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4966 martyrs d'Afrique

Les 4 966 martyrs d'Afrique sont les 4 966 Ă©vĂȘques, prĂȘtres et clercs d'Afrique du Nord morts pour leur foi en 483, sous la persĂ©cution du roi vandale HunĂ©ric. Celui-ci, fervent partisan de l'arianisme, veut imposer sa vision religieuse aux membres du clergĂ© chrĂ©tien. Devant leur refus, il les fait dĂ©porter collectivement puis exĂ©cuter.

4966 martyrs d'Afrique
Image illustrative de l’article 4966 martyrs d'Afrique
Martyrs, confesseurs de la foi
DĂ©cĂšs 483
désert d'Afrique du nord
FĂȘte 12 octobre

Leur mĂ©moire est cĂ©lĂ©brĂ©e collectivement dans l'Église catholique le 12 octobre.

Historique

Le contexte

En 429, les Vandales, présents en Espagne, débarquent en Afrique du Nord-Ouest et étendent leur royaume sur ces terres romaines[N 1]. Leur religion est l'arianisme, une variante du christianisme considérée comme une hérésie par les chrétiens fidÚles au symbole de Nicée édicté lors du concile de Nicée en 325. Souhaitant imposer leur vision religieuse, ils mÚnent contre les chrétiens une persécution « sournoise et intermittente ». La mort du roi Genséric, en 477, donne un espoir d'amélioration mais, quelques années plus tard, son fils Hunéric prend des mesures encore plus violentes contre les chrétiens[1] - [2] - [3].

Le rĂ©cit de la persĂ©cution a Ă©tĂ© donnĂ© par Victor, Ă©vĂȘque de Vite. Vers 487, pendant son exil, il compose ce rĂ©cit qui figure dans l'Histoire de la persĂ©cution d'Afrique sous les Vandales, tome 3[N 2] - [4]. Si son tĂ©moignage est de premier ordre, il ne peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme Ă©tant totalement impartial[2]. Il reste, Ă  ce jour, le seul rĂ©cit de cet Ă©vĂ©nement qui nous soit parvenu. La date de la persĂ©cution est incertaine, certaines sources donnent la date de 482 ou de 484, mais la date de 483 semble plus gĂ©nĂ©ralement retenue. La seule certitude historique est que cette persĂ©cution a probablement eu lieu avant le pseudo-concile de Carthage du . Durant ce concile, les Ă©vĂȘques ne furent pas autorisĂ©s Ă  donner leur avis, mais le roi vandale fixa une loi obligeant tous les chrĂ©tiens Ă  se convertir Ă  l'arianisme[2].

La persécution

HunĂ©ric fait arrĂȘter 4 966 Ă©vĂȘques, prĂȘtres, diacres et autres « membres de l’Église »[N 3] de toute la rĂ©gion dont il est alors le souverain. Il les rassemble Ă  Sicca Veneria et Ă  Lares[N 4]. Des responsables vandales tentent de faire flĂ©chir les clercs en leur faisant renoncer Ă  leur foi, mais ceux-ci refusent, proclamant toujours leur foi en « la TrinitĂ© en un seul Dieu ». Les conditions de dĂ©tention, d'abord souples[N 5], se durcissent avec le temps ; les Vandales « enferment les prisonniers dans de sombres rĂ©duits, entassĂ©s comme des sauterelles et d'oĂč ils ne pouvaient sortir pour satisfaire leurs besoins naturels ». Les conditions d'hygiĂšne deviennent dramatiques. Le chroniqueur (l'Ă©vĂȘque Victor) raconte avoir corrompu les gardes pour enfreindre les ordres royaux et rendre visite aux prisonniers, constatant leur situation[2] - [5] - [3].

