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Abbaye Saint-Pierre de Vertheuil

L'abbaye Saint-Pierre est une ancienne abbaye située sur la commune de Vertheuil, dans le département de la Gironde, en France.

Abbaye de Saint-Pierre
de Vertheuil
Présentation
Type
Style
Patrimonialité
Coordonnées
45° 15â€Č 02″ N, 0° 50â€Č 03″ O
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Localisation

L'abbaye Saint-Pierre se trouve au centre du bourg de Vertheuil.

Historique

L'histoire de l'abbaye Saint-Pierre est mal connue, car il ne reste que peu d'archives. Il semble que Guillaume VIII d'Aquitaine (1058-1086) en serait le fondateur, car il est mentionnĂ© dans une bulle pontificale du , par laquelle le pape Alexandre III prenait sous sa protection l'abbaye et la plaçait sous la rĂšgle des chanoines rĂ©guliers de saint Augustin. L'abbaye fut certainement fondĂ©e avant 1081, car il existe une charte datĂ©e de 1081, oĂč le captal de Vertheuil (Girald) confirme toutes les donations faites par son pĂšre (Aefredus) en faveur de l'Ă©glise[1].

La lĂ©gende locale raconte que l'abbaye est construite sur les fondations d'une Ă©glise palĂ©ochrĂ©tienne, elle-mĂȘme construite sur les ruines d'une villa gallo-romane.

L'abbé Baurein[2] fait remonter l'origine de l'abbaye au Xe siÚcle et il donne une liste des abbés à partir de 1106, commençant avec Eudon, un religieux bénédictin de l'abbaye de La Sauve-Majeure. Elle est occupée par les chanoines réguliers de saint Augustin à partir du XIIe siÚcle.

De l’antique monastĂšre, restent seulement des vestiges d’arcades, des caves voĂ»tĂ©es, les soubassements de certains murs actuels, un four Ă  pain et le mur de l’ancien cuvier.

Lors des Guerres de Religion, en 1577, elle subit le siĂšge du Vicomte de Castillon, chef des Huguenots du MĂ©doc, et connait le pillage et la destruction des archives.

La reforme de Chancelade fut introduite en 1665[3].

Au milieu du XVIIIe siĂšcle, l'abbaye compte une quarantaine de religieux[4] avec Ă  leur tĂȘte un abbĂ© commendataire. Ils ne sont que trois Ă  la veille de la RĂ©volution.

En 1792, l'abbaye est déclarée bien national et est rachetée en 1797 par Robert Skinner, armateur bordelais d'origine écossaise. L'abbaye devint un lieu de résidence et fut dotée d'un parc à l'anglaise avec piÚce d'eau, qui remplaça le potager des moines. De la famille Skinner, elle passe à la famille d'Elbaue, dont une fille héritiÚre devient Mme de Kerillis (famille de Jacques Félix Calloc'h de Kerillis, Henri de Kérillis).

Depuis la mort du contre-amiral de Kerillis, le , les propriétaires se sont succédé, mettant le bùtiment à mal, puisque l'aile gauche, qui abritait les cuisines, a disparu, ses pierres ayant été vendues.

L'Association Culture Loisirs animée par le curé de Vertheuil et les communes de Vertheuil, Cissac et Saint-Sauveur la racheta pour mettre un terme à cette démolition. Elle est revendue à la commune de Vertheuil en 1973.

En 1977 l'abbaye retrouve son ordonnance du XVIIIe siĂšcle.

L'abbaye bénéficie de multiples protections au titre des monuments historiques[5] : classement de l'église abbatiale en 1840, classement des vestiges de la salle capitulaire ainsi que des escaliers intérieurs en 1974, inscription des façades et toitures du bùtiment subsistant en 1974 et inscription de la cour antérieure, du jardin clos, des ruines de l'ancien moulin à eau en 1974.

Le monastĂšre

Les bĂątiments claustraux furent plusieurs fois dĂ©truits et reconstruits. De la pĂ©riode mĂ©diĂ©vale, il ne reste plus que des vestiges des caves voutĂ©es (dĂ©truites aprĂšs la Seconde Guerre mondiale), trois arcades gothiques du grand hall et une ouverture avec colonnes et chapiteaux sur le cĂŽtĂ© nord de l’église. La construction actuelle date de la restauration du XVIIIe siĂšcle. C'est vers 1750 que furent construits, avec les pierres de dĂ©molition des murailles et des tours de guet du chĂąteau fort, le nouveau logis des moines et les dĂ©pendances.

  • Façade ouest du monastĂšre.
    Façade ouest du monastÚre.
  • L'Ă©difice vers 1905.
    L'Ă©difice vers 1905.
  • Vue du rez-de-chaussĂ©e.
    Vue du rez-de-chaussée.
  • Vue du rez-de-chaussĂ©e.
    Vue du rez-de-chaussée.
  • Façade est du monastĂšre.
    Façade est du monastÚre.
  • Façade est du monastĂšre.
    Façade est du monastÚre.

