Le Jeu de la dame
Le Jeu de la dame (The Queen's Gambit) est une mini-série américaine en sept parties d'environ 56 minutes chacune, créée par Scott Frank et Allan Scott, adaptée du roman éponyme de Walter Tevis publié en 1983, et mise en ligne le sur Netflix.
Type de série | mini-série |
---|---|
Titre original | The Queen's Gambit |
Genre | Drame |
Création |
Scott Frank Allan Scott |
Acteurs principaux |
Anya Taylor-Joy Marielle Heller Thomas Brodie-Sangster Harry Melling Bill Camp |
Musique | Carlos Rafael Rivera |
Pays d'origine | Ătats-Unis |
ChaĂźne d'origine | Netflix |
Nb. de saisons | 1 |
Nb. d'Ă©pisodes | 7 |
Durée | 46-67 minutes |
Diff. originale |
Synopsis
Cette fiction suit Elisabeth Harmon, une prodige des Ă©checs orpheline, de neuf Ă vingt-deux ans, dans sa quĂȘte pour devenir la meilleure joueuse d'Ă©checs du monde, tout en luttant contre des problĂšmes Ă©motionnels et une dĂ©pendance aux drogues et Ă l'alcool. L'histoire commence au milieu des annĂ©es 1950 et se poursuit dans les annĂ©es 1960[1].
Distribution
Acteurs principaux
- Anya Taylor-Joy (VF : Diane Kristanek) : Beth Harmon, jeune joueuse d'Ă©checs
- Isla Johnston (VF : Elisa Bardeau) : Beth, jeune
- Annabeth Kelly : Beth, Ă cinq ans
- Bill Camp (VF : Bruno Dubernat) : Monsieur Shaibel, le gardien de l'orphelinat qui a appris Ă Beth Ă jouer aux Ă©checs
- Moses Ingram (VF : Corinne Wellong) : Jolene, une orpheline amie de Beth Ă l'orphelinat
- Christiane Seidel (VF : RafaĂšle Moutier) : Helen Deardorff, la directrice de l'orphelinat
- Rebecca Root (VF : Marie Bouvier) : Mlle Lonsdale
- Chloe Pirrie (VF : Marie Giraudon) : Alice Harmon, la mĂšre biologique de Beth
- Akemnji Ndifornyen (en) (VF : Martin Faliu) : M. Fergusson
- Marielle Heller (VF : Flora Brunier) : Alma Wheatley, mĂšre adoptive de Beth
- Harry Melling (VF : Tony Marot) : Harry Beltik, ami, adversaire et amant de Beth dans le Kentucky
- Patrick Kennedy (VF : Edgar Givry) : Allston Wheatley, mari d'Alma et pĂšre adoptif de Beth
- Jacob Fortune-Lloyd (en) (VF : Thomas Roditi) : Townes, un joueur d'échecs pour qui Beth développe un amour non partagé
- Thomas Brodie-Sangster (VF : Gabriel Bismuth-Bienaimé) : Benny Watts, ami, adversaire et amant de Beth
- Marcin DorociĆski : Vasily Borgov, champion du monde russe d'Ă©checs
- Sophie McShera : Miss Graham
Version française
- Direction artistique : Thomas Charlet
- Société de doublage : Cinephase
Source et légende : version française (VF) sur RS Doublage[2]
Production
Le , Netflix commande à la production une série composée de sept épisodes[3]. Créée par Allan Scott et Scott Frank, elle est réalisée par ce dernier et sort le [4]. Scott et Frank sont les producteurs délégués de la série aux cÎtés de William Horberg. La production bénéficie des conseils de l'ancien champion du monde d'échecs Garry Kasparov et de l'entraßneur d'échecs Bruce Pandolfini en tant que consultants[5] - [6].
DĂšs la commande de la sĂ©rie, Anya Taylor-Joy est annoncĂ©e dans le rĂŽle principal[7]. L'actrice aurait acceptĂ© de jouer Beth Harmon avant mĂȘme dâavoir lu le script, donnant son accord au crĂ©ateur de la sĂ©rie, Scott Franck, aprĂšs avoir lu le roman de Walter Tevis, dont la sĂ©rie est adaptĂ©e, en moins d'une heure[8].
En , Moses Ingram est annoncée parmi la distribution[9].
