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Anacharsis

Anacharsis (áŒˆÎœÎŹÏ‡Î±ÏÏƒÎčς, AnĂĄcharsis) est un philosophe d’origine « barbare » puisque venu en GrĂšce du peuple des Scythes au nord de la mer Noire au dĂ©but du VIe siĂšcle av. J.-C. Il est parfois rangĂ© parmi les Sept sages. Il ne reste aucun texte de lui hormis des traditions indirectes. Ce personnage presque lĂ©gendaire reprĂ©sente l’étranger avisĂ©, le « regard du dehors » dans la civilisation hellĂ©nique, une sorte de prĂ©figuration de la perspective des cyniques mettant Ă  distance les mƓurs habituelles de la CitĂ©.

Anacharsis
Fonction
Roi
Biographie
Naissance
DĂ©cĂšs
Nom dans la langue maternelle
áŒˆÎœÎŹÏ‡Î±ÏÏƒÎčς
Époque
Activités
Période d'activité
VIe siĂšcle av. J.-C.
PĂšre
Gnouros (d)

Biographie

Anacharsis est fils d’un prince scythe, Gnouros (DaucĂ©tĂšs, selon Lucien de Samosate), et d’une Grecque. Il Ă©tait bilingue et appartenait Ă  la classe noble des tarabostes que les Grecs nommaient pilophores (porteurs de bonnets). Son frĂšre Cadouidas aurait Ă©tĂ© roi des Scythes, Ă  ce point cĂ©lĂšbre pour sa franchise qu’il fit passer en proverbe « La façon de parler scythe » Ă  AthĂšnes. Le roi scythe Idanthyrse, qui affronta Darius Ier, pourrait Ă©galement ĂȘtre son neveu[1].

Il serait venu Ă  AthĂšnes vers la 47e Olympiade (vers 588 avant notre Ăšre) et aurait Ă©tĂ© accueilli par Solon, sĂ©duit par sa rĂ©partie. Il aurait Ă©tĂ© le premier Ă©tranger Ă  recevoir les privilĂšges de la citoyennetĂ© athĂ©nienne et aurait mĂȘme Ă©tĂ© initiĂ© aux mystĂšres d'Éleusis de DĂ©mĂ©ter.

D’aprĂšs HĂ©rodote (EnquĂȘte, IV, 76), quand Anacharsis revint chez lui, il aurait Ă©tĂ© tuĂ© par son frĂšre parce qu’il voulait importer les coutumes des Grecs. Les Scythes lui auraient reprochĂ© d’avoir voulu sacrifier Ă  la dĂ©esse CybĂšle.

Doctrine

On lui attribue un livre de 800 vers en grec comparant les usages des Scythes et ceux des Grecs sur la simplicité de vie et sur la guerre. Il n'en subsiste rien.

Certaines de ses sentences sont cependant restées célÚbres.

Un Grec lui ayant fait le reproche d’ĂȘtre Scythe, il lui rĂ©pondit : « Si ma patrie m’est un sujet de honte, toi, tu es un sujet de honte pour ta patrie. » (DiogĂšne LaĂ«rce, Vie d'Anacharsis)

Un de ses sujets d’ironie constants en tant que Scythe est le fait que les AthĂ©niens qui se veulent si prudents sur terre prennent des risques inconsidĂ©rĂ©s en prenant la mer. Apprenant qu’un bateau n’était Ă©pais que de quatre doigts, il s’étonnait qu'une si petite Ă©paisseur prĂ©servĂąt les marins de la mort. (
) On lui demandait si les vivants Ă©taient plus nombreux que les morts. Il dit : « Mais d’abord, ceux qui sont sur mer, dans quelle catĂ©gorie les rangez-vous ? (
) »[2]. Il prĂ©tendait encore que le vaisseau le plus sĂ»r est celui qui est Ă  l’ancre.

Cette derniĂšre phrase explique peut-ĂȘtre la tradition, issue de Strabon selon laquelle il aurait Ă©tĂ© l’inventeur de l’ancre. DiogĂšne LaĂ«rce dit qu'il aurait aussi inventĂ© le tour de potier.

Un autre de ses sujets d’ironie constants est le sport et l’athlĂ©tisme (sujet de l’Anacharsis de Lucien de Samosate, voir ci-dessous). Il Ă©tait surpris de voir les Grecs faire des lois sur la violence, et pourtant rĂ©compenser les athlĂštes de s’ĂȘtre bien donnĂ© des coups. (
)

Selon Dion Chrysostome, Discours aux Alexandrins, 44, il disait que « l’huile rend fou, car aprĂšs s’en ĂȘtre frottĂ©s, les athlĂštes se conduisent les uns envers les autres comme des insensĂ©s. »

Enfin le principal sujet de ses rĂ©flexions est le mensonge et la vie dĂ©naturĂ©e des citĂ©s. À ceux qui lui demandaient ce que les hommes avaient de bon et de mauvais Ă  la fois, il rĂ©pondait : la langue. Il prĂ©fĂ©rait un ami sĂ»r Ă  beaucoup d’amis infidĂšles. Il a dĂ©fini l’Agora comme « un lieu oĂč l’on se trompe mutuellement et oĂč l’on s’enrichit par le vol. »

Il comparait les lois Ă  des « toiles d’araignĂ©es qui n’attrapent que les petites mouches mais laissent passer les guĂȘpes et les plus gros bourdons. »

