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Julius Malema

Julius Sello Malema, né le à Seshego, dans l'ancien bantoustan du Lebowa (situé dans l'actuelle province du Limpopo) est un homme politique sud-africain. Membre des pionniers du Congrès national africain (ANC) dès 1990, il devient président de la ligue de jeunesse du Congrès national africain (ANCYL) en 2008. Connu pour ses propos et ses discours appelant à la violence contre les Blancs sud-africains, il finit par s'aliéner les instances de l'ANC dont il est exclu en 2012. En 2013, il fonde son propre parti politique : les Combattants pour la liberté économique (Economic Freedom Fighters en anglais). Idéologiquement, le parti est populiste, d'extrême gauche, anticapitaliste, panafricaniste, nationaliste noir, antiblanc, antisioniste et antioccidentaliste.

Julius Malema
Julius Malema en 2019.
Fonctions
Député à l'Assemblée nationale d'Afrique du Sud
27th South African Parliament (en)
depuis le
Député à l'Assemblée nationale d'Afrique du Sud
26th South African Parliament (en)
-
Biographie
Naissance
Nom de naissance
Julius Sello Malema
Nationalité
Formation
Activité
Conjoint
Mantwa Matlala
Enfant
1
Autres informations
Partis politiques
Condamné pour

Origines

Fils d'une mère célibataire pedi, domestique vivant dans le township de Seshego au nord-ouest de Pietersburg, Julius Sello Malema, né le , adhère à l'âge de neuf ans aux Masupatsela, le mouvement des pionniers du Congrès national africain[1]. Selon Malema, sa principale activité est alors de retirer les affiches électorales du Parti national.

Carrière politique

À l'âge de quatorze ans, Julius Malema entre à la ligue de jeunesse du Congrès national africain (ANCYL) et reçoit une formation militaire. Parallèlement, ses résultats scolaires sont très mauvais[2] et deviendront un sujet de polémiques quelques années plus tard.

En 1995, Malema est élu chef de la branche régionale de la ligue à Seshego et président régional. En 1997, il devient président provincial du Congress of South African Students (COSAS) avant d'en devenir, en 2001, le président national.

PrĂ©sident de l'ANCYL depuis , comme le fut autrefois Nelson Mandela, il se fait rapidement remarquer durant la guerre de succession Ă  la tĂŞte de l'ANC menĂ©e entre Thabo Mbeki, le prĂ©sident de la RĂ©publique et chef de l'ANC en titre, et son adversaire, Jacob Zuma, ancien vice-prĂ©sident. Soutien inconditionnel de Jacob Zuma, Julius Malema affirme alors ĂŞtre « prĂŞt Ă  prendre les armes et Ă  tuer Â» pour Zuma tandis que ses partisans traitaient Thabo Mbeki de « chien qu'il fallait tuer Â»[3] - [4]. Prenant la dĂ©fense de Zuma quand celui-ci avait Ă©tĂ© inculpĂ© pour viol, Malema avait notamment affirmĂ© que la victime avait « passĂ© du bon temps » ce qui lui vaudra d'ĂŞtre condamnĂ© Ă  prĂ©senter des excuses publiques et Ă  payer 50 000 rands (environ 5 000 euros) Ă  un centre d'aide aux femmes battues[5].

Il multiplie les provocations, ne respectant ni la loi ni ses aĂ®nĂ©s (Desmond Tutu qu'il envoie Ă  la retraite), ni ses adversaires politiques. Malema multiplie aussi les dĂ©clarations Ă  connotations racistes. Ainsi il qualifie Helen Zille, chef de l'opposition libĂ©rale, de « raciste Â» et d'avoir une « tĂŞte d’espionne de l’apartheid Â» et les chefs du Congrès du peuple (Cope) d'ĂŞtre des « traĂ®tres Â» Ă  la solde des impĂ©rialistes[4].

