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Protéine chaperon

Une protéine chaperon[1] est une protéine dont la fonction est d'assister d'autres protéines dans leur maturation en évitant la formation d'agrégats via les domaines hydrophobes présents sur leur surface lors de leur repliement tridimensionnel[2]. Beaucoup de protéines chaperons sont des protéines de choc thermique (Heat shock proteins - Hsp), c'est-à-dire des protéines exprimées en réponse à des variations de température ou d'autres types de stress cellulaire, tel que le stress oxydant.

Histoire

La recherche sur les chaperons a une longue histoire[3]. Le terme « chaperon moléculaire » est apparu pour la première fois dans la littérature en 1978, et a été inventé par Ron Laskey pour décrire la capacité d'une protéine nucléaire appelée nucléoplasmine à empêcher l'agrégation des protéines histones repliées avec l'ADN pendant l'assemblage des nucléosomes[4]. Le terme a été ensuite étendu par R. John Ellis en 1987 pour décrire les protéines qui ont servi de médiateur dans l'assemblage post-traductionnel de complexes protéiques[5]. En 1988, des recherches ont montré que des protéines similaires servent de médiateur dans les procaryotes et les eucaryotes[6]. Les détails de ce processus ont été déterminés en 1989 par Pierre Goloubinoff dans le laboratoire de George H. Lorimer, lorsque le repliement protéique dépendant de l'ATP a été démontré in vitro[7].

Structure

La structure des protéines est sensible à la chaleur, elles se dénaturent et perdent leurs fonctions biologiques. Le rôle des protéines chaperons est de prévenir les dommages potentiellement causés par une perte de fonction protéique due à un mauvais repliement tridimensionnel. D'autres protéines chaperons sont impliquées dans le repliement de protéines néosynthétisées alors qu'elles sont extraites du ribosome.

Fonctionnement général

Pour fonctionner les protéines chaperons utilisent de l'ATP.

Contextualisation

Pour les protéines, l'obtention de leur état final est une étape clef puisqu'il définit leurs propriétés fonctionnelles et leurs activités.

  • Certaines protĂ©ines, les plus petites, peuvent acquĂ©rir spontanĂ©ment cet Ă©tat, il n'y a alors pas intervention des protĂ©ines chaperon. Cependant, il arrive qu'une mauvaise conformation soit obtenue. Les protĂ©ines chaperons interviennent alors et remettent les protĂ©ines dans la « bonne voie Â».
  • On notera que la plupart des protĂ©ines nĂ©cessitent leurs actions pour obtenir leur Ă©tat actif.

Mode d'action

Les protéines chaperon aident au repliement des protéines en modifiant leur conformation. Elles reconnaissent les protéines par leur surface hydrophobe (située en temps normal au centre des protéines mais à l'extérieur dans ce cas), les masquent et, grâce à leur flexibilité, modifient leur structure en mettant les zones hydrophiles au contact de l'eau.

Différentes protéines chaperons

Les chaperonines

Les chaperonines constituent une famille de protéines chaperons[2]. Elles encapsulent leur protéine substrat et sont caractérisées par une structure en double anneau. On les trouve chez les procaryotes, dans le cytosol des eucaryotes et dans les mitochondries.

Autre protéines chaperons

D'autres types de protéines chaperons sont impliquées dans le transport transmembranaire, par exemple dans les mitochondries et le réticulum endoplasmique. De nouvelles fonctions des protéines chaperons sont continuellement découvertes, comme l'assistance à la dégradation protéique (assurant leur élimination quand elles sont anormales)[8] et la réponse aux maladies liées à l'agrégation protéique (voir prion).

Nomenclature et exemples de protéines chaperons chez les procaryotes

Il existe de nombreuses familles de protéines chaperons, dont les modes d'action sont variés. Chez les procaryotes comme Escherichia coli, beaucoup de ces protéines sont fortement exprimées dans des conditions de stress, par exemple à la suite d'une exposition à de hautes températures. Pour cette raison le terme historique de protéine de choc thermique (Heat-Shock Proteins ou Hsp) a tout d'abord désigné les protéines chaperons.

