Armes nucléaires au Tibet
Dans le document intitulé Le Tibet, cent questions et réponses publié en 1988 et dans sa version de 2001, la Chine indique qu'elle n'a jamais déployé d'armes nucléaires ni stocké de déchets nucléaires dans la région autonome du Tibet ou Xizang, ce que reconnaît Thierry Dodin, un des auteurs de Authenticating Tibet[1]. Cette position officielle ne concerne pas les zones à population tibétaine des provinces administratives limitrophes (Qinghai, Sichuan, Yunnan) ou non limitrophes (Gansu), que le gouvernement tibétain en exil considère comme faisant partie du « Tibet historique »[2].
Le premier centre de recherches nucléaires en Chine, l'académie de recherches et d'études du nord-est sur les armes nucléaires, aussi appelé « usine 221 » et « neuvième académie », fut installé dans la préfecture autonome tibétaine de Haibei (plus précisément dans le xian de Haiyan), dans la province du Qinghai, à quelques kilomètres du lac Kokonor, à la fin des années 1950. Fermé en 1987, il fut transformé en musée en 1993.
La Chine a effectué tous ses essais nucléaires sur son site d'essais d'armes nucléaires de Malan dans le Lop Nor au Xinjiang : soit 45 essais, dont 23 atmosphériques (le dernier en 1980) et 22 souterrains (le dernier en 1996)[3]. Dans Authenticating Tibet, Thierry Dodin écrit qu'aucun essai nucléaire ne semble avoir été effectué dans une région tibétaine[4] Il ajoute cependant qu'aucune investigation indépendante n'a jamais été autorisée pour confirmer ou réfuter cela[5].
Selon le Nuclear Threat Initiative, une association américaine, depuis son ultime essai atmosphérique le , la Chine se conforme dans les faits au traité d'interdiction partielle des essais nucléaires et a officiellement annoncé l'arrêt définitif des dits essais le . De plus, elle a annoncé un moratoire sur les essais souterrains à partir du puis a signé le traité d'interdiction complète des essais nucléaires le de la même année[6] - [7].
Cependant, la Chine ne signe le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires qu'en 1992, et ne l'a pas encore ratifié. Elle a été accusée en 1987 de vendre ses armes, en particulier d'avoir fourni l'arme nucléaire au Pakistan et de continuer à l'aider dans son programme d'armement[8].
Selon le politologue Taylor Fravel la Chine n'a pas de brigade de lancement de missiles balistiques au Tibet ni de missiles balistiques de courte portée à tête nucléaire. De même, la Chine n'a déployé aucune arme nucléaire tactique au Tibet ou ailleurs[9]. Cependant, la spécialiste du Tibet Anne-Marie Blondeau affirme que quatre sites de lancement de missiles nucléaires, capables d'atteindre la Russie, l'Europe et les États-Unis, sont situés dans le Qinghai. Dans la région autonome du Tibet au moins trois sites seraient aussi implantés, ce que les autorités chinoises démentent[2].
En 1987, dans son Plan de paix en cinq points pour le Tibet, le 14e dalaï-lama demandait la « cessation par la Chine de sa politique d’utilisation du Tibet dans la production d’armes nucléaires et pour y ensevelir des déchets nucléaires. »
Essais nucléaires au Xinjiang
La base de données de l'agence américaine Defense Threat Reduction Agency situe toutes les explosions chinoises dans le Lob Nor, dans la région autonome du Xinjiang, dans le nord-ouest de la Chine[10]. D'après l'association américaine Nuclear Threat Initiative (NTI), la Chine a effectué tous ses essais nucléaires sur son site d'essais d'armes nucléaires de Malan : soit 45 essais, dont 23 atmosphériques (le dernier en 1980) et 22 souterrains (le dernier en 1996). Le premier essai nucléaire, répondant au nom de code essai 596, eut lieu le [11] - [12].
Bien que la Chine n'ait pas adhéré au traité sur l'interdiction des essais atmosphériques, elle s'y conforme dans les faits depuis son ultime essai atmosphérique le et a officiellement annoncé l'arrêt définitif des dits essais le . De plus, elle a annoncé un moratoire sur les essais souterrains à partir du puis a signé le traité sur leur interdiction le de la même année[13].
