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TalĂąq

Les rĂšgles pour le talĂąq (arabe : Ű·Ù„Ű§Ù‚, traduit en français par « rĂ©pudiation » [1]) comprend toutes les formes de rupture volontaire du mariage [1]. Ces rĂšgles varient parmi les diffĂ©rentes madhhab (Ă©coles juridiques). Les chiites et sunnites n'appliquent en effet pas les mĂȘmes rĂšgles. Cependant la dĂ©marche est la mĂȘme, c'est le mari qui a la charge de prononcer les formules.

DĂ©finition

Al-Talaq est dĂ©fini, en droit musulman, par la demande de divorce Ă  l'initiative de l'homme. En arabe, vient du mot « Al Itlaq » qui signifie le fait de relĂącher une chose, de s’en sĂ©parer.

RĂšgles gouvernant l'usage du talĂąq

Les hommes comme les femmes ont la possibilité de divorcer en islam. L'islam reconnaßt la répudiation des femmes par les hommes mais aussi, si les conditions requises sont remplies, le divorce à l'initiative de la femme. Le mariage n'est pas considéré comme un sacrement, mais comme un contrat conclu entre deux personnes consentantes; le divorce est donc une rupture du contrat. En général, ce contrat doit nécessairement avoir comme objectif, au moment de sa conclusion, de durer de façon indéfinie.

Le divorce, s'il est une chose possible, ne doit se produire qu'en dernier recours. Mahomet a ainsi voulu prĂ©server le mariage en instaurant la nĂ©cessitĂ© de rĂ©itĂ©rer, par trois fois successives (et non simultanĂ©es), la formule de rĂ©pudiation qui met fin Ă  la vie commune et fait entrer la femme en 'idda, pĂ©riode de retraite ou de continence, ou en dĂ©lai de viduitĂ© (ce qui permet notamment d'Ă©viter les conflits possibles de paternitĂ©) [2]. Pour les chiites, cette rĂ©pudiation doit se faire publiquement. En outre, afin de prĂ©server la femme contre des abus frĂ©quents dans les temps prĂ©-islamiques, le ProphĂšte a ajoutĂ© que la troisiĂšme rĂ©pudiation rendait celle-ci dĂ©finitive, empĂȘchant le mari de maintenir sa femme dans un Ă©tat intermĂ©diaire. Il y a ainsi deux rĂ©pudiations, dites rĂ©vocables (radj'Ăź), suivie d'une troisiĂšme, irrĂ©vocable (bĂą'in). « La rĂ©pudiation rĂ©vocable est donc conçue comme un moyen de protĂ©ger le mariage, la rĂ©pudiation irrĂ©vocable comme une protection de la femme. » [3]

Toutefois, les populations contemporaines de Mohamed s'Ă©tant opposĂ©es Ă  cette nĂ©cessitĂ© de rĂ©itĂ©rer la rĂ©pudiation, l'usage a progressivement Ă©tĂ© admis d'une rĂ©pudiation unique, en utilisant la triple formule (simultanĂ©e). Cette jurisprudence a Ă©tĂ© entĂ©rinĂ©e dans tous les pays musulmans, bien que cette pratique coutumiĂšre soit, Ă  la lettre, contraire au Coran et aux ahĂądith [3]. Les juristes n'y ont pas vu une rĂšgle d'idjmĂą (consensus des savants), mais comme une bid'a (innovation blĂąmable), tout en l'acceptant [3]. De mĂȘme, les cadis, s'ils dĂ©ploraient cette pratique coutumiĂšre, l'ont entĂ©rinĂ©e[3].

À la troisiĂšme rĂ©pudiation, l'homme ne peut plus revivre avec sa femme. Selon le Coran, il ne peut se remarier avec elle que si celle-ci a entretemps rĂ©-Ă©pousĂ© un autre homme, puis divorcĂ©. À cette norme, la jurisprudence a ajoutĂ© l'obligation de consommer le mariage effectuĂ© dans l'intermĂšde[4].La rĂ©pudiation pour les mariages temporaires est dĂ©finitive et unique.

Il faut ajouter à cela que le mari doit payer le douaire à la femme avec qui il se marie (cela n'a rien à voir avec la dot que dans certaines sociétés du passé et d'aujourd'hui, le pÚre de la fille doit verser à celui qui se marie avec sa fille ou doit remettre au couple). Or, dans les pays arabes, ce douaire est élevé, assez élevé pour dissuader le mari de répudier sa femme pour un motif futile ; c'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles il a été institué. En cas d'utilisation abusive, par le mari, du droit de divorce par la formule, la femme ainsi divorcée peut demander le versement d'une pension compensatoire.

