Laodicé III
LaodicĂ© III (en grec moderne : ÎαοΎίÎșη ÎłÊč[1]), morte vers 176 av. J.-C., est une reine hellĂ©nistique (reine sĂ©leucide) appartenant Ă la dynastie des Mithridatides.
Titre
221 av. J.-C. â 192 av. J.-C.
Successeur | Laodicé IV |
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Dynastie | Mithridatides |
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DĂ©cĂšs | vers 176 av. J.-C. |
PĂšre | Mithridate II |
MÚre | Laodicé |
Fratrie | Mithridate III, Laodicé |
Conjoint | Antiochos III |
Enfants |
1. Antiochis III 2. Antiochos le Jeune 3. Antiochos IV 4. Ardys (el) 5. Cléopùtre Ire 6. Laodicé IV 7. Mithridate (ca) 8. Séleucos IV 9. Une fille inconnue |
Religion | Religion grecque antique |
Ăpouse d'Antiochos III, plusieurs citĂ©s l'ont honorĂ©e durant sa rĂ©gence de l'Anatolie. En 193 av. J.-C., Antiochos III lui dĂ©die un culte spĂ©cifique avant de la rĂ©pudier Ă la suite de son second mariage. Elle est toutefois considĂ©rĂ©e comme Ă©tant la reine ayant jouĂ© le plus grand rĂŽle politique parmi l'histoire des SĂ©leucides.
Biographie
Ăpouse d'Antiochos III
Fille de Mithridate II, roi du Pont, LaodicĂ© Ă©pouse Antiochos III vers 221 av. J.-C. lors d'une cĂ©rĂ©monie Ă SĂ©leucie de l'Euphrate. Elle devient reine Ă Antioche. Le fait que ses parents l'aient appelĂ© LaodicĂ© dans la tradition des reines sĂ©leucides suggĂšre quâelle est prĂ©destinĂ©e Ă tenir ce rĂŽle[2]. Durant lâexpĂ©dition de son Ă©poux dans les satrapies orientales entre 212 et 206 av. J.-C., elle rĂ©gente l'Anatolie au nom d'Antiochos le Jeune, ĂągĂ© de 9 ans au dĂ©part de son pĂšre. Elle montre son Ă©vergĂ©tisme envers les citĂ©s grecques[3]. Un sceau la reprĂ©sente aux cĂŽtĂ©s de son fils Antiochos (Ă diffĂ©rencier d'Antiochos IV) pendant la rĂ©gence. Selon quelques historiens, le culte royal rendu Ă LaodicĂ© est un geste de remerciement, trĂšs tardif, du roi Ă lâĂ©gard de son Ă©pouse[4].
Elle est souvent appelĂ©e « sĆur-reine », bien que son Ă©poux nâait Ă©tĂ© que son cousin maternel. Ce titre est utilisĂ© pour l'honorer en la prĂ©sentant comme loyale et Ă©gale Ă son mari[5]. LaodicĂ© a eu neuf enfants avec Antiochos : Antiochos le Jeune (l'aĂźnĂ© qui meurt en 193 av. J.-C.), SĂ©leucos IV, Antiochos IV, Ardys (el), une fille au nom inconnu mariĂ©e Ă DĂ©mĂ©trios Ier de Bactriane, LaodicĂ© IV, ClĂ©opĂątre Ire Syra, future reine dâĂgypte, Antiochis III et Mithridate (ca). Elle a plusieurs fois suivi son mari avec ses enfants, par exemple Ă Sardes[6].
En 192 av. J.-C., durant la campagne en GrĂšce, Antiochos prend une nouvelle Ă©pouse, Euboia, fille de ClĂ©optolĂšme de Chalcis. Bien que sa nouvelle et jeune Ă©pouse nâait pas le mĂȘme pouvoir politique que LaodicĂ©, cette derniĂšre est poussĂ©e Ă la pĂ©riphĂ©rie de la cour.
LaodicĂ©e aprĂšs la mort dâAntiochos
AprÚs la mort d'Antiochos III en 187 av. J.-C., ses enfants la réintroduisent à la cour et la lient à la déesse Aphrodite Niképhoros pour réaffirmer sa position de reine sacrée[7]. Elle apparaßt une derniÚre fois dans une inscription liée à la cour de Séleucos IV vers 177.