Allégations d'essais nucléaires au Tibet
Emmanuel Gonon, directeur des programmes à l’Observatoire européen de géopolitique (OEG) et spécialiste des questions de frontière et d'Asie, mentionne que des installations de production et d'essai d'armes nucléaires seraient stationnées sur ce qu'il appelle « l'espace tibétain »[14]. L'auteur affirme que la région autonome du Tibet n'est plus qu'un territoire historique minimal, comprenant le Ü, le Tsang et le Chang Tang, tandis que les autres régions tibétaines sont rattachées à d'autres régions autonomes ou provinces, faisant de « l'espace tibétain » un territoire éclaté entre deux régions autonomes (dont l'une regroupe 7 préfectures autonomes) et 6 préféctures autonomes situées dans le Yunnan, le Sichuan et le Gansu[15].
En 1996, Madan Gopal Chitkara[16], puis en 1997, le diplomate indien Lakhan Lal Mehrotra[17], affirment que la première explosion nucléaire chinoise eut lieu en 1964 près du site de la Neuvième académie, à proximité du lac Kokonor (province de Qinghai, ancienne province tibétaine de l'Amdo), une affirmation que l'on trouve également publiée en 1994 dans GEO sous la signature de Loïc Trebord, qui précise que les suivantes, officielles celles-ci, eurent lieu dans le Lob Nor[18]. Selon Madan Gopal Chitkara, le « toit du monde » s'est avéré utile à la recherche et l'exploitation de l'uranium, l'entreposage, et à des essais atomiques souterrains, probablement pour mettre au point une bombe sismique[19].
Selon le journal The Indian Express, une dépêche de l'agence TASS du affirme que « la Chine a effectué des mesures dans plusieurs secteurs du Tibet pour déterminer les niveaux de rayonnement dans la population de ces régions[20] ».
Dans Authenticating Tibet, Thierry Dodin écrit qu'aucun essai nucléaire ne semble avoir été effectué dans une région tibétaine[4], ajoutant cependant qu'aucune enquête indépendante n'a jamais été autorisée pour le confirmer ou le réfuter[5].
Centres de recherches nucléaires
Selon Emmanuel Gonon, la Chine s'est doté de centres de fabrication d'armes nucléaires à Dhashu (Haiyan) et à Tongkhor (Huangyuan) au Qinghai[14].
Construction par des détenus
Selon Frédéric Lenoir et Laurent Deshayes, à partir de la fin des années 1950 l'État chinois utilise les détenus des centres de rééducation par le travail pour construire les centres d'études nucléaires du Tibet[21].
Selon Vincent Metten, on suppose que les importants camps de rééducation par le travail, qui comptaient des millions de prisonniers dans les années 1960 et 1970, ont fourni une réserve constante de travail forcé pour la construction de facilités nucléaires du Qinghai et les facilités de transport nécessaires. De ce fait, il se peut que les détenus aient été exposés à des niveaux dangereux de radioactivité[22].
Selon Harry Wu, ancien détenu et expert des prisons chinoises, les camps de travail du Qinghai ont utilisé des prisonniers pour extraire du minerai radioactif, et les prisonniers ont été forcés à entrer dans des sites d'essais nucléaires pour exécuter des travaux dangereux[23].
Selon Vincent Metten, des rapports font état de l'emploi de détenus de droit commun et de prisonniers politiques dans des installations nucléaires à Lanzhou, dans la province de Gansu. Dans le Qinghai, d'importants camps à main-d'œuvre carcérale, situés à côté de sites de missile nucléaires, ont été observés sur le plateau tibétain[24].
Académie de recherches et d'études du nord-est sur les armes nucléaires (Qinghai)
L'Académie de recherches et d'études du nord-est sur les armes nucléaires (en anglais Northwest Nuclear Weapons Research and Design Academy), aussi appelée « neuvième académie » et « usine 221 », premier site chinois consacré à la fois à la recherche et à la production d'armes nucléaires, fut implantée dans la préfecture autonome tibétaine de Haibei dans la province du Qinghai, entre la ville de Xihai et le lac Qinghai ou Kokonor, dans la prairie de Jingyintan, à la fin des années 1950. E.D. Vorobiev, le directeur de la production d'armes nucléaires soviétiques du Complexe nucléaire Maïak supervisa sa construction suivant le modèle de l'Institut panrusse de recherche scientifique en physique expérimentale[25]. Le site qui relevait de la juridiction du Neuvième Bureau, était l'installation la plus secrète du programme nucléaire de la Chine. La majorité des armes nucléaires y furent conçues dans les années 1970. C'était un centre important de production d'armes, d'assemblage d'ogives nucléaires, mais aussi un centre de recherche dédié aux détonateurs et à l'enrichissement de matières fissibles, occupant une surface de 1 200 km2[14].
