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RP-1

Le RP-1 (anglais : Rocket Propellant 1 ou Refined Petroleum 1) est une forme de kérosène spécialement raffiné en vue d'une utilisation comme carburant liquide stockable pour lanceurs spatiaux. Utilisé avec l'oxygène liquide comme comburant, il forme un propergol liquide moins puissant que l'hydrogène liquide, mais bien plus simple à manipuler, avec une bien meilleure densité énergétique[1] et sans nécessiter de technologies cryogéniques pointues comme avec le LH2. Il est enfin bien moins dangereux que les carburants de type peroxyde d'azote/aérozine 50, qui sont plus toxiques et cancérogènes que le kérosène.

Décollage de la mission Apollo 11, à bord d'un lanceur Saturn V, dont les deux premiers étages fonctionnent grâce à du kérosène de grade RP-1

Le développement du RP-1 résulte de la recherche, par les États-Unis, de propergols stockables puissants pour propulser leurs missiles balistiques intercontinentaux dans le cadre de la guerre froide. Les études sont parties de la technologie développée par le IIIe Reich, souvent au mépris de la vie de ses prisonniers de guerre, pour propulser ses avions-fusées Messerschmitt Me 163B (au propergol T-Stoff/C-Stoff) et ses fusées V2 (au propergol A-Stoff/B-Stoff). Ce B-Stoff désignait un mélange d'éthanol dans une fraction d'eau, qui permettait de refroidir le moteur-fusée du V2 en faisant circuler une partie de l'ergol dans le corps du moteur et dans la tuyère avant de l'injecter dans la chambre de combustion.

Cette technique de refroidissement est aujourd'hui généralisée, et a conditionné le développement du RP-1 dans les années 1950 pour remplacer avantageusement l'éthanol des premiers missiles (à l'image du PGM-11 Redstone américain). Les hydrocarbures présentent en effet des difficultés d'application par rapport aux alcools :

  • les hydrocarbures naturels contiennent une fraction sulfurĂ©e, qui a tendance Ă  former des dĂ©pĂ´ts de soufre dans les circuits de refroidissement surchauffĂ©s du moteur et agit Ă  la fois comme catalyseur de polymĂ©risation et comme agent de rĂ©ticulation, risquant d'obstruer les conduits ;
  • ils contiennent aussi une fraction insaturĂ©e qui risque de polymĂ©riser sous l'effet de la chaleur dans les circuits de refroidissement et d'y former des dĂ©pĂ´ts ;
  • ils ont enfin tendance Ă  se fractionner en molĂ©cules plus petites sous l'effet de la chaleur, ce qui donne des bulles d'hydrocarbures lĂ©gers dans le liquide circulant dans les circuits, susceptibles de les obstruer lorsqu'elles s'accumulent sur les dĂ©pĂ´ts de polymères et/ou de soufre.

Le procédé de fabrication du RP-1 commence donc par un raffinage classique en vue de produire du kérosène, qu'on traitera ensuite par désulfuration avant d'en retirer les fractions insaturées (ce qui résout les problèmes de dépôts solides) puis les fractions trop linéaires (ce qui résout les problèmes de fractionnement des molécules en sous-produits légers). Les espèces moléculaires privilégiées sont donc les hydrocarbures saturés en C12 très ramifiés ou polycycliques, ressemblant plus ou moins à des ladderanes.

Le rĂ©sultat est une substance ayant un point d'Ă©clair Ă©levĂ© (supĂ©rieur Ă  40 °C), ce qui le rend stable et peu dangereux Ă  manipuler, avec une masse volumique d'environ 810 kg/m3 et une impulsion spĂ©cifique nominale comprise entre 270 et 360 s avec l'oxygène liquide. Étant peu volatil, le RP-1 doit ĂŞtre pressurisĂ© dans son rĂ©servoir par un système dĂ©diĂ©, gĂ©nĂ©ralement Ă  base d'azote ou d'hĂ©lium, ce qui accroĂ®t la complexitĂ© du dispositif.

Des grades Ă  usage Ă©quivalent au RP-1 avaient Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©s en URSS et sont toujours en usage en Russie sous le nom de T-1 et de RG-1, avec une densitĂ© un peu plus Ă©levĂ©e, entre 830 et 850 kg/m3, et mĂŞme davantage en le rĂ©frigĂ©rant suffisamment ; les rĂ©servoirs de kĂ©rosène du lanceur Soyouz sont d'ailleurs situĂ©s entre les rĂ©servoirs d'oxygène liquide et d'azote liquide pour le garder au frais.

Voir aussi

Articles connexes

Notes et références

  1. (en) Douglas Rapp, « High energy-density liquid rocket fuel performance », dans 26th Joint Propulsion Conference, American Institute of Aeronautics and Astronautics (DOI 10.2514/6.1990-1968, lire en ligne).
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