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Tomorrow Never Knows

Tomorrow Never Knows est une chanson des Beatles parue sur l’album Revolver, le au Royaume-Uni, et le 8 aoĂ»t aux États-Unis. Elle a Ă©tĂ© Ă©crite par John Lennon mais crĂ©ditĂ©e Lennon/McCartney, comme toutes les chansons du groupe composĂ©es par Lennon et Paul McCartney, en collaboration ou non.

PlacĂ©e en derniĂšre piste de l'album Revolver, elle a pourtant Ă©tĂ© la premiĂšre Ă  ĂȘtre enregistrĂ©e lors des sessions pour cet album. Par bien des aspects, ce titre rĂ©volutionnaire est une pierre de touche dans la carriĂšre des Beatles. Il marque le dĂ©but de leur pĂ©riode psychĂ©dĂ©lique et, par son motif rythmique obsĂ©dant, peut Ă©galement ĂȘtre considĂ©rĂ© comme prĂ©curseur de la musique techno. InfluencĂ© par la musique indienne et par ses expĂ©riences au LSD, John Lennon Ă©labore cette chanson autour du seul accord de do septiĂšme de dominante.

C’est avec Tomorrow Never Knows que le jeune Geoff Emerick fait ses dĂ©buts en tant qu’ingĂ©nieur du son du groupe aux cĂŽtĂ©s du producteur George Martin, le , et il fait, dĂšs le dĂ©part, preuve d’une extraordinaire inventivitĂ©, pour satisfaire aux demandes de l’auteur de la chanson comme pour amĂ©liorer les techniques de prise de son. Une sĂ©rie de boucles sonores rĂ©alisĂ©e par Paul McCartney est injectĂ©e en direct dans le morceau lors d’une fameuse sĂ©ance de mixage, lui donnant son aspect caractĂ©ristique.

GenĂšse

Photographie de Timothy Leary
Timothy Leary, auteur du livre The Psychedelic Experience.

Tomorrow Never Knows est une chanson intimement liĂ©e aux expĂ©riences de John Lennon avec les drogues, en particulier le LSD, un puissant hallucinogĂšne synthĂ©tisĂ© en 1938 par Albert Hofmann. Son usage rĂ©crĂ©atif se rĂ©pand dans les annĂ©es 1960, notamment au sein de la communautĂ© hippie et psychĂ©dĂ©lique. C’est en que Lennon en consomme pour la premiĂšre fois, sans le savoir, lors d’un dĂźner chez un ami dentiste. Ce dernier avait placĂ© sans rien dire du LSD dans les verres de ses invitĂ©s, qui comptaient John et George Harrison, ainsi que leurs Ă©pouses respectives Cynthia et Pattie[1]. À partir de ce moment, Lennon en devient un consommateur de plus en plus rĂ©gulier, au moins pour les deux annĂ©es suivantes[2].

Cet intĂ©rĂȘt de Lennon pour le LSD trouve Ă©cho lorsque Barry Miles lui envoie un livre Ă©crit par les psychologues amĂ©ricains Timothy Leary, Richard Alpert et Ralph Metzner. Tous trois universitaires, ils mĂšnent des recherches liĂ©es au psychĂ©dĂ©lisme ; Timothy Leary, en particulier, est surnommĂ© « le pape du LSD »[3] en raison de ses prises de position en faveur de la consommation de cette drogue. Au dĂ©but des annĂ©es 1960, les trois psychologues se rendent dans la rĂ©gion de l’Himalaya, Ă  Crank’s Ridge, pour Ă©tudier le bouddhisme tibĂ©tain[4]. De ces sept mois d’étude, ils tirent un livre, The Psychedelic Experience, une adaptation du Livre des morts tibĂ©tain destinĂ©e Ă  ĂȘtre accessible Ă  un public occidental[5]. Le livre se veut un manuel de prĂ©paration spirituelle Ă  l’absorption de drogues.