Construction débutée en 1958
Le site de Haibei pour la construction du centre de recherche fut choisi par Li Jue, un chef militaire chinois de la préfecture autonome tibétaine. En , Deng Xiaoping approuva le choix du site et les plans. Plus de 10 000 travailleurs s'installèrent à Haibei, sur la rive orientale du Kokonor[26]. Sous la direction de Li Jue, la construction débuta en 1958, mais ce n'est qu'après plusieurs années que ses concepteurs purent s'y installer[27].
Exploitation (1962-1987)
Ce centre de recherches militaire secret[28], qui entra en fonction en 1962[29], aurait produit de l'uranium enrichi et les premières armes nucléaires chinoises[30]. C'est là, entre 1958 et 1964, que la Chine mit au point sa première bombe atomique et, deux ans plus tard, sa première bombe à hydrogène, lesquelles furent testées sur le site de Lop Nor au Xinjiang.
Les Chinois reconnaissaient que 16 armes nucléaires furent mises au point dans cette usine, avant sa fermeture en 1987[31].
Selon le gouvernement tibétain en exil, en raison de la construction de ce centre de recherche d'armes nucléaires à proximité du lac Qinghai, ce dernier est contaminé par la radioactivité, entraînant cancers et malformations néonatales chez les nomades tibétains de cette région[32] et de sérieuses conséquences sur l'environnement[33]. Selon lui, l'activité du site a provoqué une pollution du sol par divers produits radioactifs. Par ailleurs, selon gouvernement tibétain en exil, compte tenu de l'existence d'une liaison ferrée directe, des experts sont d'avis que le lac aurait été utilisé comme décharge pour divers déchets, dont certains radioactifs[34].
Fermeture (1987) et transformation en musée (1993)
Aujourd'hui, le centre est déclassifié et ouvert au public. Fermé en 1987, il avait été cédé au gouvernement local en 1993. On peut en visiter certaines parties : laboratoire de recherche, salle des commandes, salle de production d'électricité et salle de transmission télégraphique. Un musée a été établi dans la ville de Xihai, où l'on a construit des hôtels et des restaurants[35] - [36].
Centre d'études de Mianyang (Sichuan)
Le centre d'études le plus important de la Chine sur les armes nucléaires (China Academy of Engineering Physics (en) (CAEP) ou Southwest Institute) se trouve près de Mianyang, dans le district de Zitong, dans la province du Sichuan[37]. Certains experts jugent peu probable qu'il ait été touché par le séisme du Sichuan de mai 2008, mais le personnel a été évacué[38].
Site de Huangyuan (Qinghai)
Un site situé près de Donghuangyuan dans la province du Qinghai fut utilisé pour des essais d'explosifs conventionnels au début des années 1960 durant les premières phases du développement d'armes nucléaires par la Chine[39].
Missiles nucléaires
Selon le politologue Taylor Fravel, contrairement à ce que les médias indiens ont rapporté, le Chine n'a pas de brigade de lancement de missiles balistiques au Tibet ni de missiles balistiques de courte portée à tête nucléaire. Les brigades de lancement les plus proches de l'Inde sont situées dans le Qinghai, le Gansu et le Yunnan. De même, la Chine n'a déployé aucune arme nucléaire tactique au Tibet ou ailleurs. Les sources les plus autorisées sur les forces armées chinoises (voir Bulletin of the Atomic Scientists, The Military Balance et les rapports du ministère américain de la défense sur les forces militaires chinoises) notent toutes que la Chine ne dispose pas d'armes nucléaires tactiques déployées[9].
