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Article 16 de la Charte canadienne des droits et libertés

L'article 16 de la Charte canadienne des droits et libertés est la premier d'une série d'articles de la Charte des droits de la Constitution du Canada qui établit les droits relatifs aux deux langues officielles du Canada, l'anglais et le français. L'article 16 déclare que l'anglais et le français sont les langues officielles du Canada et de la province du Nouveau-Brunswick.

« STOP/ARRÊT » : panneau d'arrĂȘt bilingue Ă  Ottawa, Ontario

Texte

Sous la rubrique Langues officielles du Canada, l'article se lit comme suit :

« 16. (1) Le français et l'anglais sont les langues officielles du Canada; ils ont un statut et des droits et privilÚges égaux quant à leur usage dans les institutions du Parlement et du gouvernement du Canada.
(2) Le français et l'anglais sont les langues officielles du Nouveau-Brunswick; ils ont un statut et des droits et privilÚges égaux quant à leur usage dans les institutions de la Législature et du gouvernement du Nouveau-Brunswick.

(3) La présente charte ne limite pas le pouvoir du Parlement et des législatures de favoriser la progression vers l'égalité de statut ou d'usage du français et de l'anglais. »

— Article 16 de la Charte canadienne des droits et libertĂ©s

Fonction

Cet article affirme des principes gĂ©nĂ©raux qui sont davantage Ă©largis aux articles 16.1 et 22. L'article 16 lui-mĂȘme Ă©largit des droits linguistiques dĂ©jĂ  prĂ©sents dans la Loi constitutionnelle de 1867 ; alors que l'article 133 de la Loi constitutionnelle permettait simplement l'usage des deux langues au Parlement et dans la lĂ©gislature du QuĂ©bec, ainsi que dans certains tribunaux, l'article 16 va plus loin en permettant le bilinguisme dans les bureaucraties fĂ©dĂ©rale et du Nouveau-Brunswick, et dans la lĂ©gislature du Nouveau-Brunswick[1]. Ceci n'Ă©tait pas complĂštement nouveau, puisque la Loi sur les langues officielles du Canada avait introduit ce principe au niveau fĂ©dĂ©ral en 1969, et le Nouveau-Brunswick avait une loi semblable. Toutefois, il ne s'agissait que de lois ordinaires, et l'article 16 transforme plusieurs de leurs aspects principaux en des principes constitutionnels.

Interprétation judiciaire

Paragraphes 16(1) et 16(2)

Beaucoup d'affaires relatives Ă  la Charte concernant l'utilisation des langues anglaise et française n'invoquaient pas l'article 16[2]. L'article 16 s'applique aux opĂ©rations des institutions gouvernementales ; ainsi, les droits individuels plus personnels concernant la langue doivent ĂȘtre trouvĂ©s ailleurs. Comme il fut notĂ© dans l'arrĂȘt Ford c. QuĂ©bec[3], les droits comme ils s'appliquent aux institutions du gouvernement ont « un fondement historique, politique et constitutionnel qui leur est propre. »[4]

Par exemple, la validité constitutionnelle de la Charte de la langue française du Québec, qui imposait des limites à l'utilisation de l'anglais, fut contestée non pas parce qu'elle était en conflit avec l'article 16, mais pour le motif qu'elle limitait la liberté d'expression, garantie à l'article 2 de la Charte[2].

De mĂȘme, l'article 16 ne s'applique pas rĂ©ellement aux provinces autres que le Nouveau-Brunswick ; la seule province Ă  se considĂ©rer officiellement bilingue actuellement, le Nouveau Brunswick est la seule province dont le bilinguisme est garanti par l'article 16. Lorsque les lois du Manitoba, dĂ©clarant que l'anglais Ă©tait la seule langue officielle de la province, furent invalidĂ©es par l'arrĂȘt Renvoi: Droits linguistiques au Manitoba (1985)[5], c'Ă©tait Ă  cause de contradictions avec la Loi sur le Manitoba[2].

