Kunpengopterus antipollicatus
Monkeydactyl
Kunpengopterus antipollicatus, surnommĂ© et mĂ©diatisĂ© sous le nom de « Monkeydactyl »[1], est une espĂšce de reptiles volants de l'ordre des ptĂ©rosaures, dans le genre Kunpengopterus dont il constitue la seconde espĂšce dĂ©couverte, dĂ©couverte en mi-2019 et dĂ©crite en avril 2021. Il a vĂ©cu pendant la pĂ©riode du Jurassique moyen dans la formation de Tiaojishan du Liaoning, en Chine (dans le nord-est), il y a 160 millions dâannĂ©es.
L'holotype est conservé au musée des Ptérosaures de Beipiao en Chine. Il a été décrit par une équipe internationale de chercheurs de Chine, du Brésil, du Royaume-Uni, du Danemark et du Japon dont l'étude a été publiée en deux articles dans la revue Current Biology[2] - [3].
Description
Kunpengopterus, ou « Monkeydactyl » par les chercheurs ayant eux-mĂȘmes dĂ©crit l'animal, Ă©tait un ptĂ©rosaure de moins d'un mĂštre et avait une envergure estimĂ©e Ă 85 cm[4] - [5] - [6]. L'animal ressemblait beaucoup morphologiquement et physiquement Ă K. sinensis, une autre espĂšce du genre, ainsi qu'Ă des genres proches de la famille des Wukongopteridae tels que le genre type Wukongopterus lui-mĂȘme ou le plus connu Darwinopterus, nommĂ© d'aprĂšs le cĂ©lĂšbre naturaliste Charles Darwin. Ainsi, il avait une queue longue, un cou court et un museau long garni de dent, surtout vers l'extrĂ©mitĂ©, (tel l'image ci-contre) avec possiblement une crĂȘte sur le front comme ses proches relatifs.
« Monkeydactyl » était un ptérosaure darwinoptÚre possédant, comme les autres genres de la famille à laquelle il est rattaché, des caractéristiques similaires aux premiers membres de l'ordre des Pterosauria, plus basaux et primitifs, tels les rhamphorhynchoïdes (qui inclut les Rhamphorhynchidae dont Rhamphorhynchus) avec une queue longue, un cou court et des poignets courts (métacarpes) mais également des membres plus évolués et dérivés comme le groupe des ptérodactyloïdes (qui inclut la plupart des ptérosaures de moyenne à grande taille tels Pterodactylus, Pterodaustro ou encore Ptéranodon) possédant une queue courte, un cou long, de longs poignets définis par une autapomorphie et enfin avec une seule ouverture (fenestra) nasoantorbitale en avant des yeux. Ce mélange de ces caractÚres sont les spécificités qui font que cette famille et ordre au sein de celui des Pterosauria sont remarquables.
Comme le reste des représentants des Monofenestrata, il ne possédait pas d'ouverture crùnienne différenciée ou fenestra en face de la cavité oculaire (car fusionnée avec l'ouverture nasale), caractéristique commune propre au groupe et qui permettait d'alléger le poids du crùne[7]. Il n'avait donc qu'une seule ouverture comme les ptérodactyloïdes.
Découverte et présence de « pouces opposables »
Cependant, « Monkeydactyl » est surtout connu pour une particularitĂ© qu'il est lui-mĂȘme le seul Ă possĂ©der au sein de sa famille et de l'ordre entier des PtĂ©rosaures, celle d'avoir des pouces opposables. Le nom d'espĂšce « antipollicatus » signifie justement « pouce opposable » en grec ancien, chose qui n'est d'ailleurs pas retrouvĂ©e chez l'autre espĂšce du mĂȘme genre K. sinensis, dĂ©crite en 2010 par Wang Xiaolin et al.. CaractĂ©ristique unique dans ce cas prĂ©cis chez les ptĂ©rosaures et rarissime chez les reptiles, elle indique un mode de vie clairement arboricole (confirmĂ© dĂ©finitivement aprĂšs des tests en comparaison d'autres espĂšces de ptĂ©rosaures sur un ensemble de caractĂšres anatomiques liĂ©s Ă lâadaptation sur ce mode vie) et a Ă©tĂ© dĂ©couverte Ă la suite d'une analyse de son fossile par tomographie microcalculĂ©e (micro-CT), une technique de balayage sâappuyant sur les rayons X pour imager un objet[8]. SuggĂ©rant une partition de niche parmi ces ptĂ©rosaures, il fournit ainsi la premiĂšre preuve quantitative quâau moins certains membres de la famille des Darwinoptera et Wukongopteridae Ă©taient arboricoles[9].