La spécialiste du Tibet Anne-Marie Blondeau indique que quatre sites de lancement de missiles nucléaires, capables d'atteindre la Russie, l'Europe et les États-Unis sont situés dans le Qinghai. Dans la région autonome du Tibet au moins trois sites seraient aussi implantés et ce malgré les démentis chinois[2].
Emmanuel Gonon, directeur des programmes à l'Observatoire européen de géopolitique (OEG) et spécialiste en géopolitique de l'Himalaya, affirme que la Chine fit le choix d'un armement placé sur rampe de lancement, ce qui rend difficile la localisation et numération précise des sites de missiles, mais on estime que plusieurs douzaines des 300 à 400 ogives nucléaires de la Chine seraient stockées au Tibet[14]. Mis à part Gar (Ali), l'armement nucléaire chinois se trouve dans l'est et le nord-est de l'espace tibétain, suggérant qu'il est moins dirigé vers l'Inde que vers la Russie, conçu comme une plateforme éloignée de cet objectif[14].
Province du Qinghai
Selon Nuclear Tibet, un document publié par Campagne internationale pour le Tibet en 1993, la première arme nucléaire a été apportée sur le plateau tibétain en 1971 et stationnée dans le bassin de Tsaidam (= Qaidam), dans le nord de l'Amdo (= la province du Qinghai). La Chine possède actuellement de 300 à 400 ogives nucléaires, dont plusieurs douzaines se trouveraient au Tibet[40]. Selon Campagne internationale pour le Tibet, au moins trois bases de missiles nucléaires se trouvaient au Tibet en 1993[41]. Faisant état de ce rapport, Sheryl WuDunn (en) signale dans le New York Times qu'il est impossible de confirmer de façon indépendante certaines de ses affirmations[42].
Selon Emmanuel Gonon, à l'ouest de Dhashu (Haiyan), sont implantés deux sites de lancement de missiles DF-4 depuis les années 1970[14].
Des bases de missiles nucléaires stratégiques DF-4 seraient installées depuis les années 1980 près de Delingha, chef-lieu de la préfecture autonome mongole et tibétaine de Haixi, de Da Qaidam et de Xiao Qaidam dans le bassin de Qaidam[43] - [44] - [45] - [46] - [47].
Emmanuel Gonon précise que ce site abriterait également le quartier général du régiment des missiles, qu'une nouvelle division y aurait été établie en 1995 et que quatre missiles CSS-4, d'une portée de 13 000 km, y seraient entreposés[14].
Selon le gouvernement tibétain en exil citant Tashi Chutter, à Drotsang à proximité de Kokonor, une usine de missiles navals a été construite en 1986 et largement développée en 1995. Les essais s'effectuaient sur le lac Kokonor[48].
Région autonome du Tibet
Selon un article de Tsultrim Palden Dekhang mis en ligne sur le site du gouvernement tibétain en exil, au moins trois sites de lancement de missiles seraient situés dans la région autonome du Tibet. L'un d'eux serait implanté au sud-est de Lhassa, au Kongpo, et deux autres à 250 kilomètres au nord de Lhassa, dans la région de Nagchuka[49]. Toujours selon Tsultrim Palden Dekhang, un site de stockage de missiles se trouve à 3,5 km au nord-ouest de la prison de Drapchi et 1 km à l'ouest du monastère de Séra près de Lhassa[49].
Emmanuel Gonon mentionne trois sites Nakchu, Kongpo Nyitri et Pawo Tamo[14].
Le journaliste François Gautier écrit que, selon la CIA, la Chine aurait transféré un tiers de son arsenal nucléaire à Nagchuka, où 100 missiles balistiques intercontinentaux auraient été installés, dont beaucoup pointés sur des villes indiennes[50].
Allégations de pollutions nucléaires
Province du Gansu
En 1993, International Campaign for Tibet, une ONG ayant son siège à Washington aux États-Unis, publia un rapport accusant la Chine d'être responsable de la mort d'au moins 50 Tibétains (dont 24 indiqués nommément) vivant près de mines d'uranium dans le nord-ouest de la province du Gansu. Le rapport avançait également des cas de cancer chez des enfants vivant à proximité du centre de recherche nucléaire dit Northwest Nuclear Weapons Research and Design Academy, dans la province du Qinghai[42].