L’abbaye Ă©tait construite sur un plan composĂ© de deux ailes perpendiculaires. Le sol Ă©tant surĂ©levĂ© de 1,60 mĂštre pour Ă©chapper Ă  l’humiditĂ©, la salle d’entrĂ©e se termine Ă  chaque extrĂ©mitĂ© par un escalier.

L'église est accolée aux bùtiments, formant l'aile en retour, symétrique de l'aile nord, encore visible en 1905. L'aile nord a été démolie vers 1950 et les pierres vendues. L'ormeau séculaire, au centre, a été également abattu.

La porte d'entrĂ©e de la façade occidentale donne sur un vaste hall de 44 mĂštres de long sur 8 mĂštres de large et qui possĂšde Ă  chaque extrĂ©mitĂ© un escalier, celui de droite a une magnifique rampe de 16 mĂštres de dĂ©veloppement, celui de gauche est plus ancien et plus somptueux que celui qui lui fait face, on y remarque les crosses des pĂšres abbĂ©s.

À cĂŽtĂ© de l'escalier Sud trois grandes arcades ogivales, qui font partie de l'ancienne abbaye du Moyen Âge, ont Ă©tĂ© murĂ©es et redĂ©couvertes en 1875 lors des travaux effectuĂ©s par le propriĂ©taire de l'Ă©poque, Richard d'Elbauve.

Une piÚce en cours de réfection se trouve au premier étage, au-dessus de la sacristie et c'est là que se situe le clocher octogonal.

L’entrĂ©e dans la façade orientale se fait par une salle ornĂ©e de boiseries du XVIIIe siĂšcle. CĂŽtĂ© jardin, elle s’ouvre sur une grande terrasse avec un perron Ă  sept marches, de style Louis XV.

On trouve dans le parc et dans les communs un four à pain et un petit moulin à moutarde. Au XIe siÚcle, le parc fut planté d'arbres aux essences rares, toutes à peu prÚs disparues. La municipalité de Vertheuil replante ce parc au fil du temps.

La salle capitulaire et l'escalier intérieur sont classés par les monuments historiques et les façades, toiture, cour intérieure, jardin et ruines du moulin sont inscrits à l'inventaire des monuments historiques en 1974.

L'Ă©glise abbatiale

Les archives de l'abbaye de Vertheuil sont à peu prÚs anéanties, et on n'a pas de document sur la construction de l'église. Sa construction commence à la fin du XIe siÚcle. L'orientation de l'église incline vers le sud.

L'église subit des modifications au XVe siÚcle. Un voûtement d'ogives remplace le berceau central de la nef et l'édifice est fortifié lors des Guerres de Religion. Les chapelles du chevet sont surélevées et dotées de meurtriÚres et un clocher de défense est construit au sud. Elle fut assiégée et dévastée, en 1572, par le comte de Castillon.

En 1732, deux maĂźtres architectes de Bordeaux firent une visite des immeubles bĂątis qui appartenaient Ă  Vertheuil. Du procĂšs-verbal il rĂ©sulte que l'Ă©glise Ă©tait fort nĂ©gligĂ©e: « il y avait sur les murs bien des herbes Ă  arracher, des joints Ă  refaire, des pierres Ă  remplacer, des trous Ă  boucher; la tĂȘte des divers contreforts Ă©tait dĂ©gradĂ©e; les charpentes se trouvaient dans un Ă©tat lamentable. » Le gros Ɠuvre n'Ă©tait pas trop atteint ; toutefois, les experts signalent dans le bas-cĂŽtĂ© Nord trois arcs doubleaux et trois voĂ»tes, et dans le bas-cĂŽtĂ© Sud deux arcs doubleaux et une voĂ»te « fendus par un grand effort; ce qui est trĂšs nĂ©cessaire de remĂ©dier au plus tĂŽt ». Ils conseillaient d'arrĂȘter le mouvement par des tirants en fer.

Son Ă©tat gĂ©nĂ©ral se dĂ©tĂ©riorant toujours plus, l’église fut restaurĂ©e au XIXe siĂšcle, successivement par les architectes Joseph-Adolphe Thiac, Paul Abadie pĂšre et Albert Couru[6].

La nef

Plan de l'Ă©glise de Vertheuil.

L'Ă©glise se caractĂ©rise par une longue nef Ă  quatre travĂ©es, dont la plus occidentale est rectangulaire au lieu d'ĂȘtre carrĂ©e. La nef est prolongĂ©e au nord et au sud par deux bas-cĂŽtĂ©s.