Étape Pratique sunnite Pratique chiite
Initiation (sourate 65.1 et sourate 2.228) Le mari peut, pour divorcer, prononcer de une à trois fois la formule de divorce (talāq) ou bien un mot qui n'est employé que pour désigner l'équivalent en présence de sa femme. La possibilité de divorcer par la formule fait alors en quelque sorte fonction de « fusible chez le mari : celui-ci prononce la formule de divorce. » Le mari annonce publiquement son désir de divorce
Réconciliation (sourate 4.45 et sourate 65.1) Le mari doit prononcer trois fois la formule de divorce (talāq) Les familles cherchent à trouver un arrangement pendant le iddah. Si le couple entretient une relation sexuelle la procédure est annulée.
Prononciation (sourate 65.2 et 2.231) Un Cadi commence et le mari finit de prononcer le triple talāq Deux témoins doivent, à la fin de l'iddah, attester la fin de la procédure

Divorce Ă  l'initiative de la femme

La femme, dont le consentement est nĂ©cessaire pour le mariage, a aussi le droit d'exiger le divorce, mais celui-ci doit ĂȘtre validĂ© devant un tribunal. Le contrat de mariage peut toutefois stipuler que la femme a le droit de se rĂ©pudier elle-mĂȘme, et ainsi de dissoudre d'elle-mĂȘme le mariage (soit par tafwĂźd, soit par khul' ou mubĂąrĂą'at) [5].

Le tafwĂźd s'Ă©tablit lors du contrat de mariage : le mari se dĂ©pouille alors de son droit de rĂ©pudiation, et concĂšde Ă  la femme celui de se rĂ©pudier elle-mĂȘme [5].

Le khul' permet à la femme de divorcer lorsque le tribunal refuse de prononcer celui-ci, moyennant compensation[5]. Si les deux conjoints renoncent à leurs droits de créance, on parle alors de mubùra'at [5].

La femme peut aussi recourir aux possibilités suivantes :

  1. utiliser la formule de talĂąq dans l'un de ces cas :
    • le tamliq quand elle possĂšde le droit de rĂ©pudier (ce droit peut ĂȘtre consignĂ© dans le contrat matrimonial ou dans un autre contrat);
    • le takyiree ou droit d'option, quand le mari ne veut pas divorcer mais lui confie l'option de maintenir ou mettre fin Ă  leur vie conjugale;
    • le tafwide ou dĂ©lĂ©gation, il s'agit lĂ  d'une procuration donnĂ©e oralement ou par Ă©crit par l'Ă©poux Ă  son Ă©pouse pour formuler le talĂąq.
  2. rendre le douaire (mahr), qu'il lui avait donné au moment du mariage, et tous les deux mettent fin à leur état conjugal.

Divorce juridique

Le juge peut aussi prononcer la dissolution de mariage :

  • Ă  la suite du serment d'anathĂšme (li'Ăąn)[6]
  • en prĂ©sence de vices rĂ©dhibitoires[6]; il s'agit lĂ  d'une analogie (qiyas) avec la rĂ©siliation pour vice cachĂ©[6] (en l'occurrence, maladie rendant la vie commune pĂ©rilleuse, par exemple la lĂšpre ou la dĂ©mence[6], ou impuissance du mari[6])
  • pour inaccomplissement des obligations de mariage[6]: non-paiement de la dot, manquement Ă  l'obligation d'entretien (nafaka), ou encore si le mari contrevient Ă  une disposition prĂ©cisĂ©e dans le contrat de mariage[6]
  • ou le divorce peut ĂȘtre prononcĂ© d'office par le juge[6] (abus de l'autoritĂ© maritale, en cas de violences par exemple[6], dissentiment grave entre les Ă©poux[6], absence de l'Ă©poux [6]).

D'aprĂšs Shaykh Muhammad Ibn IbrĂąhĂźm  : "Il est permis de contraindre l’époux Ă  accepter la dissolution du mariage lorsqu’il n’est pas possible de rĂ©unir les deux Ă©poux, et ce en fonction de l’effort d’interprĂ©tation du juge, et Ibn Muflih rapporta cela d’éminents juges du ShĂąm."

L'Islam met en place un arbitrage par l'intermédiaire de 2 juges (représentants) de chaque famille qui doivent trancher de la situation (en rÚgle générale, les 2 pÚres de chaque conjoints). En cas de désaccord entre les 2 arbitres-juges-médiateurs, une instance judiciaire tranche définitivement sur les conflits - à noter que, d'aprÚs al Lajna ad-Daima, en pays non-musulman, l'imam est considéré comme juge-arbitre.

Interprétation

Un hadith, cependant considéré par certains comme faible (da'ßf), mentionnerait : « le plus haïssable des actes licites aux yeux de Dieu est le Talùq ».

Mohammad Nasir Ad-Dine Al Albani considĂšre ce hadith comme Ă©tant faible dans de nombreux ouvrages et notamment dans les livres suivants:

« Irwa al ghalil (p2040) –

da’if Abi daoud (p472) –

da’if Ibn Madja (p441) –

da’if at-targhib (p1238) –

da’if al jami’ (p44) –

ghayatou al maram (p253) ».

Il a Ă©galement Ă©crit dans mishkatou al maçabih (3216) que sa chaĂźne de narrateurs comportait des erreurs et l’a rendu authentique dans « at-ta’liqat ar-radiya (p238 - 2) puis il a dit plus loin (p269 - 2) qu’il n’était pas sĂ»r mais plutĂŽt dĂ©ficient.  Pour rappel, un hadith jugĂ© faible ne peut pas ĂȘtre utilisĂ© comme un argument en jurisprudence sauf exception.

