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Soliton

Un soliton est une onde solitaire qui se propage sans se dĂ©former dans un milieu non linĂ©aire et dispersif. On en trouve dans de nombreux phĂ©nomĂšnes physiques de mĂȘme qu'ils sont la solution de nombreuses Ă©quations aux dĂ©rivĂ©es partielles non linĂ©aires.

Historique

Les solitons hydrodynamiques

Soliton hydrodynamique.

Le phĂ©nomĂšne associĂ© a Ă©tĂ© observĂ© pour la premiĂšre fois en 1834 par l'Écossais John Scott Russell qui l'a observĂ© initialement en se promenant le long d'un canal : il a suivi pendant plusieurs kilomĂštres une vague remontant le courant qui ne semblait pas vouloir faiblir[1]. Des observations complĂ©mentaires sont prĂ©sentĂ©es en 1862 par Henry Bazin Ă  l'AcadĂ©mie des Sciences Ă  la suite d'expĂ©riences menĂ©es dans un bief du canal de Bourgogne Ă  Dijon [2]. Il a Ă©tĂ© modĂ©lisĂ© par Joseph Boussinesq[3] en 1872. Ainsi sur l'eau, il est apparentĂ© au mascaret. Il apparaĂźt par exemple dans la Seine ou sur la Dordogne, en Gironde, Ă  certains endroits et Ă  certains moments. D'autres solitons apparaissent comme des ondes internes (en), initiĂ©es par la topographie du fond marin, et qui se propagent dans la pycnocline ocĂ©anique.

Ce mode de propagation d'une vague sur de longues distances explique aussi la propagation des raz-de-marée (ou tsunami). Ceux-ci se déplacent presque sans effet notable en eaux profondes. Le transport par soliton explique que les tsunamis, insensibles pour les navires en mer, puissent naßtre d'un séisme sur une cÎte de l'océan Pacifique et avoir des effets sur la cÎte opposée.

Les solitons optiques

Évolution spatio-temporelle d'un soliton optique fondamental qui se propage sans se dĂ©former.

L'utilisation de solitons a été proposée pour améliorer la performance des transmissions dans les réseaux optiques de télécommunications en 1973 par Akira Hasegawa du laboratoire Bell d'AT&T[4]. En 1988, Linn Mollenauer et son équipe transmettent des solitons sur plus de 4 000 km en utilisant la diffusion Raman, du nom du prix Nobel de physique indien qui a décrit cet effet de diffusion inélastique. En 1991, toujours aux Bell Labs, une équipe transmet des solitons sur plus de 14 000 km en utilisant des amplificateurs à erbium.

En 1998, Thierry Georges et son équipe du centre de recherche et développement de France Télécom combinent des solitons de longueurs d'onde différentes (multiplexage en longueur d'onde) pour réaliser une transmission à un débit supérieur à 1 térabit par seconde (1012 bits par seconde). En 2001, les solitons trouvent une application pratique avec le premier équipement de télécommunications transportant du trafic réel sur un réseau commercial.

Les solitons mécaniques

L’une des illustrations expĂ©rimentales des solitons les plus adoptĂ©es dans la littĂ©rature est probablement celle d’une chaĂźne de pendules couplĂ©s[5] - [6]. Ce montage mĂ©canique permet une observation directe des solitons, une comprĂ©hension des principales propriĂ©tĂ©s de ces derniers et des caractĂ©ristiques qu’un systĂšme doit possĂ©der pour permettre leur existence[7].

Les solitons Ă©lectriques

La maniĂšre la plus simple de rĂ©aliser un soliton Ă©lectrique consiste Ă  construire un dipĂŽle retardateur capable de reproduire sans dĂ©formation une impulsion dĂ©terminĂ©e Ă  une distance donnĂ©e ÎŽ, avec un dĂ©calage de temps τ. En faisant prĂ©cĂ©der ce dipĂŽle par une sĂ©rie de dipĂŽles identiques adaptĂ©s au premier, on peut reconstituer une ligne discrĂšte le long de laquelle l’impulsion se propage avec la vitesse c = ÎŽ/τ. En limite, avec des paramĂštres ÎŽ et τ infinitĂ©simaux, on accĂšde Ă  une ligne continue.