Les piliers entre la nef et les bas-cĂŽtĂ©s sont alternĂ©s de deux en deux, ils ont du cĂŽtĂ© de la nef un support pour le doubleau. La travĂ©e droite du chƓur prĂ©sente des arcades rĂ©trĂ©cies et des supports renforcĂ©s, afin de mieux rĂ©sister au poids des clochers qui sont Ă©levĂ©s sur les bas-cĂŽtĂ©s. La longueur de la nef est 40,30 m et sa largeur de m. Chaque bas-cĂŽtĂ© est large de m.

La nef et le chƓur sont voĂ»tĂ©s d’ogives et les bas-cĂŽtĂ©s d’arĂȘtes. Ces voĂ»tes ont Ă©tĂ© reconstruites presque entiĂšrement Ă  la fin de la pĂ©riode gothique : une clef de voĂ»te porte des fleurs de lys. On peut voir sous le toit les arrachements de la maĂźtresse voĂ»te primitive; il reste Ă©galement, au-dessus des deux travĂ©es occidentales du collatĂ©ral Sud et sous le clocher Nord, des spĂ©cimens d'anciennes voĂ»tes des bas-cĂŽtĂ©s.

Du point de vue de la sculpture, la nef se divise en deux parties :

  • dans les trois piliers Ă  l’ouest, la sculpture est variĂ©e, riche et trĂšs belle, avec des personnages et des scĂšnes ;
  • Ă  l’est, les chapiteaux sont rĂ©pĂ©titifs et pauvres, et leur dĂ©cor est composĂ© Ă  peu prĂšs uniquement de feuillages stylisĂ©s dont la pointe se recourbe en crochet.

LĂ©o Drouyn pensait que cette seconde partie Ă©tait plus ancienne. Dans ses Notes archĂ©ologiques, il met en avant cette cassure stylistique : « [
] Ă  partir du 4e pilier au sud-ouest, les sculptures changent de caractĂšre et il est Ă©vident pour moi qu’elles sont plus anciennes que celles que je viens de dĂ©crire. Les travĂ©es ouest et les chapelles absidiales auraient ainsi Ă©tĂ© ajoutĂ©es Ă  une Ă©poque plus avancĂ©e de la pĂ©riode romane. »

Jean-Auguste Brutails pensait le contraire : « Quant à la nef, la partie Ouest a une ornementation fort belle et nullement archaïque; mais la partie orientale, de style plus systématisé, plus sÚchement rationnel, dénote, à mon sens, une date moins reculée. Les travaux de l'église auraient marché de l'Ouest vers l'Est. »

Les piliers entre nef et collatéraux sont alternés : de deux en deux, ils ont du cÎté de la nef un support pour le doubleau. De plus, les trois premiÚres paires de piliers à l'Ouest ne sont pas combinées comme les paires suivantes : celles-ci sont plus simples et ont, sur les cÎtés, des pilastres sans colonnes engagées.

Les chapiteaux situés au sommet des piliers dans la partie ouest de la nef présentent un riche décor sculpté, typique de l'iconographie romane[7].

  • Chapiteaux
  • Tireurs des commissures.
    Tireurs des commissures.
  • Homme entourĂ© de rapaces.
    Homme entouré de rapaces.
  • Exhibitionnistes.
    Exhibitionnistes.
  • Tireurs des commissures : sur chaque angle de la corbeille, au niveau de l'astragale, la tĂȘte d'un homme ; derriĂšre lui, un homme, apparemment assis sur ses Ă©paules, a mis les mains dans sa bouche et tire les commissaires.
  • Homme et rapaces : sur la face principale du chapiteau, un homme debout, ses pieds sur l'astragale. Il est habillĂ© en tunique courte et richement brodĂ©e. Ses mains sont en contact avec les ailes de deux Ă©normes rapaces qui se trouvent sur les angles de la corbeille, leurs serres posĂ©es Ă©galement sur l'astragale.
  • Exhibitionnistes : sur chaque angle de la corbeille se trouve une femme nue, les pieds posĂ©s sur l'astragale et les jambes tenues Ă©cartĂ©es par des mains sur les cuisses. Ce type d'exhibitionnisme gĂ©nital est trĂšs frĂ©quent sur les modillons romans (voir Iconographie des modillons romans pour plus de dĂ©tails). On le trouve Ă©galement sur des chapiteaux de certains abbayes et monastĂšres, par exemple au PrieurĂ© de Saint-Macaire.
  • Chapiteaux
  • Hommes liĂ©s de bouche Ă  bouche.
    Hommes liés de bouche à bouche.
  • Fruit et feuilles.
    Fruit et feuilles.
  • Lions montĂ©s Ă  l'envers.
    Lions montés à l'envers.
  • Cracheurs de lianes.
  • Fruits et feuilles : sur les trois faces du chapiteau on voit des feuilles ligaturĂ©es et sur les angles un fruit sphĂ©rique.
  • Lions montĂ©s Ă  l'envers : sur la face principale du chapiteau se trouvent deux lions adossĂ©s, leur tĂȘte sur les angles de la corbeille. Chaque lion est montĂ© par un cavalier, mais l'homme est montĂ© face Ă  la croupe de la bĂȘte. Cette position est trĂšs dĂ©gradante pour l'homme.