Dispositions nationales

Au Maroc, la rĂ©forme du droit de la famille (Moudawana) a autorisĂ© les femmes Ă  dĂ©cider d'elles-mĂȘmes du divorce (l'art. 71 prĂ©voit le khul') [7].

NB : en cas de khul' : la femme n'est plus considérée comme l'épouse du mari et doit donc retourner chez ses parents car elle ne lui est plus licite sauf s'ils (les époux avec l'accord de l'épouse et du waly) refont un nouveau contrat de mariage .

Le Code du statut personnel tunisien (1956) a remplacĂ© la procĂ©dure de rĂ©pudiation par une procĂ©dure de divorce qui « ne peut avoir lieu que devant le tribunal »[8] et qui entraĂźne « la dissolution du mariage »[9]. Ce mĂȘme tribunal ne prononce le divorce qu’en cas de consentement mutuel des deux Ă©poux et Ă  la demande de l’un des conjoints en fonction du prĂ©judice dont il a Ă©tĂ© victime[10]. Il est Ă©galement indiquĂ© que « le prĂ©judice matĂ©riel sera rĂ©parĂ© [Ă  la femme] sous forme de rente payable mensuellement [...] en fonction du niveau de vie auquel elle Ă©tait habituĂ©e durant la vie conjugale, y compris le logement »[10]. Une fois encore, le prĂ©sident Habib Bourguiba se justifie par les dispositions du Coran[11].

Procédure en Algérie

L'ordonnance n°59-274 du relative au mariage contracté par les personnes de statut civil local en Algérie, suivie d'un décret d'application du paru au J.O.R.F. du , précise les modalités d'application du code civil en matiÚre de mariage et de divorce dans les « départements d'Algérie ».

Le mariage peut ĂȘtre dissous (sauf en cas de dĂ©cĂšs) uniquement par dĂ©cision de justice rendue par le cadi ou le juge de paix. Un jugement de divorce est obligatoire. Ce qui revenait Ă  interdire le divorce par talĂąq.

Les actes constatant les rĂ©pudiations intervenues avant cette date devaient ĂȘtre transcrits sur les registres d'Ă©tat civil. La production d'un extrait de la transcription de l'acte de rĂ©pudiation prouve la dissolution du mariage.

L'annulation du mariage

L'annulation du mariage est reconnue par l'islam en cas de non-consommation. Encore aujourd'hui, il arrive que la non-consommation doive ĂȘtre justifiĂ©e. L'annulation du mariage est encore utilisĂ©e dans certains pays religieux car il permet Ă  la femme de rompre le lien du mariage sans perdre sa dot.

Les commissions de réconciliation

Toutefois, en cas de mésentente grave et prolongée, le Coran recommande qu'on ait recours non pas directement à la formule du divorce mais à une commission qui tentera la réconciliation.

Il s'agit pour ce faire que le juge dĂ©signe une commission constituĂ©e d'une personne de la famille de la femme et d'une autre de la famille du mari. Cette commission aura pour objectif de tenter la rĂ©conciliation entre les deux Ă©poux : au cas oĂč il leur apparaĂźt que celle-ci est impossible ou vaine, ils peuvent prononcer le divorce.

Le juge peut nommer deux personnes ou une seule: selon Shaykh Al-‘UthaymĂźn « Si la dĂ©sunion ne survient que d’un seul Ă©poux, il n’est pas nĂ©cessaire de faire appel Ă  deux arbitres qui n’interviennent que si la discorde naĂźt des deux parties »

Il peut nommer des personnes apparentĂ©es ou non aux Ă©poux, or les personnes nommĂ©es doivent ĂȘtre au courant des rĂšgles de l'Islam en la matiĂšre .

Notes et références

  1. François-Paul Blanc, Le droit musulman, Dalloz, 2e édition, 2007, 128 p., p. 63
  2. Voir fiches du Maroc et de l'Algérie pour le droit du mariage, sur le site du MinistÚre français des Affaires étrangÚres
  3. François-Paul Blanc, Le droit musulman, Dalloz, 2e édition, 2007, 128 p., p. 34 et p. 64-65.
  4. François-Paul Blanc, Le droit musulman, Dalloz, 2e édition, 2007, 128 p., p. 67.
  5. François-Paul Blanc, Le droit musulman, Dalloz, 2e édition, 2007, 128 p., p. 74-76.
  6. François-Paul Blanc, Le droit musulman, Dalloz, 2e édition, 2007, 128 p., p. 76-84.
  7. Moudawana
  8. (fr) Article 30 du Code du statut personnel (Jurisite Tunisie)
  9. (fr) Article 29 du Code du statut personnel (Jurisite Tunisie)
  10. (fr) Article 31 du Code du statut personnel (Jurisite Tunisie)
  11. Michel Camau et Vincent Geisser, Habib Bourguiba. La trace et l’hĂ©ritage, Ă©d. Karthala, Paris, 2004, p. 107

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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