AccueilđŸ‡«đŸ‡·Chercher

Moggallana

Moggallāna, Mahā Moggallāna (pali) ou Mahāmaudgalyāyana (sanscrit), nom personnel Kolita, Ă©tait le second en titre des dix principaux disciples du Bouddha, premier pour les pouvoirs surnaturels de siddhi, et l’un des prĂ©cepteurs de son fils Rahula. NĂ© dans une famille brahmane, il fut tout d’abord avec Sariputta, ami d’enfance et premier disciple, ascĂšte de l’école paribbajaka dirigĂ©e par le sceptique Sanjaya Belatthiputta. Un poĂšme religieux du Theragata (Khuddaka Nikaya) lui est attribuĂ©. Il est connu dans le courant mahayana essentiellement Ă  travers l'Ullambana Sutra qui relate comment il sauva sa mĂšre de l’enfer.

Le Bouddha Chakyamuni accompagné par Moggallana et Saripoutta (deux disciples et arhat), thangka tibétain du XVIIIe siÚcle, musée national de Varsovie.
« ç›źèżžæ•‘æŻ Â», dans le bouddhisme chan. Moggallana interroge le Bouddha sur la façon de sauver sa mĂšre de l'enfer (esprit famĂ©lique en bas Ă  droite) ; cette lĂ©gende, relatĂ©e dans le Sutra Ullambana, est Ă  l’origine des fĂȘtes d’Ullambana, O-Bon et Zhongyuan

Dans les rĂ©gions theravada, il est parfois reprĂ©sentĂ© dans les temples Ă  la gauche du Bouddha, avec Sariputta ou Ananda Ă  droite. La transcription de son nom en chinois est MĂłhē MĂčjiĂ nliĂĄn æ‘©èš¶ç›źçŠé€Ł, simplifiĂ© en MĂčliĂĄn 盼連 ; japonais : Mokuren, 盼連 ou Mokkenren 盼ć»ș連; vietnamien: MỄc-kiền-liĂȘn ou MỄc-liĂȘn.

Actuellement, certains historiens, parmi diverses chronologies, retiennent ces dates : premiÚre rencontre avec le Bouddha en -527, décÚs en nov. déc. -486 un mois aprÚs Sariputta et avant le Bouddha (mars avril -483 ?)[1].

Jeunesse

Il serait nĂ© le mĂȘme jour que Sariputta dans un bourg proche de Rajagaha (Magadha). Son pĂšre, un brahmane, Ă©tait chef du bourg et sa mĂšre, Ă  qui il doit son nom usuel, s’appelait Moggali ou Moggallani, indication que sa famille prĂ©tendait descendre du devin Mugdala. On dit qu'il tire son prĂ©nom, Kolita, du nom de son village natal, Kolitagama. Il sera plus tard appelĂ© Maha (grand) Moggallana pour le distinguer d’un homonyme moins Ă©minent.

Sa famille et celle de Sariputta Ă©taient amies, et c’est ensemble que les deux jeunes gens rejoignirent la secte paribbajaka. AprĂšs quelque temps, leur maĂźtre Sanjaya leur ayant, de son propre aveu, dispensĂ© l’intĂ©gralitĂ© de son savoir, ils furent convaincus de rejoindre la communautĂ© de Shakyamuni par Assaji (sk Asvajit), l’un des cinq premiers compagnons du Bouddha avant son illumination. Mogallana se serait dĂ©cidĂ© le premier ; Sariputta, Ă©ternellement respectueux envers ses maĂźtres, ne voulait tout d’abord pas abandonner Sanjaya et tenta de le convaincre de les suivre. Devant son refus obstinĂ©, il se rĂ©signa Ă  partir. Les deux compagnons d’ascĂšse se prĂ©sentĂšrent donc auprĂšs de Gautama avec 250 ou 500 disciples paribbajakas qui les auraient suivis. Ces derniers devinrent arhats immĂ©diatement aprĂšs avoir entendu le premier prĂȘche du Bouddha, mais Moggallana n’atteignit ce stade qu’une semaine aprĂšs et Sariputta deux semaines plus tard, fait traditionnellement interprĂ©tĂ© comme signe de leur potentiel supĂ©rieur, demandant plus de temps pour mĂ»rir.