De nombreuses maximes concernaient la modĂ©ration et la tempĂ©rance : « La vigne porte trois grappes, l’une de plaisir, la seconde d’ivresse, la troisiĂšme de repentir. » Au bas de ses statues, les Grecs inscrivaient : « II faut savoir maĂźtriser sa langue, son cƓur et son sexe. »

On lui attribuait enfin une lettre sans doute apocryphe au roi Crésus, le riche roi de Lydie :

« Je suis venu en GrĂšce, roi de Lydie, pour apprendre les mƓurs et les coutumes grecques. Je n’ai pas besoin d’or, il me suffira pour ĂȘtre heureux d’ĂȘtre devenu meilleur quand je reviendrai en Scythie. Je vais toutefois Ă  Sardes, heureux de vous frĂ©quenter. »

Protagoniste du Banquet des sept sages (Plutarque) il y intervient Ă  quelques reprises (notamment chapitre 12, sur « la maniĂšre dont une maison doit ĂȘtre rĂ©glĂ©e »).

Anacharsis de Lucien

Anacharsis apparaĂźt dans le dialogue de Lucien de Samosate Anacharsis, ou les Gymnases. Il y critique l’athlĂ©tisme en discutant avec Solon d’AthĂšnes.

Il apparaĂźt aussi dans un autre texte de Lucien, Le Scythe, ou le ProxĂšne, oĂč il discute avec son compatriote Toxaris arrivĂ© avant lui Ă  AthĂšnes.

Anacharsis au XVIIIe siĂšcle

En 1788, l'abbé Jean-Jacques Barthélemy (1716-1795), philologue, publia Les Voyages du jeune Anacharsis en GrÚce[3], un récit de voyage détaillé et érudit décrivant les sites et la géographie de la GrÚce classique (une version française de la Description de la GrÚce de Pausanias).

Le voyage du jeune Anacharsis, le descendant du sage renommĂ© en GrĂšce, dure d' au , quelques jours avant le dĂ©clenchement de l'invasion de l'Empire perse par Philippe. Mais l'abbĂ© BarthĂ©lemy retrace Ă©galement d'autres passages de l'histoire athĂ©nienne, tels que les rĂ©formes des lĂ©gislateurs du VIe et VIIe siĂšcle av. J.-C. (Dracon, ÉpimĂ©nide, Solon
), les guerres mĂ©diques, le siĂšge de Syracuse (415 - ), la chute d'AthĂšnes ()
 Il en profite pour rĂ©diger de longues et minutieuses descriptions de diverses villes grecques ou ioniennes, et digresse souvent sur d'autres sujets tels que le thĂ©Ăątre, les coutumes et traditions des peuples, et la philosophie.

Un dĂ©tail qui caractĂ©rise ses Ă©crits : BarthĂ©lemy dĂ©cida, par souci de prĂ©cision, de noter en bas de ses pages chacune des rĂ©fĂ©rences antiques qu'il utilise, et convertit lui-mĂȘme les dates antiques et les valeurs monĂ©taires ou de poids. Nombre d'Ă©crivains cĂ©lĂšbres aprĂšs lui (dont Chateaubriand) se contentĂšrent de reprendre les notes scrupuleusement Ă©crites par l'abbĂ© lorsqu'ils voulaient parler de l'AntiquitĂ©, au lieu de refaire la recherche par eux-mĂȘmes
 L'Anarcharsis renferme de nombreuses informations trĂšs prĂ©cieuses sur le vin : mƓurs et vie civile des athĂ©niens, fĂȘtes, grandes Dionysiaques, culte de Bacchus, repas, mƓurs de table, plats, boissons, longues listes de nourriture avec leurs provenances, cuisiniers, recettes, divers vins de GrĂšce et des Ăźles ; fĂȘtes des Spartiates, fĂȘtes et mystĂšres d'Éleusis, l'agriculture, etc.

Au moyen d'un cadre simple et ingĂ©nieux, BarthĂ©lemy y prĂ©sente le tableau fidĂšle de la GrĂšce au siĂšcle de PĂ©riclĂšs et de Philippe ; il avait employĂ© 30 annĂ©es Ă  Ă©lever ce monument ; on estime surtout l'Introduction de l'ouvrage. Le livre eut un Ă©norme succĂšs en France et Ă  l’étranger. Au point d'ĂȘtre considĂ©rĂ© comme « le dernier grand succĂšs littĂ©raire du XVIIIe siĂšcle »[4]. Il contribua au renouveau du nĂ©oclassicisme et eut de nombreuses imitations tout au long du XIXe siĂšcle. RenĂ© Étiemble qualifiera cet ouvrage d’« illustre fadaise. »

C’est en rĂ©fĂ©rence Ă  Anacharsis que pendant la RĂ©volution française, le rĂ©volutionnaire d’origine prussienne Jean-Baptiste Cloots (ou Clootz) s’est fait appeler Anacharsis Cloots.

Bibliographie

Sources

Continuations

Notes et références

  1. Ellis Hovell Minns, Scythians and Greeks: A Survey of Ancient History and Archaeology on the North Coast of the Euxine from the Danube to the Caucasus, Cambridge University Press, 2011, p. 116. (ISBN 1108024874)
  2. Jean-Marie Kowalski, « Les marins et la mort. ActualitĂ© d’un mythe », sur www.ifmer.org (consultĂ© le )
  3. remacle.org
  4. "Abbé Jean-Jacques Barthélemy", in Je m'appelle Byblos, Jean-Pierre Thiollet, H & D, 2005, p. 250.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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