Bol chantant
Les bols chantants ou bols tibĂ©tains sont une forme particuliĂšre de cloche renversĂ©e sans battant que l'on fait rĂ©sonner Ă l'aide d'un maillet. Initialement utilisĂ©s comme instrument traditionnel par les Ă©coles bouddhistes mahayana et tantriques, on les trouve essentiellement dans les rĂ©gions himalayennes (Tibet, NĂ©pal, Bhoutan, LadakhâŠ) et dans le nord de l'Inde, mais leur usage est rĂ©pandu dans nombre de rĂ©gions d'influence bouddhiste.
Fichiers audio | |
Son frappé | |
Son frotté | |
Fabrications différentes
Les bols chantants coulés et moulés
Leur technique de fabrication est contrairement aux idées reçues, trÚs artisanale. Le métal en fusion est essentiellement constitué de laiton. Parfois, les artisans y ajoutent un ou deux autres métaux qui vont apporter une qualité sonore supplémentaire. Les bols chantants moulés cinq métaux, par exemple, se situent nettement au-dessus des simples bols en laiton au niveau de la qualité sonore.
Ă Katmandou, ou encore Ă Patan, les artisans utilisent des moules uniques dans une matiĂšre calcaire qui seront brisĂ©s aprĂšs la coulĂ©e du mĂ©tal en fusion. Une fois que le moule sera brisĂ© et que le bol chantant sera ainsi libĂ©rĂ©, on procĂ©dera Ă lâĂ©barbage de ce dernier. Puis il sera poli.
Par la suite, deux sortes de finition seront possibles.
La premiĂšre consistera Ă tremper le bol dans l'acide afin de lui donner une patine lui donnant un aspect vieilli.
Les bols tibétains de sept métaux martelés à la main
Les bols chantants martelĂ©s Ă la main constituent le meilleur de cet artisanat. Leur fabrication, ancestrale, nĂ©cessite une main d'Ćuvre plus nombreuse.
Dans un creuset calcaire, on coule sept métaux dont les doses restent jalousement tenues secrÚtes. On obtient alors une galette d'alliage qui sera ensuite placée dans un four à trÚs haute température. L'équipe de martelage est constituée de 4 personnes. Trois marteleurs manient la masse de frappe, de façon alternée, avec une synchronisation parfaite.
Le quatriĂšme marteleur est en quelque sorte le contremaĂźtre : câest lui qui, avec la pince, prĂ©sente la galette en diffĂ©rentes positions pour prendre la forme voulue. Si ce travail peut paraĂźtre trĂšs violent, Il est extrĂȘmement prĂ©cis et ne souffre d'aucune erreur de placement.
AprĂšs plusieurs heures de martĂšlement alternĂ© de remises au four, et une derniĂšre finition martelĂ©e par le maĂźtre d'Ćuvre, le bol tibĂ©tain est Ă©barbĂ©, puis poli. Ensuite, comme pour les bols moulĂ©s et coulĂ©s, il peut recevoir une finition.
On peut le plonger dans un bain d'acide afin de lui donner une patine d'aspect antique.
Le bol peut aussi ĂȘtre peint par des artistes avec une cire liquide noire qu'on laisse sĂ©cher. On trempe ensuite le bol chantant dans l'acide, selon le procĂ©dĂ© de l'eau forte, on obtient ainsi un relief gravĂ© avec des motifs symboliques du bouddhisme tibĂ©tain.
Simplement ébarbé et poli, il conserve sa brillance, avec un aspect pur et sobre.
Composition
La tradition tibétaine veut qu'un alliage de sept métaux différents soit employé, chaque métal se rapportant à un des sept chakras, ce qui leur donnerait, dit-on, des vertus thérapeutiques. Selon d'autres sources, les métaux utilisés font référence aux sept corps célestes du systÚme solaire[2] :
- argent (la Lune),
- cuivre (VĂ©nus),
- Ă©tain (Jupiter),
- fer (Mars),
- mercure (Mercure),
- or (le Soleil),
- plomb (Saturne).
Néanmoins, des analyses métallurgiques réalisées sur des bols métalliques dont la fabrication a été estimée entre le 16ᔠet le 19ᔠsiÚcle démontrent que cet alliage de sept métaux était absent à cette époque. Ces bols étant composés principalement que d'étain et de cuivre[3].
Histoire
Bien qu'il soit parfois affirmĂ© que lâexistence des « bols chantants » remonte Ă une tradition prĂ©bouddhique et chamanique Bon-Po, la fabrication et l'utilisation de bols spĂ©cifiquement dans le dessein de « chanter » sont considĂ©rĂ©es comme un phĂ©nomĂšne moderne. Les archives historiques et les rĂ©cits de la musique tibĂ©taine ou himalayenne sont muets sur les bols chantants.