Moine

Le Bouddha leur aurait donnĂ© rapidement aprĂšs leur ordination le titre de chefs des disciples (aggasāvaka). Aux autres moines qui dĂ©sapprouvaient cette promotion de nouveaux venus, Gautama expliqua qu’ils la mĂ©ritaient pour avoir fait dans une vie antĂ©rieure le vƓu d’accĂ©der Ă  cette position, et pratiquĂ© Ă  cet effet les vertus durant de nombreuses existences.

Sariputra et Mogallana, amis d’enfance selon la lĂ©gende, entretenaient une relation privilĂ©giĂ©e, illustrĂ©e dans de nombreuses anecdotes oĂč l’intuition du premier est mise en parallĂšle avec les pouvoirs surnaturels du second. Le Saccavibhanga Sutta compare Sariputta Ă  la mĂšre naturelle des disciples, qui les amĂšne Ă  la conversion, et Moggallana Ă  la mĂšre nourriciĂšre qui les Ă©duque jusqu’aux pouvoirs surnaturels d’iddhi. En tant que premiers disciples, ils Ă©taient aussi « exĂ©cuteurs des hautes Ɠuvres ». C’est ainsi qu’ils furent chargĂ©s de ramener les schismatiques qui avaient suivi Devadatta et d’excommunier les moines rĂ©calcitrants de Kitagiri. Cette fonction disciplinaire leur valut quelques inimitiĂ©s. Ils furent tous deux prĂ©cepteurs de Rahula, que Sariputta avait ordonnĂ© Ă  la demande de son pĂšre.

Pouvoirs surnaturels

Moggallana Ă©tait reconnu pour ses pouvoirs surnaturels de siddhi qu’il possĂ©dait au plus haut point parmi les disciples de Gautama. Bien que ce dernier en ait gĂ©nĂ©ralement dĂ©couragĂ© l’emploi, il aurait fait une exception pour Moggallana dont la sagesse Ă©tait grande. Le sixiĂšme chapitre du SĆ«tra du Lotus prĂ©dit qu’il deviendra un bouddha sous le nom de Tamālapatracandanagandha[2]. De nombreuses anecdotes relatent comment il mit ses pouvoirs au service de son maĂźtre et de la propagation de la doctrine. GrĂące Ă  eux il pouvait avoir la haute main sur brahmanes, rois, et ĂȘtres surnaturels comme les dĂ©mons et les nagas, et aussi visiter les autres mondes pour y porter la parole du Bouddha et en rapporter des nouvelles. Voici quelques-unes des anecdotes les plus connues :