Ainsi, John Lennon s’inspire directement de cet ouvrage pour Ă©crire une nouvelle chanson, Tomorrow Never Knows. Le livre, comme la chanson, rassemble deux de ses centres d’intĂ©rĂȘt du moment : la consommation de psychotropes hallucinogĂšnes, et les philosophies orientales (notamment indiennes), passion qui concerne d’abord George Harrison, mais qui s’étend sous son influence aux autres membres du groupe. Lennon prĂ©cise en 1972 qu’il n’a jamais lu le Livre des morts tibĂ©tain Ă  proprement parler, s’étant contentĂ© de l’adaptation de Leary[6]. Les premiers mots de Tomorrow Never Knows en sont tirĂ©s in extenso : « turn off your mind, relax, and float downstream », soit « Ă©teins ton esprit, dĂ©tends-toi et laisse-toi porter par le courant »[7].

Les Beatles ne sont plus revenus en studio depuis le , lorsqu’ils ont finalisĂ© leur album Rubber Soul[8]. AprĂšs ces ultimes enregistrements, ils sont partis pour la derniĂšre tournĂ©e de concerts au Royaume-Uni de leur carriĂšre[9], puis se sont accordĂ© leur plus longue pĂ©riode de repos depuis le dĂ©but de la Beatlemania, sans rester inactifs toutefois. Les idĂ©es bouillonnent et les influences s’élargissent ; John Lennon et surtout Paul McCartney s’intĂ©ressent Ă  l’art d’avant-garde, George Harrison se passionne pour la musique indienne. Karlheinz Stockhausen, comme Ravi Shankar, sont entrĂ©s dans l’univers musical des Beatles[10].

Enregistrement

Prélude

Les Beatles se trouvent dans la maison de leur manager Brian Epstein lorsque Lennon leur fait dĂ©couvrir sa nouvelle composition. Il s’agit d’une rĂ©union, aprĂšs trois mois de vacances inespĂ©rĂ©es entre deux tournĂ©es[11], et le producteur George Martin est Ă©galement prĂ©sent. Lennon a construit sa chanson sur un seul accord (do majeur), et Paul McCartney y voit lĂ  l’influence de la musique indienne, qui les passionnait tous Ă  cette Ă©poque. Il compare ainsi les Beatles Ă  des Ă©ponges, qui assimilaient toutes les nouvelles idĂ©es et les rĂ©utilisaient[12]. Lennon joue donc la chanson Ă  la guitare, et George Martin rĂ©agit plutĂŽt bien Ă  la dĂ©monstration. Paul McCartney rend hommage Ă  son attitude : « Je crois que George Ă©tait toujours intĂ©ressĂ© par la direction que l’on avait choisi de suivre et pensait sĂ»rement « Comment vais-je m’y prendre pour faire un disque de tout ça ? » À cette Ă©poque-lĂ , il commençait dĂ©jĂ  Ă  comprendre qu’on savait un peu ce qu’on faisait, mais la matiĂšre premiĂšre qu’on lui donnait Ă©tait vraiment Ă©trangĂšre Ă  son univers[12]. » Cependant, comme le fait remarquer le guitariste George Harrison, une bonne partie de cette libertĂ© accordĂ©e aux Beatles provenait de leur rĂ©ussite populaire : « La clĂ© de tout ça, c'est que nous avions du succĂšs. Nous pouvions donc nous permettre d'arriver avec des idĂ©es complĂštement barrĂ©es (far out ideas), et comme ça marchait, on pouvait aller encore plus loin, Abbey Road devenant un endroit de totale libertĂ© oĂč on pouvait essayer tout ce qu'on voulait[13]. »

Tomorrow Never Knows marque une nouvelle Ă©tape dans la carriĂšre des Beatles, caractĂ©risĂ©e par de nombreux changements dans la façon d'enregistrer leurs chansons et de mettre en Ɠuvre de nouvelles idĂ©es. Sur le plan technique, l’ingĂ©nieur Ken Townsend trouve le temps d’inventer un procĂ©dĂ© rĂ©volutionnaire Ă  la demande des musiciens, l’Automatic Double Tracking : cet appareil permet de doubler automatiquement une prise vocale, lĂ  oĂč les chanteurs devaient s'y prendre deux fois de suite pour obtenir le mĂȘme rĂ©sultat, ce que John Lennon en particulier dĂ©testait faire[14]. Son principe de fonctionnement est relativement simple : il consiste Ă  dupliquer une prise sonore, et, plutĂŽt que de superposer exactement les deux images, celles-ci sont dĂ©calĂ©es de quelques millisecondes l'une par rapport Ă  l'autre, donnant ainsi l'effet de deux voix distinctes[15]. Pour l’enregistrement de l'album Revolver, les Beatles ne se passent plus de cette avancĂ©e technologique, presque toutes les parties vocales des chansons du disque passant dans l'ADT[14].

