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Serin roux

Crithagra rufobrunnea

Le Serin roux (Crithagra rufobrunnea) est une espèce de passereaux appartenant à la famille des Fringillidae.

Distribution

L'espèce est endĂ©mique de l'archipel de Sao TomĂ©-et-Principe : Ă  Sao TomĂ©, Ă  Principe et Ă  l’îlot BonĂ© de JĂłquei (ou Caroço), dans le golfe de GuinĂ©e. L’îlot BonĂ© de JĂłquei mesure seulement 600 x 900 m et se trouve Ă  km au sud-est de la cĂ´te de PrĂ­ncipe.

Sous-espèces

D'après la classification de référence (version 3.2, 2012) du Congrès ornithologique international :

  • S. r. rufobrunneus (Gray, 1862) : Ă®le PrĂ­ncipe.
  • S. r. thomensis (Bocage, 1888) : Ă®le SĂŁo TomĂ©.
  • S. r. fradei de Naurois, 1975 : Ă®lot BonĂ© de JĂłquei.

Différenciation morphologique, vocale et génétique

Crithagra rufobrunnea thomensis.

Sur le plan morphologique, les serins de Boné présentent le bec le plus divergent en relation avec l’habitat le plus distinctif (monoculture des palmiers à huile comparativement aux habitats plus diversifiés de Sao Tomé-et-Principe) et donc avec le mode alimentaire également le plus différencié. Leur bec, à la fois plus long et plus large, traduit une adaptation au martelage des noix très dures. Ils sont aussi les plus lourds avec un rapport aile/poids le plus faible en relation avec une moindre nécessité de voler dans cet îlot densément couvert de palmiers. Ils présentent aussi le corps le plus grand, peut-être en relation avec le bec le plus fort, mais suggérant certainement une forte compétition intraspécifique et une faible compétition interspécifique. Les études ont montré que chez le serin roux (toutes sous-espèces confondues), le manteau est un caractère neutre et peu variable alors que les zones visibles en face-à-face (tête, collier, poitrine) sont soumises à la sélection. Le collier est la zone la plus importante dans la communication[1].

Chaque population possède un répertoire vocal différencié que l’on peut qualifier de dialecte (basé sur le type de syllabe et sur la syntaxe du chant). Des séquences audio des trois sous-espèces ont été enregistrées sur le terrain entre 2002 et 2004 puis comparées sur des sonagrammes. Ces séquences ont ensuite été passées en à São Tomé, à Boné de Jóquei et à Príncipe, ce mois ayant été choisi car l’ensemble des données montre un maximum d’activité reproductrice entre novembre et janvier. Les résultats montrent que les oiseaux des trois sous-espèces répondent plus significativement lors du passage des émissions vocales de leur propre population. Ils ne semblent donc pas reconnaître les chants des autres sous-espèces. Le chant joue donc un rôle de barrière efficace en cas de contact secondaire par une autre population et peut ainsi éviter l’hybridation mais il représente aussi un premier stade vers la spéciation[1].

Pour les analyses génétiques, des oiseaux des trois populations ont été capturés, bagués, pesés et mesurés avec prélèvement de quelques plumes et d’un peu de sang puis ils ont été photographiés et relâchés. Les résultats montrent qu’il existe une structure génétique propre à chaque population donc à chaque île mais sans différence entre les populations occupant les forêts ou les plantations de São Tomé. La couleur du manteau (pas du collier, de la poitrine et de la tête) est le seul critère de coloration significativement corrélé à la variation génétique mais les modifications du chant et de la morphologie coïncident aussi avec les variations génétiques. La nette différenciation génétique entre les populations de Boné et de Príncipe est étonnant car elles sont éloignées de seulement km et aucune des deux n’a perdu ses capacités de vol. Mais des cas similaires ont été rapportés suggérant que la traversée de petits bras de mer peut être empêchée par des barrières comportementales[1].

Habitat

Cocoteraies de Porto Alegre.

