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Article 16.1 de la Charte canadienne des droits et libertés

L'article 16.1 de la Charte canadienne des droits et libertés est l'article le plus récent de la Charte des droits de la Constitution du Canada. Il fut édicté par la Modification constitutionnelle de 1993 (Nouveau-Brunswick) et garantit l'égalité des communautés linguistique française et anglaise du Nouveau-Brunswick.

Présentation
Titre Modification constitutionnelle de 1993 (Nouveau-Brunswick)
Pays Drapeau du Canada Canada
Territoire d'application Nouveau-Brunswick
Type RĂ©forme constitutionnelle
Adoption et entrée en vigueur

L'article 16.1 ne doit pas ĂȘtre confondu avec l'alinĂ©a 16(1), qui fait partie de l'article 16 et date de 1982. En effet, le constitutionnaliste Peter Hogg traite l'article 16.1 comme un article Ă  part entiĂšre[1].

Texte

Sous la rubrique Langues officielles du Canada, l'article se lit comme suit :

« 16.1. (1) La communauté linguistique française et la communauté linguistique anglaise du Nouveau-Brunswick ont un statut et des droits et privilÚges égaux, notamment le droit à des institutions d'enseignement distinctes et aux institutions culturelles distinctes nécessaires à leur protection et à leur promotion.
(2) Le rÎle de la législature et du gouvernement du Nouveau-Brunswick de protéger et de promouvoir le statut, les droits et les privilÚges visés au paragraphe (1) est confirmé. »

— Article 16.1 de la Charte canadienne des droits et libertĂ©s

Objectif

L'article 16.1 parle d'un besoin d'institutions pour les deux groupes linguistiques, incluant des institutions d'enseignement, et semble donner au gouvernement provincial le pouvoir de protĂ©ger ce droit[2]. Cela n'est pas entiĂšrement rĂ©volutionnaire puisque l'article ne fait qu'enchĂąsser des lois dĂ©jĂ  comprises dans la Loi reconnaissant l'Ă©galitĂ© des deux communautĂ©s linguistiques officielles au Nouveau-Brunswick de 1981, comme il fut notĂ© par la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick dans l'affaire Charlesbois c. Mowat (2001). Cet article peut ĂȘtre vu comme consacrant des droits collectifs, et un critique a affirmĂ© que les tribunaux devront dĂ©cider de la signification plus profonde de l'article[3].

Dans Charlesbois c. Mowat, la cour s'est penchĂ©e sur l'argument que l'article 16.1, ainsi que les articles 16(2) et 18(2), exigent des lois municipales bilingues, particuliĂšrement lorsque la population linguistique minoritaire d'une municipalitĂ© est importante. La Cour a jugĂ© qu'un tel bilinguisme est exigĂ© (principalement par l'article 18(2)) et Ă©galement dĂ©fini dans l'article 16.1 comme ayant une nature corrective, ce qui signifie que le droit a pour objectif de rĂ©parer des problĂšmes historiques[4]. (Une affaire semblable fut par la suite portĂ©e en Cour suprĂȘme : Charlebois c. Saint John (Ville)[5])

Historique

La Loi reconnaissant l'égalité des deux communautés linguistiques officielles au Nouveau-Brunswick fut promulgué par le Premier ministre Richard Hatfield ; on l'a qualifiée d'approche « séparé mais égal » pour créer des commissions scolaires séparées pour les deux groupes linguistiques. Les principes de la loi furent inclus dans la Constitution du Canada, via l'article 16.1, en réponse à un revirement en politique provinciale au début des années 1990. Alors qu'auparavant tous les partis politiques avaient appuyé l'arrivée du bilinguisme au Nouveau-Brunswick, en 1991 un nouveau parti appelé la Confederation of Regions Party a établi une présence à la législature en étant ouvertement opposé au bilinguisme. La loi fut donc constitutionnalisée par le gouvernement provincial pro-bilinguisme afin d'assurer la survie des droits linguistiques[6].

La constitutionnalisation de la loi devait Ă  l'origine ĂȘtre incluse dans l'ensemble d'amendements constitutionnels connu sous le nom d'accord de Charlottetown en 1992. Lorsque l'accord fut rejetĂ© lors d'un rĂ©fĂ©rendum national, l'amendement fut effectuĂ© de façon sĂ©parĂ©e ; le professeur Peter Russell en parle comme un des « signes encourageants que les Canadiens sont peut-ĂȘtre en voie de retrouver leur capacitĂ© d'accomplir des rĂ©formes constitutionnelles sans tout lier ensemble et devenir embourbĂ©s dans l'Ă©norme marais constitutionnel[7]. » [8]