Après avoir Ă©tĂ© mis en cause indirectement dans l'assassinat d'Eugène Terre'Blanche en pour avoir de nombreuses fois repris le chant anti-apartheid et anti-Boer Dubula ibhunu, il vante au Zimbabwe la politique de rĂ©forme agraire du prĂ©sident Robert Mugabe dont il partage la rhĂ©torique du complot nĂ©ocolonialiste. Durant une confĂ©rence de presse, il estime ainsi la politique agraire menĂ©e au Zimbabwe de « courageuse, correcte et rĂ©ussie Â» et critique les leaders du Mouvement pour le changement dĂ©mocratique, le parti d'opposition zimbabwĂ©en, notamment pour le fait que plusieurs d'entre eux travaillent Ă  Sandton, le quartier d'affaires huppĂ© de Johannesburg. Lorsque Jonah Fisher, un journaliste blanc de la BBC, lui a fait remarquer qu'il avait sa rĂ©sidence Ă  Sandton, Julius Malema s'en est pris au journaliste, le qualifiant de « bâtard Â» dotĂ© d’une « tendance de Blanc […] Ă  attaquer les Noirs Â» avant de l’expulser sous les injures tels « Salaud, dehors, putain d'agent Â»[5] - [6].

À la suite de ces derniers événements et estimant que les déclarations incendiaires de Malema participent à l'entretien des tensions raciales dans le pays, Jacob Zuma désavoue son jeune protégé déclarant que l’Ancyl avait adopté « un comportement et des propos complètement étrangers à la culture de l'ANC[5] ». Prenant connaissance du discours de Zuma, Julius Malema se dit alors choqué par les commentaires publics du président à son égard, affirmant que Thabo Mbeki ne l'avait jamais traité de cette façon en public[7].

L'affaire de la chanson shoot the Boers

En 2009, Malema rĂ©active Dubula ibhunu, un chant traditionnel de l'Ă©poque oĂą l'ANC luttait contre l'apartheid et qui appelait Ă  « tuer les Boers parce que ce sont des violeurs Â»[5] - [8]. Les Boers dĂ©signent en Afrique du Sud les fermiers blancs afrikaners. La rĂ©activation de cette chanson, plus communĂ©ment dĂ©signĂ© comme le chant shoot the boers, intervient dans un contexte oĂą, selon Agri SA la plus importante union d'exploitants agricoles, deux fermiers sont tuĂ©s chaque semaine en Afrique du Sud, un pays oĂą cinquante personnes sont assassinĂ©es chaque jour et qui totalise 11 785 attaques et 4 044 meurtres de fermiers depuis 1991[9] - [10] - [11]. Selon les partisans de Malema, parmi lesquels il peut compter sur le soutien de Winnie Mandela, ce chant est inoffensif, appartient Ă  l'histoire du pays et ne vise personne en particulier (car les Boers ne sont pas des personnes selon eux) mis Ă  part le système de l'apartheid[12]. Perçue comme une chanson raciste et appelant Ă  la haine et au meurtre, la chanson Dubula ibhunu sera dĂ©clarĂ©e contraire Ă  la Constitution par la justice sud-africaine en [13] sans pour autant que Malema accepte le jugement[14]. L'ANC annonce alors qu'elle fera appel de ce jugement[15].

Poursuivi devant un tribunal de Johannesburg par des organisations civiles afrikaners comme AfriForum et le syndicat des fermiers du Transvaal (TAU), Julius Malema est reconnu coupable d'incitation à la haine pour avoir repris dans ses meetings cette chanson de la lutte anti-apartheid et est condamné à payer une partie des frais de justice[12]. Il accuse alors la Cour de « racisme » à son égard[16]. Le , le Congrès national africain annonce qu'il fait appel contre ce jugement interdisant le chant contesté[17].

Procédure disciplinaire au sein de l'ANC

Le , la secrétaire générale de l’ANC, Thandi Modise, annonce que Malema va faire l’objet d’une procédure disciplinaire. Il risque au pire l'exclusion du parti mais il est peu probable que cette sanction soit prononcée[5]. En , la commission disciplinaire de l'ANC condamne Malema à verser une amende et à s'excuser pour avoir notamment apporté son soutien à la politique de Robert Mugabe au Zimbabwe, sapant alors les efforts de médiation politique de Jacob Zuma[18].