La travĂ©e du chƓur, moins longue que les prĂ©cĂ©dentes, a une seule arcade sur chaque flanc et ses piles sont allongĂ©es dans le sens de l'axe. Ainsi, dans cette partie de l'Ă©glise, les arcades sont rĂ©trĂ©cies et les supports sont renforcĂ©s, afin de mieux rĂ©sister Ă  la pesĂ©e des clochers, qui sont Ă©levĂ©s sur les bas cĂŽtĂ©s au droit du chƓur. Les clochers ont, d'ailleurs, causĂ© des dĂ©sordres et nĂ©cessitĂ© des remaniements importants : il a fallu, Ă  diverses Ă©poques, murer les arcades du chƓur et quelques-unes des arcades voisines.

Sanctuaire et déambulatoire

L’église ne comporte pas de transept, mais, Ă©lĂ©ment trĂšs rare en Gironde, un dĂ©ambulatoire, voĂ»tĂ© en berceaux radiants trapĂ©zoĂŻdaux, Ă  partir duquel s’ouvrent trois chapelles. La seule autre Ă©glise romane en Gironde avec un dĂ©ambulatoire est l’église Notre-Dame de GuĂźtres.

L'abside avait auparavant sept grandes arcades, et ces sept grandes arcades s'ouvraient sur autant de travées du déambulatoire qui est divisé en travées trapézoïdales par des arcs transversaux en plein cintre, sur lesquels sont posés des berceaux rampants, en forme de demi-troncs de cÎne.

Sur le dĂ©ambulatoire s’ouvrent trois chapelles, celle du centre est carrĂ©e, les autres sont voĂ»tĂ©es en cul-de-four. Elles furent toutes trois exhaussĂ©es et fortifiĂ©es au XVIe siĂšcle durant les guerres de Religion.

  • Les trois chapelles du dĂ©ambulatoire
  • Absidiole nord-est.
    Absidiole nord-est.
  • Absidiole est.
    Absidiole est.
  • Absidiole sud-est.
    Absidiole sud-est.

Voûte du sanctuaire

La voĂ»te du chƓur est partagĂ©e en sept pans par des nervures qui s’appuient sur des culots sculptĂ©s.

  • Autel majeur.
    Autel majeur.
  • VoĂ»te du sanctuaire.
    Voûte du sanctuaire.

Ces culots sont des représentations gothiques d'un thÚme recourant dans l'art roman : les péchés capitaux et en particulier la paresse et la luxure. (Voir Iconographie des modillons romans pour plus d'information à ce sujet.)

  • culs-de-lampe des nervures de la voĂ»te
  • Se jeter dans la gueule de la bĂȘte.
    Se jeter dans la gueule de la bĂȘte.
  • Femme exhibitionniste.
    Femme exhibitionniste.
  • BestialitĂ©.
    Bestialité.
  • Le paresseux.
    Le paresseux.
  • L'ahuri.
    L'ahuri.

Ils reprĂ©sentent l'homme pĂ©cheur qui plonge ses mains volontairement dans la gueule d'une bĂȘte malĂ©fique ; une femme soulevant sa jupe et Ă©cartant ses cuisses ; un homme et une bĂȘte se caressant ; un paresseux ; le tout sous le regard ahuri d'un homme.

Mobilier liturgique

L’église conserve un mobilier liturgique d’une grande raretĂ©, qui a particuliĂšrement retenu l’attention de LĂ©o Drouyn. Celui-ci a tout d’abord laissĂ© le dessin d’une piscine amĂ©nagĂ©e Ă  la fin du Moyen Âge qui rĂ©utilise pour base une pierre sculptĂ©e romane. Celle-ci a disparu, elle Ă©tait placĂ©e au sud du chƓur.

À l'intĂ©rieur de l'Ă©glise, Ă  gauche du portail sud, se trouvent les fonts baptismaux. Ils sont cannelĂ©s et monolithes. Ils auraient Ă©tĂ© sculptĂ©s, au XVe siĂšcle, dans une pierre qui aurait servi de lest Ă  un navire commercial anglais venu, Ă  vide, chercher du vin dans la rĂ©gion. Les fonts ont Ă©tĂ© classĂ©s en 1840[8].

