Rouges barres
Le rouge barre[1] est un appareillage de pierres blanches et de briques liées à la chaux (appelé aussi lardé[2]), commun dans le Nord de la France (Flandres, Artois, Picardie) et en usage du XVIIe au XIXe siècle.
Origine
Si les carrières de craie du Nord de la France ont probablement été exploitées dès l'époque gallo-romaine, elles étaient à ciel ouvert et le minerai extrait destiné à la production de chaux. Les édifices religieux sont les plus anciennes constructions en pierre calcaire, et nombre d'églises en Pévèle et Mélantois en témoignent (Clocher de Lezennes, Wattignies, Faches…).
Les constructions civiles sont, elles, habituellement en bois. Devant la multiplication des incendies, qui font des ravages en milieu urbain, le premier magistrat de Lille décrète en 1566, que toutes les constructions seront désormais faites en pierre et en briques[3].
Les moellons de pierre calcaire (appelés blanc caillos) sont extraits des carrières souterraines voisines de Lille : Lezennes notamment, mais aussi les communes avoisinantes, Lesquin, Ronchin, Faches, et jusqu'à Loos. L'exploitation se rationalise et les catiches fleurissent sur les propriétés des carriers et chaufourniers. Mais la porosité importante[4] du calcaire de Lezennes rend cette pierre gélive, et très peu de bâtiments construits entièrement de craie nous restent aujourd'hui. La brique est plus solide, mais plus coûteuse : le charbon nécessaire à sa cuisson est importé de Belgique. Héritières des murs romains à pastoureaux chaînés de briques[5], les rouges barres sont un bon compromis : à un rang de moellons de craie succèdent trois rangs de brique. Les murs des habitations sont habituellement enduits ou peints, afin de les protéger des intempéries. Dès que les moyens le permettent, le mur de façade est entièrement de briques, façon d'afficher son aisance. L'usage des rouges barres est alors réservé aux pignons, murs du côté jardin ou dépendances.
L'exploitation des mines de charbon du bassin du Nord de la France au XIXe siècle permet une diminution du coût de la brique, rendant peu à peu caduque l'exploitation de la craie comme matériau de construction. L'emploi des briques se généralise.
Un patrimoine fragile
Les constructions en rouges barres sont donc anciennes, parfois vétustes, et la plupart du temps rasées pour laisser place à des habitations neuves. Depuis les années 1970, le charme des rouges barres a conduit nombre de propriétaires à restaurer ces murs, à en ôter le crépi pour les mettre en valeur. La pluie et le gel hélas détériorent peu à peu la craie, nécessitant des restaurations fréquentes. Effectuées bien souvent à base de ciment plutôt que de chaux, elles ne font qu'accélérer le vieillissement des murs.
Toponyme
L'expression a laissé son nom à un quartier de Marcq-en-Baroeul[6], au nord de Lille.
Notes et références
- Bien que le mot soit usité au pluriel : « un mur en rouges barres »
- Annick Stein, La maison dans sa région : Le Nord, Paris, Massin, , 95 p. (ISBN 2-7072-0178-2)
- Bernard Bivert, Les souterrains du Nord-Pas de Calais, Cuincy, Conseil général - Département du Nord, , 358 p. (ISBN 2-9502930-0-X)
- Maxime Lion, « Influence de la température sur le comportement poromécanique ou hydraulique d'une roche carbonatée », Thèse présentée à l'université des sciences et techniques de Lille,
- Étienne Poncelet, La couleur à Lille au xviie siècle, de Philippe IV à Louis XIV, Bulletin du Centre de recherche du château de Versailles, (lire en ligne)
- https://www.marcq-en-baroeul.org/votre-ville/vos-quartiers/quartier-croise-laroche-rouges-barres