Malema continue néanmoins à faire des déclarations polémiques et racialement diffamatoires, déclarant que les Blancs ont « volé nos terres », que ce « sont des criminels… il faut les traiter comme tels » ou remettant en cause la politique de Jacob Zuma, désormais son plus grand adversaire, et l'autorité de celui-ci sur le parti. Ainsi, après avoir défendu la politique d'expropriation des terres des Blancs du Zimbabwe, il propose de nationaliser les mines sud-africaines et exproprier sans indemnisation les fermiers blancs sud-africains[19]. Il déclare qu'il faut « renverser le régime impérialiste » du Botswana, attribuant au président Ian Khama le qualificatif de « marionnette de l'Ouest »[20] pour le fait d'abriter Africom, le commandement militaire américain opérationnel en Afrique et pour avoir affirmé que Julius Malema était un « garçon indiscipliné »[21]. Contestant l’intervention de l’Otan en Libye, il qualifie les Américains d'« impérialistes assoiffés de sang »[19]. Ces déclarations prennent alors place au sein d'un ensemble de discours des chefs de la Ligue des jeunes de l’ANC qui remettent en cause l'autorité de la direction de l'ANC et du gouvernement sud-africain ou qui prennent à partie des journalistes appartenant aux minorités visibles blanches et indiennes[21]. Selon une journaliste sud-africaine, Malema détient un fonds familial, le Ratanang Family Trust, enregistré au nom de son fils de cinq ans, et financé par des fonds secret provenant de commissions touchées illégalement sur des marchés publics octroyés par la province du Limpopo[21].

Il comparait pour insubordination devant la commission disciplinaire de l'ANC en août et , notamment pour « avoir porté atteinte à la réputation de l'ANC » et pour « avoir semé la division », il risque d'être suspendu, voire exclu du parti[20]. Lors de son audition devant la commission disciplinaire, ses partisans s'en prennent à la police, blessent des journalistes et brûlent un drapeau de l’ANC et des t-shirts et portraits à l'effigie du président Jacob Zuma[20] - [19]. Le , la commission rejette tous les arguments de Julius Malema visant à obtenir l'abandon des charges retenues contre lui.

Le 10 septembre, à l'occasion du 67e anniversaire de la Ligue de jeunesse de l'ANC, Julius Malema s'en prend de nouveau à la minorité blanche lui promettant « la guerre », de « marcher sur la bourse de Johannesburg » et traite les fermiers blancs de « criminels » qui ont volé la terre [celle des populations noires d'Afrique du Sud].

Le , la commission de discipline du parti rend sa décision et suspend Julius Malema pour cinq ans pour avoir semé la division au sein de l'ANC, défié ses dirigeants nationaux et porté atteinte à l'image du parti. La Commission ne retient cependant pas contre lui la charge d'incitation à la haine raciale[22]. Il est exclu du mouvement de jeunesse de l'ANC le [23] - [24]. En revanche, il n'a pas été reconnu coupable par la commission de propager « racisme et intolérance politique » et ce malgré ses propos racistes antiblanc répétés[25].

DĂ©but , il dĂ©clare vouloir faire tomber le maire de Port Elizabeth parce qu'il est « un homme blanc Â». « On coupe les tĂŞtes de la blancheur Â» estime-t-il[26].

Enrichissement personnel

Julius Malema a été accusé d'enrichissement personnel et mis en cause dans une affaire portant sur le détournement de millions de fonds publics ; il a fait l'objet d'une enquête policière mais nie ces accusations[27].

Combattants pour la liberté économique

À la suite de son exclusion de l'ANC en 2012, il fonde un nouveau parti qui se revendique anticapitaliste et panafricaniste[28], les Combattants pour la liberté économique, dont le programme comprend l'expropriation des terres et la nationalisation des mines sans compensation[29]. Aux élections générales sud-africaines de 2014, EFF obtient 6,4 % des voix et devient le troisième parti du pays[30].

En , dans une interview accordée à Al Jazeera, Julius Malema annonce qu'il n’excluait pas d’avoir recours à la violence pour renverser le gouvernement, ce qui amène l'ANC à porter plainte contre lui pour trahison. Ces déclarations interviennent dans un contexte politique tendu marqué par des demandes récurrentes de l'opposition visant à obtenir la démission ou la déchéance du président Zuma, ce dernier ayant été déclaré coupable par la justice d’avoir violé la Constitution en refusant de rembourser partiellement les millions de rands d’argent public utilisés pour rénover sa résidence privée[31] - [32].