Autre fait majeur dans la vie de la petite Ă©quipe qui travaille aux studios EMI avec le groupe, Geoff Emerick s’apprĂȘte Ă  dĂ©buter comme ingĂ©nieur du son principal aux cĂŽtĂ©s de George Martin. EntrĂ© comme stagiaire chez EMI Ă  seize ans, en 1962, il a souvent travaillĂ© pour les Beatles en tant qu’assistant jusqu’à ce que Norman Smith lui laisse la place aux manettes. Emerick n'a pas encore vingt ans[16]. Il va rapidement substituer ses propres mĂ©thodes Ă  celles de Norman Smith[14].

Les sessions d’enregistrement commencent le mercredi , lorsque les Beatles posent la rythmique du morceau au cours d’une longue session nocturne : Ringo Starr sur un tempo aĂ©rien, hypnotique, Paul McCartney calant dessus sa ligne de basse entre les do grave et aigu (il joue aussi du piano), John Lennon au chant et George Harrison Ă  la guitare. Trois prises complĂštes sont mises en boĂźte ; c'est la troisiĂšme qui est choisie pour l'ajout d'overdubs et la publication sur l'album[14]. Si la seconde prise est ratĂ©e, Mark Lewisohn dĂ©crit la premiĂšre comme « sensationnelle et apocalyptique », presque « heavy metal »[14]. Le groupe et son Ă©quipe finalisent Tomorrow Never Knows en deux jours seulement, achevant le gros du travail le [17] avant d'y revenir le pour ajouter deux overdubs (une partie vocale de John Lennon et un son de sitar enregistrĂ© par George Harrison)[18].

Tomorrow Never Knows est ainsi la premiÚre chanson enregistrée pour l'album Revolver, et son ambiance et ses innovations marquent le projet dans son intégralité[19].

Travail sur la batterie et le chant

Une cabine Leslie démontée
Une cabine Leslie a été utilisée sur la voix de John Lennon afin de la rendre plus éthérée et lointaine.

Pour ses dĂ©buts aux cĂŽtĂ©s des Beatles, le jeune Geoff Emerick propose beaucoup d'idĂ©es. D'autoritĂ©, il modifie la position des micros autour de la batterie de Ringo Starr : il les installe tout prĂšs des fĂ»ts et des cymbales et assourdit la grosse caisse avec un vĂȘtement placĂ© Ă  l'intĂ©rieur, ce qui dĂ©bouche sur un rĂ©sultat sonore inĂ©dit pour le rendu rythmique de cette chanson. « C'est vraiment devenu le son de Revolver et de Pepper », tĂ©moigne Emerick[17].

Par ailleurs, le son de la batterie donne l'impression de passer à l'envers. Cet effet est dû à l'utilisation d'un limiteur Fairchild sur l'instrument, premiÚre fois qu'Emerick s'y essaye. Tous les sons de la batterie sont passés dans le limiteur, à l'exception de celui de la grosse caisse. Dans ces conditions, Geoff Emerick explique que « plus la grosse caisse passait, plus le Fairchild compressait les autres sons de la batterie. Si Ringo frappait sur une cymbale, on obtenait un effet d'aspiration à cause du Fairchild »[20].

Un autre aspect caractĂ©ristique de la chanson, la voix Ă©thĂ©rĂ©e et lointaine de John Lennon, est aussi Ă  porter au crĂ©dit d'Emerick. Pour coller au thĂšme de son texte, Lennon veut absolument que sa voix sonne « comme celle du DalaĂŻ-lama chantant du haut d'une montagne », avec l'Ă©quivalent de quatre mille moines psalmodiant en arriĂšre-plan[17]. Cette mĂ©thode Ă©tant loin d'ĂȘtre envisageable en pratique, Lennon en imagine une autre pour obtenir le mĂȘme effet : le pendre par les pieds, et le balancer d'avant en arriĂšre autour d'un point fixe, le micro. Emerick propose une solution plus rĂ©aliste : il dĂ©tourne l'effet sonore tournoyant du haut-parleur Leslie d'un orgue Hammond. Habituellement utilisĂ©e par les instruments de musique Ă©lectroniques, la cabine Leslie donne un effet de vibrato. Geoff Emerick, lui, s'en sert directement sur la voix de Lennon : aprĂšs s'ĂȘtre connectĂ© directement au circuit de la cabine, il rĂ©-enregistre le chant Ă  sa sortie des hautparleurs. Le chant passĂ© au Leslie fait son apparition aprĂšs les 87 premiĂšres secondes de la chanson ; avant, il s'agit simplement de la voix de Lennon passĂ©e dans l'Automatic Double Tracking[17].

