Sequana (mythologie)
Sequana est représentée le plus souvent sous les traits d'une jeune fille[1]. Ce personnage de la mythologie celtique gauloise est associé au fleuve de la Seine. Il est possible de voir une statue la représentant dans un nymphée construit pour protéger la source, situé au même endroit qu'un sanctuaire, lui aussi consacré à la déesse, aux sources de la Seine à Source-Seine. Personne n'est en mesure de connaître avec certitude l'origine de la divinité gauloise puisqu'aucun document ne parle de la déesse Sequana. Le seul moyen actuel est d'émettre des hypothèses à partir des objets retrouvés lors des différentes fouilles [2]sur le site à Source-Seine. On ne peut donc que faire des études sur ce qui a été découvert pour pouvoir mettre un nom sur cette déesse de la Seine mais également savoir comment était le sanctuaire[3], ou encore le culte voué par les Gaulois à Sequana.
Sequana | |
Déesse de la mythologie celtique | |
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Sculpture de la déesse Sequana dans le nymphée construit sur la source principale de la Seine. | |
Caractéristiques | |
Fonction principale | Déesse de la Seine |
Fonction secondaire | Pouvoir de guérison et exauce les voeux |
Lieu d'origine | Gaule celtique |
Période d'origine | Antiquité celte et gauloise |
Culte | |
Temple(s) | Sanctuaires des Sources de la Seine |
La divinité
La déesse Sequana est une divinité réputée dans l'Antiquité pour accomplir des miracles. Elle détenait un double don : le pouvoir de guérison et exaucer les vœux. On sait que les Gaulois vénéraient particulièrement les sources et notamment les sources de la Seine. Ainsi, ils croyaient fortement en la présence d'une divinité dotée d'une bienveillance résidant aux sources de la Seine. Mais pour eux, il n'y avait qu'une sorte de présence, en effet à cette époque la déesse Sequana ne possédait pas de forme particulière.
Après la défaite d'Alésia (en 52 avant notre ère), Sequana n'est plus qu'une simple essence que l'on nommait "Déesse de la Seine", c'est à partir de ce moment qu'on la dote d'une forme humaine traduite par une sculpture que chacun pouvait contempler. Ce n'est qu'après la conquête de la Gaule par Jules César que la déesse trouve toute sa résidence au parc des sources de la Seine (à 40km de Dijon).
Culte, religion et oracles
Le culte de Sequana est lié étroitement à un élément primaire : l'eau. En effet, reposant comme véritable point focal d'attention du culte[4], la sacralisation de l'élément aquatique est au centre des pratiques d'hommages ou de vénération rendus à Sequana[5]. L'expression de la présence divine est représentée par cet élément symbolique choisi par la communauté pratiquant ces hommages pour la déesse[5].
Ce culte voué sur un site sacré est avant tout public[6] car pratiqué par des personnes privées, modestes, sans doutes analphabètes[7] mais il est impossible de le lier clairement à une pratique précise[6].
Les chercheurs ont retrouvé dans les environs d'Alésia et aux sources de la Seine trois dédicaces à Sequana : deux sont des ex-votos anatomiques et une vient d'une femme la dédiant pro salute nepotis[6], chacune de ces dédicaces est reliée à l'empereur Auguste[7]. Une fréquentation individuelle massive est traduite par ces ex-votos anatomiques pour la plupart en bois et en pierre ou en bronze[7]. De plus, on a retrouvé plusieurs inscriptions (dont 9 qui nomment directement Sequana), des dédicaces à Sequana, qui informent sur les pratiques religieuses et le public car elles sont souvent maladroitement orthographiées[7].
Selon des archéologues, après avoir réalisé leurs ablutions et être passés au temple de Sequana, les pèlerins offraient à la divinité différentes offrandes dans l'espoir d'une guérison. En effet, durant l'Antiquité, la religion et la médecine étaient liées, les sanctuaires guérisseurs de sources étaient comparables à des centres médicaux pour cures thermales. En plus de recevoir des offrandes, on retrouve, grâce à une inscription qui mentionne le nom de la déesse, des pratiques oraculaires soit en faveur de Sequana ou peut-être Sequana elle-même rendait des oracles régulièrement (comme Clitumne)[8]. Pour toutes ses pratiques consacrées à Sequana, il faut une cohabitation entre l'espace sacré d'origine et le complexe monumental qu'il fallait pour honorer la déesse[4].
