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Charte de l'environnement

Charte de l'environnement

Présentation
Titre Charte de l'environnement de 2004
Référence NOR:JUSX0300069L
Pays Drapeau de la France France
Type Loi constitutionnelle
Branche Droit constitutionnel, Droit de l'environnement, Libertés fondamentales
Adoption et entrée en vigueur
Législature XIIe législature
Gouvernement Raffarin III
Adoption
Promulgation
Publication

Lire en ligne

Loi constitutionnelle no 2005-205 relative Ă  la Charte de l'environnement

La Charte de l'environnement est un texte de valeur constitutionnelle. Elle est intĂ©grĂ©e en 2005 dans le bloc de constitutionnalitĂ© du droit français, reconnaissant les droits et les devoirs fondamentaux relatifs Ă  la protection de l'environnement. Elle introduit notamment dans la Constitution trois grands principes : le principe de prĂ©vention, le principe de prĂ©caution, et le principe pollueur-payeur.

Cette charte est l'aboutissement d'un projet initié et annoncé par le Président de la République française Jacques Chirac, et préparé par la Commission Coppens.

Historique

Jacques Chirac (en 2003) et Yves Coppens (en 2008).

L'annonce par Jacques Chirac du projet de Charte de l'Environnement est faite dans un discours Ă  OrlĂ©ans, le . Il a ensuite Ă©tĂ© repris comme un engagement pendant la campagne prĂ©sidentielle de 2002[1]. Le texte du projet de rĂ©vision constitutionnelle est prĂ©parĂ© pendant quatre ans par une commission particulière prĂ©sidĂ©e par le professeur Yves Coppens qui comprenait, outre lui-mĂŞme :

Le rapport est remis en avril 2005[2]. Cette commission a vu ses travaux enrichis par deux comités, l'un juridique, l'autre scientifique pour valider ou invalider certaines hypothèses. Une série de réunions publiques organisées dans toute la France ont permis aussi de recueillir l'avis des citoyens français, avec pour objet diverses thématiques liées à la Charte.

Le texte, retravaillé par le Secrétariat Général du Gouvernement et par le cabinet du Président de la République, comprend en plus de la charte une modification du préambule et de l’article 34 de la Constitution.

Le projet de loi est approuvé par l'Assemblée nationale puis le Sénat en 2004. Le Parlement a ensuite été réuni en Congrès à Versailles le et a entériné, par 531 voix contre 23 le projet de loi constitutionnelle[3].

La Charte est promulguée le par Jacques Chirac.

Contenu

La charte reprend un certain nombre de droits ou de principes dits de « 3e gĂ©nĂ©ration Â» dĂ©jĂ  consacrĂ©s dans des textes Ă  valeur lĂ©gislative ou le plus souvent dans des textes internationaux. Elle a une valeur constitutionnelle[4].

La charte contient dix articles :

« Art. 1er. - Chacun a le droit de vivre dans un environnement Ă©quilibrĂ© et respectueux de la santĂ©.

Art. 2. - Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l'amélioration de l'environnement.

Art. 3. - Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences.

Art. 4. - Toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu'elle cause à l'environnement, dans les conditions définies par la loi.

Art. 5. - Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage.

Art. 6. - Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. À cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social.

Art. 7. - Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement.

Art. 8. - L'éducation et la formation à l'environnement doivent contribuer à l'exercice des droits et devoirs définis par la présente Charte.

Art. 9. - La recherche et l'innovation doivent apporter leur concours à la préservation et à la mise en valeur de l'environnement.

Art. 10. - La prĂ©sente Charte inspire l'action europĂ©enne et internationale de la France. Â»

Elle consacre un nouveau droit individuel, celui du droit de chacun à vivre dans un environnement équilibré et respectueux de sa santé (article 1er).

Une innovation juridique rĂ©side Ă©galement dans la notion de devoir (articles 2 Ă  4 : devoir pour toutes personnes, articles 5, 6 et 10 relatifs aux autoritĂ©s publiques, articles 8 et 9 pour les secteurs concernĂ©s tels que l'Ă©ducation et la recherche), celui de prendre part Ă  la prĂ©servation de l'environnement. Ce n'est pas la première fois que la notion de devoir apparaĂ®t dans une constitution (la constitution de 1946 mentionne le devoir de travailler), mais c'est la première fois que le devoir peut prendre une valeur normative. Cela a Ă©tĂ© critiquĂ©, notamment par les dĂ©fenseurs de la conception de droit subjectif, pour qui le seul devoir qu'ait le citoyen est de respecter les droits d'autrui.

