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L'Argent

L’Argent est un roman naturaliste d’Émile Zola publié en 1891, le dix-huitième volume de la série Les Rougon-Macquart.

L’Argent
Image illustrative de l’article L'Argent

Auteur Émile Zola
Pays Drapeau de la France France
Genre Roman
Éditeur G. Charpentier
Lieu de parution Paris
Date de parution 1891
Chronologie
SĂ©rie Les Rougon-Macquart

Résumé

Le héros est Aristide Saccard, frère du ministre Eugène Rougon, qu’on avait déjà vu amasser une fortune colossale dans La Curée. Après une succession de mauvaises affaires, il doit repartir de zéro, mais son ambition est demeurée intacte. Il vend sa luxueuse propriété du parc Monceau afin de régler ses créanciers, puis loue deux étages d’un hôtel particulier à Paris où il installe la Banque Universelle, destinée à financer des projets de mise en valeur du Moyen-Orient. Tout est fait pour attirer petits et moyens épargnants, auxquels on promet des gains faciles et rapides. Les communiqués et articles de presse, les rumeurs savamment dosées font s’envoler les titres de la société. Saccard se retrouve à nouveau au sommet de la gloire et de la puissance. Mais celles-ci sont construites sur du sable, car il ne cesse d’acheter ses propres actions.

Thème

Zola en livre une description haute en couleur et en personnages, complétée par la solide documentation qu'il avait amassée[1], en plaçant l'action vingt-cinq ans plus tôt, en mars 1864. Comme dans Germinal, il préfère ce décalage dans le temps qui lui permet une relation plus solide de l'intrigue. L’Argent évoque la spéculation financière à une période où Paris est, avec Londres, la première place boursière au monde.

Le romancier se livre par endroits à des considérations philosophiques sur le changement « qualitatif » qu'opère dans l'esprit la disposition de ressources importantes, permettant de transformer jusqu'aux paysages eux-mêmes. Avant Francis Scott Fitzgerald, chez qui ce sera un thème récurrent, il laisse entrevoir cette nouvelle perception bien éloignée des principes de 1789 : « Les riches sont différents. » Ce thème était déjà en partie abordé dans La Curée.

Inspiration

Place de la Bourse, Paris (vers 1890)
Plan de la Bourse de Paris de la main de Zola

Pour écrire son roman, Zola s’est inspiré des scandales financiers de son époque. Le scandale de Panama est amplifié par la liquidation judiciaire de la Compagnie de Panama, le , au moment où Zola écrit L’Argent. L'année 1889 est aussi marquée, un mois plus tard, par les spéculations d'Eugène Secrétan qui causent la faillite du Comptoir national d'escompte de Paris, ancêtre de la BNP, et le suicide de son président, Eugène Denfert-Rochereau.

Le romancier s’est principalement inspiré d'un évènement survenu sept ans plus tôt, le krach de l’Union générale (1881-1882), à l'issue duquel le banquier catholique et légitimiste Eugène Bontoux est condamné à cinq ans de prison et ruiné par la baisse des actions de sa banque, qu'il avait achetées en masse, en infraction à la loi de 1856 sur les sociétés. Jugeant l'action trop élevée, les Rothschild et la Caisse générale des chemins de fer de Jules Mirès avaient spéculé à la baisse, à l'instar de l'ennemi juré de Saccard dans L’Argent, le banquier Gundermann.

L'industriel Hector de Sastres, spéculateur, ami et protégé du ministre Jacques Louis Randon, a aussi inspiré le personnage de Saccard.

Zola Ă©voque aussi la bataille de Sadowa, qui dĂ©clencha de forts mouvements spĂ©culatifs. Saccard est averti du rĂ©sultat de la bataille avant tout le monde par une indiscrĂ©tion chez son frère, ministre de l'IntĂ©rieur, et en profite pour rĂ©aliser d'importants bĂ©nĂ©fices. Dans les jours prĂ©cĂ©dents la bataille, le marchĂ© obligataire avait chutĂ©, car on pensait que la guerre serait interminable. La victoire prussienne, imprĂ©vue mais très nette, renverse complètement la tendance sur les marchĂ©s obligataires, qui repartent très fortement Ă  la hausse, après avoir Ă©tĂ© vendus Ă  dĂ©couvert : le , le cours de l'emprunt français Ă  3 % bondit, passant de 64,40 francs Ă  70 francs, soit une progression de presque 10 % en une seule journĂ©e[2]. Parallèlement, le cours de l'emprunt italien Ă  5 % passe de 42 francs Ă  70 francs, soit une progression de presque 40 % en une seule sĂ©ance[2]. Cet Ă©vènement entraĂ®ne la faillite de deux importants agents de change, Doyen et PorchĂ©, qui avaient spĂ©culĂ© Ă  la baisse et subi de lourdes pertes.