Un exemple est donnĂ© (Bulletin de l’Union des Physiciens, juillet-aoĂ»t-, N° 1006, p.959-968 / Propagation d’un soliton dans une ligne Ă©lectrique en Ă©chelle) avec un signal en forme de sĂ©cante hyperbolique carrĂ©e.

Pour introduire les solitons Ă©lectriques, on peut procĂ©der Ă  trois Ă©tapes : d'abord on commence par une propagation Ă©lectromagnĂ©tique linĂ©aire et non dispersive, puis on passe Ă  une propagation linĂ©aire mais dispersive, et Ă  la fin on traite le cas des solitons, c'est‑à‑dire la propagation non linĂ©aire et dispersive.

Propagation linéaire et non dispersive

Par exemple dans des cĂąbles coaxiaux (sous certaines conditions).

Propagation non linéaire et dispersive

Un des modĂšles couramment utilisĂ©s pour l’étude des solitons Ă©lectriques est celui d’une chaĂźne LC Ă©lectrique.

Dans la pratique, la propagation d'une onde solitaire dans un tel montage dĂ©pend de nombreuses conditions et nĂ©cessite un certain nombre d’approximations (RĂ©fĂ©rences). L’une des approximations les plus importantes est celle des milieux continus. En effet, la structure discrĂšte de la chaĂźne de pendules et de celle du montage LC Ă©lectrique conduit Ă  des Ă©quations discrĂštes du mouvement. L’approximation des milieux continus permet, sous certaines conditions, de remplacer ces Ă©quations discrĂštes par des Ă©quations continues plus simples Ă  manipuler[6] .

Les solitons dans d'autres domaines physiques

En 2004, N. Sugimoto de l'universitĂ© d'ƌsaka a trouvĂ© le moyen d'introduire de la dispersion lors de la propagation d'ondes acoustiques et, par lĂ  mĂȘme, de crĂ©er les premiers solitons acoustiques. Une utilisation potentielle de ce phĂ©nomĂšne est la rĂ©duction des ondes de choc Ă  l'entrĂ©e de trains dans les tunnels.

En 2006, Michael Manley observe, grùce à des expériences de diffusion par des rayons X et des neutrons, des solitons au sein de cristaux d'uranium portés à une température élevée.

Théorie

La thĂ©orie des solitons s'est surtout dĂ©veloppĂ©e grĂące Ă  l'optique rendue non linĂ©aire au moyen de l'effet Kerr ou de photo-rĂ©fraction, l'expĂ©rience et la thĂ©orie s'Ă©paulant : soit une onde lumineuse plane dont l'intensitĂ© dĂ©croĂźt en fonction de la distance Ă  un point central. Vers le centre, l'accroissement de l'indice de rĂ©fraction, qui rĂ©sulte de l'accroissement de l'intensitĂ©, rĂ©duit la vitesse de propagation et l'onde devient convergente ; mais cette convergence est limitĂ©e du fait de la dĂ©faillance de l'optique gĂ©omĂ©trique. L'expĂ©rience ainsi que la rĂ©solution des Ă©quations de Maxwell montrent que l'essentiel de l'Ă©nergie lumineuse se propage en un filament entourĂ© d'une onde Ă©vanescente. L'Ă©nergie Ă©tant concentrĂ©e dans deux directions perpendiculaires au filament et se propageant dans une troisiĂšme, on nomme ce filament « soliton 2+1 ». La prĂ©sence d'un filament voisin modifie diffĂ©remment le champ Ă©lectromagnĂ©tique suivant qu'on se trouve du cĂŽtĂ© voisin ou du cĂŽtĂ© opposĂ© au filament voisin, de sorte que la variation rĂ©sultant du champ, donc de l'indice de rĂ©fraction, courbe le filament. Le filament peut ĂȘtre courbĂ© de façon Ă  former un tore, par exemple en postulant que la permĂ©abilitĂ© magnĂ©tique du milieu croĂźt aussi avec le champ. Le tore ainsi obtenu est un soliton tridimensionnel (3+0) qui peut reprĂ©senter une particule. Ces particules possĂšdent toutes les propriĂ©tĂ©s des particules matĂ©rielles : leurs interactions par leurs champs Ă©vanescents permettent, en particulier, des interfĂ©rences.