Le sanctuaire
Localisation du sanctuaire de Sequana. |
Au milieu du XVIIIe siècle, on découvre dans un vallon à proximité de la source de la Seine, les fondations d’un vaste édifice rectangulaire (57 m sur 18 m)[9] et une inscription : "DEA SEQUANA". La statue en bronze de la déesse Seine elle fut retrouvée avec celle d’un faune en 1933 par Henri Corot.
Ainsi, c'était dans un sanctuaire monumental bien connu articulé sur la Source que le culte de Sequana était pratiquée[10]. Le sanctuaire de Sequana est situé dans le vallon où la Seine prend sa source aux confins des territoires de Roncez-sur-l'Igon et Saint-Germain-Source-Seine, près de Chatillon à environ 35km au nord-ouest de Dijon [11]. Aujourd'hui, ce domaine des sources appartient à Paris , il abrite une grotte dans le parc accueillant les eaux de la source principale de la Seine avec au milieu du bassin une sculpture de pierre blanche qui réfléchit la lumière du jour.
Structure
Les sources de la Seine, appelées aussi les Fontes Sequanae (« les sources de Sequana »), sont situées dans une vallée sur le plateau de Langres à Source-Seine. À partir de la fin de La Tène, le sanctuaire fut aménagé par les Lingons aux sud-ouest de leur territoire. Ils y construisirent deux temples, une enceinte avec des colonnes et d'autres structures centrées sur la piscine et la source. En effet, situé dans un vallon reculé le sanctuaire comporte le terrain, les édifices, le temple, les bassins, les canaux hydrauliques et les sources.
Le temple est situé près d'une falaise rocheuse taillée en gradins[12]. De plus, on a la devant la façade (de type occidental) la mise en lumière d'une piscine qui prouve la grandeur et la somptuosité de la station gallo-romaine qu'elle avait aux premiers siècles de notre ère, qui est encore à l'heure actuelle unique au monde[12].
À partir du monument érigé par les Aresequani, on en déduit que le sanctuaire dépendrait d'une communauté rurale locale[13]. En effet c'était un grand sanctuaire public. Le contexte économique de ce sanctuaire est moins évident car il se trouve dans un espace densément peuplé en établissement ruraux de statut moyen voire important, et en périphérie d'agglomération secondaire de Blessey[14].
À ce jour, grâce à plusieurs fouilles réalisées par de nombreux archéologues, les ruines sont toujours visibles dans le parc à Source-Seine.
Fouilles
De nombreuses fouilles ont été réalisées pour mettre à la lumière du jour les différentes dédicaces à Sequana dans son sanctuaire. Grâce à cela, une multitude d'objets ont été retrouvés, notamment des objets offerts à la déesse pour demander une guérison mais également des objets de remerciements à un vœu formulé.
Les premières fouilles[12]ont été effectuées en 1933 par Henry Corot un archéologue et membre de l'Académie des sciences, arts et belles-lettres de Dijon, ainsi que membre de la Commission des antiquités du département de la Côte-d'Or. Cette première expédition permit la découverte de deux statuettes en bronze. Ces dernières ont été trouvées dans les gradins du sanctuaire à environ 3,50 mètres de haut.
- La première statuette représente un jeune faune avec un bras brisé qui semble avoir subi quelques restaurations datant de l'époque, cette figurine comprend également un socle[12].
- La deuxième statuette, quant à elle, dépeint la déesse Sequana. Composée de trois parties sur un socle en bois, on y retrouve la divinité dans une galère en bronze dont la poupe prend la forme d'un canard avec une groseille dans le bec. De plus, grâce à cette statue, on remarque que la déesse porte une robe de l'époque qui la couvre[12].
En octobre 1963, de nouvelles campagnes de fouilles[11] sont faites, on y découvre près de 300 bois sculptés, ce sont pour la plupart des ex-votos. En 1966 et 1967, il y a deux nouvelles campagnes de fouilles dirigées par le doyen Roland Martin et ses collaborateurs[11]. Des divinités du Panthéon romain vont élire domicile par la suite sur le domaine où régnait Sequana comme en témoignent les découvertes des statues d'Apollon et d'Hercule[15]. Les découvertes faites durant toutes ces fouilles aux sources de la Seine sont visibles au Musée Archéologique de Dijon.
- Déesse Sequana sur une galère en bronze
- Possible représentation de Sequana découverte à Gissey-sur-Ouche (Côte-d'Or)
Chronologie autour de Sequana
Dates | Avancées majeures sur la déesse |
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1763 | |
1836 |
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1867 |
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XXe siècle |
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Dans la culture
- Sequana fait partie des nombreux dieux cités dans la série de bande dessinée Astérix.