Des fonts baptismaux semblables, et datant de la mĂȘme Ă©poque, se trouvent dans l'Ă©glise de Vensac, une commune voisine et dans l'Ă©glise Notre-Dame de Bayon-sur-Gironde, sur l'autre rive de la Gironde.

Le lutrin en bois du XVe siĂšcle est peut-ĂȘtre le seul de cette Ă©poque existant encore dans le dĂ©partement de la Gironde. Cet objet en bois sculptĂ© servait Ă  poser le livre de chant lors des offices. Le lutrin a Ă©tĂ© classĂ© en 1903[9].

Une tribune d'orgue en pierre. Dans le mur nord du chƓur, au-dessus des stalles, se trouve un encorbellement gothique sculptĂ© du XVe siĂšcle qui s’élĂšve vers la voĂ»te. C'est une tribune pour une orgue mais l’on s’en servit comme tribune au XVIIIe siĂšcle. On y accĂšde par un escalier situĂ© dans le pilier du chƓur. La tribune a Ă©tĂ© classĂ©e en 1840[10].

La chaire Ă  prĂȘcher : le prĂȘtre montait jadis dans cette petite tour de bois pour surplomber les fidĂšles et donner plus de force Ă  ses critiques ou ses conseils.

  • Fonts baptismaux.
    Fonts baptismaux.
  • Lutrin.
    Lutrin.
  • Tribune d'orgue.
    Tribune d'orgue.
  • Chaire Ă  prĂȘcher.
    Chaire Ă  prĂȘcher.

Les stalles

Des stalles de bois sont placĂ©es de part et d’autre du chƓur. Quatorze siĂšges sont conservĂ©s. Elles ont Ă©tĂ© fabriquĂ©es Ă  la fin du XVe siĂšcle et classĂ©es[11] en 1840. Ces stalles proviennent, peut-ĂȘtre, de la salle capitulaire de l'abbaye.

Une seule des miséricordes des stalles est figurée, avec une représentation d'Adam et Ève.

DiffĂ©rents thĂšmes sont abordĂ©s sur les accoudoirs : une femme chevauchant un homme bridĂ© comme un cheval. C'est une reprĂ©sentation du Lai d'Aristote. Celui-ci s’appliquant Ă  dĂ©tourner Alexandre le Grand des charmes d’une belle indienne indique, par sa posture Ă  quatre pattes, qu’il est devenu l’esclave de la femme qui est sur son dos, comme le sera Alexandre s’il succombe Ă  l’amour.

Un moine au tonnelet, témoin de la présence des bénédictins, reconnaissables à leur coule.

Des créatures grotesques.

Ce type de mobilier est trĂšs rare en Gironde. Celles de Vertheuil sont les plus anciennes, mais l’on peut signaler les stalles de la collĂ©giale de Saint-Émilion, l'Ă©glise de Saint-Étienne-de-Lisse (dont un des accoudoirs figure la sculpture d'une femme nue Ă  cheval) ainsi que celles de la Basilique Saint-Seurin de Bordeaux.

  • Stalles
  • ChƓur Sud.
    ChƓur Sud.
  • ChƓur Nord.
    ChƓur Nord.
  • Adam et Ève.
    Adam et Ève.
  • Lai d'Aristote.
    Lai d'Aristote.

Extérieur de l'église

La place de l'église marque l'emplacement de l'ancien cimetiÚre, des dalles de pierre matérialisent le tracé de son mur.

Une inscription, difficilement lisible, sur la croix, relate que dans les années 1570, lorsque les Guerres de Religion faisaient rage, fut exécuté, sur ordre du roi Charles IX, un magistrat protestant du village, le juge Esqui.

Le portail

Dans le mur sud de l'Ă©glise se trouve un portail roman d’inspiration saintongeaise. Le portail a Ă©tĂ© modifiĂ© au XVIIe siĂšcle par l’ajout d’un encadrement de porte de style nĂ©o-classique prĂ©sentant une tĂȘte d’angelot. C’est que, jusqu’alors, l’église Ă©tait la propriĂ©tĂ© des religieux, qui y pĂ©nĂ©traient Ă  partir de l’abbaye. Lorsqu’en 1753, l'Ă©glise devint paroissiale, on sacrifia au style nĂ©o-classique.


Les trois voussures du portail sont assez érodées, mais encore lisibles.

