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Pungitius pungitius

L'Épinochette (Pungitius pungitius) est un poisson d'eau douce à saumâtre de l'hémisphère nord, plutôt nordique (trouvé jusque dans les régions arctiques[1]), d'Asie (jusqu'en Chine, Corée et Japon), d'Amérique du Nord (États-Unis, Canada). En Amérique du Nord elle présente des variations géographiques (différences morphologiques et éthologiques observables chez les reproducteurs par exemple du Mississippi, de la zone du détroit de Béring et/ou d'Europe)[2]. En France, on pouvait la trouver dans une grande moitié nord du pays (jusqu'au sud du Lot-et-Garonne).

Description 

Avec son corps plus effilé que celui de l'épinoche et avec ses 6 à 9 (jusqu'à 12) épines dorsales, l'épinochette possède un dos et des flancs brun clair avec des taches sombres. Elle est dépourvue d'écailles. Sa taille n'excède pas cm.

Dimorphisme sexuel : visible en période de frai, la gorge et la poitrine du mâle sont alors noires et les nageoires ventrales sont orange.

Habitats

Cette espèce peut fréquenter des habitats très divers. Elle résiste aux hivers longs et froids et sa vessie natatoire lui permet d'équilibrer sa flottabilité à des salinités diverses (0 à 22,5 ppt d'après les tests faits en laboratoire par Gee & Holst (1992)[3]) ainsi qu'à des variations du courant si le poisson est exposé à un courant pendant plusieurs jours (également démontré chez Culaea inconstans). D'autres adaptations lui permettent de passer de l'eau douce à salée notamment concernant le mucus et les branchies[4].

Il a aussi été constaté dans la nature que ces poissons diminuent leur flottabilité quand le courant augmente (et selon la température). La flottabilité est aussi plus élevée chez les épinoches vivant dans les zones riches en plantes en eaux calmes ou lentiques. Beaver & Gee (1988) ont montré en laboratoire que l'épinoche ajuste lentement sa flottabilité à la température de l'eau mais uniquement s'il y a aussi du courant (« dans ce cas, à 6 °C, la flottabilité était plus grande qu'à des températures plus élevées » (l'ajustement permettant de passer d'une flottabilité maximale à minimale (quand la température monte) est plus rapide chez P. pungitius (4 jours) que chez C. inconstans (7 jours)[5].

Répartition

Aire de répartition
Aire de répartition

Cette espèce d'épinoche est présente dans tout l'hémisphère nord, dont en Asie (jusqu'en Chine, Corée et Japon) et en Amérique du Nord (États-Unis, Canada). Elle est présente en Europe, et trouvée en France dans la grande moitié nord jusqu'au Lot-et-Garonne au sud. C'est une espèce plutôt nordique. Cameron et al. (1973) l'ont étudié[1] dans le lac Ikroavik (nord de l'Alaska)[1]. Dans cette région, la population varie beaucoup en termes de densité (atteignant 74 g/m2 dans les zones de marais en début d'été[1].

Alimentation 

L'espèce est carnivore ; petites proies animales (essentiellement de petits crustacés et larves d'insectes). Son bilan énergétique a été étudié dans le lac Ikroavik où cette épinoche se nourrit essentiellement de larves de moustiques chironomidés, de zooplancton) (copépodes et daphnies principalement) elle y croît asse vite, mesurant 21 mm en fin de la première année, 42 mm la seconde et 65 mm la troisième année[1] ; aucun individu de plus de 3 ans n'a été observé dans ce lac[1].

Mode de vie 

Grégaire : ce poisson vit en groupe, avec des individus de même taille ; mais le mâle devient très territorial au moment du frai.

Reproduction 

Avril-mai. La température de l'eau ne doit pas dépasser 8 °C pendant l'hiver sinon ils ne frayent pas au printemps suivant. Au moment de la reproduction, le mâle construit un nid à quelques centimètres du sol à l'aide de brindilles et d'une substance produite par les capsules surrénales, qui sert de mastic ; il y attire une femelle. La ponte terminée, la femelle quitte le nid par la sortie opposée et s'éloigne. Le mâle féconde ensuite les œufs et ce processus se répète avec 3 ou 4 femelles. Chacune pondra une centaine d'œufs. À la fin du frai, le mâle surveille la ponte, puis les alevins pendant quelque temps (famille paternelle). La période d'incubation est d'une dizaine de jours.

Selon John R. Foster (1977), le comportement des reproducteurs pourrait être à l'origine des sous-populations constatées par divers ichtyologues : des mâles échoueraient à stimuler des femelles s'ils sont d'une taille, coloration et proportions légèrement différente, de même si leur parade en zigzag diffère ; et une femelle peut refuser un nid dont la position, la taille ou le type et le nombre de ses voies d'accès ne correspondent pas aux standards de la sous-population à laquelle elle appartient[6].