RĂ©trospectivement, John Lennon Ă©met cependant quelques regrets quant au rendu final : « C'Ă©tait irrĂ©aliste, bien sĂ»r, et on a trouvĂ© autre chose. Mais j'aurais dĂ» m'en tenir Ă  ça, aux moines en train de chanter. Je me rends compte maintenant que c'est vraiment ce que je voulais »[21]. Cette trouvaille de Geoff Emerick fait en tout cas date pour les Beatles, qui en inventent quasiment un verbe : to Leslie, demandant frĂ©quemment « can you Leslie that for me? » (« tu peux leslier ça pour moi ? »). « Citez un instrument ! Piano, guitares, batterie, chants... ils voulaient tout y passer », raconte Emerick[17].

Boucles sonores

Bande magnétique typique des années 1960
Le type de bande magnétique utilisé par McCartney.

Les sons inhabituels incorporĂ©s Ă  la chanson, dont certains sont semblables Ă  des cris de mouette[22], sont issus d'une idĂ©e de Paul McCartney. Jugeant le classique solo de guitare peu appropriĂ©, il va mettre en pratique ses diverses expĂ©rimentations avec son magnĂ©tophone personnel[12]. Ayant relevĂ© la tĂȘte d'effacement de l'appareil, il enregistre jusqu'Ă  saturation sur le mĂȘme morceau de bande magnĂ©tique ; il rĂ©pĂšte ensuite l'opĂ©ration avec d'autres morceaux de bandes[17]. Parmi les sons qu'il a utilisĂ©s : son rire, sa guitare, des verres de vin s'entrechoquant[22]. McCartney se rend alors aux studios avec ses bouts de bandes saturĂ©es de sons entassĂ©s dans un sac en plastique.

Le mixage de la chanson donne lieu Ă  un vĂ©ritable happening dans le studio 3 d'Abbey Road, qui prend des allures de « film de science-fiction »[16]. En effet, le studio 3 ne contenant qu'un seul autre magnĂ©tophone, l'Ă©quipe rĂ©quisitionne les machines des autres studios – tous libres en cet aprĂšs-midi du – du bĂątiment de EMI. L'utilisation simultanĂ©e de tous les appareils est possible grĂące au rĂ©seau de cĂąbles les connectant entre eux. On demande ainsi Ă  chaque employĂ© disponible de tenir un stylo ou un verre pour donner la bonne tension aux diffĂ©rentes bandes 3/4 de pouce qui tournent en boucle, passant sur le cabestan[note 1] puis devant la tĂȘte de lecture et se rĂ©pĂ©tant Ă  l'infini. Emerick dĂ©crit le comique de la situation : « La plupart de ces gens qui se tenaient devant les magnĂ©tophones n’avaient pas la moindre idĂ©e de ce qu’ils faisaient. AjoutĂ© au fait que le personnel technique devait revĂȘtir des blouses blanches, la scĂšne Ă©tait carrĂ©ment surrĂ©aliste »[16]. Les sons sont envoyĂ©s vers les diffĂ©rents canaux de la table de mixage.

Dans la salle de contrĂŽle, George Martin et Geoff Emerick montent et descendent les potentiomĂštres de volume sur la table de mixage selon les instructions des Beatles. Au total, cinq magnĂ©tophones diffĂ©rents sont utilisĂ©s pour faire tourner les boucles de McCartney, qui apparaissent et disparaissent dans le mixage, se rĂ©pĂštent et se superposent[12]. George Martin explique par la suite que de tous les morceaux des Beatles, c'est celui qui ne pourrait pas ĂȘtre reproduit, en raison du caractĂšre totalement improvisĂ© du mixage[23].