Le tournage commence en à Cambridge (Ontario)[10]. Certaines scÚnes sont également tournées à Berlin[11], notamment Kino International pour les scÚnes à Paris, le zoo de Berlin et le Friedrichstadt-Palast[12].
Résumé des épisodes
â | # | Titre | RĂ©alisation | ScĂ©nario | PremiĂšre diffusion |
---|---|---|---|---|---|
1 | 1 | Ouvertures Openings | Scott Frank | Scott Frank | |
à la suite du décÚs d'Alice, sa mÚre, dans un accident de voiture, la petite Elizabeth "Beth" Harmon, ùgée de 9 ans, arrive dans un orphelinat. Un jour, une professeur lui demande d'aller nettoyer les tampons du tableau dans le sous-sol. Là , elle découvre Monsieur Shaibel, le concierge de l'orphelinat, qui joue tout seul aux échecs. Tout de suite intéressée par le jeu, elle lui demande si elle peut jouer avec lui, mais il refuse catégoriquement, prétextant que les échecs ne sont pas pour les femmes. | |||||
2 | 2 | Ăchanges Exchanges | Scott Frank | Scott Frank | |
Six ans plus tard, Beth est adoptée par la famille Wheatley. Allston Wheatley, le mari, est souvent absent pour son travail, et Alma, l'épouse, est mÚre au foyer. Beth découvre sa nouvelle chambre. Le lendemain, alors qu'elle a du mal à s'intégrer dans son nouveau lycée, principalement auprÚs d'un groupe de filles dont Margaret, la leader populaire, elle cherche un club d'échecs, en vain. | |||||
3 | 3 | Pions doublés Doubled Pawns | Scott Frank | Scott Frank | |
Cincinnati 1963. | |||||
4 | 4 | Milieu de jeu Middle Game | Scott Frank | Scott Frank | |
Beth a 17 ans. Elle prend des cours de russe et fait la connaissance dâun groupe de jeunes. Elle passe la soirĂ©e chez eux et finit par coucher avec un garçon. Sa premiĂšre expĂ©rience sexuelle nâest pas des plus plaisante, car le garçon a trop fumĂ©. | |||||
5 | 5 | Fourchette Fork | Scott Frank | Scott Frank | |
Beth revient dans le Kentucky, et retourne dans la maison des Wheatley, vide, que son pĂšre adoptif lui a donnĂ©. Harry Beltik, le joueur que Beth a battu il y a 5 ans, lors de la finale du tournoi du Kentucky, lâappelle. Il arrive chez elle et ils discutent des stratĂ©gies dâĂ©checs. | |||||
6 | 6 | Ajournement Adjournment | Scott Frank | Scott Frank | |
Benny et Beth arrivent Ă New York. Beth sâinstalle chez Benny, qui vit dans un appartement en sous-sol au confort minimal, et dort dans le salon, sur un matelas gonflable. Ils passent leurs journĂ©es Ă rĂ©pĂ©ter les parties des grands maĂźtres et des meilleurs joueurs au monde. | |||||
7 | 7 | Finale End Game | Scott Frank | Scott Frank | |
Jolene annonce Ă Beth que M. Shaibel est mort. Alors que Jolene loge chez Beth pour la nuit, cette derniĂšre lui avoue quâelle continue Ă prendre des tranquillisants et boire de lâalcool. AprĂšs sâĂȘtre remĂ©morĂ©s leurs souvenirs, elles retournent Ă lâorphelinat, pour lâenterrement de Shaibel. Ensuite Beth pĂ©nĂštre Ă nouveau dans les locaux, remplis de souvenirs, et recroise lâancienne directrice qui ne la reconnait pas. Puis elle descend dans les sous-sols, lĂ oĂč elle a dĂ©couvert les Ă©checs pour la premiĂšre fois avec M. Shaibel. Elle dĂ©couvre quâil lâa toujours suivi, collectionnant les articles de presse Ă son sujet et les photos dâelle. De retour dans la voiture, elle pleure dans les bras de Jolene. |
Accueil
Audience
Le , la série devient la plus regardée sur Netflix[13] - [14]. Pendant le mois suivant sa mise en ligne, la série est vue par 62 millions de téléspectateurs dans le monde[15].