  • Le roi naga : Un jour que le Bouddha en grande escorte s'en allait visiter le ciel Tavatimsa, il passa Ă  proximitĂ© de la demeure du roi naga Nandopananda qui, dĂ©rangĂ©, entra dans une colĂšre noire. Il enroula son corps immense autour du mont Sumeru et dĂ©ploya sa tĂȘte de naja de telle maniĂšre que le monde en fut obscurci. Le Bouddha jugea que de tous ses moines, seul Moggallana pouvait le mettre Ă  raison. AprĂšs avoir affrontĂ© Nandopananda sous diverses formes, la derniĂšre Ă©tant celle de l’aigle Supanna, Moggallanna le vainquit et le contraignit Ă  prĂ©senter ses excuses.
  • Le pont : Le bourg de Sravasti donna un jour un banquet pour les ascĂštes de toutes les sectes. Pour accĂ©der aux lieux, ils devaient passer Ă  guĂ© une riviĂšre, mais trouvĂšrent en arrivant un cours grossi par les pluies qu’il leur Ă©tait impossible de traverser Ă  pied. Sachant que le Bouddha approchait, Moggallana, qui Ă©tait parmi eux, se changea en pont. Alors que les ascĂštes le traversaient, il se dĂ©sagrĂ©gea, les prĂ©cipitant dans l’eau juste Ă  temps pour que Gautama puisse les en tirer, faisant la preuve de sa compassion et de ses pouvoirs. Ils se convertirent.
  • Māra : Un jour, un mara pĂ©nĂ©tra dans l’estomac de Moggallana, causant une Ă©norme enflure douloureuse. Le moine, qui avait lui-mĂȘme Ă©tĂ© mara lors d’une existence antĂ©rieure et s’en rappelait fort bien grĂące Ă  ses pouvoirs, n’était pas de nature Ă  se laisser abuser et lui enjoignit de dĂ©guerpir. DĂ©masquĂ©, le mara s’enfuit sous forme de salive.
  • Moggallana sauve sa mĂšre : Si l’on en croit la tradition, les mĂšres brahmanes des deux premiers disciples de Gautama dĂ©sapprouvaient fortement le choix de leurs fils. Si celle de Sariputta fut finalement convertie, c’est en enfer que Moggallana aurait retrouvĂ© la sienne, tout Ă  fait par hasard, un jour qu’il y faisait une visite. Ému, il alla trouver le Bouddha qui lui confirma qu'elle Ă©tait devenue esprit affamĂ© pour avoir dit du mal des Trois Joyaux[3], Ă©tant de plus colĂ©reuse et avide. Bien qu'il ait toujours insistĂ© sur l’aspect inĂ©luctable de la rĂ©tribution karmique, le Bouddha lui rĂ©vĂ©la qu'il pouvait par ses pouvoirs dĂ©livrer sa mĂšre. C’est l’origine des rites d’Ullambana, qui ont lieu le quinziĂšme jour du septiĂšme mois lunaire, Ă  la sortie de la retraite annuelle monastique. De nombreux bonzes et nonnes sont devenus arhats. Il est possible de leur faire ce jour des offrandes afin qu’ils usent ensemble de leurs pouvoirs pour sauver les parents dĂ©cĂ©dĂ©s, ou prolonger leur vie s’ils sont encore de ce monde. Cette anecdote est relatĂ©e dans l'Ullambana Sutra, que son adĂ©quation avec l'idĂ©al de piĂ©tĂ© filiale a rendu populaire dans le monde chinois ; il a mĂȘme Ă©tĂ© soupçonnĂ© d'ĂȘtre un apocryphe. La tradition d'Ullambana a donnĂ© naissance aux fĂȘtes d'O-Bon (Japon) et de Zhongyuan (Chine), encore appelĂ©e « fĂȘte des fantĂŽmes affamĂ©s ».
  • CuriositĂ© dĂ©placĂ©e : Ses pouvoirs dĂ©cuplant son audition, un jour que Moggallana mĂ©ditait, sa concentration fut perturbĂ©e - si l’on peut dire - par la voix clairement audible du Bouddha, qui se trouvait pourtant dans une ville Ă©loignĂ©e. La curiositĂ© le poussa alors Ă  tenter une expĂ©rience pour mesurer jusqu’à quelle distance exactement portait la voix d’un bouddha. Il se rendit Ă  cet effet dans le Buddhakshetra (terre de bouddha) de Lokesvarara. Celui-ci, ayant senti sa prĂ©sence et devinĂ© ses motifs, lui fit remarquer sĂšchement que le pouvoir d’un bouddha est tellement immense qu’il pĂ©nĂštre l’univers entier, proche et lointain Ă  la fois ; chercher Ă  le mesurer est un signe de discrimination mentale, donc de sagesse insuffisante. Moggallana se le tint dĂ©sormais pour dit.
  • Le karma vainqueur des pouvoirs : Lorsque le roi Vidudabha de Kosala fit encercler Kapilavastu (capitale des Shakyas), le Bouddha, qui avait auparavant rĂ©ussi Ă  dĂ©nouer pour sa tribu trois crises, sentit que cette fois-ci lui-mĂȘme ne pourrait rien, et qu’ils seraient rattrapĂ©s par leur karma (ils auraient jadis empoisonnĂ© les eaux de la Rohini). Mais Mogallana ne pouvait se rĂ©signer. Il enferma cinq cents shakyas choisis parmi les plus valeureux dans son bol et sortit discrĂštement de la ville, espĂ©rant qu’ils constitueraient une armĂ©e de renfort. Cependant, quand il dĂ©couvrit son bol, tout ce qu’il contenait Ă©tait du sang.
Moggallana attaqué par les bandits à la solde de la secte Niganthaka ; fresque de temple laotien