Sur la premiĂšre voussure on voit une sĂ©rie (22 actuellement, mais probablement 24 avant la modification du portail) d'hommes habillĂ©s en tunique longue. Les figures sont assez Ă©rodĂ©es, certains observateurs pensent que les hommes se tiennent la barbe, d'autres qu'ils jouent un instrument de musique (flĂ»te ou pipeau). C'est certainement une reprĂ©sentation des Vieillards de l’Apocalypse Apocalypse de Jean, chapitre 4, verset 4 : Autour du trĂŽne Ă©taient vingt-quatre trĂŽnes, et sur ces trĂŽnes vingt-quatre vieillards assis, revĂȘtus de vĂȘtements blancs, avec des couronnes d'or sur leurs tĂȘtes[12]. Ce thĂšme Ă©tait assez populaire en Aquitaine, mais rarement avec les vingt-quatre en totalitĂ©. On trouve des claveaux quasi identiques sur une voussure du portail de l'Ă©glise Notre-Dame d'Avy oĂč les personnages jouent clairement des instruments de musique.

La deuxiĂšme voussure est dĂ©corĂ©e avec une sĂ©rie de personnages entremĂȘlĂ©s avec des lianes.

Au sommet de la troisiĂšme voussure se trouve un personnage qui tient dans chaque main un cor ou une trompette qu'il sonne, sans doute une autre rĂ©fĂ©rence Ă  l'Apocalypse de Jean, tandis que de part et d’autre, des personnages, opposĂ©s deux Ă  deux, s’activent dans la vigne ou les champs.

L'archivolte est décorée avec une série d'hommes, partant de l'est et allant vers l'ouest, qui portent un rinceau sur l'épaule et qui le tiennent entre les mains. Habituellement les décorations sont symétriques par rapport au sommet de l'arc.

  • Portail de Saint-Pierre.
    Portail de Saint-Pierre.
  • Le portail en 2022 avec son abri en bois.
    Le portail en 2022 avec son abri en bois.
  • Voussures (dĂ©tail).
    Voussures (détail).
  • Église Notre-Dame d'Avy.
    Église Notre-Dame d'Avy.

Les clochers

La présence de deux clochers, édifiés sur les cÎtés sud et nord de l'église, est unique en Gironde. Le plus ancien (XIIe siÚcle), au nord, est le plus ouvragé. Il est à trois niveaux :

  • le premier est brut, si bien que les colonnes engagĂ©es qui ornent le deuxiĂšme niveau, qui est Ă©galement carrĂ©, portent sur des culs-de-lampe ;
  • le troisiĂšme niveau est de plan octogonal et il Ă©tait destinĂ© peut-ĂȘtre Ă  porter une flĂšche conique renflĂ©e, pareille Ă  certaines flĂšches de la Saintonge. Les deux Ă©tages sont percĂ©s de fenĂȘtres romanes cintrĂ©es et surmontĂ©s d'une corniche.

Le plus rĂ©cent (XVIe siĂšcle), au sud, est une tour carrĂ©e, construite pour la dĂ©fense, lors des Guerres de Religion. Il abrite un escalier donnant accĂšs au chevet surĂ©levĂ© et fortifiĂ©. On y a accĂšs Ă©galement par l’extĂ©rieur, grĂące Ă  la tourelle qui y est accolĂ©e.

Au-dessus de la porte de la tourelle on distingue une sculpture en mauvais Ă©tat. C’est un blason qui a probablement appartenu Ă  un abbĂ© au XVe siĂšcle : une mitre et une crosse (signes distinctifs d'un abbĂ©) ; trois coquilles (en rĂ©fĂ©rence aux pĂšlerins sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle) ; un lion rampant signale l'appartenance de la Guyenne au royaume d'Angleterre. Ce blason est dĂ©sormais celui de la commune.

  • Clocher nord vers 1895 (Brutails).
    Clocher nord vers 1895 (Brutails).
  • Clocher nord en 2015.
    Clocher nord en 2015.
  • Absidioles et clocher sud.
    Absidioles et clocher sud.
  • Le clocher sud et son horloge.
    Le clocher sud et son horloge.

Abbés

Liste établie d'aprÚs celle de l'abbé Hugues Du Tems.

Abbés réguliers

  • 1106 : Eudon, ou Eudes, un religieux bĂ©nĂ©dictin venant de l'Abbaye de La Sauve-Majeure.
  • 1187 : Guillaume Ier de Peis ou Pers
  • 1234 : Gombaud de La Fite
  • 1254 : Wilhem ou Guillaume
  • 1263-1264 : un abbĂ© anonyme
  • 1309 : Guillaume Fortoneau ou Wilhem Hortunel ou Guilhem Fortoneu, vraisemblablement un prĂ©lat de la cour du pape ClĂ©ment V car il est nommĂ© dans les actes Monseigneur.
  • 1344 : Ramond Faure
  • 1358 : Vital Roland (dans un titre de un: Videau Rollan Ă©toit per la gracia de Diu, Abbat der Monastey de Sent Pey de Verthulh Est-ce le mĂȘme?
  • 1364 : Arnaud de Luc
  • 1407 : Pierre d'Arinhac
  • 1409 : Pierre II
  • 1412 : Pierre III Pallet
  • 1436 : Pierre IV de Rinhac (est-il en rapport avec Pierre d'Arinhac ?)
  • 1440 : Menaud de Casebelle ou Menault de Casavelhe dans un acte de bail Ă  fief rĂ©digĂ© par Yvon Nobilis notaire en janvier 1441.
  • 1455 : Helias Capuch (ou Capos) en date du 5 novembre, licenciĂ©, sans prĂ©cision de facultĂ©
  • 1664 et 1478 : Menaud II
  • 1483 : Jacques de Saint-Martin, suivant un titre du un nommĂ© Jean de Saint-Martin est abbĂ©
  • 1493 : Pierre V ou Pey Garric