Ătats-Unis
L'agrégateur de critiques Rotten Tomatoes donne une cote d'approbation de 100 % sur la base de 42 avis, avec une note moyenne de 8,04 / 10. « Ses mouvements ne sont pas toujours parfaits, mais entre les performances magnétiques d'Anya Taylor-Joy, les détails d'époque incroyablement réalisés et l'écriture émotionnellement intelligente, The Queen's Gambit est une victoire absolue »[16]. Metacritic a attribué à la série une note moyenne pondérée de 79 sur 100 sur la base de 27 avis[17].
Entertainment Weekly donne un B à la série : « Taylor-Joy excelle dans les moments calmes, ses paupiÚres se rétrécissant lorsqu'elle décime un adversaire, tout son corps matérialisant le désespoir de colÚre lorsque le jeu se retourne contre elle »[18]. Rolling Stone lui a attribué 3 étoiles sur 5 : « Un projet esthétiquement beau avec plusieurs superbes performances »[19]. Variety écrit : « The Queen's Gambit parvient à personnaliser le jeu et ses joueurs grùce à une narration intelligente. Anya Taylor-Joy est une actrice principale si magnétique que lorsqu'elle regarde l'objectif de la caméra, son éclat de silex menace de le traverser »[20].
France
La sĂ©rie obtient une note de presse moyenne de 3,9â5 sur le site AlloCinĂ©, qui recense 7 titres de presse[21].
TĂ©lĂ©rama Ă©crit notamment : « un drame solide et fĂ©ministe qui rĂ©ussit Ă glamouriser un jeu pas facile Ă porter Ă lâĂ©cran. Et passionnera mĂȘme les profanes »[22]. Ăcran Large donne Ă la sĂ©rie une note de 3,5 sur 5 : « Scott Frank rĂ©ussit Ă rendre ce jeu palpitant, explore la complexitĂ© de Beth et capte la richesse de son personnage »[23].
La note spectateur est, quant Ă elle, plus Ă©levĂ©e, avec un rĂ©sultat de 4,6â5 pour 2 772 notes[24]. Elle se classe ainsi cinquiĂšme meilleure sĂ©rie d'aprĂšs les notes, selon AlloCinĂ©. Elle suit donc Game of Thrones, Breaking Bad, Chernobyl et Notre planĂšte.
ThĂšmes et analyses
Le titre de la série
Le Jeu de la dame se nomme en anglais « The Queen's Gambit », qui désigne une ouverture de jeu d'échecs, trÚs populaire aux échecs, appelée en français « le gambit dame » (ou gambit de la dame). Il se réfÚre à l'ouverture de la derniÚre partie de la série, mais aussi à la position de Beth qui doit s'imposer dans un monde d'hommes[25].
Les parties d'Ă©checs
Les crĂ©ateurs de la sĂ©rie, Scott Frank et Allan Scott, souhaitaient que les parties d'Ă©checs prĂ©sentes dans la sĂ©rie puissent ĂȘtre jugĂ©es rĂ©alistes par les joueurs d'Ă©checs. Ils firent donc appel aux conseils de divers experts, dont l'entraĂźneur Bruce Pandolfini et l'ancien champion du monde d'Ă©checs, Garry Kasparov[26]. Le rĂŽle de Vasily Borgov fut proposĂ© Ă Garry Kasparov, mais il dut dĂ©cliner car son emploi du temps ne le permettait pas. Il accepta cependant d'ĂȘtre consultant[27].
Garry Kasparov voulait s'assurer que les parties d'Ă©checs soient le plus rĂ©aliste possible car « de nombreux joueurs seraient amenĂ©s Ă regarder la sĂ©rie et pourraient dire : c'est complĂštement illogique »[27]. Il aida Ă revoir chaque partie. La plus compliquĂ©e fut la derniĂšre partie de Beth Harmon contre le champion Vasily Borgov. La partie ainsi que sa conclusion devaient ĂȘtre complexes, reflĂ©tant le niveau des joueurs. AprĂšs plusieurs recherches, Kasparov s'inspira de la partie de Patrick Wolff contre Vassili Ivantchouk, durant le Festival d'Ă©checs de Bienne en 1993[27].