La Charte porte au niveau constitutionnel d'autres principes, qui existaient dĂ©jĂ  au niveau lĂ©gislatif, mais qui acquièrent ainsi une plus grande force. Par exemple, la responsabilitĂ© Ă©cologique, qui englobe, en lui donnant une portĂ©e plus large, le « principe pollueur-payeur Â» qui n'est pas expressĂ©ment reconnu dans la charte Ă  la diffĂ©rence du TraitĂ© CE.

Enfin, la Charte définit le principe de précaution[5]. Un soin particulier a été apporté à sa rédaction, afin d'écarter tous les abus d'interprétation qui en ont été faits dans le passé. Le libellé de l'article 5 de la Charte est ainsi différent de la rédaction traditionnelle du principe de précaution, telle qu'on la trouve dans la déclaration du Sommet de Rio ou en tête du code de l'environnement français.

Effets de la charte dans l'ordre juridique français

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Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel s’est rĂ©fĂ©rĂ© pour la première fois Ă  la Charte de l'environnement par une dĂ©cision n° 2005-514 DC du 28 avril 2005, relative Ă  la crĂ©ation du registre international français de l’immatriculation des navires. Le Conseil constitutionnel a jugĂ© que le lĂ©gislateur n’avait pas mĂ©connu le principe du dĂ©veloppement durable Ă©noncĂ© par l'article 6 de la Charte de l'environnement. Une autre dĂ©cision du 19 juin 2008 relative Ă  la loi sur les OGM, a permis au Conseil constitutionnel de censurer certaines dispositions sur la base de la charte et conjointement avec l'article 34 de la Constitution qui dĂ©finit le domaine d'intervention du lĂ©gislateur tout en rappelant que « l'ensemble des droits et devoirs dĂ©finis dans la Charte de l'environnement ont valeur constitutionnelle Â». Le Conseil ne peut toutefois pas exercer le mĂŞme contrĂ´le sur les dispositions rĂ©digĂ©es de manière prĂ©cise et sur celles qui renvoient la dĂ©finition de leurs modalitĂ©s Ă  la loi.

Dans sa dĂ©cision n°2009-599 DC du 29 dĂ©cembre 2009, le Conseil a annulĂ© les articles de loi de finances relative Ă  la contribution carbone en constatant une rupture d'Ă©galitĂ© de traitement, notamment au regard des exonĂ©rations prĂ©vues au titre des installations notamment industrielles et polluantes couvertes par le plan quotas no 2 sur la pĂ©riode 2008-2013 au motif que les quotas Ă©taient allouĂ©s Ă  titre gratuit (ConsidĂ©rant 82). Les rĂ©gimes d'exemption prĂ©vus par le lĂ©gislateur ont Ă©tĂ© ainsi considĂ©rĂ©s comme contraires aux articles 2, 3 et 4 de la Charte (ConsidĂ©rant 79) mais pas l'exemption au bĂ©nĂ©fice des DOM.

La dĂ©cision n° 2011-116 QPC (Question Prioritaire de ConstitutionnalitĂ©) du 8 avril 2011 Ă  propos de l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation a confirmĂ© l'application lĂ©gislative de la « thĂ©orie de la prĂ©occupation Â» au regard des articles 1 Ă  4 (Points 5 et 6) de la charte au regard du trouble de voisinage qui ne peut ĂŞtre Ă©voquĂ© ultĂ©rieurement par les futurs voisins puisque la responsabilitĂ© pour faute peut ĂŞtre exercĂ©e Ă  tout moment.

Dans la décision n° 2019-823 rendue , le Conseil constitutionnel fait primer le préambule de la Charte de l’environnement et le onzième alinéa du préambule de la Constitution de 1946 priment sur l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, consacrant la préservation de l’environnement comme enjeu supérieur à la liberté d'entreprendre, y compris pour les effets que les effets à l'étranger d'activités exercées en France[6].