Ne pouvant les faire flĂ©chir, le roi vandale dĂ©cide de les dĂ©porter. Parmi eux, un vieil Ă©vĂȘque, FĂ©lix d'Abbis Minus, paralysĂ© et pouvant Ă  peine parler, est incapable de suivre la caravane. Il est ligotĂ© et attachĂ© sur le dos d'un mulet « comme un tronc d'arbre », et fait ainsi toute la route avec ses compagnons. Quelques personnes accompagnent les prisonniers, dont Cyprien, Ă©vĂȘque d'Unizibir (qui sera tuĂ©), ou Victor, Ă©vĂȘque de Vite (qui survivra). La caravane de prisonniers se dĂ©place essentiellement la nuit Ă  cause de la chaleur du jour. Pour faire presser le pas aux prisonniers, les soldats les piquent de la pointe de leurs lances, ou jettent des pierres sur « ceux qui n'allaient pas assez vite ». Durant les arrĂȘts, les prisonniers sont enfermĂ©s ; leur Ă©tat physique empire. Le chroniqueur indique que les soldats avaient l'ordre « d'attacher par les pieds ceux qui ne pouvaient marcher et de les traĂźner au sol comme des bĂȘtes mortes ». TrĂšs vite, les plus faibles succombent, leurs tombes jalonnent le chemin. Les prisonniers d'abord sont nourris d'orge[N 6], mais la distribution de nourriture est suspendue lorsque les prisonniers arrivent dans le dĂ©sert[2] - [5] - [6]. Tous les survivants de cet exode sont exĂ©cutĂ©s par les Vandales[3].

Personnes connues

Parmi les martyrs chrĂ©tiens, seuls deux noms sont connus[2] - [5], FĂ©lix, Ă©vĂȘque d'Abbis Minus, qui avait quarante-quatre ans d'Ă©piscopat, et Cyprien, Ă©vĂȘque d'Unizibir.

On connaĂźt aussi la prĂ©sence de la « fille de l'Ă©vĂȘque de Zuritana », trĂšs ĂągĂ©e, et de son fils. Les autres membres ne sont pas nommĂ©s, mĂȘme s'il y avait probablement des Ă©vĂȘques. La seule indication les concernant est leur rĂŽle dans l’Église, prĂȘtres, diacres et clercs, ainsi que de « nombreux fidĂšles ».

FĂȘte et mĂ©moire

Les « saints confesseurs et martyrs » sont commĂ©morĂ©s le . La mention de cette fĂȘte remonte Ă  Florus de Lyon (IXe siĂšcle) qui, en rĂ©digeant son martyrologe, rajoute des fĂȘtes, dont celle-ci, pour « remplir dans son martyrologe les jours laissĂ©s vides par ses prĂ©dĂ©cesseurs ». Il reprend donc les Ă©crits de Victor de Vite pour honorer « plusieurs groupes de martyrs qui n'avaient jamais Ă©tĂ© honorĂ©s d'un culte ». Pour ne pas crĂ©er de confusion avec une fĂȘte ou une canonisation officielle, il utilise le terme vague de « commĂ©moraison ». La date de cette « commĂ©moraison » est placĂ©e le . Mais quelques dĂ©cennies plus tard, Adon de Vienne, dans la rĂ©daction de son propre martyrologe, reprend cette commĂ©moration en la dĂ©plaçant au [2]. Les ouvrages ultĂ©rieurs de « vie des saints » et de « calendrier des fĂȘtes chrĂ©tiennes » reprennent cette date[7]. Aujourd'hui, cette fĂȘte a disparu du calendrier liturgique romain[N 7], ce qui n'empĂȘche pas certaines revues catholiques rĂ©centes de continuer Ă  l'Ă©voquer, telle la revue Magnificat en 2017.

En plus de ces victimes de la persĂ©cution de 483, ce mĂȘme jour, sont cĂ©lĂ©brĂ©s collectivement « tous les chrĂ©tiens d’Afrique du Nord, morts martyrs lors des diffĂ©rentes persĂ©cutions subies au cours des premiers siĂšcles du christianisme »[6].