  • Hsp60 (complexe GroEL/GroES chez E. coli) est le plus connu des complexes Ă  haut poids molĂ©culaire (1 million de Daltons) de protĂ©ines chaperons. GroEL est constituĂ© de 14 sous-unitĂ©s rĂ©unies en un double anneau qui possède une zone hydrophobe au niveau de son ouverture. Le complexe est suffisamment grand pour contenir une molĂ©cule de GFP de 54 kDa non dĂ©naturĂ©e. GroES est un heptamère ne formant qu'un seul anneau, qui se lie Ă  GroEL en prĂ©sence d'ATP ou d'ADP. GroEL/GroES ne semble pas capable d'agir sur les prĂ©cipitĂ©s protĂ©iques, mais il semble entrer en compĂ©tition avec les phĂ©nomènes de mauvais repliements et d'agrĂ©gation. Fenton & Horwich (2003)
  • Hsp70 (DnaK chez E. coli) est peut-ĂŞtre la plus connue des petites (poids molĂ©culaire = 70 kDa) protĂ©ines chaperons. Hsp70 est assistĂ©e par Hsp40 (DnaJ chez E. coli) qui accroit son activitĂ© et sa consommation d'ATP. Il a Ă©tĂ© montrĂ© que la surexpression de Hsp70 dans une cellule conduit Ă  la diminution de sa sensibilitĂ© aux messages pro-apoptotiques. Bien que les mĂ©canismes prĂ©cis aient encore Ă  ĂŞtre Ă©claircis, il est rapportĂ© qu'Hsp70 Ă©tablit des liaisons de haute affinitĂ© avec les protĂ©ines non-repliĂ©es quand elle est liĂ©e Ă  l'ADP, et de faible affinitĂ© quand elle est liĂ©e Ă  l'ATP. On pense que de multiples molĂ©cules d'Hsp70 se rassemblent autour des substrats non-repliĂ©s afin de les stabiliser et d'Ă©viter les phĂ©nomènes d'agrĂ©gation survenant avant que la protĂ©ine n'ait terminĂ© tous ses repliements. Ă€ ce moment seulement, la Hsp70 perd son affinitĂ© pour le substrat et s'Ă©loigne. Pour de plus amples informations, voir Mayer & Bukau (2005).
  • Hsp90 (HtpG chez E. coli) est peut-ĂŞtre la moins bien connue des protĂ©ines chaperons. Son poids molĂ©culaire est de 90 kDa et elle est nĂ©cessaire Ă  la survie des Eucaryotes (et peut-ĂŞtre Ă©galement Ă  celle des Procaryotes). Chaque molĂ©cule d'Hsp90 possède un domaine de fixation de l'ATP, un domaine intermĂ©diaire et un domaine de dimĂ©risation. On pense qu'elles se fixent sur leurs protĂ©ines substrats en fixant l'ATP, et qu'elles peuvent avoir besoin de cochaperons comme l'Hsp70. Voir Terasawa et al. (2005).
  • Hsp100 (famille des protĂ©ines Clp chez E. coli) dĂ©signe un ensemble de protĂ©ines Ă©tudiĂ©es in vivo et in vitro pour leurs capacitĂ©s Ă  reconnaĂ®tre et Ă  dĂ©plier les protĂ©ines marquĂ©es ou incorrectement repliĂ©es. Les protĂ©ines de la famille Hsp100/Clp forment de larges structures hexamĂ©riques ayant une activitĂ© enzymatique unfoldase en prĂ©sence d'ATP. On pense qu'elles sĂ©lectionnent une Ă  une les protĂ©ines « candidates Â» en les faisant passer Ă  travers un petit pore de 20 Ă… (2 nm) de diamètre, leur donnant ensuite une seconde chance de se replier convenablement. Certaines Hsp100, comme ClpA et ClpX, s'associent avec la protĂ©ase Ă  sĂ©rine ClpP composĂ©e de 24 sous-unitĂ©s organisĂ©es en un double-anneau ; au lieu de catalyser le repliement des protĂ©ines-cibles, ces complexes sont responsables de la destruction des protĂ©ines marquĂ©es ou incorrectement repliĂ©es.

Références

  1. On trouve Ă©galement souvent la forme « protĂ©ine chaperonne Â».
  2. Michel Morange, Protéines chaperons, médecine/sciences 2000, n°5, vol. 16, mai 2000
  3. R. J. Ellis, « Discovery of molecular chaperones », Cell Stress & Chaperones, vol. 1, no 3,‎ , p. 155–160 (ISSN 1355-8145, PMID 9222600, PMCID PMC248474, lire en ligne, consulté le )
  4. R. A. Laskey, B. M. Honda, A. D. Mills et J. T. Finch, « Nucleosomes are assembled by an acidic protein which binds histones and transfers them to DNA », Nature, vol. 275, no 5679,‎ , p. 416–420 (ISSN 0028-0836, PMID 692721, lire en ligne, consulté le )
  5. J. Ellis, « Proteins as molecular chaperones », Nature, vol. 328, no 6129,‎ 1987 jul 30-aug 5, p. 378–379 (ISSN 0028-0836, PMID 3112578, DOI 10.1038/328378a0, lire en ligne, consulté le )
  6. S. M. Hemmingsen, C. Woolford, S. M. van der Vies et K. Tilly, « Homologous plant and bacterial proteins chaperone oligomeric protein assembly », Nature, vol. 333, no 6171,‎ , p. 330–334 (ISSN 0028-0836, PMID 2897629, DOI 10.1038/333330a0, lire en ligne, consulté le )
  7. P. Goloubinoff, J. T. Christeller, A. A. Gatenby et G. H. Lorimer, « Reconstitution of active dimeric ribulose bisphosphate carboxylase from an unfoleded state depends on two chaperonin proteins and Mg-ATP », Nature, vol. 342, no 6252,‎ 1989 dec 21-28, p. 884–889 (ISSN 0028-0836, PMID 10532860, DOI 10.1038/342884a0, lire en ligne, consulté le )
  8. (en) Sarah Hanzén, Katarina Vielfort, Junsheng Yang, Friederike Roger, Thomas Nyström et al., « Lifespan Control by Redox-Dependent Recruitment of Chaperones to Misfolded Proteins », Cell,‎ (DOI 10.1016/j.cell.2016.05.006)

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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