- Il existe une série de trois bandes dessinées intitulées Sequana de l'auteur Henri Léo et du dessinateur Stéphane Perger ayant pour maison d'édition: Emmanuel Proust éditions. Cette série, plutôt destinée aux adolescents-adultes, est parue à partir de 2008. Le premier tome [16] est une histoire se déroulant en janvier 1910 à Paris sous une pluie torrentielle, mettant en scène plusieurs personnages : Monseigneur Chelles et son secrétaire Pétillot ; Alice Treignac (étudiante en médecine) et son père qui lui est médecin ; Jean Faure, un malfrat ; également l'esprit de la déesse de la Seine (d'où le nom de la bande dessinée, et le rapport avec l'eau). Les deux tomes suivant [17] - [18] et derniers de la série, continuent les histoires des différents personnages précédemment cités, dans cette suite, tout s'imbrique, tout se recoupe pour laisser place à des courses-poursuites, des alliances, pour essayer de sauver Paris de la noyade.
- Le Trésor Gaulois de Sequana [19] de A. Bertron-Martin, est un livre jeunesse racontant l'histoire d'une princesse prénommée Abelia, protégée par la déesse Sequana à la suite de la mise à mort de Lugurix. Ce dernier avait recueilli la princesse quand elle était bébé. Tout au long de ce récit, Abelia et un jeune barde, Ernos, devront passer de nombreuses épreuves et vaincre celui qui a tué Lugurix, pour rejoindre leur royaume.
Étymologie
Le nom propre Sequana a déjà fait verser des flots d'encre sans qu'on soit arrivé à une solution satisfaisante. Si on a affaire réellement à un -qv- vieux-celtique, ne donnant pas p en gaulois, on est en présence d'un phénomène celtiquement inexplicable. Joseph Loth propose une solution à la phonétique et l'étymologie de ce nom.
Selon lui Sequana viendrait d'une base d'un mot composé : Seco-vana ou secu-vana, forme que les Romains ne pouvalent traduire dans l'écriture autrement qu'ils l'ont fait.
Pour expliquer ce mot Joseph Loth indique que les langues brittoniques possèdent une racine sec- qui signifie couper: gallois hesg, armor. sescenn, sorte de glaïeul à bords coupants, sec-sco; hesken, scie. Quant à -wama, on pourrait le rapprocher du gallois gwanu, percer, pénétrer à travers[20].
Bibliographie
- H. Corot, « Fouilles du temple de la dea Sequana », Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 77, no 2,‎ , p. 289–292 (DOI 10.3406/crai.1933.76351, lire en ligne, consulté le )
- Y. Le Bohec, Inscriptions de la cité des Lingons : inscriptions sur pierre, "Inscriptiones latinae Galliae Belgicae", Paris, coll. « Mémoires de la section d'archéologie et d'histoire de l'art », , 366 p. (ISBN 978-2-7355-0515-9)
- J.-M. Loth, « L'inscription latine de Gélignieux (Ain) et le prétendu ligure ou celtican du calendrier de Coligny », Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 53, no 1,‎ , p. 16–28 (DOI 10.3406/crai.1909.72350, lire en ligne, consulté le )
- M. Vauthey et P. Vauthey, « Les ex-voto anatomiques de la Gaule romaine (Essai sur les maladies et infirmités de nos ancêtres) », Revue archéologique du Centre de la France, vol. 22, no 2,‎ , p. 75–81 (DOI 10.3406/racf.1983.2371, lire en ligne, consulté le )
- M.-T. Raepsaet-Charlier, « Alésia et ses dieux : du culte d’Apollon Moritasgos à l’appartenance civique des Mandubiens à l’époque gallo-romaine », L'Antiquité Classique, vol. 82, no 1,‎ , p. 165–194 (DOI 10.3406/antiq.2013.3831, lire en ligne, consulté le )
- D. Vurpillot, Les sanctuaires des eaux en Gaule de l'est : origine, organisation et évolution (Ier siècle av. J.-C. : IVe siècle après J.-C.), vol. 1, , 499 p.