En effet, une telle caractĂ©ristique pour un animal permet de nombreux bĂ©nĂ©fices, car cela permet de bien tenir, d'agripper et d'avoir une meilleure accroche aux branches, aux troncs ou tout autre milieu en hauteur, de mĂȘme que pouvoir en supplĂ©ment la capacitĂ© de prendre et manipuler des objets, de la nourriture ou attraper des proies (mĂȘme si ce n'est encore que spĂ©culatif pour le Monkeydactyl)[10] - [11] - [12]. Non seulement « Monkeydactyl » vivait dans les arbres, mais plus encore que tous ses proches ou tous autres ptĂ©rosaures (qui devaient au moins utiliser les arbres comme plateforme pour s'y reposer), tĂ©moignant d'une spĂ©cialisation (ici appelĂ©e plus prĂ©cisĂ©ment en biologie une spĂ©ciation) de l'animal Ă un milieu prĂ©cis et lui confĂ©rant une niche Ă©cologique unique lui permettant de ne pas trop entrer en concurrence avec les autres espĂšces de ptĂ©rosaures vivant et cohabitant Ă ses cĂŽtĂ©s. Ce que prĂ©cise et indique Xuanyu Zhou (d), de lâUniversitĂ© chinoise des gĂ©osciences, et l'un des chercheurs de l'Ă©tude sur l'animal : « La palĂ©oforĂȘt de Tiaojishan abrite de nombreux organismes, y compris trois genres de ptĂ©rosaures darwinoptĂšres. Nos rĂ©sultats montrent que K. antipollicatus a occupĂ© une niche diffĂ©rente de celle de Darwinopterus et de Wukongopterus, ce qui a probablement minimisĂ© la concurrence entre ces ptĂ©rosaures », car cette dĂ©couverte met aussi en lumiĂšre l'organisation de la zone de dĂ©couverte de l'animal qui Ă©tait un habitat forestier complexe dans lequel des espĂšces apparentĂ©es Ă©troitement se rĂ©partissaient dans diffĂ©rentes niches Ă©cologiques et Ă©vitaient ainsi de fait la concurrence entre elles.
Il est donc aujourd'hui considĂ©rĂ© comme le premier et plus ancien animal, aux connaissances actuelles, Ă avoir dĂ©veloppĂ© des pouces opposables vĂ©ritables dans l'histoire de la terre[13] - [14]. CaractĂ©ristique qui fut toujours mentionnĂ©e comme Ă©tant rĂ©servĂ©e aux primates (lĂ©muriens, petits et grands singes de l'ancien et nouveau monde et l'Homme), alors que d'autres rares animaux possĂšdent Ă©galement cette caractĂ©ristique comme les opossums d'AmĂ©rique (aux pattes arriĂšres, comme l'Opossum de Virginie), le Grand panda, le Koala, certaines grenouilles arboricoles ou mĂȘme les CamĂ©lĂ©ons et dĂ©montre que ces derniers ont tous suivi une Ă©volution convergente. Dans tous les cas, la dĂ©couverte de « Monkeydactyl » constitue l'une des dĂ©couvertes historiques, significatives et majeures de 2021 les plus importantes en palĂ©ontologie.
Notes et références
Références taxonomiques
- (en) RĂ©fĂ©rence Paleobiology Database : â Kunpengopterus antipollicatus Zhou et al. 2021 (pterosaur) (consultĂ© le )
Références
- (en) RĂ©fĂ©rence Paleobiology Database : â Kunpengopterus antipollicatus Zhou et al. 2021 (pterosaur) (consultĂ© le ).
- (en) Xuanyu Zhou, Rodrigo V. PĂȘgas, Waisum Ma et Gang Han, « A new darwinopteran pterosaur reveals arborealism and an opposed thumb », Current Biology, vol. 31, no 11,â , p. 2429â2436.e7 (ISSN 0960-9822, DOI 10.1016/j.cub.2021.03.030, lire en ligne, consultĂ© le )
- (en-GB) « New Jurassic flying reptile reveals the oldest opposed thumb », sur University of Birmingham (consulté le )
- « Voici le "Monkeydactyl", un ptérosaure du Jurassique doté de pouces opposables », sur Trust My Science, (consulté le )
- « Monkeydactyle : un ptérosaure volant avec les plus anciens pouces véritablement opposables », sur GuruMeditation, (consulté le )
- « «Monkeydactyl»: des scientifiques découvrent un dinosaure volant qui grimpe aux arbres », sur www.netcost-security.fr (consulté le )
- Junchang LĂŒ, David M. Unwin, Xingsheng Jin et Yongqing Liu, « Evidence for modular evolution in a long-tailed pterosaur with a pterodactyloid skull », Proceedings of the Royal Society B: Biological Sciences, vol. 277, no 1680,â , p. 383â389 (PMID 19828548, PMCID PMC2842655, DOI 10.1098/rspb.2009.1603, lire en ligne, consultĂ© le )
- « Le « Monkeydactyl » aussi avaient des pouces opposables », sur Sciencepost, (consulté le )
- (en) Matthew Rozsa, « Pterosaurs with thumbs? Scientists say yes, a "monkeydactyl" once existed », sur Salon, (consulté le )
- « Monkeydactyl, the flying reptile with the âoldest opposable thumbs' », sur believersias.com (consultĂ© le )
- (en-US) « âMonkeydactylâ may be the oldest known creature with opposable thumbs », sur Science News, (consultĂ© le )
- ĂlĂ©onore SolĂ©, « Ce ptĂ©rosaure est la plus vieille espĂšce aux pouces opposables », sur Futura (consultĂ© le )
- (en-US) « âMonkeydactylâ may be the oldest known creature with opposable thumbs », sur Science News, (consultĂ© le )
- (en) « Strange New Jurassic Flying Reptile Reveals the Oldest Opposable Thumbs », sur scitechdaily,