Pour constituer le dossier préparatoire du roman, l'un des plus importants de la série des Rougon-Macquart, Zola visite la Bourse, dresse des plans des lieux et du quartier, consulte des ouvrages techniques, requiert l'aide de spécialistes des questions financières, compulse de nombreuses encyclopédies[3]. Il s'intéresse également aux nouvelles théories du travail et du capital, à travers le personnage de Sigismond, un traducteur et essayiste proche de Karl Marx et ardent socialiste[1].

Édition

Livre audio libre L'Argent, lu par Pomme.

Bibliographie

  • Edward J. Ahearn, « Monceau, Camondo, La CurĂ©e, L’Argent: History, Art, Evil », French Review, may 2000, vol. 73, no 6, p. 1100-1115.
  • David Baguley, « Le Capital de Zola : le fĂ©tichisme de la monnaie dans L’Argent », Currencies: Fiscal Fortunes and Cultural Capital in Nineteenth-Century France, Oxford, Peter Lang, 2005, p. 31-42.
  • (en) Benjamin F. Bart, « Non-Physical Sexuality in Émile Zola’s Women », L’HĂ©naurme Siècle: A Miscellany of Essays on Nineteenth-Century Literature, Heidelberg, Carl Winter Univ.-verl., 1984, p. 145-153.
  • Adolfo Fernandez-ZoĂŻla, « DiscontinuitĂ©s et paroxysmes dans L’Argent », Les Cahiers Naturalistes, 1993, no 67, p. 107-121.
  • Antonia Fonyi, « Zola : question d’argent, ambivalences financières et modèles inconscients dans L’Argent », Romantisme, 2003, no 119, p. 61-71.
  • (en) Richard B. Grant, « The Jewish Question in Zola’s L’Argent », PMLA, , vol. 70, no 5, p. 955-967.
  • (en) Susan Hennessy, « Bearing the Cross of Sterility: Childless Women of Les Rougon-Macquart », Journal of the Association for Research on Mothering, automne-hiver 2002, vol. 4, no 2, p. 171-179.
  • Jurate D. Kaminskas, « Accumulation et dĂ©pense dans L’Argent d’Émile Zola », Excavatio, 2004, vol. 19, nos 1-2, p. 13-25.
  • Monica Lebron, « Madame Caroline : expĂ©ditions discursives dans L’Argent », Cahiers Naturalistes, 1999, no 73, p. 217-225.
  • (en) Andrew McQueen, « The Wild Child in Zola’s L’Argent », Excavatio, 1999, no 12, p. 53-59.
  • (en) Brian Nelson, « Energy and Order in Zola’s L’Argent », Australian Journal of French Studies, septembre-, vol. 17, no 3, p. 275-300.
  • Edouard Richard, L'Argent de Zola et le krach de l'Union GĂ©nĂ©rale : une Ă©tude juridique, Droz, Genève, 2018, 2 vol.
  • Thierry Suchère, « L’Argent d’Émile Zola (1891) : la comparaison entre les marchĂ©s de capitaux, les aires de jeux et ses implications Ă©thiques »,2016, Les cahiers de sociologie Ă©conomique et culturelle, juin / dĂ©cembre, n° 59-60, p. 93-113, https://sociologieeconomique.org/2019/04/28/autour-de-la-sociologie-anthropologie-des-marches-un-choix-de-textes-publies-par-les-cahiers-de-sociologie-economique-et-culturelle/.

Adaptations

Annexes

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. L'Argent, par Emile Zola, édition de Philippe Hamon et Marie-France Azéma, dossier financier par Bernard Cieutat, Le Livre de poche.
  2. Alfred Colling, La Prodigieuse Histoire de la Bourse, p. 279.
  3. Philippe Hamon, Préface à L'Argent d'Émile Zola, Paris, Librairie Générale Française, , 757 p., p. 12
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