Notes et références

Notes

  1. Ils bénéficient de tensions et dissensions entre différentes autorités de l'empire.
  2. Cet ouvrage est cité en référence bibliographique par tous les hagiographes et rédacteurs de dictionnaires religieux (ex. : Histoire de la persécution vandale en 5 livres, 487, cité dans Charles-Louis Richard (O.P.), Dictionnaire universel, dogmatique, canonique, historique, géographique et chronologique des sciences ecclésiastiques ... : contenant l'histoire générale de la religion ... avec des sermons abrégés des plus célÚbres orateurs chrétiens ..., t. 5, Paris, chez Jacques Rollin, Charles-Antoine Jombert, Jean-Baptiste-Claude Bauche, , 924 p. (lire en ligne), p. 541 et 542). Cet ouvrage de Victor de Vite a été réédité au XVIe siÚcle et au XVIIe siÚcle sous le titre Histoire de la persécution d'Afrique sous les Vandales par Rheanus en 1535, par Reinard Lorich en 1537, par le pÚre Chifflet en 1664 (voir le commentaire dans Louis Moréri, Le Grand Dictionnaire Historique Ou Le Mélange Curieux De L'Histoire Sacrée Et Profane: S - Z, vol. 6, Paris, Pierre-Augustin le Mercier, , 904 p. (lire en ligne), p. 81) puis par Thierry Ruinard, Paris, 1694 (VoirAbbé J-B Glaire, Dictionnaire universel des sciences ecclésiastiques ...: K-Z, vol. 2, Paris, Poussielgue FrÚres, , 2508 p. (lire en ligne), p. 2403). Si le titre de l'ouvrage peut varier d'une référence à l'autre, le nombre de volumes également (de 3 à 5 volumes indiqué suivant les auteurs), le nombre de 5 est le plus souvent repris.
  3. Le terme de « clercs » est parfois utilisĂ©. Il s'agit probablement de personnes ayant un rĂŽle dans l’Église, comme les lecteurs, qui Ă©taient parfois des enfants.
  4. Ville romaine, aujourd'hui en ruine, Ă  une vingtaine de kilomĂštres au sud de Sicca.
  5. Le chroniqueur indique que les prisonniers ont droit Ă  des visites et mĂȘme de cĂ©lĂ©brer leur culte.
  6. Nourris d'orge « comme des animaux » dit le chroniqueur.
  7. La mĂ©moire de ces saints n'est plus prĂ©sente dans le calendrier du brĂ©viaire, mĂȘme en « mĂ©moire facultative ».

Références

  1. Christian Courtois, Les Vandales et l'Afrique : thÚse pour le doctorat Ús lettres présentée à la faculté des lettres de l'Université de Paris, Paris, Arts et métiers graphiques, (présentation en ligne).
  2. AbbĂ© Vincent Serralda, « les 4966 clercs dĂ©portĂ©s chez les Maures », Pieds-noirs d'hier et d'aujourd'hui, no 67,‎ (lire en ligne, consultĂ© le ) — Article rĂ©Ă©ditĂ© dans le numĂ©ro 156 d'octobre 2007.
  3. « Un jour, un saint, les 4966 martyrs d'Afrique », Magnificat, no 299,‎ , p. 177.
  4. Victor (Vitensis) et Serge Lancel, Histoire de la persécution vandale en Afrique, vol. 368, Belles lettres, coll. « Collection des Universités de France », , 414 p. (ISBN 9782251014296).
  5. Jacqueline Bouette de Blémur, Vie des saints : tirée des auteurs ecclésiastiques anciens et modernes, vol. 4, Lyon, Antoine Toma, , 528 p. (lire en ligne), p. 81-82.
  6. P. Silvio G. Moreno, « Les saints d'afrique du Nord (II) », sur Archéologie et Art chrétien, archeologiechretienne.ive.org, (consulté le ).
  7. abbé Claude Chastelain, Martyrologe universel : traduit en français du martyrologe romain avec un dictionnaire universel des saints, saintes, martyrs, confesseurs... honorés par les chrétiens sur toute la surface de la terre, rédigés sur l'ouvrage de M. l'abbé Chastelain et considérablement augmentés par Mr St Allais, Paris, G. Michaud, , 640 p. (lire en ligne), p. 483.


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