Selon Human Rights in China, une organisation ayant son siège à New York aux États-Unis, la mine d'uranium no 792, située dans la préfecture autonome tibétaine de Gannan de la province du Gansu, qui appartient au « Tibet historique » selon le gouvernement tibétain en exil, a été officiellement fermée en 2002 mais l’administration locale aurait continué à exploiter le minerai radioactif à des fins de profits personnels. Sun Xiaodi, un militant écologiste chinois, a témoigné des graves contaminations radioactives dues à l’exploitation de la mine d’uranium et a interpellé les autorités pendant plus de dix ans, recherchant notamment le soutien de la population par pétitions. Il a été arrêté puis relâché à deux reprises en 2005 et 2006 puis mis sous surveillance policière. Sun a dû faire face à une intensification de harcèlement depuis qu'il a reçu le Nuclear-Free Future Award[51], bien qu'il ait de graves problèmes de santé[52].
Selon Raymond Meyers, de l’association Les Amis du Tibet, Luxembourg, en 2002, le ministère d'État de l'industrie nucléaire a fermé la mine d'uranium de Têwo, située dans la préfecture autonome tibétaine de Gannan, dans la province de Gansu, qui avait été ouverte en 1980. Meyers affirme que le matériel radioactif a été incorrectement manipulé, induisant un nombre élevé de cancers et de malformations congénitales chez les populations avoisinantes et que le corps médical tibétain a attribué près de la moitié des décès dans la région à une variété de cancers liés à la radioactivité et à des maladies du système immunitaire. Le bétail a souffert également d’un taux de mortalité exceptionnellement élevé. L’environnement est devenu une terre stérile[53].
Province du Sichuan
Plusieurs sites sont fortement contaminés par la radioactivité. Selon Laura S. Ziemer, les rapports les plus persistants d'eau polluée proviennent de deux sites dans le nord du Tibet ethnographique. Une mine est située dans la préfecture autonome tibétaine de Ngaba, dans la province du Sichuan, et l'autre dans la préfecture autonome tibétaine de Gannan, dans la province du Gansu[54]. Pourtant, selon le gouvernement tibétain en exil, les effets des polluants radioactifs déversés dans l’eau du plateau tibétain se feront sentir bien au-delà car dix des plus grands fleuves d’Asie y prennent source. De plus, les vents de haute altitude qui soufflent au Tibet peuvent transporter des radioisotopes à de grandes distances[55] - [56].
Province du Qinghai
Selon le gouvernement tibétain en exil, le , l'agence de presse chinoise Xinhua a fait état de l'existence d'« un dépôt de 20 mètres carrés pour les polluants radioactifs » dans la préfecture autonome tibétaine de Haibei, dans la province du Qinghai, près des rives du lac Kokonor[57], ce que signale également Green Tibet[58], et Brahma Chellaney[59].
Censure
Selon Loïc Trebord, les déchets nucléaires représentent un sujet tabou en Chine. Il rapporte que des Tibétains de la région de l'Usine 211 interrogés par des étrangers refusèrent de répondre à des questions relatives à l'usine, expliquant qu'ils n'en avaient pas le droit[60].
Un expert du Council on Foreign Relations, Elizabeth C. Economy, estime que la censure du débat et du militantisme écologique sur le nucléaire a pu faciliter la vie du gouvernement chinois jusqu'à présent, mais que la dévastation nucléaire consécutive à l'Accident nucléaire de Fukushima au Japon nécessite un changement[61].
Accusation d'espionnage par le gouvernement chinois : le cas de Dolma Kyab
Dolma Kyab, un professeur d'histoire né en 1976 au Tibet, particulièrement concerné par la destruction de l’environnement tibétain, notamment la pollution liée aux mines d'uranium, mais aussi les camps militaires chinois[62] est actuellement emprisonné à la suite de son arrestation et de sa condamnation en 2005 à dix années de prison, accusé par les autorités chinoises d'espionage et d'avoir dérobé et transmis des secrets d'État[63]. Il est l'auteur d'un manuscrit non publié à l'origine de son arrestation selon lui. Selon Dolma Kyab, l'accusation qui est porté contre lui est lié à son autre manuscrit où il exprime sa préoccupation croissante au sujet de l'environnement au Tibet, l'emplacement de camps militaires chinois dans la Région autonome du Tibet[64]. Le cas de Dolma Kyab est rapporté par l'association Index on Censorship dans Beyond Bars: 50 Years of the PEN Writers in Prison Committee publié en 2011[65], un numéro commémoratif pour PEN et Index on Censorship, témoins principaux notamment de l'effacement de livres[66].