Son évergétisme envers les cités
LaodicĂ© a utilisĂ© ses pouvoirs en agissant comme bienfaitrice, ou Ă©vergĂšte, dans plusieurs citĂ©s d'Anatolie. Son activitĂ© politique est exceptionnelle et elle s'est vu accorder de nombreux honneurs. Ses donations ont souvent ciblĂ© des problĂšmes dĂ©mographiques et la pauvretĂ©, en encourageant le mariage. Des traces de ses donations peuvent ĂȘtre trouvĂ©es dans des inscriptions Ă©pigraphiques[8].
Sardes
AprĂšs la conquĂȘte de Sardes en 214 av. J.-C., Antiochos impose des mesures punitives, Ă cause de leur opposition. Il impose par exemple une taxe de 5% et confisque le gymnase. En mars 213 av. J.-C., ces mesures sont rĂ©duites pour permettre la reconstruction de la ville, avec une exemption de taxe pendant 3 ans, une donation de bois et la restauration du gymnase[9]. Dans le mĂȘme temps, un autel est dĂ©diĂ© Ă LaodicĂ©, tandis qu'une fĂȘte est organisĂ©e annuellement en l'honneur de la famille royale. Quelques historiens ont suggĂ©rĂ© que les honneurs rendus Ă LaodicĂ© laissent Ă penser quâelle a jouĂ© un rĂŽle clĂ© dans les bĂ©nĂ©fices donnĂ©s Ă Sardes[10].
TĂ©os
Une inscription Ă TĂ©os de 203 av. J.-C. remercie LaodicĂ© pour ses services rendus Ă la citĂ©, Ă cĂŽtĂ© de son Ă©poux. La citĂ© a Ă©rigĂ© des statues du roi et de la reine dans le temple de Dionysos. Une fĂȘte annuelle est aussi dĂ©crĂ©tĂ©e, l'Antiocheia Kai Laodikeia, avec un banquet dĂ©diĂ© au couple. Une agora est construite dans le port, avec une fontaine consacrĂ©e Ă LaodicĂ©. Lâeau de cette fontaine est utilisĂ©e pour les sacrifices, dans les rituels des funĂ©railles, et comme eau de bain pour les filles avant de se marier[8]. Pour prendre de lâeau, il faut sâhabiller en blanc et mettre une couronne. Ces pratiques sont une tradition pour l'entrĂ©e des sanctuaires hellĂ©nistiques. L'inscription spĂ©cifie que les honneurs sont rendus pour « le reste du temps » ; mais ils ont Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s en 189 aprĂšs la dĂ©faite contre les Romains[11]. La similaritĂ© entre les honneurs accordĂ©s Ă la reine par TĂ©os et ceux accordĂ©s Ă Iasos suggĂšre que les services que LaodicĂ© a rendus Ă la ville sont similaires. Ă noter que par la suite, les TĂ©iens ont Ă©mis un dĂ©cret pour la reine attalide Apollonis de Cyzique dans des termes quasi identiques Ă celui de LaodicĂ©, montrant une forme de sujĂ©tion des citĂ©s aux royaumes.
Iasos
En 196 av. J.-C., LaodicĂ© donne Ă Iasos 1 000 mĂ©dimnes de blĂ©, en demandant que les bĂ©nĂ©fices soient utilisĂ©s pour donner Ă chaque fille une dot de 300 drachmes[12]. Ces donations permettent de combattre les problĂšmes causĂ©s par la pauvretĂ© de la citĂ©, sa dĂ©population, sa perte des lois et des libertĂ©s traditionnelles, et un tremblement de terre. LaodicĂ© utilise ses propres biens pour financer ce projet, mais elle a pour intermĂ©diaire un administrateur royal, StrouthiĂŽn, ce qui laisse imaginer quâelle agit de la part de l'administration royale[13]. Pour la remercier, la ville assimile LaodicĂ© Ă Aphrodite, et crĂ©e une fĂȘte annuelle dans le mois dâAphrodisie pour la cĂ©lĂ©brer. Pour fĂȘter LaodicĂ© est organisĂ©e une procession des jeunes prĂȘts Ă se marier, et une vierge (une parthĂ©non) est Ă©lue parmi les grandes familles pour ĂȘtre dĂ©signĂ©e prĂȘtresse de LaodicĂ©. Dans les inscriptions, Iasos promet de continuer ses honneurs pour 10 ans, mais ils se terminent lĂ aussi aprĂšs la dĂ©faite d'Antiochos III[14].