Mathilde Choisy, joueuse d'Ă©checs, indique que quasiment toutes les parties sont inspirĂ©es de parties ayant Ă©tĂ© rĂ©ellement jouĂ©es : notamment, tous les champions du monde ont pratiquĂ© l'ouverture « sicilienne ». Mais elle estime par contre que la gestuelle des joueurs dans la sĂ©rie n'est pas du tout semblable Ă celle des joueurs professionnels : ceux-ci ont une façon trĂšs assurĂ©e de bouger les piĂšces, ce qui est un moyen d'envoyer un message Ă leur adversaire. Mathilde Choisy compare les parties d'Ă©checs Ă de « vrais combats de boxe », oĂč lorsqu'un joueur rĂ©alise un coup qui « fait mal » Ă l'adversaire, il peut effectuer par exemple une pression avec la piĂšce sur l'Ă©chiquier ou la faire pivoter sur elle-mĂȘme sur la case pour insister[26].
Autres aspects
Mathilde Choisy, directrice gĂ©nĂ©rale de la FĂ©dĂ©ration française des Ă©checs, donne son avis sur le rĂ©alisme de divers aspects de la sĂ©rie. Elle note que le comportement de Beth Harmon, qui consiste Ă visualiser sur le plafond de sa chambre ses parties d'Ă©checs, correspond Ă une capacitĂ© habituelle chez les joueurs d'Ă©checs d'un certain niveau : tous peuvent faire appel Ă une visualisation mentale et n'ont pas besoin d'un Ă©chiquier rĂ©el pour jouer[26]. Romuald De Labaca, ancien joueur national et entraĂźneur, affirme : « Les joueurs anticipent tout et font beaucoup de calculs et de combinaisons. Ils peuvent prĂ©parer jusquâĂ 10 coups Ă lâavance. Ils visualisent sans cesse, câest omniprĂ©sent pour eux. »[28]
Lors du deuxiĂšme Ă©pisode, Beth affronte de façon simultanĂ©e une dizaine de joueurs. Il s'agit d'une pratique trĂšs commune et tous les joueurs d'un certain niveau en sont capables. MĂȘme un joueur amateur est capable de jouer simultanĂ©ment contre des joueurs dĂ©butants[26]. Romuald De Labaca explique qu'il arrive qu'un seul joueur affronte simultanĂ©ment jusqu'Ă 40 joueurs et que des jeunes de 14 ans peuvent affronter des joueurs de 40 ans[28].
Concernant les tics des joueurs dans la sĂ©rie, ou leurs tentatives de dĂ©stabiliser l'adversaire, Mathilde Choisy estime qu'en gĂ©nĂ©ral les joueurs se comportent correctement mais qu'il existe effectivement certains joueurs connus pour ĂȘtre « insupportables ». Mathile Choisy cite Garry Kasparov : il se montrait dĂ©sagrĂ©able en soufflant ou secouant la tĂȘte, et retirait sa montre dĂšs qu'il savait avoir gagnĂ© la partie, ce qui Ă©tait Ă©galement dĂ©stabilisant pour l'autre joueur. Sa simple prĂ©sence physique reprĂ©sentait une difficultĂ© mentale pour ses adversaires[26].
Concernant le genre de parties d'Ă©checs « Blitz » (« Ă©clair » en allemand) auquel est initiĂ©e Beth Harmon par le joueur Benny Watts, Mathile Choisy explique que ce type de parties jouĂ©es Ă toute vitesse a d'abord Ă©tĂ© considĂ©rĂ© comme un loisir puis est devenu une discipline Ă part entiĂšre avec des tournois spĂ©cifiques. Le Blitz est Ă©galement utilisĂ© comme entraĂźnement Ă la vitesse de rĂ©flexion[26]. Une partie peut durer cinq minutes, deux minutes ou mĂȘme une minute[26] - [28].
Il est exact que dans les annĂ©es 1960, les Ă©checs Ă©taient un jeu jouĂ© par les hommes, comme cela est le cas dans la sĂ©rie[28]. Mais Mathilde Choisy estime que la sĂ©rie, qui met en scĂšne des adversaires qui se comportent quasiment tous comme de « parfaits gentlemen », ne reprĂ©sente pas tout Ă fait la rĂ©alitĂ©, qui est « un peu plus compliquĂ©e que cela »[26]. Judith Polgar tĂ©moigne que certains joueurs qu'elle a battus refusaient de lui serrer la main, contrairement Ă ce que veut la coutume. Elle rapporte Ă©galement que l'un de ses adversaires « se tapait la tĂȘte contre l'Ă©chiquier aprĂšs sa dĂ©faite »[29] - [30].
