarquer que, pendant un an, les écoles nationales d'arts et métiers n'ont pas été inspectées par un inspecteur permanent. C'est qu'en effet, depuis le départ de M. Lebois, nous n'avions plus dans les cadres de l'inspection permanente un homme qualifié pour faire l'inspection générale des écoles nationales d'arts et métiers »[49].
À la mort de Claude Lebois, en 1919, la Revue générale d'électricité écrit : « Avec lui disparaît un des premiers et des plus éminents organisateurs de l'enseignement industriel en France. De bonne heure, il avait pressenti l'importance future des écoles d'apprentissage. Successivement, il fut appelé à créer ou à organiser l'enseignement technique à Saint-Chamond, à Saint-Étienne ; puis il fut appelé, comme inspecteur des écoles pratiques en France, à créer des écoles similaires dans les régions industrielles. En 1910, le ministère du Commerce lui confiait la mission délicate d'organiser à Paris l'École normale supérieure d'enseignement technique qui devait préparer des professeurs orientés plus directement vers un programme approprié aux besoins immédiats de l'industrie et du commerce »[50].
En octobre 1929, lors de l'hommage rendu à Claude Lebois à Saint-Chamond, le maire Antoine Pinay déclare :« Le nom de M. Lebois est désormais lié à l'histoire de l'enseignement technique». Le récent congrès de la Fédération nationale, tenu en août dernier à Saint-Étienne, rendit hommage à plusieurs reprises à ce précurseur d'un enseignement qui contribua pour une large part à la réputation de l'industrie saint-chamonaise. Car j'estime, messieurs, que ce n'est diminuer ni le mérite, ni le rôle des cadres supérieurs, que d'associer et d'envelopper, dans le même sentiment de gratitude, l'effort intellectuel qui conçoit, avec celui qui interprète, et l'effort manuel qui exécute »[28].
Distinctions et hommages
Claude Lebois a été fait officier de l'Instruction publique le 30 décembre 1888 et chevalier de la Légion d'honneur le 30 mai 1898[6]. En 1911, il reçoit la rosette d'officier de la Légion d'Honneur[28].
En 1925, le congrès des œuvres post-scolaires organise un hommage devant le monument de Claude Lebois à Saint-Étienne[51]. Ce monument - un buste - avait été installé en 1922 dans la cour d'honneur de l'école pratique ; il est aujourd'hui conservé et exposé au lycée Claude-Lebois à Saint-Chamond.
Le 27 octobre 1929, une cérémonie rend honneur à Claude Lebois à l'occasion du cinquantenaire de la fondation de l'école pratique d'industrie de Saint-Chamond[28]. Et en 1943, l'école prend le nom de «collège Claude Lebois».
Une rue porte son nom à Saint-Étienne[52]. Le lycée public de Saint-Chamond a conservé le nom de Claude Lebois attribué au collège en 1943[53].
Anecdote
Claude Lebois était membre d'honneur du groupe espérantiste de Saint-Étienne, depuis sa fondation[54].
Publications
Ouvrages
- Cours de mathématiques théorique et pratique, à l'usage des élèves des écoles normales primaires et des écoles primaires supérieures, 2e partie. Notions d'algèbre, Saint-Étienne, impr. de Montagny, 1874.
- Étude mécanique de la platine de fusil, Saint-Étienne, impr. de Théolier, 1896 ; extrait des Annales de la Société d'agriculture, industrie, sciences, arts et belles-lettres du département de la Loire.
- Les Métiers à tisser le ruban : description, étude des mouvements, réglage, Saint-Étienne, impr. A. Waton, 1899.
- Rapport sur les moyens de retenir les élèves dans les écoles pratiques d'industrie, Congrès international de l'enseignement technique (Paris, 6 août 1900), 1900.
- Cours élémentaire d'électricité industrielle, (deux volumes), Paris, C. Delagrave, 1902 et 1908. Quatorzième édition en 1919.
- L'A.B.C. de l'électricité industrielle, éd. Librairie Delagrave, 1916[55] - [56].
Préfaces
- Notions élémentaires sur la métallurgie et le travail des métaux ferreux, E. Marcon, Paris, C. Delagrave, 1909.
- Technologie Ă©lectrique, Le Souhaitier, Paris, C. Delagrave, 1911.
- Mécanique, J. Roumajon, Paris, C. Delagrave, collection : Bibliothèque des écoles pratiques de commerce et d'industrie, 1911.
- L'Usine, J.-B. Maniguet, Ă©d. Librairie Loubat & Cie, Paris, 1912[57].
