Élection primaire
Une élection primaire est une élection qui permet la désignation du candidat d'un parti politique (ou d'une coalition de partis) à une élection. On distingue généralement les primaires fermées, où seuls les adhérents du parti peuvent voter (on parle alors aussi d'élection interne), et les primaires ouvertes auxquelles l'ensemble des citoyens peut participer. Selon les pays, les élections primaires sont organisées par les partis politiques eux-mêmes (par exemple en France ou en Italie) ou relèvent d'une législation spécifique et ainsi peuvent être obligatoires (Argentine, États-Unis, Uruguay).
États-Unis
Aux États-Unis, la généralisation des élections primaires s'est imposée au cours du XXe siècle à la place de la désignation classique des candidats par les partis politiques[1] : il s'agit d'un moyen pour que les électeurs soient plus directement associés aux prises de décision (mais des recherches en science politique contestent que ce soit vraiment le cas[2]).
Les primaires sont ainsi la règle pour la désignation de presque tous les candidats à tous les niveaux de gouvernement (local, État, fédéral). Il est généralement obligatoire d'être désigné lors de la primaire d'un parti pour se présenter sous l'étiquette de ce parti lors de l'élection générale[3]. Les primaires sont organisées par l'administration selon la législation locale[4] :
- Les primaires fermées permettent aux seuls électeurs inscrits comme affiliés à un parti politique de voter à la primaire de ce parti (dans de nombreux États, l'inscription sur les listes électorales s'accompagne de la déclaration facultative d'affiliation à un parti). Treize États utilisent ce système (Connecticut, Delaware, Floride, Kentucky, Maine, Nebraska, Nevada, New Jersey, Nouveau-Mexique, New York, Oklahoma, Oregon, Pennsylvanie et Dakota-du-Sud)[1].
- Les primaires ouvertes permettent Ă tous les Ă©lecteurs de voter Ă la primaire du parti de leur choix.
- les primaires semi-fermées permettent aux électeurs inscrits comme affiliés à un parti politique de voter à la primaire de ce parti et aux électeurs affiliés à aucun parti de choisir la primaire du parti à laquelle ils souhaitent participer. Treize États utilisent ce système (Alaska, Arizona, Colorado, Iowa, Kansas, Massachusetts, New Hampshire, Caroline-du-Nord, Rhode Island, Utah, Virginie-Occidentale et Wyoming )[1].
- les blanket primaries mettent l'ensemble des candidats de tous les partis sur un bulletin unique : chaque électeur vote pour le candidat de son choix, quel que soit le parti, et le candidat de chaque parti qui recueille le plus de voix peut se présenter à l'élection générale ; ce système a été jugé inconstitutionnel par la Cour suprême ;
- les nonpartisan blanket primaries sont une variation des blanket primaries : tous les candidats sont présentés sur un bulletin unique et les deux candidats qui recueillent le plus de voix peuvent se présenter à l'élection générale ; ce système, similaire au scrutin uninominal majoritaire à deux tours permet à deux candidats du même parti d'être candidats à l'élection générale. La Louisiane, la Californie et Washington utilisent ce système.
Tous les quatre ans, les États organisent des primaires présidentielles qui peuvent être ouvertes, fermées ou semi-fermées. Elles servent à désigner les délégués qui siègent à la convention nationale de chaque parti politique et qui élisent le candidat du parti à l'élection présidentielle.
Certains États connaissent encore des caucus plutôt que des primaires : ce sont des réunions organisées par les partis politiques au cours desquelles les sympathisants débattent et votent.
Autres pays
Les élections primaires se développent en Amérique latine dans les années 1990. En 1995, le Front pour un pays solidaire argentin organise une primaire à laquelle participe 2,5 % de l'électorat[5]. Au Mexique, le Parti révolutionnaire démocratique organise des primaires pour la désignation de ses candidats depuis 1996[5]. La Constitution de l'Uruguay prévoit depuis 1997 l'organisation d'« élections internes » (« elecciones internas »)[6]. Ce système, en vigueur depuis les élections de 1999 remplace celui de la ley de lemas qui permettaient à plusieurs candidats de se présenter à l'élection présidentielle pour le même parti. Des élections primaires sont également organisées au Costa Rica et au Paraguay depuis 1996 et en Bolivie depuis 1999[5].
Des primaires pour l'élection présidentielle ont été inscrites dans la loi en Argentine en 2010 et au Chili en décembre 2011[7]. Toutefois en Argentine, le système est souvent contourné par les partis politiques qui ne présentent qu'un seul candidat à l'élection primaire afin de s'assurer qu'il sera bien leur candidat lors de l'élection générale[8].