Demande de dénucléarisation du Tibet par le dalaï-lama
Le , dans son plan de paix en cinq points pour le Tibet, le 14e dalaï-lama a demandé la « cessation par la Chine de sa politique d’utilisation du Tibet dans la production d’armes nucléaires et pour y ensevelir des déchets nucléaires ». Pourtant, selon l'agence chinoise Chine Nouvelle, la même année l'académie de recherches et d'études du nord-est sur les armes nucléaires, installée dans le Qinghai, avait été fermée[35] avant d'être transférée dans le Sichuan (Tibet oriental)[67].
En 2009, dans une interview à François Gautier, le 14e dalaï-lama a déclaré que les Chinois avaient placé des ogives nucléaires sur le plateau du Tibet et stocké des déchets nucléaires dans des grottes au nord du Tibet, où nombre d'animaux présentent des malformations à la naissance, demandant que cela cesse[68].
Notes et références
- (en) Thierry Dodin, in Anne-Marie Blondeau, Katia Buffetrille, Wei Jing, Authenticating Tibet: Answers to China's 100 Questions, University of California Press, 2008, 364 p., p. 284 : « It is reported that China has deployed nuclear weapons and dumped nuclear waste in Tibet, damaging the environment there. Is that true? No. "On the contrary », « the authors deny that there have ever been nuclear weapons or disposal of nuclear wastes "in the TAR" (Question 32, 2001). [...] there are indeed no such reports in the case of the TAR [...]. »
- Anne-Marie Blondeau, Le Tibet est-il chinois ?, Albin Michel, 2002, p. 340 et suivantes.
- (en) site du NTI (Nuclear Threat Initiative) : « Beginning with its first test on 16 October 1964, China conducted a total of 45 nuclear weapon tests -- 23 atmospheric and 22 underground [...]. China has conducted all of its nuclear weapons testing at Lop Nur, typically in the late spring and early fall. »
- (en) Thierry Dodin, in Anne-Marie Blondeau, Katia Buffetrille, Wei Jing, Authenticating Tibet: Answers to China's 100 Questions, University of California Press, 2008, 364 p., p. 284 : « It is true that no nuclear tests seem to have ever been carried out in any Tibetan region. »
- Thierry Dodin, ibid : « However, for obvious reasons, no independent investigation could ever be conducted to confirm or refute this. »
- (en) China - Nuclear, site du NTI : « China's 1996 signing of the CTBT [Comprehensive Nuclear Test Ban Treaty] was the latest in a series of policy shifts on nuclear nonproliferation issues. »
- (en) Nuclear Disarmament China, site du NTI : « Nuclear Weapons Policies / Nuclear Testing / Has observed a nuclear testing moratorium since July 1996 / Signed but did not ratify the CTBT. »
- Anne-Marie Blondeau, Le Tibet est-il chinois ?, Albin Michel, 2002, p. 340 : « Elle est accusée de faire commerce de ses armes et, en particulier, d'avoir fourni l'arme nucléaire au Pakistan et de continuer à l'aider dans son programme d'armement (Domenach et Richer, 1987, pp. 605 et 625-626). »
- (en) Taylor Fravel, China Views India's Rise : Deepening Cooperation, Managing Differences p. 65-101 in Strategic Asia 2011-12: Asia Responds to Its Rising Powers - China and India (Ashley J. Tellis, Travis Tanner and Jessica Keough (eds), NBR, 2011 (ISBN 0981890423 et 9780981890425), p. 90.
- http://www.rdss.info/
- (en) site du NTI (Nuclear Threat Initiative) : « Beginning with its first test on 16 October 1964, China conducted a total of 45 nuclear weapon tests -- 23 atmospheric and 22 underground -- ranging in yield from about 1 kiloton to about 4 megatons. China first tested underground on 23 September 1969. China's largest atmospheric test was 4 MT, conducted on 17 November 1976; its largest underground test was 660 kT, conducted on 21 May 1992. China has conducted all of its nuclear weapons testing at Lop Nur, typically in the late spring and early fall. »
- (en) China Overview Last updated: October, 2013, Nuclear Threat Initiative.
