Article 18 de la Constitution de la Cinquième République française
L’article 18 de la Constitution de la Ve République est un article de la Constitution française du qui précise les modalités de message du président de la République aux deux assemblées du Parlement.
Législature | IIIe législature de la Quatrième République française |
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Gouvernement | Charles de Gaulle (3e) |
Promulgation | 4 octobre 1958 |
Publication | 5 octobre 1958 |
Entrée en vigueur | 5 octobre 1958 |
Origines
Constitution de 1791
Le droit de message du chef de l'État à l'assemblée existe en France dès la première constitution du [1]. Le roi a la possibilité de faire lire un message devant l'Assemblée nationale législative[2].
IIe République : discours annuel
Dans la Constitution du (régissant la IIe République), l'article 52 dispose que le président doit prononcer annuellement un discours devant l'Assemblée nationale législative, qui était l'unique assemblée parlementaire, pour « l'exposé de l'état général des affaires de la République ». Louis-Napoléon Bonaparte a ainsi prononcé trois discours, en 1849, 1850 et 1851 avant l'instauration du Second Empire[3].
IIIe et IVe Républiques : lecture d'un message
Au début de la IIIe République, la loi de Broglie, votée le interdit la présence du président de la République devant le Parlement, et réduit son intervention à la possibilité de faire lire des messages par le président d'une assemblée. Cette contrainte, appelée « cérémonial chinois », visait à sanctionner le tournant politique de Thiers, élu par la majorité monarchiste au Parlement mais qui s'était tourné vers le républicanisme[4].
Ces dispositions ont été reprises par la loi constitutionnelle du sur les rapports des pouvoirs publics (article 6), puis sous la IVe République par la Constitution du (article 37)[5].
Rédactions successives de l'article 18
À l'origine : Lecture d'un message uniquement
Les dispositions de la IIIe et de la IVe République ont été reprises sous la Ve République par l'article 18 de la Constitution du . Sous ces différentes républiques, le président de la République — jusqu'à la modification de 2008 lui permettant de s'adresser aux deux assemblées réunies en congrès — n'a pas accès aux chambres. Mais cette constitution précise, contrairement aux deux précédentes, que la lecture est prévue dans les deux chambres, et pas uniquement à l'Assemblée nationale[1].
« Le Président de la République communique avec les deux Assemblées du Parlement par des messages qu'il fait lire et qui ne donnent lieu à aucun débat.
Hors session, le Parlement est réuni spécialement à cet effet. »
— Article 18 de la Constitution du 4 octobre 1958 en vigueur du au [6]
Depuis 2008 : Possibilité de discours devant le Congrès
La révision constitutionnelle du a modifié l'article 18 pour donner au président la possibilité de venir s'exprimer de vive voix devant le Parlement réuni en congrès. Cette modification avait été suggérée précédemment par Charles de Gaulle et Valéry Giscard d'Estaing[7].
« Le Président de la République communique avec les deux assemblées du Parlement par des messages qu'il fait lire et qui ne donnent lieu à aucun débat.
Il peut prendre la parole devant le Parlement réuni à cet effet en Congrès. Sa déclaration peut donner lieu, hors sa présence, à un débat qui ne fait l'objet d'aucun vote.
Hors session, les assemblées parlementaires sont réunies spécialement à cet effet. »
— Article 18 de la Constitution du en vigueur depuis le [8]
La pratique
Sous la Ve République, la lecture d'un message du président s'est produite à 23 reprises, dont 19 sous la forme d'un message écrit et 5 sous la forme d'une prise de parole devant le congrès. Pour un certain nombre d'entre eux, ils interviennent dans un contexte de crise et placent le débat sur le terrain des valeurs républicaines[9]. Il est aussi fréquent pour un président de s’adresser au Parlement après son élection, Cette pratique s'observait sous les IIIe et IVe Républiques, jusqu’à, sous une forme différente, Emmanuel Macron. Il se pose alors la question de l’articulation avec la déclaration de politique générale, où le Premier ministre peut engager la responsabilité du Gouvernement devant l'Assemblée nationale selon l'article 49 de la Constitution[10].
Après la révision constitutionnelle de 2008, le message écrit n’est plus employé jusqu'en où, à la suite de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, Emmanuel Macron, face à l'urgence, a préféré cette solution plus rapide[1].
En cas de discours devant le Congrès, les deux chambres du Parlement se réunissent au château de Versailles, dans la salle du Congrès.
Courrier
Le président Nicolas Sarkozy ayant envoyé le un courrier à chaque parlementaire français, cette initiative a été jugée contraire à la Constitution par le député Henri Emmanuelli, au motif que l'article 18 définirait de manière limitative les procédures par lesquelles le président peut s'adresser aux parlementaires. La position des constitutionnalistes varie sur cette question : Guy Carcassonne estime que ce courrier n'est pas conforme à la Constitution, tandis que Didier Maus « ne voi[t] pas ce qui lui interdit formellement d'écrire aux parlementaires »[12]. Le président de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer, a quant à lui considéré que rien n'interdisait au président de s'adresser, comme il l'entend, à chacun des parlementaires[13].
Notes et références
- Brice Lacourieux, « La résurrection du « droit de message » du Président de la République », Les Cuisines de l'Assemblée, blog du Monde, (consulté le )
- C., titre III, chap. III, sect. 4, art. 4.
- Jean-Marie Pottier, « Sarkozy succède à Louis-Napoléon Bonaparte », Challenges, .
- Patrick Roger, « Adophe Thiers et le “cérémonial chinois” », Le Monde, .
- Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions, « Les discours du Président de la République devant le Parlement » (sur Internet Archive).
- Article 18 de la Constitution du 4 octobre 1958 en vigueur du au , sur Légifrance.
- Pierre Avril, « Équilibrer la présidence quinquennale ? », Revue française de théorie, de philosophie et de cultures juridiques, PUF, no 44, , p. 149–160 (DOI 10.3917/droit.044.0149, lire en ligne)
- Article 18 de la Constitution du en vigueur depuis le , sur Légifrance.
- Afroukh 2011.
- Nicolas Thiébault, « La déclaration présidentielle d'Emmanuel Macron devant le Congrès : entre problèmes anciens et nouveaux usages », sur blog.juspoliticum.com,
- « Les messages au Parlement du président de la République », Dossiers d'histoire, sur senat.fr (consulté le ).
- Thomas Wieder, « Nicolas Sarkozy a-t-il pris ses aises avec la Constitution ? », Le Monde, .
- Jean-Baptiste Garat, « La lettre de Sarkozy conforme à la Constitution pour Accoyer », Le Figaro, .
Voir aussi
Bibliographie
- Sophie Lamouroux, « Les messages sous la Ve République : Une prérogative présidentielle inutile ? », Revue française de droit constitutionnel, PUF, no 115, , p. 533–548 (DOI 10.3917/rfdc.115.0533, lire en ligne).
- Maxime Torrente, « Le droit de message présidentiel : Entre paradoxes juridiques et révolutions institutionnelles », Les Cahiers Portalis, no 3, , p. 121–127 (DOI 10.3917/capo.003.0121, lire en ligne).
- Mustapha Afroukh, « La portée du nouveau droit de message à la lumière de la déclaration du Président de la République au Congrès du », Revue française de droit constitutionnel, PUF, no 87, , p. 1–23 (DOI 10.3917/rfdc.087.0001, lire en ligne).