Malema soutient avec ferveur l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Il y voit une « lutte anti-impérialiste » de la Russie contre l'OTAN en adéquation avec l’idéologie de l'EFF. Il souhaite pouvoir envoyer des armes afin d'aider la Russie[33].

Notes et références

  1. (en) Amy McKenna, « Julius Malema », sur Encyclopædia Britannica, (consulté le ).
  2. Verashni Pillay, One-on-One with Julius Malema, News24, .
  3. Pierre Malet, Afrique du Sud : la fin d'un tabou, Slate, .
  4. Malema l'indomptable, Jeune Afrique.
  5. Fabienne Pompey, Julius Malema, l'enfant terrible de l'ANC, Jeune Afrique, .
  6. Sabine Cessou, « Salaud, dehors, putain d'agent ! » lance Julius Malema au correspondant de la BBC en Afrique du Sud, Blogue Libération, .
  7. Julius Malema : « je suis choqué par ce qui est arrivé… », .
  8. AFP, « Afrique du Sud: "tue le Boer" fait débat », Le Figaro, (ISSN 0182-5852, consulté le ).
  9. , 4044 Farmers Murdered.
  10. AFP, Af. du Sud : 2 fermiers tuĂ©s par semaine, Le Figaro, .
  11. Selon la police, il y a eu 1 248 meurtres dans des fermes, fermiers et ouvriers confondus entre 1997 et 2007 - DĂ©pĂŞche AFP, LibĂ©ration, .
  12. AFP, Julius Malema reconnu coupable d'incitation à la haine, Libération, .
  13. (en) 'Shoot the boer' song banned, News24.com, .
  14. (en) ANC youth wing defies party's call not to sing 'Shoot the Boer', The Guardian, .
  15. (en) ANC shocked at banning of 'shoot the boer', IOL News, .
  16. (en) South Africa's Julius Malema denounces 'racist' courts, BBC, .
  17. Le parti au pouvoir en Afrique du Sud conteste en appel l'interdiction d'un chant révolutionnaire, Afriquinfos, .
  18. Sébastien Hervieu, Le turbulent chef de la ligue de la jeunesse de l'ANC défie sa direction, Le Monde, .
  19. Fouâd Harit, Julius Malema fait marcher les jeunes de l’ANC, Afrik.com, .
  20. Caroline Dumay Le chef des jeunes de l'ANC divise l'Afrique du Sud, .
  21. Sabine Cessou, Les jeunes de l'ANC, plaie sud-africaine ?, Slate, 11 aout 2011.
  22. (en) Julius Malema suspended for 5 years, News24.com, .
  23. AFP, « Le chef des jeunes de l'ANC exclu », Le Figaro, (ISSN 0182-5852, consulté le ).
  24. Profile: Julius Malema, BBC News, .
  25. Agence France-Presse, L'ANC sanctionne le trublion Julius Malema, Le Temps, , p. 4.
  26. BĂ©atrice DĂ©but, « L'Australie courtise les Sud-Africains blancs persĂ©cutĂ©s, Pretoria enrage Â», France-Soir, .
  27. Lydia Polgreen, « Le parti de Mandela fait face Ă  la grogne Â», The New York Times ; page 5 de l'encart distribuĂ© dans Le Figaro, .
  28. AFP, du Sud : Malema lance son parti politique, Jeune Afrique, .
  29. Christophe Le Bec, « Négociations salariales à haut risque en Afrique du Sud », Jeune Afrique,‎ (ISSN 1950-1285, lire en ligne)
  30. (en) Norimitsu Onishi, « African National Congress Draws 62 Percent of the Vote in South Africa », The New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne)
  31. Afrique du Sud : L’ANC porte plainte contre Julius Malema pour trahison, Le Monde avec AFP,
  32. « Afrique du Sud : Julius Malema, en guerre et contre tous – Jeune Afrique », sur JeuneAfrique.com (consulté le )
  33. (en) Emmanuel Wanjala, « I would arm Russia since it's fighting imperialism – Malema », sur The Star, (consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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