Ă€ SĂŁo TomĂ©, le serin roux est un oiseau commun des forĂŞts primaires de montagne et de basse altitude du sud-ouest et du centre de l’île. Il frĂ©quente Ă©galement les vieilles forĂŞts secondaires du pourtour du massif montagneux central et les habitats très dĂ©gradĂ©s et ouverts des plantations vivrières vers 1 000 m d’altitude oĂą le faciès du paysage est nettement diffĂ©rent : massifs d’arbres, notamment du genre Pentaclethra, d’arbustes et de buissons, dominant une vĂ©gĂ©tation basse de graminĂ©es, d’herbes et de cultures. Mais il descend aussi sur la cĂ´te, dans des milieux profondĂ©ment modifiĂ©s par l’homme comme les plantations de cacao sous ombrage d’érythrines sur la cĂ´te nord-ouest, les cultures mixtes avec arbres fruitiers et vĂ©gĂ©tation secondaire sur la cĂ´te sud-est, vers Ribeira Peixe, les grandes cocoteraies de Porto Alegre au sud, les savanes Ă  cocotiers de la cĂ´te nord et les galeries sèches de Lagoa Azul.

Pico Papagaio.

À Príncipe, on le trouve en lisière du massif forestier primaire en moyenne et haute vallée du rio Papagaio (pt) et dans le même type de végétation, sur la côte occidentale, au pied du pic Papagaio. Dès l’entrée en forêt primaire, on peut le repérer grâce à son chant. Dans le sud de l’île, il est également commun en forêt primaire de plaine et en forêt côtière où il est l’un des chanteurs les plus réguliers des cocotiers et des arbres du littoral. Mais il n’y a pas d’explication actuelle à la restriction de sa répartition dans le centre et le sud de Príncipe, ni à sa préférence d’habitat. Sur l’îlot Boné de Jóquei, il est inféodé aux palmiers Elaeis et à la végétation basse[2].

Alimentation

Le serin roux ne se comporte pas comme un granivore, mais à la fois comme un frugivore et un insectivore. Il consomme, en zones dégradées, les fruits du Cecropia (Cecropiacées) et les baies noires du buisson Cestrum laevigatum (ceb) (Solanacées). Dans les cultures mixtes, il décortique souvent des bourgeons d’Erythrina. En forêt primaire, il se nourrit également de bourgeons de Schefflera (Araliacées), et de feuilles et de fruits de Musanga. Il a aussi été observé en train de picorer vigoureusement le lichen couvrant les branches des grands arbres y recherchant certainement des insectes ou des pontes d’insectes. L’étude de son spectre alimentaire par les autres auteurs confirme qu’il peut être considéré comme généraliste, se nourrissant d’une large gamme de fruits et de graines, mais aussi d’insectes [3] - [2] - [4].

Comportement alimentaire

Parallèlement au comportement alimentaire classique des formes rufobrunneus et thomensis, fradei a développé toute une gamme de techniques de nourrissage comme l’exploration de l’écorce d’arbres à la manière d’un pic, le prélèvement d’insectes sur les rameaux, sur les feuilles et même dans les galets des rivières[4].

MĹ“urs

Malgré son plumage sombre et peu brillant, le serin roux est facile à repérer. Il est généralement peu farouche, restant longtemps sur place dans le même arbre où il chante et se nourrit. Il est facile d’observation dans les habitats ouverts, en lisière de forêts et en bordure de rivières. Il est plus difficile à observer en forêt primaire à canopée fermée surtout s’il se tient dans la voûte notamment à Príncipe et dans les forêts de plaine du sud-ouest de São Tomé[2].

Nidification

Ă€ PrĂ­ncipe, un nid a Ă©tĂ© dĂ©couvert Ă  la mi- Ă  3,50 m de hauteur, bien dissimulĂ© dans le feuillage d’un arbuste surplombant un chemin. C’était une coupe de brindilles avec une garniture intĂ©rieure d’herbes sèches; le fond Ă©tait parfaitement propre et paraissait prĂŞt Ă  recevoir des Ĺ“ufs. Ă€ BonĂ© de JĂłquei, un nid fraĂ®chement construit fut trouvĂ©, Ă  quelques mètres de l’estran caillouteux, il avait Ă©tĂ© arrachĂ© par le vent Ă  un rameau de palmier. La structure, parfaitement conservĂ©e, montrait que ce nid avait Ă©tĂ© simplement posĂ© (sans amarrage) sur la partie horizontale d’une branche en arceau, Ă  mi-distance entre l’aisselle et les palmes.