Juridictions judiciaires

Au titre des juridictions judiciaires, la Cour de cassation a pour rôle de définir comment les conditions d'exercice de tous ces principes doivent être définies par la loi et apporter des recommandations sur les textes d'application de la Charte, pour mettre en cohérence les lois existantes.

D'ores et déjà, les tribunaux de l'ordre judiciaire de première instance ont reconnu pleinement à la Charte ses effets, en premier lieu le droit de vivre dans un environnement respectueux de la santé, conjugué au principe de précaution. Elle a notamment permis le fondement de la relaxe des faucheurs d'OGM dont la responsabilité pénale était en cause[7] (décision annulée par la cour d'appel d'Orléans).

Juridictions administratives

Concernant la juridiction administrative, dans ses premières décisions[8], le Conseil d'État a limité l'utilisation d'une ou plusieurs dispositions de la Charte comme moyen juridique invoqué[9] pour contrer directement une disposition réglementaire dans un contentieux. Il a ajouté que l'arrêté de chasse contesté était conforme, non seulement à la Charte de l'Environnement, mais également à l’article L. 110-1 du code de l’environnement.

Par une autre dĂ©cision du 3 octobre 2008, « Commune d'Annecy Â»[10], le Conseil d'État a enfin pleinement reconnu la valeur constitutionnelle de la charte. Au regard de l'article 7 de la charte, un dĂ©cret gouvernemental relatif Ă  la participation du public dans l'Ă©laboration des dĂ©cisions qui concourent Ă  la protection des lacs de montagne a Ă©tĂ© invalidĂ© faute d'avoir Ă©tĂ© dĂ©fini par la loi.

Deux décisions du Conseil d'État du 24 juillet 2009[11] ont annulé, en reportant la prise d'effet de cette annulation au 30 juin 2010 afin d'éviter que la France ne soit poursuivie pour manquement, des dispositions de deux décrets relatives aux OGM en ce qu'elles intervenaient dans un domaine que l'article 7 de la Charte attribue à la loi. L'effet contraignant de la charte est désormais évident tant pour le législatif que pour l'exécutif.

En première instance, les tribunaux administratifs ont Ă©tĂ© naturellement les premières juridictions Ă  reconnaĂ®tre la charte et sa valeur juridique. Ainsi, le juge des rĂ©fĂ©rĂ©s d'un tribunal administratif a reconnu dès 2005 qu’en adossant Ă  la Constitution une Charte de l’environnement qui proclame dans son article 1er que « Chacun a le droit de vivre dans un environnement Ă©quilibrĂ© et respectueux de la santĂ© Â», le lĂ©gislateur a nĂ©cessairement entendu Ă©riger le droit Ă  l’environnement en « libertĂ© fondamentale Â» de valeur constitutionnelle[12].

Effets de la charte dans l'administration française

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Article connexe : Administration française.

L'article 6 de la Charte de l’environnement donne une orientation incontournable : « Les politiques publiques doivent promouvoir le dĂ©veloppement durable Â». L'administration française doit par consĂ©quent changer de culture et de mentalitĂ© pour arriver Ă  une dynamique concrète de changement en faveur du dĂ©veloppement durable sous toutes ses formes. Le dĂ©veloppement durable Ă  travers une meilleure gestion des ressources comme des dĂ©penses sur le long terme permet de lutter contre les formes de gaspillages Ă©conomiques et environnementaux des administrations publiques comme privĂ©es.

Comme l'indique l'action 21 du SĂ©minaire gouvernemental du 23 mars 2005 qui visait Ă  Adapter les procĂ©dures administratives et politiques Ă  la Charte de l’environnement, un document expliquant les notions juridiques essentielles de la charte Ă  destination des administrations publiques a Ă©tĂ© Ă©laborĂ©. Un groupe de travail a Ă©tĂ© créé par la DĂ©lĂ©gation interministĂ©rielle au dĂ©veloppement durable en vue de proposer des approches, des mĂ©thodes et les procĂ©dures nĂ©cessaires Ă  la mise en Ĺ“uvre du principe de prĂ©caution (article 5 de la Charte de l’environnement, prĂ©cision de la notion de « risques graves et irrĂ©versibles Â»). Bilan des mesures adoptĂ©es en 2005 dĂ©taille le contenu des engagements de l'État français. La loi de programmation no 2009-967 du 3 aoĂ»t 2009 dite Grenelle 1 consacre la notion d'exemplaritĂ© de l'État par son article 48.

