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Église de Suède

L'Église suédoise (en suédois Svenska kyrkan) est une église luthérienne d'épiscopat historique valide. Elle est membre de la Fédération luthérienne mondiale. Elle s'est séparée de l'Église catholique romaine à l'époque de la Réforme, et est devenue, par décision du Riksdag (parlement) réuni à Västerås en 1527, une église d'État, dont le chef (élu) est l'archevêque d'Uppsala. Jusqu'au XIXe siècle, il a été interdit aux Suédois de quitter l'Église de Suède, même si de nombreuses dissidences, notamment piétistes, ont jalonné son histoire.

Le drapeau de l'église de Suède et le clocher de l'église de Smögen.
Le palais de l'archevêque de Suède, à Uppsala

En 2000, l'Église de Suède a cessé d'être une église d'État. La grande majorité des Suédois restent cependant membres de l'Église suédoise : en 2021, 53,9 % des habitants de Suède sont membres de l'Église de Suède[1], un chiffre en diminution constante, qui n'inclut toutefois pas les sympathisants.

En 2013, c'est une femme, Antje Jackelén, qui a été élue au poste d'archevêque d'Uppsala[2].

Historique

Début du christianisme

La Suède, en raison de sa situation géographique dans l'Europe la plus septentrionale, a été christianisée tardivement. Les premières missions de moines irlandais aux VIe et VIIe siècles restent sans lendemain et il n’y a encore que quelques communautés chrétiennes en Suède au IXe siècle. Il faut attendre la proximité de l'an 1000, à peu près à la même époque que les autres pays nordiques, pour que le roi suédois Olof Skötkonung soit baptisé.

Les coutumes religieuses pré-chrétiennes survivent à cette conversion ; par exemple, l'important centre religieux païen connu sous le nom de Temple d'Uppsala à Gamla Uppsala était encore en usage à la fin du XIe siècle, et l’évangélisation des Samis de Laponie a été bien plus tardive.

L'église chrétienne de Scandinavie était à l'origine régie par l'archevêché de Brême. En 1104, un archevêque pour toute la Scandinavie a été installé à Lund. Uppsala est devenu l'archevêché de Suède en 1164, et l'est toujours aujourd'hui.

Réforme protestante

Peu après avoir pris le pouvoir en 1523, Gustave Ier Vasa s'adressa au Pape à Rome pour lui demander de confirmer Johannes Magnus comme archevêque de Suède, à la place de Gustav Trolle qui avait été officiellement déposé et exilé par le Riksdag, étant donné sa collaboration active avec l’ennemi danois et sa participation au « bain de sang de Stockholm », en novembre 1520. Mais le pape Clément VII, le même qui s’aliénera Henri VIII d’Angleterre, exige que Trolle soit réintégré dans ses fonctions. Puisque l’Église catholique romaine soutient Christian II de Danemark, le roi Gustave la prive de tout pouvoir politique en Suède et lui confisque ses biens en 1527. En 1536, au synode d'Uppsala, l'Église de Suède devient officiellement luthérienne[3]. Après cette transition progressive vers le luthéranisme, la Suède restera attachée à son église nationale luthérienne, malgré l’arrivée au pouvoir de princes ayant d’autres convictions personnelles, soit catholiques, à savoir Jean III (1568-1592) puis Sigismond (1592-1604), soit calvinistes, à savoir Charles IX (1604-1611).

Le roi Gustave fait traduire la Bible en suédois par les réformateurs suédois, Laurentius Andreae et les frères Olaus et Laurentius Petri. Ce dernier devient le premier archevêque luthérien en Suède. Le Nouveau Testament a été traduit en suédois en 1526 et la Bible entière en 1541. Des traductions révisées ont été publiées en 1618 et 1703. De nouvelles traductions officielles ont été adoptées en 1917 et 2000. De nombreux hymnes ont été écrits par des réformateurs de l'église suédoise et plusieurs de ceux écrits par Martin Luther ont été traduits. Un hymne semi-officiel est apparu dans les années 1640. Des cantiques officiels de l'Église de Suède (en suédois : Den svenska psalmboken) ont été adoptés en 1695, et seront modifiés en 1819, 1937 et 1986.

Tout en adoptant une théologie complètement luthérienne, la Réforme suédoise conserve bon nombre de coutumes et de formes de l’Église catholique : crucifix, icônes et vêtements sacerdotaux « riches » alors que la plupart des Églises protestantes les abandonnent au profit de la robe professorale noire. Un certain nombre de jours de fêtes, consacrés à des saints populaires, se maintiennent jusqu’à la fin du XVIIIe siècle.