Inspirations de la série
Les personnages de Beth Harmon et de son plus grand rival, le grand maßtre russe Vasily Borgov, sont fictifs. Ils sont le résultat de la synthÚse de plusieurs joueurs historiques[31].
Vasily Borgov a des caractĂ©ristiques proche de Boris Spassky, le 10e champion du monde d'Ă©checs et double champion d'URSS : il possĂšde le mĂȘme type de tactiques, a la mĂȘme habiletĂ© de fin de partie, et met en oeuvre lui aussi une version particuliĂšre de la dĂ©fense sicilienne. Et, comme Vasily Borgov, Boris Spassky a eu lui aussi une rencontre cĂ©lĂšbre avec un amĂ©ricain, Bobby Fischer, qui a eu lieu en 1972 et a Ă©tĂ© qualifiĂ©e de « match du siĂšcle » entre l'URSS et les Ătats-Unis. Lorsque Boris Spasski perd face Ă Fischer, il se comporte alors comme le personnage fictif Vasily Borgov : il se se joint au public pour applaudir lui aussi celui qui vient de le vaincre[31].
Dans la prĂ©face du roman original, l'auteur, Walter Tevis, amateur fĂ©ru d'Ă©checs, indique s'ĂȘtre inspirĂ© Ă©galement pour son grand maĂźtre fictif Vasily Borgov[31] - [32] du grand maĂźtre Anatoli Karpov (plusieurs fois champion du monde de 1975 Ă 1998). Anatoli Karpov a un style de jeu qui a pu ĂȘtre dĂ©crit comme une offensive calme, lente, sans attaques vives, mais implacable et rendant trĂšs difficile une contre-attaque : il s'agit de l'« Ă©cole soviĂ©tique » redoutĂ©e par le personnage principal de la sĂ©rie Beth Harmon[31].
Enfin, l'hĂ©roĂŻne de la sĂ©rie est une personne de nationalitĂ© amĂ©ricaine qui dĂ©fie la suprĂ©matie Ă©chiquĂ©enne russe d'aprĂšs-guerre, ce qui peut Ă©voquer Bobby Fischer affrontant Boris Spassky. Le match qui clĂŽt la sĂ©rie ferait alors Ă©cho au « match du siĂšcle » qui opposa les deux joueurs pour le titre de champion du monde d'Ă©checs en 1972, un match gagnĂ© par Bobby Fisher, qui, tout comme l'hĂ©roĂŻne de la sĂ©rie brise ainsi lâhĂ©gĂ©monie soviĂ©tique sur la discipline. Mais les similitudes entre l'hĂ©roĂŻne de la sĂ©rie et Bobby Fischer ne s'arrĂȘtent pas lĂ . Tout d'abord la pĂ©riode couverte par la sĂ©rie, de 1958 Ă 1968, correspond Ă celle de lâapogĂ©e de la carriĂšre du Bobby Fischer. Bobby Fischer Ă©tait Ă©galement un joueur trĂšs prĂ©coce, tout comme Beth Harmon. Et il avait Ă©galement, comme elle, des difficultĂ©s dans ses interactions sociales. Comme elle, il lisait les revues sur les Ă©checs, et comme elle, il a appris Ă parler le russe. Il dĂ©sirait en effet pouvoir lire les revues russes, considĂ©rĂ©es comme les meilleures sources d'information sur les Ă©checs. Bobby Fischer avait Ă©galement le mĂȘme type de jeu que l'hĂ©roĂŻne de la sĂ©rie Beth Harmon : il Ă©tait trĂšs agressif et passait rapidement Ă l'attaque contre ses adversaires. Par contre, il n'Ă©tait pas dĂ©pendant Ă des mĂ©dicaments comme Beth Harmon. L'auteur du livre dont est tirĂ© la mini-sĂ©rie, Walter Tevis, s'est inspirĂ© de sa propre expĂ©rience concernant cet aspect de son hĂ©roĂŻne : hospitalisĂ© pour un cĆur rhumatismal, il a reçu de trĂšs fortes de doses de mĂ©dicaments et il est devenu dĂ©pendant[33] - [34] - [35]. Une autre diffĂ©rence est que Bobby Fischer n'a pas Ă©tĂ© dans un orphelinat. Par contre, il vĂ©cut dans un environnement familial difficile, son pĂšre Ă©tant absent et sa mĂšre Ă©tant une femme complexe, ce qui nourrit sa volontĂ© de s'Ă©vader grĂące aux Ă©checs, qu'il dĂ©couvre Ă l'Ăąge de 6 ans[36].