« Avec chaque potentiomĂštre actionnant une boucle, la table de mixage devenait un vĂ©ritable synthĂ©tiseur, et nous en jouions comme d’un instrument de musique, envoyant avec prĂ©caution ces textures sonores sur la bande rythmique prĂ©enregistrĂ©e. Nous n’avions aucune idĂ©e de l’importance de ce que nous Ă©tions en train de faire. Mais ce que nous avons crĂ©Ă© cet aprĂšs-midi-lĂ  Ă©tait en fait le prĂ©curseur de la techno (« beat and loop driven music »). Si quelqu’un m’avait dit que nous venions d’inventer un nouveau genre de musique, qui se dĂ©velopperait durant les prochaines dĂ©cennies, je l’aurais pris pour un fou. »

— Geoff Emerick[16]

Reste enfin, pour complĂ©ter la chanson, l’enregistrement d’un nouvel instrument oriental apportĂ© par le guitariste George Harrison : le tampura. Cet instrument Ă  cordes donne le son du « bourdon » audible au dĂ©but du morceau et qui revient Ă  plusieurs reprises. Les notes de piano jouĂ©es par Paul McCartney lors des premiĂšres prises sont, pour terminer, injectĂ©es dans le final du morceau[16]. À la fin de la journĂ©e du , les Beatles commencent dĂ©jĂ  Ă  travailler un nouveau titre, Got to Get You into My Life[17].

Description musicale

Ce morceau rompt avec les habitudes des Beatles et les standards de l'Ă©poque, abandonnant les riffs de guitare et la structure couplet-refrain-pont usuelle[24].

Le musicologue Allan W. Pollack explique ainsi : « l'harmonisation de la chanson consiste presque seulement en une pĂ©dale de do majeur tout du long [
] Le seul mouvement harmonique prĂ©sent dans toute la chanson est le balancement implicite vers si bĂ©mol Ă  la fin de chaque couplet »[25] (voir Ă  ce titre l'analyse des boucles sonores ci-dessous). La pĂ©dale, jouant un rĂŽle de bourdon, est en partie obtenue par l'utilisation du tampura, le premier instrument entendu en intro, et par la basse qui alterne des do graves et aigus.

Comme le note par ailleurs le critique musical Richie Unterberger, « Ă  la base de Tomorrow Never Knows on trouve un bourdon sur une tonalitĂ© unique, sous l’influence de l'intĂ©rĂȘt croissant du groupe dans la musique indienne, et l’inoubliable motif rythmique produit par la batterie de Ringo Starr »[24]. Le batteur des Beatles est en ce mois d' au sommet de son art et il considĂšre notamment la chanson Rain comme sa meilleure prestation avec les Beatles[10]. En 1994, Ringo Starr inclut aussi Tomorrow Never Knows dans cette apprĂ©ciation, lorsqu'il retourne avec George Harrison, Paul McCartney et George Martin devant la table de mixage Ă  Abbey Road pour les besoins de la sĂ©rie vidĂ©o The Beatles Anthology. Les quatre acteurs de l'aventure dĂ©cortiquent en effet le morceau de John Lennon, et l'on voit Ringo mimer son motif rythmique avec un plaisir et une Ă©motion manifestes sous les yeux approbateurs de ses comparses[13].

John Lennon développe sa mélodie au chant en boucle, sur huit mesures, décomposant les notes d'un accord de do majeur septiÚme (mi-sol-do-mi-do-sol-si bémol-do), soit dans le mode mixolydien en do, cinq fois en tout sur les 2 minutes et 59 secondes de la chanson.