Les cultes à l'égard de Laodicée
Le culte royal
En 193 av. J.-C. (aprĂšs 19 ans de mariage), Antiochos III fait promulguer par dĂ©cret dans tout le royaume un culte Ă l'Ă©gard de son Ă©pouse. Ce culte lui est attribuĂ© Ă vie en rĂ©compense de lâaffection qu'elle aurait montrĂ©e envers le roi. Ce culte est attestĂ© par trois inscriptions. La traduction de l'acte royal instituant le culte est la suivante :
« Le roi Antiochos Ă Anaximbrotos[15], salut. Nous voulons accroĂźtre autant que possible les honneurs rendus Ă notre sĆur la reine LaodicĂ© et nous estimons que cela nous est trĂšs nĂ©cessaire, non seulement parce quâelle vit Ă nos cĂŽtĂ©s avec tendresse et sollicitude, mais encore parce quâelle est pieuse envers la divinitĂ© et aussi parce que nous accomplissons avec affection tout ce quâil est convenable et juste quâelle obtienne de nous. Nous dĂ©cidons en particulier que, de mĂȘme que des grands-prĂȘtres de notre culte sont nommĂ©s dans le royaume, seront instituĂ©es dans les mĂȘmes lieux des grandes-prĂȘtresses attachĂ©es au culte [de Laodice] ; elles porteront des couronnes dâor Ă son effigie et leur nom sera inscrit dans les contrats Ă la suite des grands-prĂȘtres de nos ancĂȘtres et des nĂŽtres »
â StĂšle d'« Ăriza » (trouvĂ©e Ă Dodurga en Anatolie), 193 av. J.-C.
Antiochos a dĂ©jĂ crĂ©Ă© un culte pour lui-mĂȘme en 209. Le culte demande un sacrifice et une fĂȘte annuelle pour LaodicĂ©. Une prĂȘtresse du culte de LaodicĂ© est nommĂ©e dans chaque satrapie. Ă LaodicĂ©e de MĂ©die, LaodicĂ© IV, fille d'Antiochos III et de LaodicĂ©, et Ă©pouse dâAntiochos IV, est nommĂ©e prĂȘtresse du culte. Dans les autres endroits, des filles de la haute aristocratie sont nommĂ©es prĂȘtresses ; par exemple, en Carie, BĂ©rĂ©nice, fille de PtolĂ©mĂ©e de Telmessos, est aussi prĂȘtresse. La nomination des filles de l'Ă©lite permet d'unifier le royaume pendant un moment de fragilitĂ©[16].
AprĂšs son mariage avec Euboia de Chalcis, Antiochos nâa plus encouragĂ© le culte officiel de LaodicĂ© ; celui-ci s'est donc arrĂȘtĂ© dans le royaume sĂ©leucide[17].
Culte d'Aphrodite Niképhoros
Quelques historiens ont liĂ© la perpĂ©tuation du culte d'Aphrodite NikĂ©phoros au culte de LaodicĂ©. Des monnaies en bronze portant l'effigie de NikĂ©phoros avec une Ă©toile, datĂ©es d'aprĂšs 176 av. J.-C., ont en effet Ă©tĂ© trouvĂ©es. L'Ă©toile signifie la mort et le genre d'Aphrodite est liĂ© aux reines, ce qui permet de penser qu'il s'agit d'une rĂ©fĂ©rence Ă LaodicĂ© qui serait morte. La promotion d'un culte de LaodicĂ© aurait aidĂ© SĂ©leucos IV Ă lĂ©gitimer son pouvoir en mettant lâemphase sur LaodicĂ©, considĂ©rĂ©e comme la vĂ©ritable rĂ©gente du royaume pendant le rĂšgne d'Antiochos III.
Famille
Mariage et enfants
De son union avec son cousin maternel Antiochos III, elle eut :
- Antiochis III ;
- Antiochos le Jeune ;
- Antiochos IV ;
- Ardys (el) ;
- Cléopùtre Ire ;
- Laodicé IV ;
- Mithridate (ca) ;
- SĂ©leucos IV ;
- une fille au nom inconnu.
