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Castle Bravo

Castle Bravo est le nom de la bombe H la plus puissante testĂ©e par les États-Unis, libĂ©rant une Ă©nergie de 15 mĂ©gatonnes, soit mille fois celle de chacune des bombes larguĂ©es sur le Japon mais moins que les 57 mĂ©gatonnes de la Tsar Bomba russe, plus grosse bombe H de l'histoire.

Castle Bravo
Le champignon atomique de Castle Bravo.
Le champignon atomique de Castle Bravo.
Puissance nucléaire Drapeau des États-Unis États-Unis
Série d'essais Opération Castle
Localisation Bikini
CoordonnĂ©es 11° 41′ 50″ N, 165° 16′ 19″ E
Date
Type d'arme nucléaire Bombe H
Puissance 15 Mt
Type d'essais Atmosphérique

Parmi les nombreux essais nucléaires réalisés au cours de la guerre froide, Castle Bravo est l'un des plus connus en raison de la contamination radiologique qu'elle cause aux populations locales ainsi qu'aux militaires présents sur le terrain[1].

Histoire

La « crevette ». Photo publiée en 1954. Une silhouette d'homme a été rajoutée ultérieurement pour donner l'échelle.

L'explosion eut lieu sur l'atoll de Bikini, le lors de l'opération Castle. Elle était destinée à tester un nouveau prototype de bombe H, basée sur une configuration de Teller-Ulam.

Description

La bombe, surnommĂ©e « crevette » (en anglais : Shrimp) en raison de sa forme[1], Ă©tait un cylindre de 4,56 mètres de long pour un diamètre de 1,37 mètre. Sa masse Ă©tait de 10,66 tonnes. Son combustible Ă©tait du deutĂ©rure de lithium, contrairement au mĂ©lange deutĂ©rium-tritium d'Ivy Mike[2].

ComposĂ©e Ă  40 % de lithium 6 enrichi et d'uranium, elle a de manière spectaculaire dĂ©passĂ© les prĂ©visions en termes de puissance. Cet effet inattendu fut causĂ© par la prĂ©sence du lithium 7, un isotope normalement stable, mais qui, selon sa « section efficace Â», se divise en hĂ©lium et en tritium lorsqu'il est bombardĂ© avec des neutrons Ă©nergĂ©tiques. Le tritium contribua sensiblement Ă  la fusion.

Sa puissance avait été prévue à 5 mégatonnes. Le dispositif de ce tir (en surface) a toutefois explosé en fait à 15 mégatonnes[3], dans des conditions météorologiques mal appréciées, en raison notamment d'un changement d'orientation des vents en altitude ; la pulvérisation du corail a entraîné la formation d'un aérosol (cendres blanches) dont l'activité était très élevée[4].

Retombées

Carte montrant les concentrations de retombées radioactives de l'essai Castle Bravo. Elles ont contaminé une zone de plus de cent kilomètres de long, comprenant des îles habitées.

L'explosion, Ă  sept mètres de la surface de l'atoll, provoqua un cratère d'environ deux kilomètres de diamètre et de 70 mètres de profondeur. Le champignon atomique atteignit une altitude de plus de 50 kilomètres en quelques minutes. La boule de feu elle-mĂŞme avait un diamètre de 7,2 kilomètres[1].

Une forte proportion des retombĂ©es radioactives ne se sont pas Ă©vacuĂ©es vers le nord-nord-ouest comme anticipĂ©, mais vers l'est, et ont rapidement atteint plusieurs atolls habitĂ©s Ă  une distance de 150 Ă  250 km : Ailinginae et Rongelap (une centaine d'habitants) dans un dĂ©lai de trois Ă  six heures, puis Rongerik (une trentaine de militaires) et enfin Utirik Ă  570 km oĂą les 167 habitants subirent des retombĂ©es moindres mais peu repĂ©rables, contrairement aux Ă®les plus proches oĂą les retombĂ©es ont « concrĂ©tisĂ© » le phĂ©nomène sous forme de cendres (aspect de neige)[4]. Selon les archives dĂ©classifiĂ©es de cette opĂ©ration, cet effet inattendu est dĂ» au fait que, si les vents de surface Ă©taient bien orientĂ©s vers l'ouest comme prĂ©vu par les prĂ©visions mĂ©tĂ©orologiques, les vents de haute altitude soufflaient vers l'est, entraĂ®nant la majoritĂ© des particules radioactives produites en altitude dans cette direction[1] - [2].