Quant aux boucles sonores, elles ont notamment été construites de la façon suivante :

  • les « cris de mouette », crĂ©Ă©s Ă  partir de cris et de rires de Paul McCartney accĂ©lĂ©rĂ©s[26] - [27], entendus dĂšs le dĂ©part et rĂ©pĂ©tĂ©s cinq fois dans la chanson ;
  • un accord d’orchestre de si bĂ©mol majeur[26], le premier Ă©tant entendu aprĂšs 19 secondes (lorsque Lennon chante « It is not dying, it is not dying Â»), et qui revient Ă  chaque passage correspondant de la mĂ©lodie de Lennon (« It is shining », « It is being Â», « it is knowing », « it is believing », « it is not living », et enfin, « of the beginning » rĂ©pĂ©tĂ© 7 fois dans le final) ;
  • les notes d’un mellotron dispensant un son de flĂ»tes aprĂšs 22 secondes[27] ;
  • un autre mellotron jouĂ© en 6/8 de si bĂ©mol Ă  do, utilisant le son « 3 violons » aprĂšs 38 secondes[27] ;
  • un solo de guitare retournĂ© et accĂ©lĂ©rĂ© aprĂšs 1 minute et 8 secondes. Selon Ian MacDonald, dans son ouvrage Revolution in the head : The Beatles Records and the sixties, il s'agit du solo de Paul McCartney jouĂ© pour Taxman[27]. Cette chanson ayant Ă©tĂ© enregistrĂ©e entre les 20 et , soit deux semaines aprĂšs Tomorrow Never Knows, cette affirmation pose un Ă©vident problĂšme de chronologie. Elle peut toutefois s'avĂ©rer exacte dans la mesure oĂč cette partie a pu ĂȘtre insĂ©rĂ©e plus tard ;
  • une phrase de sitar saturĂ©e et considĂ©rablement accĂ©lĂ©rĂ©e que l'on entend pour la premiĂšre fois au bout de 56 secondes et qui revient Ă  plusieurs reprises ensuite[27] ;
  • un drone de tampura[26].

Analyse des paroles

Photographie de Ringo Starr
Ringo Starr, auteur de nombreux « ringoïsmes ».

Le titre de la chanson n’apparaĂźt pas dans les paroles[28]. Le biographe Steve Turner rapporte que le titre originel Ă©tait The Void (« le vide »), en rĂ©fĂ©rence Ă  un autre passage de The Psychedelic Experience[5]. Cette version est contredite par Mark Lewisohn, premier spĂ©cialiste mondial des Beatles, qui affirme qu’il s’agit lĂ  d’un mythe, fondĂ© sur une affirmation de Neil Aspinall, alors road manager et assistant du groupe, dans la chronique qu’il tenait pour le magazine Beatles Monthly. Lewisohn, qui a eu accĂšs aux archives d’EMI, prĂ©cise que toutes les notes d’enregistrement et les cassettes de la chanson portent le nom Mark 1[14].

La chanson reçoit son nom dĂ©finitif lorsque John Lennon dĂ©cide d’y ajouter une touche d’humour, de non-sens, pour relativiser le cĂŽtĂ© sĂ©rieux et philosophique de son texte[6]. Tomorrow never knows se traduit littĂ©ralement par « Demain ne sait jamais », et n’a donc pas vraiment de signification. Il s’agit en fait d’un « ringoĂŻsme », terme inventĂ© par Lennon pour qualifier les accidents de langage de Ringo Starr, dont il Ă©tait trĂšs friand et qu’il notait dans ses carnets. Celui-ci provient d’une interview donnĂ©e deux annĂ©es plus tĂŽt, le Ă  la BBC au retour du groupe de son premier sĂ©jour aux États-Unis [note 2] - [30].

Le texte de la chanson se veut philosophique[31], dans une ambiance et un esprit largement influencĂ©s par la drogue[19] ; Lennon la dĂ©crit lui-mĂȘme comme sa premiĂšre chanson psychĂ©dĂ©lique[32]. À l’image du livre de Timothy Leary, la chanson est aussi construite comme un mode d'emploi. Chaque couplet reprend toujours la mĂȘme structure : d'abord l'instruction, par exemple Lay down all thought, surrender to the void (« Abandonne toute pensĂ©e, livre-toi au vide »), suivie de sa signification, en l'occurrence It is shining (« C'est briller »)[28]. Ce passage en particulier traite du concept de VacuitĂ© dans le bouddhisme. La rĂ©action de Timothy Leary Ă  ce sujet a Ă©tĂ© que Lennon a su tĂ©moigner de l'importance de ce principe dans sa chanson[5].