- China Overview, op. cit. : « China's signature of the Comprehensive Nuclear Test Ban Treaty (CTBT) [...]. »
- Emmanuel Gonon, Marches et Frontières: Géopolitique des Conflits de Voisinage Dans les Himalayas, 2011, Presses de l'université du Québec, (ISBN 2760527034), p. 270 et 271.
- Emmanuel Gonon, op. cit., p. 253.
- (en) Madan Gopal Chitkara, Toxic Tibet Under Nuclear China, 1996, p. 51 « The testing site for China's first atomic explosion in 1964 was close to the Ninth Academy. »
- (en) Lakhan L. Mehrotra, India's Tibet policy: an appraisal and options, Tibetan Parliamentary and Policy Research Centre (New Delhi, India), 1re édition : 1997, p. 28 : « China conducted its first nuclear test in 1964 at a site close to the Ninth Academy in the region east of Kokonor in the gold and silver sand area. By that act it gave a message to India, the then Soviet Union and the United States of America as well as to Taiwan. », voir aussi l'édition de 2000 : p. 53
- Loïc Trebord, Un tabou, les déchets nucléaires, GEO Tibet, no 186, août 1994, p. 99. « C'est également près de ce site qu'a eu lieu, en 1964, la première explosion nucléaire chinoise. Par la suite, les tests nucléaires « officiels » ont été effectués à 1 000 kilomètres de là, dans le bassin désertique du Lop Nord. »
- (en) M. G. Chitkara, Tibet, a reality, APH Publishing, 1994, (ISBN 8170246393), p. 100 : « Thus the "roof of the world" has proved useful for exploring, exploitation of Uranium and for stock-piling and underground testing. The underground atomic testing is likely to development of a "seismic bomb". »
- (en) China report, Volume 19, China Study Centre (India), Centre for the Study of Developing Societies, Institute of Chinese Studies (New Delhi, India), 1983, p. 45 : « Indian Express (3 July 1982) N-TESTS IN TIBET. China has been conducting nuclear tests in several areas of Tibet in order to determine the radiation levels among the people living in those parts, reports Tass. »
- Frédéric Lenoir et Laurent Deshayes, L'épopée des Tibétains : entre mythe et réalité, Fayard, 2002 (ISBN 2-213-61028-2), page 341.
- Vincent Metten, op. cit., « There is wide speculation that the massive labor camps, which held millions of prisoners during the 60s and 70s, provided a steady pool of forced labor for construction of Qinghai’s nuclear facilities and the necessary transport facilities. Therefore, prisoners were possibly exposed to unsafe level of radioactivity. »
- Vincent Metten, op. cit., « Harry Wu, a former prisoner and China prison expert, reported that labor camps in Qinghai used prisoners to excavate radioactive ore, and that prisoners were forced to enter nuclear test sites to perform dangerous work. »
- Vincent Metten, op. cit. : « Other reports detail the use of common and political prisoners in nuclear facilities in Lanzhou, Gansu Province. [...] In Qinghai, placement of huge prison labor camps adjacent to nuclear missile sites were observed on the Tibetan Plateau. »
- (en) I. C. Smith, Nigel West, Historical Dictionary of Chinese Intelligence, pp. 279 et 280.
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- (en) Xiao Qaidam [Hsiao-ch'ai-tan / Smaller Tsaidam37° 31′ N, 95° 25′ E].
- (en) Environment and Development Desk; Department of Information and International Relations; Central Tibetan Administration, Chapter 7: Nuclear Threats, 26 avril 2000 : « Anti-Frigate Missile Centre at Drotsang.A new missile production centre is located at Drotsang (Ch. Ledu; 36.05N, 102.5E), 63 km east of Siling. The secret code number of this centre is 430. It was originally set up in 1986 and was massively expanded in 1995. It is a surrogate of the Ninth Academy and has been producing anti-frigate missiles which are being tested in Lake Kokonor (Chutter 1998). »
- (en) Tsultrim Palden Dekhang, Nuclear Weapons on the Tibetan Plateau, publié sur le site tibet.com (site du gouvernement tibétain en exil), 9 octobre 1998.