Avec son diamètre de plus de 100 kilomètres, le nuage contamina une grande partie des atolls environnants (Rongelap et Rongerik), de mĂŞme que les Ă®les Marshall. Un bateau de pĂŞcheurs japonais, le Daigo FukuryĹ« Maru, fut contaminĂ© par les retombĂ©es et un des membres d'Ă©quipage mourut des suites de l'irradiation. Ce test fut un drame Ă©cologique et humain[1], puisque des membres de l'armĂ©e, des ingĂ©nieurs et les populations locales furent Ă©galement touchĂ©s. Après cet essai, une zone interdite fut dĂ©limitĂ©e autour du point d'explosion avec un rayon de 1 200 kilomètres.

Les habitants à Utirik se sont réinstallés dès le mois de dans leur atoll. Le retour n'a été jugé possible pour ceux de Rongelap qu'en , accompagné de restrictions quant aux îles de l'atoll et quant aux productions agricoles qui pourraient être obtenues[4].

Après l'essai, le ministère de l'Énergie des États-Unis communique sur l’estimation selon laquelle seulement 253 habitants des îles Marshall auraient été touchés par les retombées radioactives. Les niveaux de retombées radioactives attribués à l'essai de Castle Bravo sont considérés comme les plus élevés de l'histoire[5]. Les populations voisines du site d'essai ont été exposées à des niveaux élevés de radiation, qui ont entraîné des malaises immédiats chez de nombreuses personnes (nausées, vomissements, diarrhée). Plusieurs semaines plus tard, de nombreuses personnes ont commencé à souffrir d'alopécie (perte de cheveux) et de lésions cutanées[6].

On a établi un lien entre l'exposition aux retombées et l'augmentation de la probabilité de plusieurs types de cancer, comme la leucémie et le cancer de la thyroïde[7].

Notes et références

  1. (en) « Operation Castle: 1954 - Pacific Proving Ground », sur nuclearweaponarchive.org, (consulté le ).
  2. 1954-1961 : Les bombes H de la guerre froide (The World's Biggest Bomb), documentaire d'Andy Webb, 2011, 53 min.
  3. (en-US) « The untold story of the world’s biggest nuclear bomb », sur Bulletin of the Atomic Scientists, (consulté le ).
  4. Rapport sur les incidences environnementales et sanitaires des essais nucléaires effectués par la France entre 1960 et 1996 et éléments de comparaison avec les essais des autres puissances nucléaires [PDF], Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, Assemblée nationale et Sénat français, 2001.
  5. (en) British Medical Journal Publishing Group, « Fallout Radiation and Growth », Br Med J, vol. 1, no 5496,‎ , p. 1132–1132 (ISSN 0007-1447 et 1468-5833, DOI 10.1136/bmj.1.5496.1132-a, lire en ligne, consulté le )
  6. (en) « News of Science. Radioactive Fallout in the Marshall Islands. », Science (New York, N.Y.), vol. 122, no 3181,‎ , p. 1178–1183 (ISSN 0036-8075, PMID 17807268, DOI 10.1126/science.122.3181.1178, lire en ligne, consulté le ).
  7. (en) Steven Simon, André Bouville et Charles Land, « Fallout from Nuclear Weapons Tests and Cancer Risks », American Scientist, vol. 94, no 1,‎ , p. 48 (ISSN 0003-0996 et 1545-2786, DOI 10.1511/2006.57.982, lire en ligne, consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

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