Ă€ SĂŁo TomĂ©, quatre nids, en tous points semblables Ă  ceux de PrĂ­ncipe, ont Ă©tĂ© trouvĂ©s. Ils Ă©taient placĂ©s entre 4 et 10 m de hauteur et, le plus souvent, bien dissimulĂ©s dans le feuillage et Ă  l’écart des habitations sauf pour un cas dans un arbre totalement dĂ©foliĂ© et Ă  proximitĂ© d’une maison. Ils Ă©taient faits de brindilles et de tiges d’herbes dessĂ©chĂ©es, gĂ©nĂ©ralement assez raides et cassantes, mĂŞlĂ©es d’un peu de mousse. La ponte normale Ă©tait de trois Ĺ“ufs blanc pur, peut-ĂŞtre seulement deux Ĺ“ufs dans certains cas. Ils nichaient par couples isolĂ©s les uns des autres et non en colonies, la reproduction occupant au moins huit Ă  neuf mois sur douze. Ă€ PrĂ­ncipe et SĂŁo TomĂ©, deux pĂ©riodes d’intense activitĂ© reproductrice ont lieu de juin Ă  aoĂ»t et de novembre Ă  janvier et coĂŻncident avec les saisons relativement sèches ; gravana de juin Ă  aoĂ»t, gravanito de fin dĂ©cembre Ă  fin janvier : ce qui paraĂ®t logique pour une espèce dont le nid est une coupe ouverte[3].

Statut

Îlot Boné de Jóquei (ou Caroco).

La capacitĂ© d’exploiter diffĂ©rentes ressources alimentaires a fait du serin roux l’un des oiseaux les plus communs de SĂŁo TomĂ© oĂą il se reproduit du niveau de la mer Ă  2 025 m d’altitude. Ă€ PrĂ­ncipe, il est confinĂ© aux forĂŞts matures du sud mais rare dans les zones cultivĂ©es du nord. Ă€ BonĂ©, il est extrĂŞmement abondant avec des groupes de dix oiseaux partout dans l’îlot. Ces densitĂ©s sont dues aux forĂŞts Ă  palmiers Ă  huile qui constituent la principale couverture vĂ©gĂ©tale. Les effectifs de SĂŁo TomĂ© sont beaucoup plus importants que ceux de PrĂ­ncipe et de BonĂ©, ces deux dernières Ă®les ayant une population d’importance similaire[1].

Notes et références

  1. (en) Melo, M. (2007). Bird speciation in the Gulf of Guinea. PhD, School of Biological Sciences, Institute of Evolutionary Biology, University of Edinburgh, Edinburgh.
  2. Christy, P. & Clarke, W. V. (1998). Guide des oiseaux de São Tomé et Príncipe. Libreville, Ecofac, 106 p.
  3. Naurois, de, R. (1975). « Les Carduelinae des îles de São Tomé et Príncipe (Golfe de Guinée) », Ardeola 21 : 903-931.
  4. (en) Jones, P. J. & Tye, A. (2006). The Birds of São Tomé and Príncipe with Annobón, islands of the Gulf of Guinea. British Ornithologists’ Union, Oxford, 192 p.

Bibliographie

  • Christy, P. & Clarke, W. V. (1998). Guide des oiseaux de SĂŁo TomĂ© et PrĂ­ncipe. Libreville, Ecofac, 106 p.
  • (en) Jones, P. J. & Tye, A. (2006). The Birds of SĂŁo TomĂ© and PrĂ­ncipe with AnnobĂłn, islands of the Gulf of Guinea. British Ornithologists’ Union, Oxford, 192 p.
  • (en) Melo, M. (2007). Bird speciation in the Gulf of Guinea. PhD, School of Biological Sciences, Institute of Evolutionary Biology, University of Edinburgh, Edinburgh.
  • Naurois, de, R. (1975). « Les Carduelinae des Ă®les de SĂŁo TomĂ© et PrĂ­ncipe (Golfe de GuinĂ©e) », Ardeola 21 : 903-931.

Liens externes

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