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Le Grand Jeu (revue)

Le Grand Jeu est le nom, proposé par Roger Vailland, d'une revue littéraire et, par extension, du groupe dont elle est l'expression de 1927 à 1932.

Le Grand Jeu
Pays Drapeau de la France France
Langue français
Périodicité 3 numéros entre 1928 et 1930. La réimpression chez J.-M. Place (Paris, 1977) comporte aussi les éléments du n° 4, automne 1932, qui n'a jamais paru
Genre revue littéraire
Date de fondation 1928
Date du dernier numéro 1932
Ville d’édition Paris

Directeur de la rédaction Roger Gilbert-Lecomte,
René Daumal, Roger Vailland,
Joseph Sima (directeur artistique)

Histoire du groupe

En 1922, Ă  Reims, quatre lycĂ©ens, RenĂ© Daumal, Roger Gilbert-Lecomte, Roger Vailland et Robert Meyrat forment un groupe qu'ils appellent « Phrères simplistes Â»[1] ayant pour but de retrouver « la simplicitĂ© de l'enfance et ses possibilitĂ©s de connaissance intuitive et spontanĂ©e Â» par des pratiques de recherches extrasensorielles. FondĂ© sur la rĂ©volte et la pataphysique, ce groupe aux allures de sociĂ©tĂ© initiatique va tenter l'exploration du monde onirique par le recours aux textes mystiques et par l'usage de drogues.

C'est en 1925, à Paris, qu'ils découvrent le surréalisme, mouvement dans lequel ils reconnaissent certaines recherches similaires comme les sommeils forcés, et dont ils admirent le caractère révolutionnaire. C'est Léon Pierre-Quint, le directeur des éditions Kra, qui permet les contacts avec le groupe de la revue Discontinuité animé par Arthur Adamov et celui de Bifur dirigé par Georges Ribemont-Dessaignes.

Le groupe s'étoffe avec l'arrivée du peintre Joseph Sima, puis de Pierre Audard, André Delons[2] le dessinateur Artür Harfaux, le poète Maurice Henry, Pierre Minet et le critique littéraire André Rolland de Renéville et noue des contacts avec Robert Desnos. S'y ajoute le cercle dit des "Amis du Grand Jeu", collaborateurs à la revue et au groupe, qui compte notamment Georges Ribemont-Dessaignes, Léon Pierre-Quint, Marianne Lams et le peintre et créateur de costumes Mayo[3].

Illustration de Mayo pour le deuxième numéro du Grand Jeu

André Breton mesurant la qualité des membres du Grand Jeu, notamment Rolland de Renéville[4], souhaite la coopération entre les deux groupes.

Les membres du Grand Jeu, notamment RenĂ© Daumal et Roger Gilbert-Lecomte, s'affranchiront vite des idĂ©es surrĂ©alistes, limitĂ©es Ă  leurs yeux au domaine du subconscient, notamment avec l'Ă©criture automatique, qui ne donnent pas accès Ă  « une mĂ©taphysique expĂ©rimentale Â».

Le premier numéro de la revue paraît en :

« Le Grand Jeu est irrémédiable ; il ne se joue qu'une fois. Nous voulons le jouer à tous les instants de notre vie. »

— Roger Gilbert-Lecomte, Le Grand Jeu, avant-propos du premier numéro.

En , l'Ă©crivain Monny de Boully quitte le groupe de Breton pour le Grand Jeu. IntĂ©grĂ© au groupe surrĂ©aliste depuis 1925, il Ă©tait entrĂ© en conflit avec Breton Ă  l'occasion du rapprochement des surrĂ©alistes avec les collaborateurs de ClartĂ©, revue proche du parti communiste français (1927). Il reprochait Ă  Breton de sacrifier le caractère expĂ©rimental du surrĂ©alisme. Cette dĂ©fection amène Breton Ă  instruire le « procès Â» du Grand Jeu, le . Sous couvert d'une rĂ©union sur le thème « Examen critique du sort fait rĂ©cemment Ă  LĂ©on Trotsky Â» (exilĂ© par Staline), Breton demande l'exclusion (qui sera refusĂ©e) de Roger Vailland du Grand Jeu, en raison de la parution dans un journal quotidien d'un article de ce dernier rendant hommage au prĂ©fet de police Jean Chiappe.

En dépit de cette tentative d'André Breton de fragiliser le groupe, l'activité du Grand Jeu perdure avec force, même après la rupture avec Roger Vailland () : parution du deuxième numéro de la revue, organisation d'expositions (galerie Bonaparte en 1929)[5] et de conférences...