- Constructions métalliques. Résistance des matériaux, matériaux, assemblages, poutres, colonnes, planchers, escaliers, combles, ponts, par J. Bonhomme, E. Silvestre, Paris, H. Dunod et E. Pinat, 1913.
Bibliographie
- Loire : dictionnaire, annuaire et album, éd. H. Jouve (Paris), 1899, Claude Lebois : notice et portrait, non paginé.
- Bulletin administratif de l'instruction publique, (1850-1899).
- Bulletin mensuel de l'Association amicale des anciens élèves de l'École normale spéciale.
Notes et références
- Archives départementales de Saône-et-Loire, état civil de la commune de Chissey-lès-Mâcon [en ligne].
- Archives départementales de Saône-et-Loire, recensement de la commune de Chissey-lès-Mâcon, 1846 [en ligne].
- Archives départementales de Saône-et-Loire, recensements de Chissey-lès-Mâcon de 1836 à 1936.
- Archives départementales de Saône-et-Loire, recensements de Chissey-lès-Mâcon, 1851, 1856, 1861.
- Claude Lebois était-il bachelier ? En principe, pour être nommé maître élémentaire, il fallait détenir un baccalauréat. Mais on ne trouve aucune trace à ce sujet concernant Claude Lebois.
- Loire : dictionnaire, annuaire et album, Ă©d. H. Jouve, Paris, 1899.
- «Notre enquête sur l'école unique», Charles Bruneau, La Pensée française : organe d'expansion française et de propagation nationale, 24 novembre 1924.
- Archives départementales de Saône-et-Loire, recensement de 1866, Chalon-sur-Saône, quartiers Saint-Laurent, Sainte-Marie, Saint-Vincent, p. 75-76. Il y a donc une erreur dans la notice biographique de Louis Challet qui affirme que Claude Lebois était au collège de Mâcon en 1865.
- Biographie de Claude Lebois par Louis Challet, sans date.
- L'école de Cluny est créée par le décret du 28 mars 1866. Cf. Mémoires & comptes-rendus de la Société scientifique et littéraire d'Alais (Alès, Gard), 1885.
- La grande encyclopédie : inventaire raisonné des sciences, des lettres et des arts, tome 15, 1885-1902, p. 380.
- Victor Duruy, Notes et souvenirs (1811-1894), tome 1, Ă©d. 1901, p. 255-256.
- À cette époque, l'École était sous le contrôle direct du ministre (en 1871, elle passa sous le contrôle du rectorat de Lyon puis de l'inspection de Mâcon). Victor Duruy faisait du sort de l'école une question personnelle ; il échangea 582 correspondances avec Ferdinand Roux. Cf. «Un ministre méconnu en Saône-et-Loire : Victor Duruy et l'École normale spéciale de Cluny», Alain Dessertenne, 1990.
- «Rapport du Directeur de l'École normale de Cluny sur les notes obtenues par les élèves pendant l'année», Bulletin administratif de l'instruction publique, tome 8, n° 148, 1867, p. 162-167.
- «École normale de Cluny, nomination de boursiers de l'État», 21 octobre 1867, Bulletin administratif de l'instruction publique, tome 8, n° 155, 1867, p. 447.
- Le Courrier de SaĂ´ne-et-Loire, 7 novembre 1867.
- «M. Lebois, élève sortant breveté de l'école normale de Cluny, est chargé de l'enseignement scientifique à l'école normale primaire de Montbrison (emploi nouveau)», 21 octobre 1868, Bulletin administratif de l'instruction publique, tome 10, n° 186, 1868, p. 412.
- Cf. notice «Claude Lebois», in Annales des sciences physiques et naturelles, d'agriculture et d'industrie, publiées par la Société d'agriculture de Lyon, janvier 1901, p. 439.
- La notice biographique de Louis Challet comporte une erreur sur les dates d'affectation en écoles normales : en réalité, Claude Lebois est resté à Montbrison de 1868 à 1875, puis a passé quatre ans à Grenoble, de 1875 à 1879. Les sources de ces dates se trouvent dans le recensement de Montbrison en 1872, page 53 et dans plusieurs numéros du Bulletin mensuel de l'Association amicale des anciens élèves de l'École normale spéciale, notamment celui du 15 janvier 1875 et celui du 15 novembre 1875.
- Cf. Bulletin mensuel de l'Association amicale des anciens élèves de l'École normale spéciale, 1er juillet 1871.
- Mais les deux publications de mariage avaient été faites à Montbrison. Cf. archives départementales de la Loire, état civil de Montbrison, 1871.