Les ethnomusicologues ayant étudié la musique tibétaine au XXe siÚcle ne mentionnent pas de traces de bols chantants au Tibet avant les années 1970[5].
Le bol chantant tire cependant son origine des bols en mĂ©tal couramment utilisĂ©s comme rĂ©cipients depuis des milliers dâannĂ©es dans diffĂ©rentes rĂ©gions de lâAsie. Lâutilisation de divers rĂ©cipients en bronze ou laiton fait partie intĂ©grante de la vie culturelle himalayenne.
Lâutilisation des bols chantants pour leur qualitĂ© sonore remonterait aux annĂ©es 1960. Ce nâest que lors de lâexpansion du tourisme dans lâHimalaya, et notamment au NĂ©pal, que lâon commence Ă Ă©voquer le bol chantant, dans un premier temps pour lâintĂ©rĂȘt portĂ© par lâafflux de touristes pour cet objet[6].
La fabrication de bols pour leur qualitĂ© sonore a rapidement Ă©voluĂ© et leur utilisation Ă diverses fins sâest progressivement dĂ©mocratisĂ©e Ă travers le monde[7].
Utilisation
Les bols tibĂ©tains sont des instruments chantants qui peuvent ĂȘtre utilisĂ©s de deux maniĂšres[8] bien spĂ©cifiques afin de faire retentir leur sonoritĂ©. Pour rĂ©sumer, vous pouvez vous en servir soit :
- en le frappant à l'aide d'un maillet de bois nu ou recouvert de feutre, ou d'autres matiÚres, comme sur un gong ; on vient simplement taper la partie extérieure du bol avec le maillet pour laisser ensuite résonner le bol. C'est la méthode la plus simple et intuitive pour faire résonner un bol tibétain.
- en tournant lentement une mailloche, bùton en bois, parfois recouvert de cuir ou de caoutchouc, sur le bord extérieur du bol. On peut taper d'abord la partie extérieure du bol pour le faire résonner et ensuite frotter avec le maillet verticalement autour des parois du bol. On peut aussi simplement frotter. On obtient aussi de nouvelles harmonies de sonorités et d'exploiter au mieux tout le potentiel du bol chantant.
Il est important de ne pas faire tourner le maillet de façon rapide. Ce n'est pas la rapidité qui donne l'efficacité de la mise en vibration du bol chantant. C'est la bonne position qui crée la vibration. C'est une question de force centrifuge, comme pour des satellites qui tournent autour de la Terre. Si on veut les faire s'éloigner de celle-ci, on leur donne de la vitesse. Ainsi, si l'on tourne le maillet trop vite autour du bol, il ne sera plus en vibration mais en percussion avec un son désagréable. On peut commencer la vibration en tournant un peu vite pour la lancer, mais dÚs qu'on l'a trouvé, il faut ralentir au maximum[9].
Il est à noter que certains bols sont plus ou moins difficiles à faire chanter. Le choix d'un bol[10] est personnel, selon la sensibilité de chacun à l'un ou l'autre son du bol.
Dans la culture
Le premier enregistrement utilisant des cloches tibétaines et des bols chantants est l'album Tibetan Bells (en), d'Henry Wolff et Nancy Hennings en 1972[11].
Notes et références
- « Bol chantant tibétain: deux fabrications différentes. », sur artisans-du-nepal.com (consulté le )
- « Histoire des bols - www.bol-chantant.fr », sur bol-chantant.fr (consulté le ).
- « Tout savoir sur le Bol Tibétain ou le Bol Chantant. », sur www.instruments-du-monde.com
- « L'histoire des bols chantants tibétains », sur www.artisans-du-nepal.com (consulté le )
- Helffer 1995.
- « Origine des bols chantants tibétains », sur www.namaste-thonon.fr (consulté le )
- (en) Salil Subedi, Singing Bowl Sound Healing, , 104 p. (ISBN 978-9937-0-6285-5), p. 29-39
- « Comment bien faire chanter un bol tibétain ? »
- « Bols tibétains: la bonne utilisation du stick », sur www.artisans-du-nepal.com (consulté le )
- « Le Blog des Bols Tibétains Chantants | Histoire et Utilisation », sur Le Bol Tibétain (consulté le )
- "Signification spirituelle du bol chantant dans la culture tibétaine", sur bol-tibetain.info (lire en ligne)
Bibliographie
- Mireille Helffer, Mchod-Rol : Les instruments de la musique tibĂ©taine, CNRS Ăditions, coll. « Chemins de l'ethnologie », (ISBN 9782271052247, OCLC 906719280, prĂ©sentation en ligne)