Piétisme

Le piétisme et l’illuminisme se répandent en Suède sous le règne de Charles XII (1697-1718) dont les vingt années de règne sont presque exclusivement marquées par la Grande Guerre du Nord, catastrophique pour le pays et ses finances. Des inspirés prophétisent dès 1688, tel Lars Ullstadius à Aabo en 1688 ou Peter Schoefer en 1701. Au début du XVIIIe siècle, le piétisme a déjà des appuis à la faculté de théologie d’Upsalla[4]. En 1694, le roi Charles XI avait interdit de faire tort à l’unité de l’église nationale par le biais de mouvements dissidents. En 1706, Charles XII interdit les livres piétistes, notamment ceux de Spener (1635-1705) et ceux de Arndt (1555-1621).

Toutefois cette interdiction ne touche pas les officiers suédois prisonniers en Russie qui se réunissent librement pour prier tant qu’ils ne manquent pas le culte du dimanche. Aussi, à peine la première vague piétiste réprimée, le retour des prisonniers de guerre relance-t-il les expériences spirituelles nouvelles. Les ouvrages piétistes et théosophiques allemands connaissent une grande vogue et de nombreux groupes piétistes se forment. Tout ceci conduit le parlement à voter une loi contre les conventicules en 1726, qui encourage le culte familial mais pénalise fortement toute autre forme de réunion religieuse en dehors des églises. Mais la vogue du piétisme se poursuit. Le pasteur de l’amirauté Erik Tolstadius (1693-1759) en est l’un des chefs de file.

Dans ce milieu imprégné de mystique apparaît Emanuel Swedenborg qui, sans totalement renier le luthéranisme, devient un philosophe et un théosophe extrêmement célèbre, après avoir été un inventeur et un savant. Les idées mystiques et théosophiques touchent jusqu’au roi de Suède Gustave IV (roi de 1792 à 1809), et son successeur Charles XIII (roi de 1809 à 1818) qui se lance quant à lui dans la franc-maçonnerie.

Le XIXe siècle

En 1818, un général français pétri des idées de la Révolution, Jean-Baptiste Bernadotte arrive au pouvoir sous le nom de Charles XIV de Suède. Il sait se faire bon luthérien et calmer la situation religieuse, établissant de bons rapports tant avec l’église officielle qu’avec les groupes dissidents[5]. Au début du XIXe siècle, le piétisme a pris la forme de petits groupes de lecture de la Bible, les laesares, que l’Eglise officielle laisse faire sans exiger l’application à leur encontre de la loi de 1726, mais à partir de 1842, un mouvement plus visible, les « crieurs » (ropares) est lancé par un paysan du nom d’Erik Jansen. Il s’agit d’appeler à la repentance et de proclamer l’imminence du jugement dernier. La répression reste mesurée, d’autant plus qu’un certain nombre de ces crieurs sont des enfants, et, que, en fin de compte, les autorités relèvent que le mouvement a un bonne influence dans la société, où il combat notamment avec efficacité l’alcoolisme[6] - [7]. En outre, influence des moraves et des méthodistes s’accentue au cours du XIXe siècle et favorise l’émergence d’un Réveil, dont le leader sera Carl Olof Rosenius (1816-1868), alors même que certains anciens dissidents choisissaient souvent l’émigration vers l’Amérique pour pouvoir vivre leur foi librement. Le mouvement piétiste-évangélique se maintient donc toujours au moment où la Suède retrouve des libertés religieuses dans le dernier quart du XIXe siècle.

XXe et XXIe siècles

Au cours des XXe et XXIe siècles, divers enseignements ont été officiellement approuvés, la plupart orientés vers l'œcuménisme :

  • 1878 : développement du catéchisme
  • le Credo d'Uppsala de 1909, qui prépare à la communion eucharistique avec l'Église d'Angleterre
  • les constitutions du Conseil œcuménique des Églises (COE)
  • les statuts de la Fédération luthérienne mondiale (FLM)
  • réponse officielle de l'Église de Suède au "document de Lima"
  • lettre du Conseil des évêques sur les questions théologiques importantes
  • traité de communion de 1995 avec l'Église indépendante des Philippines

La mise à jour du recueil de cantiques officiel de 1986 est œcuménique et combine des hymnes traditionnels avec des chants d'autres confessions chrétiennes, notamment adventiste du septième jour, baptiste, catholique, alliance missionnaire, méthodiste, pentecôtiste et armée du salut.