Deux noms de joueuses moins connues qui ont pu servir d'inspiration au personnage de Beth dans le roman ont Ă©tĂ© proposĂ©s : Lisa Lane, championne des Ătats-Unis au dĂ©but des annĂ©es 1960 qui fit la une de Sports Illustrated en 1961, et Diana Lanni, une joueuse amĂ©ricaine nĂ©e en 1955 qui lutta contre sa toxicomanie et fit nulle contre la Championne du monde soviĂ©tique Nona Gaprindachvili Ă l'Olympiade d'Ă©checs de 1982, au moment oĂč l'auteur Ă©crivait son livre[37] - [38].
Il y a également des ressemblances avec Judit Polgår. Cette derniÚre a évolué dans un univers encore plus masculin que dans la série, les hommes doutant de sa réelle capacité à jouer à un haut niveau. Notamment, le grand maßtre russe Garry Kasparov, l'un des meilleurs joueurs de tous les temps, avait estimé qu'il était « impossible » qu'il soit battu par Judit Polgår. Selon cette derniÚre, Garry Kasparov a déclaré que « les femmes ne sont pas capables de gérer ce type de pression ». Mais, tout comme l'héroïne de la série Beth Harmon, Judit Polgår a connu une ascension brillante, cumulant les succÚs, et a fini par battre le joueur russe. Selon Jennifer Shahade, championne américaine, Judit Polgår avait comme Beth Harmon un style de jeu trÚs agressif. Cependant, une différence notable est que Judit Polgår a commencé à apprendre à jouer à partir de 3 ans, et que son pÚre la programmait pour devenir une championne. Beth Harmon, elle, commence dans la série à jouer aux alentours de dix ans, et découvre les échecs par hasard[29] - [30]. Une autre différence est que Judit Polgår ne consommait pas de stupéfiants[30].
Réaction de la communauté des échecs
La sĂ©rie a reçu les Ă©loges de la communautĂ© des Ă©checs pour sa reprĂ©sentation du jeu et des joueurs et relancĂ© la popularitĂ© du jeu, notamment en ligne sur des sites comme Chess.com ou Lichess et en streaming sur la plateforme Twitch[39] - [40]. Selon The Independent, les recherches « jeu dâĂ©checs » ont augmentĂ© de 273 % entre le 23 octobre et le 2 novembre[41].
Lâancienne championne dâĂ©checs Judit PolgĂĄr a saluĂ© la « performance incroyable » de la sĂ©rie[42].
Cependant, dâaprĂšs plusieurs joueurs, Beth Harmon « ne perd pas assez » pendant ses dĂ©buts aux Ă©checs, ce qui n'est pas rĂ©aliste[43].
Costumes
La sĂ©rie a aussi Ă©tĂ© louĂ©e pour la qualitĂ© des costumes. La costumiĂšre Gabriele Binder, connue Ă©galement pour son travail dans La vie des autres (2006) et Au pays du sang et du miel (2011), sâest inspirĂ©e de Edie Sedgwick, Jean Seberg, Pierre Cardin ou encore Balenciaga. Pour la visite de Beth Harmon Ă Paris, Gabriele Binder sâest directement inspirĂ©e de Pierre Cardin[44]. La tenue a « une sorte dâĂ©lĂ©gance qui nâexiste plus aujourdâhui ». La tenue « robe Ă nĆud » fut aussi inspirĂ©e de Pierre Cardin[45].