En Europe, les élections primaires ouvertes relèvent du choix des différents partis et sont organisées par eux. C'est notamment le cas des coalitions de gauche en Italie, qui désignent depuis 2005 leur candidat au poste de président du Conseil par des primaires ouvertes[9] - [10]. Ce processus a été inscrit dans les statuts du Parti démocrate lors de sa création et est également utilisé pour la désignation des têtes de liste aux élections régionales et municipales.
France
En France, les partis désignent souvent leurs candidats par des votes internes, réservés aux adhérents. Le premier parti à avoir organisé une primaire ouverte est le Parti socialiste (PS), en partenariat avec le Parti radical de gauche, afin de désigner un candidat pour la présidentielle de 2012. Près de 3 millions de personnes ont participé au second tour, qui a désigné François Hollande comme candidat. D'autres primaires ouvertes ont eu lieu à l'occasion des élections municipales de 2014, organisées par l'UMP (Paris, Lyon) et le PS (Aix-en-Provence, Béziers, Boulogne-Billancourt, Le Havre, Marseille, La Rochelle). Les Républicains (ex-UMP) organisent une primaire pour désigner leur candidat à l'élection présidentielle de 2017[11]. Aucune loi ne réglemente ces primaires en France et les partis demandent aux électeurs participant de signer une charte et de payer une participation aux frais d'organisation.
Année | Nom officiel | Parti(s) | Participation | Vainqueur | ||
---|---|---|---|---|---|---|
1er tour | 2e tour | |||||
2011 | Primaire présidentielle écologiste française de 2011 | EELV | 25 437 | 22 896 | Eva Joly | |
2011 | Primaire citoyenne de 2011 | PS, PRG | 2,66 millions | 2,86 millions | François Hollande | |
2016 | Primaire Ă©cologiste de 2016 | EELV | 12 582 | 13 926 | Yannick Jadot | |
2016 | Primaire ouverte de la droite et du centre | LR, PCD | 4,30 millions | 4,40 millions | François Fillon | |
2017 | LaPrimaire.org | LaPrimaire.org | 10 676 | 32 685 | Charlotte Marchandise | |
2017 | Primaire citoyenne de 2017 | PS, PE, PRG, FD | 1,66 million | 2,05 millions | Benoît Hamon | |
2021 | Primaire Ă©cologiste de 2021 | PĂ´le Ă©cologiste (EELV, GE, Cap21, AEI, MdP) | 106 649 | 104 772 | Yannick Jadot |
Élections similaires
Dans certains pays, des partis politiques organisent des scrutins ouverts à des sympathisants pour la désignation de leur chef :
- En 2004, le PASOK grec a organisé une primaire ouverte afin de désigner son leader. Mais George Papandréou en était le seul candidat. Il a été élu à la tête du parti.
- En 2013, le Parti libéral du Canada a autorisé les sympathisants préalablement enregistrés à voter lors de la course à la direction qui a désigné Justin Trudeau comme chef.
- En 2015 le Parti travailliste britannique a ouvert l'élection de son chef aux sympathisants enregistrés.
Bibliographie
- Les primaires socialistes, la fin du parti militant, RĂ©mi Lefebvre, Paris, Raisons d'agir, 2011.
- Les primaires ouvertes en France. Adoption, codification, mobilisation, Rémi Lefebvre et Éric Treille (dir.), Presses universitaires de Rennes, 2016, (ISBN 978-2-7535-5179-4)
Notes et références
- (en) Benjamin Ginsberg, We the People: An Introduction to American Politics, New York, W.W. Norton & Co., .
- Cohen, Marty. The Party Decides: Presidential Nominations before and after Reform. Chicago: University of Chicago, 2008.
- (en) Ann Bowman, State and Local Government: The Essentials, Boston, MA, Houghton Mifflin Co., , 75–77 p..
- , Les Décodeurs, lemonde.fr, 1er février 2016.
- Hélène Combes, « Quelques leçons latino-américaines », Le 1,‎ .
- « Constitution of Uruguay », sur Constitute Project (consulté le ).
- « Au Chili, le vote n'est plus obligatoire », sur Le Figaro (consulté le ).
- Primary elections: What are we voting?, consulté le 21 décembre 2011.
- (fr) Romano Prodi sacré candidat de la gauche.
- (fr) Barbara Revelli, Les élections primaires : illusion démocratique ou “révolution” politique ? Quelques réflexions à partir du cas italien du Partito Democratico, EuroCité, 23.09.2010.
- Présidentielle : la primaire UMP se tiendra les 20 et 27 novembre 2016.