Abbés commendataires

  • 1515 : Pierre VI Pallet, conseiller au Parlement de Bordeaux
  • 1523 : Jean Drouilhet
  • 1524-1534 : Michel Gouyn
  • 1552-†.4 septembre 1573 : Nicolas de La Chassaigne[Notes 1], conseiller du Roi en sa Cour du Parlement de Bordeaux, chanoine comme son frĂšre Guillaume de la CathĂ©drale Saint-AndrĂ© de Bordeaux. Oncle de Françoise de La Chassaigne et de don Ă©poux Michel Eyquem de Montaigne[13]
  • 1573-1578 : Pierre de Vergey
  • 1577-1600 : Guillaume de La Chassaigne, frĂšre de Nicolas, prend possession le , lettres de provisions datĂ©es de Rome le . Il Ă©tait comme son frĂšre Nicolas chanoine de la CathĂ©drale Saint-AndrĂ© de Bordeaux[14]
  • 1600-1648 : Lancelot de Mulet de Volusan, conseiller du Roi au Parlement de Bordeaux, par bulle du pape ClĂ©ment VIII en date du , il prit possession le [15]
  • 1648- av.1674 : Michel Girard, homme de lettres secrĂ©taire du duc d'Épernon prit possession le
  • 1680 : Claude Jaillot de Beaumont
  • 1686-1686 : Pierre Sabatier (1654-1733), se dĂ©mit la mĂȘme annĂ©e. Il fut nommĂ© Ă©vĂȘque d'Amiens en 1706.
  • 1686-1732 : Jean de Clermont-Toury
  • 1732 : RenĂ© ou Étienne de Courtarvel [Notes 2] , vicaire-gĂ©nĂ©ral de Blois
  • 1784 - 1790 : Toussaint-Joseph-Pierre de Boisboissel[Notes 3]. (nĂ© le -mort le )[16], , prĂȘtre reçu Chanoine, Comte de Lyon en 1779, vicaire-gĂ©nĂ©ral, chanoine et comte de Lyon, pourvu par lettres de provisions en date du

Propriétés, revenus et dépenses

Elle est taxĂ©e en Cour de Rome Ă  125 florins et vaut 7 000 livres.

Cures

Notes et références

Notes

  1. fils de Geoffroi de La Chassaigne, seigneur de Pressac (1491-1565), conseiller au Parlement de Bordeaux, second président et de son épouse Catherine de Lescours (1490-1532), et frÚre de Joseph de La Chassaigne (v. 1515-1572) Soudan de Pressac, de Guillaume abbé
  2. Il faut lire Etienne peut ĂȘtre Ă  la place de RenĂ©, mais COURTARVEL et non COURTAVEL voir: Nicolas Viton de Saint-Allais, Nobiliaire de France, Bureau du Nobiliaire de France, Paris, 1818, t.XIII, p. 187
  3. Toussaint-Joseph-Pierre de Boisboissel, (1744-1819) fils de Jean-Joseph, nĂ© le 28 mars 1744 Ă  TrĂ©guier-St-SĂ©bastien. Il fut tonsurĂ© par l'Ă©vĂȘque de TrĂ©guier le 29 dĂ©cembre 1753 (probablement 1763 ?) et obtint, le 17 juin 1767 des lettres de bĂ©nĂ©fice d'Ăąge, lesquelles furent entĂ©rinĂ©es au greffe de la juridiction de la prĂ©vĂŽtĂ© de TrĂ©guier le 8 du mois suivant. Il a Ă©tĂ© reçu en 1779 chanoine comte de Lyon, et a fait ses grandes preuves chapitrales devant M. ChĂ©rin, gĂ©nĂ©alogiste des ordres du roi, au mois de novembre 1785. Vicaire gĂ©nĂ©ral de TrĂ©guier en 1780, puis de Lyon en 1781, il fut nommĂ© par le Roi abbĂ© de Verteuil, ordre de Saint Augustin, au diocĂšse de Bordeaux en 1784. Il devint ensuite vicaire gĂ©nĂ©ral de Monseigneur de Montazet, archevĂȘque de Lyon. IncarcĂ©rĂ© Ă  Saint-Lazare en mars 1791, puis Ă  Pierre-Scize, il fut Ă©largi en juillet. Il dut Ă©migrer le 30 pluviĂŽse an II mais revint Ă  Lyon en 1795. Il fut amnistiĂ© du fait d'Ă©migration par lettre du grand juge Regnier du 25 germinal an XI, et remis en possession de ses biens. Par son testament du 15 novembre 1815, dĂ©posĂ© chez M. Dugueyt, notaire Ă  Lyon, Toussaint-Joseph-Pierre, a instituĂ© son hĂ©ritier universel Jean-Hyacinthe de Boisboissel, son neveu Ă  la mode de Bretagne, et est dĂ©cĂ©dĂ© Ă  Lyon le 7 janvier 1819, le dernier descendant mĂąle de la branche issue de François-Isaac de Boisboissel. Il est inhumĂ© au cimetiĂšre de Loyasse