En thĂ©orie (quantique) des champs, les solitons topologiques sont des solutions classiques non triviales topologiquement. Ils portent diffĂ©rents noms suivant qu'ils minimisent l'action (→ instanton) ou l'Ă©nergie et en fonction des topologies respectives de l'espace et du groupe de jauge (monopĂŽle, vortex, skyrmion, toron, ...).

Modélisation

Vague en faible profondeur : l'Ă©quation de Korteweg-de Vries

En mathĂ©matiques, l'Ă©quation de Korteweg-de Vries[6] (KdV en abrĂ©gĂ©) est un modĂšle mathĂ©matique pour les vagues en faible profondeur. C'est un exemple trĂšs connu d'Ă©quation aux dĂ©rivĂ©es partielles non linĂ©aire dont on connait exactement les solutions. Ces solutions comprennent, mais ne se limitent pas Ă  des solitons. Ces solutions peuvent se calculer par la transformation de diffusion inverse (mĂȘme principe que la rĂ©solution de l'Ă©quation de la chaleur).

On considÚre un fluide incompressible et non visqueux lors d'un écoulement irrotationnel[5]. On note la profondeur, la hauteur de la surface et la vitesse des ondes linéaires.

À partir des Ă©quations d'Euler, on obtient l'Ă©quation :

On se place dans un repĂšre mobile en posant et pour Ă©liminer le second terme de l'Ă©quation :

On obtient alors l'équation de Korteweg-de Vries en posant des variables adimensionnées (, et ) :

On cherche alors les solutions localisées spatialement se propageant à vitesse constante. On pose donc pour obtenir :

En intégrant par rapport à on obtient (en prenant la constante d'intégration nulle car on cherche des solutions localisées spatialement) :

D'oĂč en intĂ©grant encore par rapport Ă  (et en considĂ©rant encore la constante d'intĂ©gration nulle) :

Finalement, en effectuant le changement de variable (oĂč est la sĂ©cante hyperbolique) pour intĂ©grer , on obtient :

En revenant aux notations précédentes, on obtient :

La vitesse est linéaire par rapport à l'amplitude :

L'Ă©quation de sine-Gordon

Application aux solitons, permettant de décrire à partir de la mécanique lagrangienne une chaßne de pendules infinis par exemple. Elle s'écrit :

Son nom vient de ce qu'elle se réduit à l'équation de Klein-Gordon décrivant les particules de spin 0 dans la limite . Elle possÚde des solitons et des breathers (états liés de solitons et d'antisolitons). On peut construire les solutions à plusieurs solitons au moyen de la transformation de BÀcklund.

L'équation de Schrödinger non linéaire

Le soliton est solution de l'équation de Schrödinger non linéaire, qui s'écrit par exemple dans le cas de la propagation d'un signal lumineux dans une fibre sous la forme :

avec la dispersion d'ordre 2 (supposée anormale, soit ) et le coefficient de non-linéarité Kerr de la fibre optique. et représentent respectivement la distance de propagation et la variable temporelle dans un repÚre se propageant à la vitesse de groupe.

Références

  1. J. Scott Russell. Report on waves, Fourteenth meeting of the British Association for the Advancement of Science, 1844.
  2. Henry Bazin, « ExpĂ©riences sur les ondes et la propagation des remous », Comptes Rendus des SĂ©ances de l'AcadĂ©mie des Sciences, vol. 55,‎ , p. 353-357
  3. Joseph Boussinesq, « ThĂ©orie de l'intumescence liquide, appelĂ©e onde solitaire ou de translation, se propageant dans un canal rectangulaire », Comptes rendus de l'AcadĂ©mie des sciences, vol. 72,‎ , p. 755–759 (lire en ligne)
  4. (en) Hasegawa et Tappert, « Transmission of stationary nonlinear optical pulses in dispersive dielectric fibers. I. Anomalous dispersion », Appl. Phys. Lett., vol. 23,‎ , p. 142-144
  5. source : La Physique des Solitons, Michel Peyrard, Thierry Dauxois, 2004, EDP Sciences, Savoirs Actuels
  6. Voir par exemple Michel Remoissenet, « Waves Called Solitons : Concepts and Experiments », Sringer 1996
  7. (en) Aymen Jallouli, Najib Kacem et Noureddine Bouhaddi, Stabilization of solitons in coupled nonlinear pendulums with simultaneous external and parametric excitations, FEMTO-ST Institute, UMR 6174, Applied Mechanics Department, University of Franche-Comté (lire en ligne)

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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