Les tenues de Beth Harmon sont le reflet de son Ă©volution en tant que personne et joueuse dâĂ©checs. De nombreuses tenues sont ornĂ©es de lignes ou de carreaux rappelant le plateau de jeu. Les tenues de Beth Harmon dans lâĂ©pisode un et sept peuvent ĂȘtre comparĂ©es. Dans le premier Ă©pisode, Beth porte une robe cousue par sa mĂšre et portant son nom. Pour le dernier Ă©pisode, Beth porte une robe de la mĂȘme couleur pour sa victoire contre le champion du monde. Cette couleur permet de rappeler « que sa mĂšre est lĂ avec elle » affirme Gabriele Binder, Beth nâest plus effrayĂ©e par son passĂ©[44].
La derniÚre tenue de la série portée par Beth Harmon est un manteau et chapeau blanc. Le chapeau symbolise la couronne de « la reine » des échecs[44].
Le style du joueur dâĂ©checs Benny Watts (jouĂ© par Thomas Brodie-Sangster) est inspirĂ© de la Factory dâAndy Warhol. Câest un joueur qui est diffĂ©rent des autres dans sa personnalitĂ©[44].
Alma porte aussi une robe créée par Christian Dior pour les grandes occasions comme la remise des diplÎmes de Beth ou sa visite à Mexico[45].
Le Brooklyn Museum maintient une exposition virtuelle sur les costumes du Le Jeu de la Dame et la sĂ©rie The Crown dâoctobre Ă dĂ©cembre 2020[45].
FĂ©minisation des Ă©checs
Une femme d'un niveau tel qu'elle affronte l'Ă©lite mondiale masculine Ă©voque la joueuse hongroise Judit PolgĂĄr, et par exemple ses affrontements contre Anatoli Karpov et Garry Kasparov.
Judit PolgĂĄr, championne dâĂ©checs venue de Hongrie a battu Ă plusieurs reprises certains des champions du monde des Ă©checs. Câest la seule femme Ă avoir Ă©tĂ© classĂ©e dans le top 10 mondial. Si Judit PolgĂĄr s'accorde sur lâexcellente performance de la sĂ©rie, elle confie ne pas reconnaĂźtre le comportement des joueurs masculins qui sont « trop gentils avec elle [Beth Harmon] ». En effet, certains des compĂ©titeurs de Judit PolgĂĄr ont refusĂ© de lui serrer la main aprĂšs leurs dĂ©faites[42].
Il y a trÚs peu de femmes dans le top du classement mondial mixte des joueurs d'échecs. Seule la joueuse Hou Yifan est classée 84e dans le top 100 mondial mixte en 2020[46]. La Fédération française des échecs (FFE) comptabilisait 20,22 % de licences prises par des femmes sur 54 860 licenciés, regroupés dans 897 clubs en 2018. La FFE a lancé un « Plan de Féminisation » depuis 2019[47].
Le Jeu de la Dame a ainsi rouvert le débat sur la place des femmes dans les échecs.
Plainte en justice contre Netflix
Le 16 septembre 2021, Nona Gaprindashvili, ancienne championne du monde d'Ă©checs (chez les femmes), ĂągĂ©e de 80 ans, porte plainte contre Netflix pour diffamation. Dans le dernier Ă©pisode de la sĂ©rie, Nona Gaprindashvili est mentionnĂ©e comme n'ayant « jamais affrontĂ© dâhommes » en compĂ©tition. Elle accuse Netflix d'avoir ainsi « menti effrontĂ©ment et dĂ©libĂ©rĂ©ment » sur ses succĂšs et considĂšre que sa carriĂšre est par consĂ©quent montrĂ©e de façon « sexiste et dĂ©nigrante ». Nona Gaprindashvili estime que Netflix a agi ainsi dans le but « mesquin et cynique » de faire apparaĂźtre lâhĂ©roĂŻne de la sĂ©rie comme ayant fait ce que personne n'aurait fait avant elle. Elle rĂ©clame 5 millions de dollars. Elle rappelle qu'elle a battu 28 hommes au cours de sa carriĂšre[15] - [48]. LibĂ©ration indique qu'elle a Ă©tĂ© premiĂšre ex aequo aux tournois masculins de Hastings en 1964 et de Lone Pine en 1977[49].
En septembre 2022, Netflix affirme ĂȘtre parvenu Ă un accord financier avec Nona Gaprindashvili, sans en prĂ©ciser le montant[50].