À l'échelon local, les collectivités se sont engagées dans l'approche agenda 21 qui illustre aussi l'action concrète d'une démarche de développement durable. Celle-ci va en s'approfondissant à l'exemple de la communauté d'agglomération de Bourges [1] dont les services sont les premiers à avoir été certifiés en matière de qualité, de sécurité, d'environnement et d'éthique (QSEE) comme une entreprise en novembre 2006 au terme de 18 mois de procédure.

Sans conteste, la dĂ©marche de dĂ©veloppement durable concourt Ă  la modernisation in concreto des administrations publiques françaises. La dĂ©marche des achats durables ou achats « verts Â» en est une illustration pour l'État comme les collectivitĂ©s locales. Toutes ces administrations publiques responsables de l'intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral doivent dĂ©sormais plus que jamais rĂ©pondre sur le terrain Ă  la demande de citoyens dont les prĂ©occupations voire exigences environnementales montent en puissance.

La dĂ©marche de Grenelle de l'environnement initiĂ©e par le gouvernement en 2007 peut constituer une relance de l'implication des administrations françaises au service des 33 chantiers opĂ©rationnels ouverts en 2008 au terme des rapports de leurs comitĂ©s. Cette quatrième phase tournĂ©e vers la mise en Ĺ“uvre, sera pour ces administrations l'occasion de renouveler leurs engagements concrets et opĂ©rationnels dans la mise en Ĺ“uvre de la charte pour l'environnement. La gestion de l'efficacitĂ© Ă©nergĂ©tique des bâtiments publics (chantier no 3) ou encore des chantiers no 4 et no 28 oĂą État et collectivitĂ©s locales doivent fixer les modalitĂ©s de leur exemplaritĂ© environnementale.

Outre l'administration, les entreprises publiques poussées sans doute par le Grenelle de l'environnement ont adopté en avril 2008 une charte du développement durable qui les pousse désormais à inscrire cette priorité dans leur stratégie. L'impact est également visible sur les entreprises qui sont de plus en plus nombreuses à rédiger leur propre charte. Une dernière circulaire du premier Ministre du 3 décembre 2008 confirme la volonté de l'État d'aborder plus systématiquement les critères environnementaux dans ses achats pour qu'ils deviennent durables.

Notes et références

  1. Gilles Bresson, « Chirac, chantre du tout-Ă©cologique.. Â», LibĂ©ration,‎ (lire en ligne)
  2. Coppens 2005
  3. « Congrès du Parlement - sĂ©ance du 28 fĂ©vrier 2005 Â», sur www.assemblee-nationale.fr
  4. Voir notamment le commentaire de la dĂ©cision n° 2008-564 DC aux Cahiers du Conseil constitutionnel : « En faisant rĂ©fĂ©rence dans le PrĂ©ambule de la Constitution « aux droits et devoirs dĂ©finis dans la Charte de l’environnement de 2004 Â» et en plaçant ainsi cette Charte sur le mĂŞme plan que la DĂ©claration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et que le PrĂ©ambule de la Constitution du 27 octobre 1946, la loi constitutionnelle du 1er mars 2005 a nĂ©cessairement entendu confĂ©rer une valeur constitutionnelle Ă  la Charte. Â»
  5. Article 5. - Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage.
  6. Christophe Gueugneau, « Le Conseil constitutionnel fait primer la dĂ©fense de l’environnement sur la libertĂ© d’entreprendre Â», sur mediapart.fr, (consultĂ© le )
  7. Tribunal correctionnel d'Orléans, 09/12/2005
  8. CE, 6 avril 2006, n°283103, « Ligue pour la protection des oiseaux Â» (LPO), et 19 juin 2006, n° 282456, « Association Eaux et Rivières de Bretagne Â».
  9. (art. 1, 2 et 6)
  10. ArrĂŞt du 3 octobre 2008 n° 297931, « Commune d’Annecy Â».
  11. nos 305314 et 305315, « ComitĂ© de recherche et d'information indĂ©pendantes sur le gĂ©nie gĂ©nĂ©tique Â» (CRII GEN).
  12. TA Chalons-en-Champagne, ordonnance 29 avril 2005 no 050082805

Voir aussi

Bibliographie

Liens externes

Articles connexes