Fin

Le principe de la rĂ©tribution karmique est de nouveau en mis en Ă©vidence dans le rĂ©cit des circonstances de la mort de Moggallāna, qui fut violente[4]. Ses pouvoirs et leur effet persuasif lui avaient valu l’inimitiĂ© fĂ©roce des autres sectes qui perdaient leurs disciples. Les niganthas auraient engagĂ© des brigands pour le tuer. Il dĂ©joua leurs tentatives six jours de suite, dont une fois en s’échappant par la serrure de sa hutte. Mais le septiĂšme jour, ils rĂ©ussirent Ă  l'encercler, le rouĂšrent de coups et le laissĂšrent pour mort. Ses pouvoirs furent tout juste suffisants pour lui permettre de parvenir jusqu’au Bouddha pour prononcer une derniĂšre fois sa profession de foi et obtenir son autorisation de s’éteindre. On explique cette fin par le fait qu'il aurait lui-mĂȘme tuĂ© ses parents de cette façon, encouragĂ© par sa femme, lors d’une existence antĂ©rieure. Le temps passĂ© ensuite en enfer n’aurait pas suffi Ă  purifier totalement son karma. C’est pourquoi, selon la tradition orale singhalaise, les cendres funĂ©raires bleuĂątres (couleur qu'on prĂȘte Ă  celles de Moggallana) tĂ©moigneraient d'un sĂ©jour rĂ©cent en enfer. Il mourut durant le mois de katthina (octobre-novembre), un jour d'uposatha de nouvelle lune, quinze jours aprĂšs Sariputta mort un jour de pleine lune. Le Bouddha lui fit Ă©lever un stupa Ă  Veluvana.

Notes

  1. Hans Wolfgang Schumann, Le bouddha historique (1982), trad., Sully, 2011, p. 116-118, 290, 306. Jùtaka n° 95
  2. (en) The Lotus Sutra, « Prediction [Chapter VI] », sur www.wisdomlib.org, (consulté le )
  3. le Bouddha, le dharma et le sangha
  4. Jùtaka n° 522.

Bibliographie

  • AndrĂ© Bareau, Recherches sur la biographie du Bouddha, Publications de l'École Française d'ExtrĂȘme-Orient, t. I, 1970.
  • MĂŽhan Wijayaratna, Le Bouddha et ses disciples, Cerf, 1990, 262 p.
  • Nyanaponika Thera et Hellmuth Hecker Les grands disciples du Bouddha, t. I : Sariputra - Mahamoggallana - Mahakassapa - Ananda, trad. de l'anglais TancrĂšde Montmartel, Kim Burgat, Claire Jullien, Christine Louveau, Claire LumiĂšre, 1999, 284 p.
  • Sylvie Servan-Schreiber et Marc Albert, Le SĂ»tra du Lotus ćŠ™æł•è“źèŻç”Œ, Les Indes savantes, Paris, 2007, 323 p. (ISBN 978-2-84654-180-0).

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplĂ©mentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimĂ©dias.