Génétique

Des croisements (hybridation) naturels avec des individus sympatriques de l'espèce proche Pungitius tymensis (Nikolsky) sont possibles, démontrés au Japon par des analyses d'ADN mitochondrial (ADNmt)[7]. L'incidence de ces hybridations est localement plus importante par exemple dans le centre d'Hokkaïdo peut-être selon les auteurs d'une étude, en raison du climat plus doux là que dans les autres régions ; ils ajoutent que « Les populations réceptrices de P. tymensis présentaient une variation de l'ADNmt nettement plus élevée que celle qui a été observée chez les populations sympatriques des espèces donneuses, ce qui semble indiquer qu'une croissance soudaine de la population est survenue pendant ou après les processus de substitution de l'ADNmt »[7].

Parasitoses

Comme de nombreux autres poissons, toutes les épinoches peuvent héberger et transporter des parasites[8]. Une étude a porté sur les cestodes (du genre Schistocephalus) et a confirmé que ce parasite force les épinoches à monter en surface (en augmentant leurs besoins en oxygène). Ceci facilite leur prédation par des oiseaux piscivores (hérons notamment) qui sont l'hôte final du cestode. Si l'on dispose à proximité un faux oiseau prédateur, les épinoches parasitées restent aussi plus longtemps près de la surface que les épinoches saines. Ce phénomène de remontée est encore plus net en situation d'hypoxie (0,75 à 2,0 mg/L d'oxygène dissous)[9].

Les effets d'une parasitose par les plécocercoïdes du cestode Schistocephalus pungitii Dubinina, 1959 ont été étudiés dans le lac Airolo en Alaska par Heins et al. (2014). Il a été constaté un « écrasement des gonades du poisson hôte par les parasites »[10] ; les femelles infectées ne produisaient pas d’œufs et les testicules des mâles parasités étaient anormalement petits[10]. Ceci pourrait être lié au détournement de nutriments par le parasite. Les auteurs estiment que ceci va dans le sens de l'hypothèse que S. pungitii serait un « parasite castreur ». Ce dernier pourrait ainsi grandir plus vite et/ou prolonger de sa « période de transmission »[10].

Espèce proche

On trouve une espèce voisine en France Pungitius laevis (Cuvier, 1829), beaucoup plus rare.

Notes et références

  1. Cameron, J. N., Kostoris, J., & Penhale, P. A. (1973). Preliminary energy budget of the ninespine stickleback (Pungitius pungitius) in an arctic lake. Journal of the Fisheries Board of Canada, 30(8), 1179-1189 (résumé).
  2. J. D. McPhail (1963) Geographic Variation in North American Ninespine Sticklebacks, Pungitius pungitius ; Journal of the Fisheries Research Board of Canada, 20(1): 27-44, 10.1139/f63-004
  3. John H. Gee, Heidi M. Holst (1992) Buoyancy regulation by the sticklebacks Culaea inconstans and Pungitius pungitius in response to different salinities and water densities ; Revue canadienne de zoologie, 1992, 70(8): 1590-1594, 10.1139/z92-219 (résumé)
  4. Solanki, T. G., & Benjamin, M. (1982). Changes in the mucous cells of the gills, buccal cavity and epidermis of the nine‐spined stickleback, Pungitius pungitius L., induced by transferring the fish to sea water. Journal of Fish Biology, 21(5), 563-575 (http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1095-8649.1982.tb02860.x/abstract résumé]).
  5. Beaver & Gee (1988) Role of water current and related variables in determining buoyancy in the sticklebacks Culaea inconstans and Pungitius pungitius ; Revue canadienne de zoologie, 1988, 66(9): 2006-2014, 10.1139/z88-294 (résumé)
  6. John R. Foster (1977), The role of breeding behavior and habitat preferences on the reproductive isolation of three allopatric populations of ninespine stickleback, Pungitius pungitius ; Revue canadienne de zoologie, , 55(10): 1601-1611, 10.1139/z77-209 (résumé)
  7. H Takahashi, K Takata (2000) Multiple lineages of the mitochondrial DNA introgression from Pungitius pungitius (L.) to Pungitius tymensis (Nikolsky) ; Canadian Journal of Fisheries and Aquatic Sciences, 57(9): 1814-1833, 10.1139/f00-133
  8. George Hanek, William Threlfall (1970) Parasites of the ninespine stickleback Pungitius pungitius (L.) in Newfoundland and Labrador ; Revue canadienne de zoologie, 1970, 48(3): 600-602, 10.1139/z70-106 (pas de résumé)
  9. Roger S. Smith, Donald L. Kramer (1987) Effects of a cestode (Schistocephalus sp.) on the response of ninespine sticklebacks (Pungitius pungitius) to aquatic hypoxia ;Revue canadienne de zoologie, 65(7): 1862-1865, 10.1139/z87-285 (résumé)
  10. David C Heins, Britt Ulinski, Jill Johnson, John A Baker (2004), Effect of the cestode macroparasite Schistocephalus pungitii on the reproductive success of ninespine stickleback, Pungitius pungitius ; Revue canadienne de zoologie, 2004, 82(11): 1731-1737, 10.1139/z04-171 (http://www.nrcresearchpress.com/doi/abs/10.1139/z04-171#.VkMVZ-IWn-s résumé])

Liens externes

Bibliographie

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