- (en) François Gautier, Why must India kow-tow to China?, 18 avril 2008, reproduit sur le site rediff.com.
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- Raymond Meyers (Green Tibet), Le Chinois Sun Xiaodi a reçu le prix international de militantisme anti-nucléaire, mis en ligne sur le site Action des citoyens pour le désarmement nucléaire, 12 décembre 2006.
- (en) Laura S. Ziemer Application in Tibet of the Principles on Human Rights and the Environment, Harvard Human Rights Journal, Vol. 14, Spring 2001 : « The most persistent reports of polluted water come from two particular sites in northern Tibet. One mine is located in the Ngaba Tibetan Autonomous Prefecture, under Sichuan Province, and the other is in Gannan Ti. »
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- (en) China Admits to Nuclear Waste on Tibetan Plateau, Green Tibet - Annual Newsletter 1996, sur tibet.com (ancien site du gouvernement tibétain en exil)
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- (en) Elizabeth C. Economy, Japan and China’s New Nuclear Accountability, Council on Foreign Relations, 15 mars 2011.
- (en) Dolma Kyab.
- Vincent Metten, op. cit., « Let me also mention the case of Dolma Kyab, a young Tibetan writer and teacher who was interested in Chinese military camps and in the issue of pollution from mining and the poisoning of rivers by uranium mining. He was sentenced on 16 September 2005 to 10 years prison for ‘espionage and stealing or passing state secrets”. He serves his sentence at Chushur prison in Lhasa. »
- (en) Tibetan PEN calls for unconditional release of detained Tibetan writers.
- (en) Jo Glanville, Index on Censorship, Beyond Bars: 50 Years of the PEN Writers in Prison Committee, Volume 39 de Index on Censorship, SAGE Publications Ltd, 2011, (ISBN 0857028472 et 9780857028471), p. 204
- Margaret Atwood, Don't tell us what to write. in Beyond Bars: 50 Years of the PEN Writers in Prison Committee, p. 59 :« The publication of this special commemorative issue of Index on Censorship is a noteworthy occasion – and it is an important one, for often PEN and Index on Censorship have been the chief witnesses and recording angels of the erasures of books, as well as other acts against our shared writing-and-reading activity – the murders of journalists, the closing down of newspapers and publishing houses, the trials of novelists. »
- Green Tibet: annual newsletter, Central Tibetan Administration-in-Exile (India). Environment & Development Desk, 1998, p. 15 : « According to (...) Xinhua, in a report dated 20 July 1995, the Ninth Academy was decommissioned in 1987 and the base was moved to sites in Sichuan Province in Eastern Tibet. »
- Quand le dalaï-lama se confie au Point, Le Point, 19 février 2009 : « les Chinois ont placé sur le plateau du Tibet un certain nombre d’ogives nucléaires. Nous savons également qu’ils stockent leurs déchets nucléaires dans des grottes au nord du Tibet, car de nombreux animaux y donnent naissance à des rejetons difformes. Il faut que cela cesse et c’est pour cela que je pense que le bouddhisme et sa religion de non-violence et de compassion peuvent aider la Chine communiste. Une zone de paix ne veut pas simplement dire une absence d’armes nucléaires, mais aussi qu’il n’y ait pas la moindre trace de haine et de violence mentale dans ceux qui la peuplent. »
Bibliographie
- Anne-Marie Blondeau et Katia Buffetrille, Le Tibet est-il chinois ?, éditions Albin Michel, collection « Sciences des religions », 2002, (ISBN 2-2261-3426-3)
Annexes
Articles connexes
Liens externes
- La question tibétaine : souci stratégique ou vestige de la Guerre Froide - Ministère de la Défense (France), [PDF]
- (en) Claude Arpi, Missiles in Tibet, Indian Defence Review, 23-3, juillet-, pp. 38-43 [PDF]
- (en) Nuclear Threat Initiative, China Overview Last updated: May, 2012
- L´Histoire de la première bombe atomique chinoise, CCTV-F Chaîne française, 07-15-2012