Dans la pratique, les confessions de foi luthériennes jouent un rôle mineur, et, tout en s'appuyant sur la tradition luthérienne, les paroisses font coexister le luthéranisme avec les influences d'autres confessions et mouvements chrétiens tels que la Basse Église, la Haute Église, le Piétisme ("Vieille Église"), qui peuvent être fortement implantés localement, mais qui ont peu d'influence à l'échelle nationale.

Au cours du XXe siècle, l'Église de Suède s'est fortement orientée vers le christianisme libéral et les droits de l'homme. En 1957, l'assemblée de l'église a rejeté une proposition d'ordination des femmes, mais le Riksdag a ensuite modifié la loi au printemps 1958 et a forcé l'assemblée de l'église à accepter la nouvelle loi à l'automne 1958. Depuis 1960, des femmes sont consacrées pasteur et, depuis 1994, les hommes qui s'opposeraient à la collaboration avec des femmes pasteures ne sont eux-mêmes pas admis au pastorat. Une proposition visant à célébrer des mariages homosexuels a été approuvée le par 176 des 249 membres votants du synode de l'Église de Suède[8].

En 2000, l'Église de Suède a cessé d'être une église d'État, mais il subsiste une forte tradition de lien communautaire avec les églises, notamment en ce qui concerne les rites de passage, avec de nombreux enfants baptisés et des adolescents confirmés (actuellement 40 % de tous les jeunes de 14 ans[9]) pour les familles sans appartenance officielle à une église.

Depuis le , c'est, pour la première fois, une femme, Antje Jackelén, qui est l'archevêque de l'Église de Suède[2].

L’Église de Suède présente ses excuses formelles pour son rôle dans la persécution des Samis pendant des siècles, notamment les études raciales que l’Église a permises dans ses paroisses, les enfants retirés de leur famille et parqués dans les écoles nomades et la suppression des noms samis au profit des noms suédois dans les registres de baptême et de mariage[10] - [11].

Église de Suède
Année Population de la Suède Membres de l'Église de Suède Pourcentage
19728 146 0007 754 78495,2 %
19808 278 0007 690 63692,9 %
19908 573 0007 630 35089,0 %
20008 880 0007 360 82582,9 %
20059 048 0006 967 49877,0 %
20109 415 5706 589 76970,0 %
20119 482 8556 519 88968,8 %
20129 555 8936 446 72967,5 %
20139 644 8646 357 50865,9 %
20149 747 3556 292 26464,6 %
20159 850 4526 225 09163,2 %
20169 982 9186 109 54661,2 %
201710 120 2425 993 36859,3 %
201810 230 1855 899 24257,7 %
201910 327 5795 817 63456,4 %
202010 379 2955 728 74655,2 %
202110 452 3265 633 86753,9 %

Structure

Carte des diocèses de l'Église de Suède.

L'Église de Suède compte un archidiocèse et treize diocèses.

Plusieurs diocèses ont disparu :

Notes et références

  1. (sv) Svenska kyrkan i siffror
  2. Ambassade de Suède. http://www.swedenabroad.com/fr-FR/Embassies/Paris/Actualites--evenements/Actualites/Antje-Jackelen-elue-archeveque-de-Suede-sys/
  3. Jean-Michel Sallmann, Nouvelle histoire des relations internationales, vol. 1 : Géopolitique du XVIe siècle, 1490-1618, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Points » (no H318), , 410 p., 18 cm (ISBN 2-02-037497-8, BNF 38962086), p. 262.
  4. Linck 2013, p. 90-91.
  5. Léonard 1964, p. 195.
  6. Léonard 1964, p. 212-213.
  7. Léonard 1964, p. 296-297.
  8. (en) « Church of Sweden says yes to gay marriage », sur The Local: Sweden's News in English, (consulté le )
  9. (en) « Confirmation in the Church of Sweden », sur le site de l’Église de Suède (consulté le )
  10. « En Suède, la repentance de l’Église face aux Samis », sur Le Figaro,
  11. « En Suède, l’Eglise présente ses excuses aux Sami », Le Monde.fr, (lire en ligne)

Voir aussi

Bibliographie

  • Patrick-dominique Linck, Histoire religieuse de la Suède (1520-1930)-, Editions du Cerf, , 367 p. (ISBN 978-2-204-12383-9, lire en ligne)
  • Histoire générale du protestantisme, Paris, PUF, 1961-1964 ; rééd. coll. « Quadrige », 1988 :
    • T. 1 : La Réformation, (1961)
    • T. 2 : L'Établissement (1564-1700), 1961
    • T. 3 : Déclin et renouveau : XVIIIe – XXe siècle, 1964 (posthume)

Articles connexes

Liens externes

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