Références

  1. M. Rabanis, « Église de Vertheuil », Compte-rendu des travaux de la commission des monuments historiques du dĂ©partement de la Gironde,‎ , p. 17-18 (lire en ligne, consultĂ© le ).
  2. Jacques Baurein, Variétés Bordeloises, t. 1, Bordeaux, , 2e éd. (1re éd. 1786) (lire en ligne) : article 2.XXXII, pages 334-338.
  3. A. de Lantenay, « Abbaye de Vertheuil », Revue catholique de Bordeaux,‎ , p. 140.
  4. Abbé Bergier, Dictionnaire de Théologie, t. 2, Toulouse, A. Gaude, , 685 p. (lire en ligne)
  5. « Ancienne abbaye Saint-Pierre de Vertheuil », notice no PA00083859, base Mérimée, ministÚre français de la Culture
  6. Jean-Auguste Brutails, Les vieilles Ă©glises de la Gironde, Bordeaux, Feret et Fils, (lire en ligne), pp. 121-124.
  7. Christian Bougoux, L'imagerie romane de l'Entre-deux-Mers : l'iconographie raisonnée de tous les édifices romans de l'Entre-deux-Mers, Bordeaux, Bellus éd., , 828 p. (ISBN 978-2-9503805-4-9 (édité erroné))
  8. « Fiche de classement des fonts baptismaux », notice no PM33000852, base Palissy, ministÚre français de la Culture.
  9. « Fiche de classement du lutrin. », notice no PM33000854, base Palissy, ministÚre français de la Culture
  10. « Fiche de classement de la tribune d'orgue. », notice no PM33000853, base Palissy, ministÚre français de la Culture
  11. « Fiche de classement des stalles », notice no PM33001028, base Palissy, ministÚre français de la Culture
  12. « Apocalypse de Jean, chapitre 4 », sur Bible catholique (consulté le ).
  13. Généalogie de La Chassaigne, par pierfit sur Geneanet
  14. GUILLAUME de la CHASSAIGNE, chanoine de St-André-de-Bordeaux. 40. - Attestation, signée de Raymond Eyqyem de Montaigne, Guillaume de Gergomus, Léonard Boyot, Arnauld Duhart pour un certificat de vie en faveur de son frÚre, Nicolas de la Chassaigne, comme lui chanoine de St-André de Bordeaux.. s.d. 41. - Cachet de cire, dessin du cachet du seigneur de Montaigne. S. d, Archives nationales de France
  15. Les Cahiers médulliens, numéro:54 du mois de décembre 2010,
  16. Portrait de l'abbé,

Voir aussi

Bibliographie

  • Hugues Du Tems, Le ClergĂ© de France, tome II, pp. 258 et suivantes (en ligne).
  • AbbĂ© J.-B. Pelette, « Lancelot de Mullet, abbĂ© de Vertheuil est-il l'auteur de la Mazarinade “Jugement du CurĂ© Bourdelois”, 1651 ? », Bulletin de la SociĂ©tĂ© des bibliophiles de Guyenne, 1950, p. 90 Ă  94.
  • Pierre Dubourg-Noves, « 55-Vertheuil-en-MĂ©doc », dans Guyenne romane, La Pierre-qui-Vire, Zodiaque, coll. « la nuit des temps no 31 », , p. 35-36
  • Jean Cabanot, « Saint-Pierre de Vertheuil », dans CongrĂšs archĂ©ologique de France. 145e session. Bordelais et Bazadais. 1987, Paris, SociĂ©tĂ© française d'archĂ©ologie, (lire en ligne), p. 343-362
  • Jacques Baurein, VariĂ©tĂ©s bordelaises, Éditions des RĂ©gionalismes, 2020, pp. 259 Ă  262.

Article connexe

Liens externes

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