Il est difficile de comprendre la façon dont l'article 16 pourrait ĂȘtre appliquĂ©. Dans SociĂ©tĂ© des Acadiens c. Association of Parents (1986)[6], le juge en chef Brian Dickson a fait rĂ©fĂ©rence au fait que « l'importance prĂ©cise de l'art. 16 soit dĂ©battue dans la doctrine » et la question « qu'il soit visionnaire, qu'il soit dĂ©claratoire ou qu'il participe d'une disposition de fond ». Il a toutefois jugĂ© que l'article 16 « constitue Ă  tout le moins un indice trĂšs rĂ©vĂ©lateur de l'objet des garanties linguistiques de la Charte [...] le gouvernement fĂ©dĂ©ral et le gouvernement du Nouveau‑Brunswick ont dĂ©montrĂ© leur engagement Ă  rĂ©aliser le bilinguisme officiel dans leurs ressorts respectifs. »[7]

Dans la mĂȘme dĂ©cision, le juge Jean Beetz Ă©crit que la nature politique de l'article 16, contrairement Ă  la nature gĂ©nĂ©reuse des droits ailleurs dans la Charte, indique que les tribunaux devraient faire preuve de prudence en interprĂ©tant l'article 16 de façons nouvelles. Les gouvernements Ă©lus doivent jouer un plus grand rĂŽle Ă  en dĂ©terminer la portĂ©e. La juge Bertha Wilson a avancĂ© l'hypothĂšse que le but de l'article 16 est de fournir une occasion pour l'expansion des droits linguistiques. Ainsi, les tribunaux doivent toujours se demander comment leurs dĂ©cisions s'accordent avec l'Ă©tat actuel des politiques concernant les langues officielles, et de quelle façon leurs jugements y sont conformes. Bien que les droits garantis dans une autre disposition linguistique de la Charte, l'article 20, soient limitĂ©s, cela ne veut pas dire que l'article 16 est limitĂ© ou qu'il ne peut avoir un effet sur le dĂ©veloppement des droits linguistiques. En ce qui concerne le Nouveau-Brunswick, elle a ajoutĂ© que le bilinguisme « joue un rĂŽle capital dans le dĂ©veloppement socio‑culturel » et qu'il devrait ainsi y avoir des « attentes accrues du public » pour que ce bilinguisme trouve des appuis dans la Charte[8].

Dans R. c. Beaulac (1999)[9], la Cour suprĂȘme a rejetĂ© certaines de ses interprĂ©tations conservatrices antĂ©rieures. Elle a jugĂ© qu'une interprĂ©tation gĂ©nĂ©reuse est appropriĂ©e pour les droits linguistiques, puisque cela aiderait les communautĂ©s linguistiques minoritaires (c'est-Ă -dire les francophones ou anglophones vivant dans une rĂ©gion oĂč leur langue est minoritaire) Ă  atteindre l'Ă©galitĂ©.

Paragraphe 16(3)

Le paragraphe 16(3) dispose que le Parlement ou un gouvernement provincial peut travailler Ă  l'amĂ©lioration de la situation du bilinguisme officiel. Ceci reflĂšte une dĂ©cision judiciaire de 1975, Jones c. Procureur gĂ©nĂ©ral du Nouveau-Brunswick, qui a reconnu ce pouvoir aux gouvernements. Ainsi, la Cour suprĂȘme a jugĂ© dans la dĂ©cision SociĂ©tĂ© des Acadiens[6] que ce sont les gouvernements Ă©lus et le « compromis politique », plutĂŽt que les tribunaux, qui feront davantage avancer les droits linguistiques.

La juge Wilson a ajoutĂ© que le paragraphe 16(3) dĂ©montre que, bien que les droits linguistiques doivent toujours ĂȘtre amĂ©liorĂ©s, ils ne doivent pas ĂȘtre Ă©rodĂ©s une fois qu'ils ont Ă©tĂ© Ă©tablis[10].

Notes et références

  1. Hogg, Peter W. Constitutional Law of Canada. 2003 Student Ed. Scarborough, Ontario: Thomson Canada Limited, 2003.
  2. Dyck, Rand. Canadian Politics: Critical Approaches. Third ed. Scarborough, Ontario: Nelson Thomson Learning, 2000.
  3. Ford c. Québec (Procureur général), [1988] 2 R.C.S. 712
  4. Ford, par. 43.
  5. Renvoi: Droits linguistiques au Manitoba, [1985] 1 R.C.S. 721
  6. Société des Acadiens c. Association of Parents, [1986] 1 R.C.S. 549
  7. Acadiens/Parents, par. 21.
  8. Acadiens/Parents, par. 188.
  9. R. c. Beaulac, [1999] 1 R.C.S. 768
  10. Recueil de dĂ©cisions, Articles 16 et 16.1 — Institut canadien d'information juridique

Sources

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

  • Recueil de dĂ©cisions relatives Ă  la Charte — Institut canadien d'information juridique :
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