Distinctions
RĂ©compenses
- IGN Awards 2020 : Meilleure série dramatique[51]
- Golden Globes 2021 [52] :
- AACTA International Awards 2021[53] :
- Meilleure série dramatique
- Meilleure actrice dans une série pour Anya Taylor-Joy
- Critic's Choice Television Awards 2021[54] :
- Meilleure série limitée
- Meilleure actrice dans une mini-série ou un téléfilm pour Anya Taylor-Joy
- Screen Actors Guild Awards 2021[55] : Meilleure actrice dans une mini-série ou un téléfilm pour Anya Taylor-Joy
- Primetimes Emmy Awards 2021[56] :
- Meilleure mini-série
- Meilleur maquillage d'Ă©poque ou d'un personnage
- Meilleur montage à caméra unique pour une minisérie, anthologique ou un téléfilm
- Meilleure réalisation pour une mini-série ou un téléfilm
- Meilleurs costumes d'Ă©poque
- Meilleure photographie pour une minisérie ou anthologique
- Meilleur casting pour une minisérie, anthologique ou un téléfilm
- Meilleurs décors pour un récit d'époque ou un programme fantastique (d'une heure ou plus)
- Meilleur mixage du son pour une minisérie, anthologique ou un téléfilm
- Meilleur montage sonore pour une minisérie, anthologique ou un téléfilm
- Meilleure composition musicale pour une minisérie, anthologique ou un téléfilm pour Carlos Rafael Rivera
Nominations
- IGN Awards 2020 :
- Satellite Awards 2021[60] :
- Meilleure mini-série
- Meilleure actrice dans une mini-série ou un téléfilm pour Anya Taylor-Joy
- Critic's Choice Television Awards 2021[61] : Meilleure actrice dans un second rÎle dans une mini-série ou un téléfilm pour Marielle Heller
- Screen Actors Guild Awards 2021[55] : Meilleur acteur dans une mini-série ou un téléfilm pour Bill Camp
- Primetimes Emmy Awards 2021 [62]:
- Meilleure actrice principale dans une mini-série pour Anya Taylor-Joy
- Meilleur design du générique
- Meilleur supervision musicale
- Meilleur scénario pour une mini-série ou un téléfilm
- Meilleure actrice dans un second rÎle dans une mini-série ou un téléfilm pour Moses Ingram
- Meilleur acteur principal dans une mini-série pour Thomas Brodie-Sangster
- Meilleures musiques et paroles originales pour Adjournment - I Can't Remember Love
Notes et références
- (en) « Netflix orders limited series The Queen's Gambit from Scott Frank » [archive du ], Netflix Media Center, (consulté le ).
- « RS-Doublage », sur www.rsdoublage.com (consulté le )
- (en) Denise Petski, « Netflix Orders The Queen's Gambit Limited Series From Scott Frank; Anya Taylor-Joy To Star » [archive du ], Deadline Hollywood, (consulté le )
- (en) Jackson McHenry, « The Queen's Gambit Trailer: Anya Taylor-Joy Dives Into Chess, Drugs, and More Chess » [archive du ], sur Vulture, (consulté le )
- (en) Judy Berman, « Netflix's Marvelous The Queen's Gambit Is the Kind of Prestige Drama TV Doesn't Make Anymore » [archive du ], sur Time, (consulté le )
- (en) John Hartmann, « The Queen's Gambit - Out Today On Netflix! » [archive du ], sur Chess Life, (consulté le )
- (en) Will Thorne, « Anya Taylor-Joy to Star in The Queen's Gambit Limited Series at Netflix » [archive du ], Variety, (consulté le )
- Alexis Savona, « « Le Jeu de la Dame » : 5 choses à savoir sur la série phénomÚne de Netflix », sur www.ouest-france.fr,
- (en) Jeff Sneider, « Newcomer Moses Ingram Joins Denzel Washington in Joel Coen's Macbeth » [archive du ], (consulté le )
- (en) « The Queen's Gambit filming in Cambridge for 2 days » [archive du ], Cambridge Times, (consulté le )
- (en) Leonie Cooper, « The Witch star Anya Taylor-Joy: "People always want to put you in a box" » [archive du ], sur NME, (consulté le )
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Liens externes
- (en) Site officiel
- Ressources relatives Ă l'audiovisuel :
- Allociné
- (en) IMDb
- (en) LUMIERE
- (en) Rotten Tomatoes
- Ressource relative Ă plusieurs domaines :
- (en) Metacritic