Dans la sĂ©rie The Beatles Anthology, George Harrison – des quatre Beatles, il Ă©tait le plus fĂ©ru de philosophie orientale – donne son interprĂ©tation de la chanson. Il considĂšre que le texte traite de l'essence mĂȘme de la mĂ©ditation transcendantale, Ă  laquelle les Beatles ne s'initient qu'en 1967, soit un an aprĂšs la parution de Tomorrow Never Knows[33]. Le premier couplet dit qu'il faut « dĂ©brancher son esprit, se relaxer », parce que, selon Harrison : « depuis notre naissance, nous ne faisons que penser, mĂȘme quand nous dormons, nous rĂȘvons, il n'y a pas un seul moment oĂč l'esprit peut se reposer[34]. »

Plus loin, John Lennon chante : « That you may see the meaning of within / It is being » (Que tu puisses voir le sens de l'intĂ©rieur / C'est ĂȘtre). George Harrison explique que l'ĂȘtre, la vraie nature de l'Ăąme, c'est la transcendance, tout le reste Ă©tant superflu. Il conclut : « Je ne suis pas certain que John a totalement compris ce qu'il disait. Il a rĂ©alisĂ© qu'il touchait Ă  quelque chose, mais il n'a peut-ĂȘtre pas fait l'expĂ©rience de ce qu'il chantait ». En 1968, Lennon avait lui-mĂȘme confirmĂ© qu'il ne savait pas vraiment ce qu'il disait[32].

Les autres couplets sont dans la mĂȘme veine. Ainsi, la connaissance se situe dans le fait que « l'amour est tout, et l'amour est tout le monde », qu'on peut voir comme un prolongement du message que Lennon faisait passer dans The Word un an plus tĂŽt[35]. D'autres passages sont clairement psychĂ©dĂ©liques, par exemple « Ă©couter les couleurs de ses rĂȘves ». La chanson se conclut par une derniĂšre invective philosophique : « Joue le jeu de l'existence jusqu'Ă  la fin... du dĂ©but[28]. »

Parution et réception

La premiĂšre phrase de Tomorrow Never Knows surmonte All You Need Is Love, sur les murs du Beatles Story Museum Ă  l'Albert Dock de Liverpool

Tomorrow Never Knows est publiĂ©e sur l'album Revolver le au Royaume-Uni, et trois jours plus tard aux États-Unis. Il s'agit de la derniĂšre piste du disque. Deux versions mono de cette chanson ont Ă©tĂ© publiĂ©es. Lors de la premiĂšre journĂ©e de l'impression du disque, le mixage numĂ©ro 11 Ă©tait dans la bande maĂźtresse mais George Martin exigea de le changer pour le mixage numĂ©ro 8. Cette version est aujourd'hui rarissime[36].

Dans une chronique du New Musical Express datĂ©e du , Allen Evans ne manque pas de s'Ă©tonner des nombreux effets sonores de la chanson : « Sur Tomorrow Never Knows, la voix de John vous invite Ă  dĂ©connecter votre esprit, vous relaxer et flotter au fil du courant. Mais, comment se dĂ©tendre avec ces bruitages spatiaux Ă©lectroniques ressemblant Ă  des cris de mouettes ? MĂȘme la voix de John est bizarrement Ă©loignĂ©e. Seul le rythme rock-steady de Ringo est naturel[37]. »

Plus rĂ©cemment, d'autres spĂ©cialistes ont donnĂ© leur avis sur la chanson. Richie Unterberger Ă©crit pour Allmusic que « Tomorrow Never Knows est la piste la plus expĂ©rimentale et psychĂ©dĂ©lique de l’album Revolver, dans sa structure comme dans sa production »[24]. Chris Ingham dĂ©crit ce « cocktail de rock et d'avant-garde » comme la musique la plus radicale des Beatles Ă  cette Ă©poque[26]. Courtney Taylor-Taylor des Dandy Warhols est surtout impressionnĂ© par la batterie : « Ces batteries compressĂ©es Ă  mort et les cymbales qui font schwooooo !, c'est hyper rock. Ça a dĂ» faire flipper les gens[38]. »