Ascendance
32. Ariobarzane II de Cius | |||||||||||||||||||
16. OrontobatĂšs | |||||||||||||||||||
8. Mithridate Ier | |||||||||||||||||||
4. Ariobarzane | |||||||||||||||||||
3. Mithridate II | |||||||||||||||||||
5. Laodicé | |||||||||||||||||||
1. Laodicé III | |||||||||||||||||||
48. Antiochos | |||||||||||||||||||
24. SĂ©leucos Ier | |||||||||||||||||||
49. Laodicé de Macédoine | |||||||||||||||||||
12. Antiochos Ier | |||||||||||||||||||
50. SpitaménÚs | |||||||||||||||||||
25. Apama | |||||||||||||||||||
51. Dascatylis de Bactriane | |||||||||||||||||||
6. Antiochos II | |||||||||||||||||||
52. Antigone le Borgne | |||||||||||||||||||
26. Démétrios Ier PoliorcÚte | |||||||||||||||||||
53. Stratonice | |||||||||||||||||||
13. Stratonice Ire | |||||||||||||||||||
54. Antipater | |||||||||||||||||||
27. Phila Ire | |||||||||||||||||||
3. Laodicé | |||||||||||||||||||
56. Antiochos | |||||||||||||||||||
28. SĂ©leucos Ier | |||||||||||||||||||
57. Laodicé de Macédoine | |||||||||||||||||||
14. AchaĂŻos Ier | |||||||||||||||||||
58. SpitaménÚs | |||||||||||||||||||
29. Apama | |||||||||||||||||||
59. Dascatylis de Bactriane | |||||||||||||||||||
7. Laodicé Ire | |||||||||||||||||||
Annexes
Bibliographie
- Anne Beilman, Femmes en public dans le monde hellénistique, Sedes, .
- Laurent Capdetrey, Le Pouvoir séleucide : Territoire, administration, finances d'un royaume hellénistique (312-129 av. J.-C.), Presses Universitaires de Rennes, , 536 p. (ISBN 9782753530041, lire en ligne).
- Philippe Gauthier, Les CitĂ©s grecques et leurs bienfaiteurs (IVeâââIer siĂšcle avant J.-C.), Ăcole française d'AthĂšnes, .
- Philippe Gauthier, Nouvelles Inscriptions de Sardes II, Droz, coll. « Hautes études du Monde Gréco-Romain », .
- John Ma, Antiochos III et les citĂ©s de lâAsie Mineure Occidentale, Les Belles Lettres, .
- Ădouard Will, Histoire politique du monde hellĂ©nistique 323-, Paris, Seuil, coll. « Points Histoire », (ISBN 2-02-060387-X).
- (en) Gillian Ramsey, « The Queen and the City : Royal Female Intervention and Patronage in Hellenistic Civic Communities », Gender & History, vol. 23, no 3,â , p. 510-527.
- (en) Iossif Panayotis et Catharine Lorber, « Laodikai and the Goddess Nikephoros », LâantiquitĂ© classique, vol. 76,â , p. 63-88 (lire en ligne).
Notes et références
- Laodiké.
- Ramsey 2011, p. 510-527.
- Francis Prost (dir.), L'Orient méditerranéen de la mort d'Alexandre aux campagnes de Pompée. Cités et royaumes à l'époque hellénistique, Actes du colloque de la SOPHAU, P.U de Rennes, Rennes, 2003, .
- Capdetrey 2007, p. 351.
- Beilman 2002, p. 519-520.
- Gauthier 1989, p. 65 ; Ma 2004, p. 55.
- Iossif 2007, p. 63-88.
- Gauthier 1985, p. 76.
- Ramsey 2001, p. 515 ; Ma 2004, p. 513.
- Beilman 2002, p. 46.
- Ramsey 2001, p. 517.
- Ramsey 2001, p. 512, 513.
- Beilman 2002, p. 162 ; Capdetrey 2007, p. 314.
- Beilman 2002, p. 46 ; Ramsey 2011, p. 518, 523, 534.
- Anaximbrotos est le satrape de Carie.
- Beilman 2002, p. 45, 47 ; Capdetrey 2007, p. 324 ; Ramsey 2001, p. 520.
- Beilman 2002, p. 45.