- A. Bertron-Martin, Le trésor gaulois de Sequana, Paris, Auzou, , 93 p. (ISBN 978-2-7338-5109-8)
- L. Henry et S. Perger, Le pyrogène, Paris, EP éd., coll. « Sequana », , 44 p. (ISBN 978-2-84810-221-4)
- L. Henry et S. Perger, La cathédrale engloutie, Paris, EP éd., coll. « Sequana », , 48 p. (ISBN 978-2-84810-258-0)
- L. Henry et S. Perger, Le guetteur mélancolique, Paris, coll. « Sequana », (ISBN 978-2-84810-180-4 et 2-84810-180-6)
- R. Martin, « Le travail du bois dans les sculptures des sources de la Seine », Publications de l'École Française de Rome, vol. 99, no 1,‎ , p. 609–620 (lire en ligne, consulté le )
Articles connexes
Liens externes
- Une petite image de la statue en bronze dans le Musée archéologique de Dijon était censé représenter Sequana
- Pour aller plus loin dans l'interprétation des objets retrouvés lors des fouilles:Le travail du bois dans les sculptures des sources de la Seine.[21]
Notes et références
- « Résultats Google Recherche d'images correspondant à https://media-cdn.tripadvisor.com/media/photo-p/0f/f4/5d/12/flussgottin-sequana.jpg », sur www.google.com (consulté le )
- Henry Corot, « Fouilles du temple de la dea Sequana », Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 77, no 2,‎ , p. 289–292 (DOI 10.3406/crai.1933.76351, lire en ligne, consulté le )
- « Le sanctuaire des Sources de la Seine | Musée Archéologique », sur archeologie.dijon.fr (consulté le )
- D. Vurpillot, « Les sanctuaires des eaux en Gaule de l’est : origine, organisation et évolution (Ier siècle av. J.-C. - IVe siècle après J.-C.) », vol. 1, 2016, p. 342.
- D. Vurpillot, « Les sanctuaires des eaux en Gaule de l’est : origine, organisation et évolution (Ier siècle av. J.-C. - IVe siècle après J.-C.) », vol. 1, 2016, p. 188.
- M.-T. Raepsaet-Charlier, « Alésia et ses dieux : du culte d’Apollon Moritasgos à l’appartenance civique des Mandubiens à l’époque gallo-romaine », L’Antiquité Classique, vol. 82, no 1, 2013, p. 182.
- M.-T. Raepsaet-Charlier, « Alésia et ses dieux : du culte d’Apollon Moritasgos à l’appartenance civique des Mandubiens à l’époque gallo-romaine », L’Antiquité Classique, vol. 82, no 1, 2013, p. 185-186.
- D. Vurpillot, « Les sanctuaires des eaux en Gaule de l’est : origine, organisation et évolution (Ier siècle av. J.-C. - IVe siècle après J.-C.) », vol. 1, 2016, p. 392.
- Francis Leveque, « ~~ La déesse Séquana ~~ Navires Antiques ~~ Le Musée Imaginaire ~~ », sur marine-antique.net (consulté le )
- Wolfgang Spickermann, Religionsgeschichte des römischen Germanien. 1. Germania superior, Tübingen, 2003, p. 65-66 ; cf. CAG 21/2, p. 122-139.
- M. Vauthey et P. Vauthey, « Les ex-voto anatomiques de la Gaule romaine (Essai sur les maladies et infirmités de nos ancêtres) », Revue archéologique du Centre de la France, vol. 22, no 2, 1983, p. 76.
- H. Corot, « Fouilles du temple de la dea Sequana », Comptes rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 77, no 2, 1933, p. 290-292.
- D. Vurpillot, « Les sanctuaires des eaux en Gaule de l’est : origine, organisation et évolution (Ier siècle av. J.-C. - IVe siècle après J.-C.) », vol. 1, 2016, p. 395.
- D. Vurpillot, « Les sanctuaires des eaux en Gaule de l’est : origine, organisation et évolution (Ier siècle av. J.-C. - IVe siècle après J.-C.) », vol. 1, 2016, p. 355.
- D. Vurpillot, « Les sanctuaires des eaux en Gaule de l’est : origine, organisation et évolution (Ier siècle av. J.-C. - IVe siècle après J.-C.) », vol. 1, 2016, p. 346.
- L. Henry et S. Perger, Sequana, Paris, 2008, vol. Le guetteur mélancolique.
- L. Henry et S. Perger, Sequana, Paris, 2009, vol. Le pyrogène.
- L. Henry et S. Perger, Sequana, Paris, 2009, vol. La cathédrale engloutie.
- A. Bertron-Martin, Le trésor gaulois de Sequana, Paris, 2017.
- Kelly - University of Toronto, Revue celtique, Paris : F. Vieweg, (lire en ligne)
- R. Martin, « Le travail du bois dans les sculptures des sources de la Seine », 1987, p. 609-62.