Pour Philippe Paringaux, longtemps journaliste du magazine Rock & Folk et traducteur du livre The Beatles Anthology, il s'agit de sa chanson prĂ©fĂ©rĂ©e des Beatles, et il explique pourquoi : « Parce qu'elle a ce cĂŽtĂ© rĂ©pĂ©titif, sur une seule note. Parce que j'adore la voix de John sur cette chanson. Avec le recul, je trouve le texte marrant. Et John a Ă©tĂ© assez malin pour trouver ce titre absurde, qu'il a empruntĂ© Ă  Ringo. Lennon se branchait sur tout, courait tous les liĂšvres, tombait dans tous les panneaux, politique, gourou-machin, etc. Mais toujours avec sincĂ©ritĂ©. C'est pour moi sa chanson la plus Ă©mouvante, mĂȘme si ce n'est pas forcĂ©ment la plus belle. Elle me donne la chair de poule, je l'Ă©coute assez souvent. Si j'Ă©tais ingĂ©nieur du son, je la mettrais en boucle pour qu'elle dure une face entiĂšre [39]! »

Daniel Lesueur qualifie le texte de John Lennon d'« hallucinant... ou plutÎt halluciné » et la chanson de représentative du cÎté avant-gardiste des Beatles. Il poursuit en indiquant qu'il s'agit du « premier titre vraiment fou de la pop britannique », bien avant Pink Floyd et consorts[40]. Cette analyse est souvent reprise et place Tomorrow Never Knows comme premiÚre grande chanson psychédélique[41]. Ian McDonald va jusqu'à la présenter comme une des chansons des Beatles à l'impact social le plus important, puisqu'elle introduit au jeune public occidental le LSD et la révolution psychédélique de Leary[42].

La prise 1 de la chanson a été publiée sur le disque Anthology 2. La version originale sera incluse sur l'album compilation éponyme paru exclusivement en téléchargement sur itunes en 2012.

Un projet d'utiliser la musique des Beatles comme trame sonore d'un spectacle du Cirque du Soleil a été initié par George Harrison et Guy Laliberté au début des années 2000. Lorsque Neil Aspinall a approché George Martin pour en faire la production sonore, celui-ci invita son fils à l'aider dans ce projet. En , Giles Martin a conçu les 13 premiÚres minutes de la trame sonore du spectacle Love en plus du mashup de la chanson Within You Without You avec Tomorrow Never Knows[43]. C'est à la suite de l'écoute de ce montage que la création de ce spectacle s'est réellement enclenchée. La piÚce Within You Without You / Tomorrow Never Knows a été utilisée comme vidéoclip pour la promotion de l'album Love. Ce clip est inclus sur le second DVD de l'édition de luxe de la réédition du disque 1.

InterprĂštes

The Beatles

Musicien additionnel

Équipe de production

Reprises

George Martin a expliquĂ© que, au vu du procĂ©dĂ© trĂšs particulier utilisĂ© pour crĂ©er la chanson, il Ă©tait impossible de la reproduire. Cela n'a pourtant pas empĂȘchĂ© d'autres artistes de l'adapter et de la reprendre[note 3], notamment :

Références

Notes

  1. PiÚce cylindrique du magnétophone, destinée à régler la vitesse de défilement de la bande.
  2. Traduction d’un extrait de l’interview :

    Q. : Ringo, j’ai entendu dire qu’on vous avait « manutentionnĂ© » lors du bal de l’ambassade.
    R. : Pas vraiment, c’est juste que quelqu’un m’a coupĂ© quelques cheveux.
    Q. : Voyons voir... Il semble que vous en avez encore beaucoup !
    R. : Regardez la différence ! Ils sont plus longs de ce cÎté...
    Q. : Que s’est-il passĂ© exactement ?
    R. : Je ne sais pas. J’étais en train de parler, une interview, juste comme je suis maintenant...
    (John et Paul soulĂšvent ses cheveux, faisant mine de les couper)
    R. : Je discutais, puis j’ai regardĂ© autour de moi et il y avait environ 400 personnes en train de sourire. Alors, que peut-on dire ?
    John : Que peut-on dire ?
    R. : Demain ne sait jamais[29].

  3. Le site web SecondHandSongs dénombre une trentaine de reprises[44].

Références

  1. The Beatles Anthology, p. 177
  2. Tim Hill, p. 262
  3. Steve Turner, p. 115
  4. (en) « The Lost Teachings of Lama Govinda », Richard Power, 2007, Quest Book. ConsultĂ© le 18 dĂ©cembre 2010.
  5. Steve Turner, p. 116
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