- Archives départementales de Saône-et-Loire, état civil de la commune de Brancion, mariages, 1871.
- Archives départementales de la Loire, recensement de Saint-Chamond, 1881, Mairie/Hôtel de ville.
- Cf. Bulletin mensuel de l'Association amicale des anciens élèves de l'École normale spéciale, 1er octobre 1871.
- Archives départementales de l'Isère, état civil de Grenoble, 1878.
- Archives municipales de Saint-Étienne, état civil, 1889. Jeanne Pierrette Lucie s'est mariée le 22 septembre 1913 à Saint-Étienne avec Léon Claude Marius Tachon. Elle est décédée à Nancy le 27 mars 1971.
- Devenue la rue Mimard en octobre 1944.
- Commémoration du cinquantenaire de l'école pratique d'industrie de Saint-Chamond, sous la présidence de M. Edmond Labbé, directeur général de l'enseignement technique, organisée par l'association des Anciens élèves, sous les auspices d'Antoine Pinay, maire de Saint-Chamond, 27 octobre 1929 : plaquette conservée aux archives municipales de Saint-Chamond.
- Mathieu Fournier, Tableaux de la vie saint-chamonaise, Ă©d. Librairie A. Bordron, Saint-Chamond, 1949-1950, p. 110-111.
- Ancienne rue Saint-Denis.
- Site du lycée Étienne Mimard, historique.
- Archives municipales de Saint-Étienne, «École nationale professionnelle de garçons».
- Rapports et délibérations / Conseil général de la Loire, août 1888, p. 596-597.
- Le Petit Parisien, 14 janvier 1902.
- Le Journal, 14 janvier 1902.
- Le Stéphanois, 14 janvier 1902, p. 3.
- La ville de Crefeld (auj. Krefeld) possédait un enseignement spécial pour les industries textiles. Une école y avait été fondée dès 1855. Cf. La France commerciale et industrielle comparée aux puissances étrangères, Armand Massip, 1884, p. 36.
- Par exemple dans l'Annuaire de la jeunesse pour l'année 1890, de Henry Vuibert (1857-1945), p. 56 : «École remarquablement organisée».
- Bulletin de l'enseignement technique , 1908, p. 133.
- Décret du 20 août 1911. Cf. Bulletin de l'enseignement technique , 1911, p. 285.
- Cf. Guy Capalt, L'inspection générale de l'enseignement technique, 1806-1980, quatre vol., L'Harmattan, 2016.
- Cité par Aurélie Brayet, Revivre : victimes de guerre de la Grande Guerre à Saint-Étienne, 1914-1935, publications de l'université de Saint-Étienne, 2006, p. 175.
- Note biographique manuscrite relative Ă Claude Lebois, archives municipales de Saint-Chamond, 1 Rsc 20.
- S'agit-il de l'École des blessés militaires de Saint-Étienne, fondée en mai 1915, au 17 rue Benoît Malon ? À la même époque, une École professionnelle des blessés militaires du département de la Loire fut créée par le conseil général de la Loire le 13 avril 1915. Cf. Aurélie Brayet, Revivre : victimes de guerre de la Grande Guerre à Saint-Étienne, 1914-1935, publications de l'université de Saint-Étienne, 2006, p. 176.
- Histoire des noms des rues de Saint-Étienne.
- Cours élémentaire d'électricité industrielle, vol. 1, 1902, édition de 1919, p. 1-2.
- Claude Lebois, préface au manuel de Mécanique de J. Roumajon (éd. Delagrave, 1914).
- Journal officiel de la République française. Lois et décrets, 18 avril 1915.
- Séance du 30 juin 1914. Bulletin de l'enseignement technique, n° 3, 20 mars 1915, p. 103.
- Revue générale de l'électricité : organe de l'Union des syndicats de l'électricité, 5 avril 1919.
- Le Matin : derniers télégrammes de la nuit, 13 avril 1925.
- Rue Claude Lebois à Saint-Étienne.
- C'est le seul établissement scolaire ainsi dénommé.
- Paris-esperanto. Bulletin mensuel du Groupe espérantiste de Paris. Organe officiel de la Fédération espérantiste de la région parisienne, décembre 1909, p. 48.
- La Revue hebdomadaire : romans, histoire, voyages, 29 avril 1916.
- La Science à la maison et l'industrie en chambre : journal populaire illustré, Paris, décembre 1917, p. 73.
- Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse, 1912, p. 620.
Articles connexes
Liens externes
- Ressource relative aux militaires :