L'article 43 de la Loi constitutionnelle de 1982 est la partie des procĂ©dures de modification utilisĂ©e pour ajouter l'article 16.1 Ă  la Charte. Cela veut dire que l'amendement Ă©tait approuvĂ© par la province affectĂ©e (le Nouveau-Brunswick) ainsi que le SĂ©nat et la Chambre des communes du Canada ; l'avocate constitutionnelle Deborah Coyne Ă©tait nĂ©anmoins d'avis que l'amendement touchait Ă  des compĂ©tences fĂ©dĂ©rales et que sept provinces auraient dĂ» consentir Ă  l'amendement[3]. La Chambre des communes a adoptĂ© l'amendmeent Ă  219 voix contre 2. Ce vote a attirĂ© certaines critiques ; un journaliste a affirmĂ© que le Parlement n'a pas pleinement analysĂ© le document et a tentĂ© d'Ă©touffer la discussion publique. Il a mĂȘme suggĂ©rĂ© que l'article 16.1 pourrait crĂ©er deux gouvernements pour le Nouveau-Brunswick, l'un en anglais et l'autre en français[3]. Auparavant, ce mĂȘme journaliste a Ă©galement affirmĂ© que l'enchĂąssement de droits collectifs dans la Constitution est « Ă©tranger au libĂ©ralisme » et minerait l'individu au profit d'un groupe plus large ; il a Ă©galement affirmĂ© que l'article 16.1 excluait les groupes autochtones au Nouveau-Brunswick et ferait d'eux des citoyens de seconde classe. Il a comparĂ© l'article 16.1 Ă  la façon dont l'accord du lac Meech et l'accord de Charlottetown auraient reconnu le QuĂ©bec comme une sociĂ©tĂ© distincte[9]. Toutefois, le chef de l'opposition de l'Ă©poque, Jean ChrĂ©tien, qui Ă  l'Ă©poque reprĂ©sentait les Acadiens, a affirmĂ© que « pour moi c'est un grand jour. C'est un exemple que nous pouvons ĂȘtre ensemble et en mĂȘme temps ĂȘtre diffĂ©rents au Canada[10]. »[3] Un article publiĂ© dans la Gazette de MontrĂ©al a Ă©galement accueilli favorablement l'amendement, qualifiant le gouvernement nĂ©o-brunswickois de « courageux » Ă  cause de sa rĂ©sistance devant le Confederation of Regions Party, et a ajoutĂ© que l'article donne une « vision noble et gĂ©nĂ©reuse de la dualitĂ© et la coexistence canadiennes. C'est dommage que cela semble se limiter au Nouveau-Brunswick[11]. »[12]

L'amendement fut signé par le Premier ministre Brian Mulroney, le procureur général Pierre Blais, et le régistraire général Pierre H. Vincent, sous la proclamation du gouverneur général Ray Hnatyshyn à Ottawa, le .

Hors du Nouveau-Brunswick

En 2000, un tribunal ontarien a jugĂ© que les Franco-Ontariens pouvaient conserver un hĂŽpital de langue française. Ce jugement se fondait sur un principe non-Ă©crit de droits des minoritĂ©s dĂ©couvert par la Cour suprĂȘme dans le Renvoi relatif Ă  la sĂ©cession du QuĂ©bec (1998)[13]. Le gouvernement de l'Ontario a critiquĂ© le jugement et a accusĂ© la cour d'activisme judiciaire, affirmant que « la dĂ©cision de la cour a, dans les faits, rĂ©Ă©crit la constitution pour rende l'article 16.1 applicable Ă  l'Ontario malgrĂ© l'intention expresse qu'il ne s'applique uniquement qu'au Nouveau-Brunswick[14]. » [15]

Notes et références

  1. Hogg, Peter W. Constitutional Law of Canada. 2003 Student Ed. (Scarborough, Ontario: Thomson Canada Limited, 2003), p. 1214.
  2. Deborah Coyne, "New Brunswick amendment has fundamental flaw, " (The Gazette, Montréal (Québec) 13 janvier 1993). p. B.3.)
  3. William Johnson, "Unseemly haste to amend constitution without debate" (The Hamilton Spectator. Hamilton (Ontario) 4 février 1993. p. A.7)
  4. Charlebois c. Mowat, 2001 NBCA (2001), 242 N.B.R. (2e) 259
  5. Charlebois c. Saint John (Ville), [2005] 3 R.C.S. 563
  6. Dyck, Rand. Canadian Politics: Critical Approaches. Third ed. (Scarborough, Ontario: Nelson Thomson Learning, 2000), p. 95.
  7. "...encouraging signs that Canadians may be recovering the capacity to accomplish constitutional reform without linking everything together and getting bogged down in the mega constitutional swamp."
  8. Russell, Peter. Constitutional Odyssey, 2nd ed. (Toronto: University of Toronto Press, 1993), p. 231.
  9. William Johnson, "New Brunswick amendment tramples individual rights, " (The Gazette. Montréal (Québec) 16 janvier 1993. p. B.5.)
  10. "For me it is a great day. It is an example that we can be together and at the same time be different in Canada."
  11. "...noble, generous vision of Canadian duality and co-existence. Too bad it seems confined to New Brunswick."
  12. "New Brunswick leads the way" (The Gazette. Montréal (Québec) 4 décembre 1992. p. B.2)
  13. Renvoi relatif à la sécession du Québec, [1998] 2 R.C.S. 217
  14. "The divisional court decision has effectively rewritten the constitution to make [Section] 16.1 applicable to Ontario despite the express intention that it apply to New Brunswick alone."
  15. Wills, Terrance. “English will do: Ontario: Franco-Ontarians’ plight not our problem: Harris.” The Gazette. MontrĂ©al (QuĂ©bec) 16 juillet 2000, A.1.FRO

Liens externes

  • Recueil de dĂ©cisions relatives Ă  la Charte — Institut canadien d'information juridique :
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