Dans une volonté d'apaisement, Louis Aragon entreprend plusieurs démarches auprès de Rolland de Renéville. Mais la parution du Second Manifeste du surréalisme d'André Breton refroidit les tentatives de réconciliation. René Daumal, sommé de « préciser sa position personnelle »[6] à l'égard du surréalisme, répond à Breton par une lettre ouverte, publiée dans le troisième numéro du Grand Jeu :

« Pour une fois, vous avez devant vous des hommes qui, se tenant à l'écart de vous, vous critiquant même souvent avec sévérité, ne vont pas pour cela vous insulter à tort et à travers [...] Prenez garde, André Breton, de figurer plus tard dans les manuels d'histoire littéraire, alors que si nous briguions quelque honneur, ce serait celui d'être inscrits pour la postérité dans l'histoire des cataclysmes. »

Il est à noter qu'aucun membre du Grand Jeu n'a collaboré au pamphlet Un cadavre rédigé contre Breton à l'initiative de Georges Bataille et Robert Desnos.

Au dĂ©but de 1932, l'« affaire Aragon Â»[7] peut ĂŞtre l'une des causes provoquant l'Ă©clatement du Grand Jeu. L'autre cause Ă©tant une dissension entre les deux principaux membres du Grand Jeu, RenĂ© Daumal et Roger Gilbert-Lecomte. Ce dernier reproche Ă  Daumal son engagement auprès d'un maĂ®tre spirituel nommĂ© Georges Gurdjieff qui, selon lui, aura poussĂ© Daumal Ă  laisser de cĂ´tĂ© les ambitions du Grand Jeu.

Autres collaborateurs du Grand Jeu :

Bibliographie

  • Le Grand Jeu, no 1 Ă  4, 1928-1932, Éd. Jean-Michel Place, Paris, 1977, 350 p. (ISBN 2858930104)
  • Catalogue Le Grand Jeu, prĂ©face de Bernard NoĂ«l, Paris, Librairie Fourcade, hiver 2003 : livres, revues et documents de R. Daumal, R. Gilbert-Lecomte, A. Rolland de RenĂ©ville, J. Sima, M. Henry, Mayo...
  • Dossier Le Grand Jeu, in L'Herne, no 10 (1968), introduction de Marc Thivolet
  • Dossier Le Grand Jeu, in L'Originel, no 7 ()
  • Sima - Le Grand Jeu, catalogue de l'exposition du MusĂ©e d'Art moderne de la Ville de Paris, 1992
  • Adam Biro & RenĂ© Passeron, Dictionnaire gĂ©nĂ©ral du surrĂ©alisme et de ses environs, Office du livre, Fribourg, Suisse et Paris, Presses universitaires de France, 1982, p. 190. (ISBN 2130372805)
  • Michel Camus, L'Enjeu du Grand Jeu, Ă©d. Mont analogue
  • Jean-Paul ClĂ©bert, Dictionnaire du surrĂ©alisme, Paris, Éd. du Seuil, 1996, p. 293
  • Yves Leclair, « Le Grand Jeu », Dictionnaire de poĂ©sie de Baudelaire Ă  nos jours, PUF, 2001
  • J.-B. Pontalis, « Une boule de feu » in Le Dormeur Ă©veillĂ©, Paris, Gallimard "Folio", 2004
  • Michel Random, Le Grand Jeu, Paris, DenoĂ«l, 1970, 2 volumes, 264 et 215 p. (tome 1 : essai, biographie, bibliographie, cahier de photographies - tome 2 : textes essentiels et documents prĂ©sentĂ©s par l'auteur, glossaire). RĂ©Ă©dition : Le Grand Jeu. Les Enfants de Rimbaud le Voyant, nouvelle Ă©dition augmentĂ©e, Ă©d. Le Grand Souffle, 2005
  • Marc Thivolet, La Crise du Grand Jeu, Ă©d. Arma Artis, 2006

Notes et références

  1. Selon l'orthographe des décadents.
  2. Cousin de Jacqueline Lamba, il lui fera découvrir le surréalisme et les œuvres d'André Breton. Mark Polizzotti « André Breton », Gallimard, 1995, p. 459.
  3. Evelyne Yeatman-Eiffel, Mayo, mayo-peintre.com, , p. 207.
  4. Auteur d'un essai remarqué par les surréalistes : Rimbaud le voyant (avril 1929). Biro & Passeron, op. cit., p. 367.
  5. Biro, op. cité, page 200
  6. André Breton « Œuvres complètes, tome 1 », Gallimard, 1988, p. 817.
  7. Ă€ la suite de la publication Ă  Moscou du poème Front rouge de Louis Aragon, ce dernier est poursuivi par le gouvernement français pour « excitation de militaires Ă  la dĂ©sobĂ©issance et de provocation au meurtre dans un but de propagande anarchiste. Â» Breton prend la dĂ©fense d'Aragon au nom de la libertĂ© d'expression de la poĂ©sie. Mais de son cĂ´tĂ©, Aragon rĂ©cuse son dĂ©fenseur.

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