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Josué Henry

Josué Henry de la Lindi, né à Bohan le et mort à Ixelles le , est un militaire belge, personnage important de l'histoire coloniale.

Josué Henry
Naissance
Bohan (Belgique)
Nationalité Drapeau de la Belgique Belge
Décès
Ixelles (Belgique)
Profession Militaire

Il prend part à toute l'histoire de l'État indépendant du Congo, et est mémorialisé en Belgique pour son rôle dans les campagnes anti-esclavagistes. Il est en outre protagoniste de l'affaire Stokes (en), et participe à la répression de la révolte des Batetela lors de la bataille de la Lindi en 1897. Il essayera de franchir le Nil blanc sur ordre de Léopold II en 1899.

Après la crise de Fachoda, il est au cœur des tensions internationales qui débouchent dans la Première Guerre mondiale, pendant laquelle il est commandant de troupes de la frontière orientale du Congo.

Outre sa carrière militaire, Josué Henry est aussi un important géologue. Après sa retraite, il devient président des vétérans coloniaux.

Biographie

Jeunesse

Josué Henry est né à Bohan le , troisième fils d'une famille d'artisans ardennais. Comme sa famille n'a pas les moyens pour l'envoyer au collège, il intègre la carrière militaire. A seize ans il est volontaire au 2e régiment de Chasseurs à pied en garnison à Mons, devenant caporal et ensuite sergent. Avec Adolphe de Meulemeester (plus tard vice-gouverneur général du Congo belge) prépare le concours d'entrée à l'École royale militaire, d'où il sort en 1891 avec le grade de sous-lieutenant. Le , à bord du Lualaba, il s'embarque pour l'État indépendant du Congo, fondé en 1885 par Léopold II.

Les campagnes anti-esclavagistes

Josué Henry arrive au Congo en 1892 et sert dans la Force publique, participant aux campagnes anti-esclavagistes dans la guerre pour le contrôle des ressources du Congo entre les troupes coloniales belges (la Force Publique de Francis Dhanis) et les marchands arabo-swahili (zanzibarites), tels que Tippo Tip, qui contrôlent les commerces d'ivoire et d'esclaves autour des Grands Lacs.

Josué Henry est chargé par le Général Gustave Fivé d'occuper la région entre les Stanley Falls et la rivière Lomami, où sont campés les troupes de arabo-swahilis de Rachid, refoulés par Chaltin. Henry les vainc grâce à une tactique mélangeant mobilité et surprise, en gagnant le surnom de Bwana N'Deke (« le blanc qui se déplace avec la rapidité de l'oiseau »). Pendant deux ans, Henry commande une compagne sous les ordres de Hubert Lothaire contre le chef Rumaliza.

Henry rencontre le géologue belge Jules Cornet déjà lors de son arrivée au Congo en 1892. Cornet en influencera ses intérêts pour la géologie.

L'affaire Stokes

En 1894, Josué Henry est promu lieutenant ; entre mai et décembre il poursuit le chef Kibonge à Makala, en s'emparant enfin de son champ par surprise. Kibonge, reconnu coupable de la mort d'Emin Pacha, sera fusillé le . Grâce à ses lettres, Henry découvre que le mercenaire irlandais Charles Stokes, qui travaille aussi pour l'Allemagne, ravitaille les arabo-swahilis en armements.

Stokes sera ensuite capturé par Henry et fait pendre par Lothaire, le , après une cour martiale qui le reconnait coupable de brigandage. L'assassinat de Stokes cause des répercussions diplomatiques : la Grande-Bretagne et l'Allemagne se plaignent du manque de garanties légales dans le processus ; pour ne pas se créer trop de problèmes, l'État indépendant du Congo décide de verser des indemnités. Henry est témoin au processus de Lothaire à la cour de Boma et au Conseil supérieur de l'État indépendant du Congo à Bruxelles, où Lothaire est acquitté.

En parallèle à sa carrière militaire, Henry commence par prospecter dans le nord de l'Ituri. En 1895, il découvre un bloc de quartz aurifère dans le ruisseau Agola à Kilo.

La révolte des Batetela et la bataille de la Lindi

En , Henry vient soutenir Lothaire qui doit confronter la révolte des Batetela à Luluabourg. En 1896, avec le grade de commandant de 2e classe, Henry rentre en Belgique, où il est reçu par Léopold II qui lui décerne la médaille de la campagne arabe, la Croix de chevalier de l'Ordre royal du Lion et l'Étoile de Service.

En 1896, Henry repart au Congo en tant que capitaine-commandant de 1re classe. Il est désigné pour les Stanley Falls et attaché à la mission de Francis Dhanis.

Le , il apprend de la rĂ©volte des Batetela, qui se sont rĂ©voltĂ©s Ă  la suite de l'exĂ©cution de certains de leurs chefs, et ont ensuite Ă©tĂ© rejoints par les bantus arabisĂ©s. Henry, avec ses fidèles sergents Djoko et Lufungula, arrĂŞtent les rebelles au passage de l'Ituri pendant que Dhanis se rend aux Stanley Falls pour prĂ©parer la rĂ©sistance. Le , sur la rivière Lindi, Henry avec 600 hommes Ă©clate contre 2 500 - 3 000 rebelles batetelas. Henry compte 120 tuĂ©s et blessĂ©s tandis que les rĂ©voltĂ©s comptent 400 tuĂ©s et autant de blessĂ©s, avant de s'enfuir.

Le , le capitaine-commandant Henry est promu chevalier de l'Ordre de l'Étoile africaine. En 1938, en souvenir de cette victoire, le roi Léopold III autorisera Henry à rajouter de la Lindi à son patronyme.

La Campagne vers le Nil blanc

Carte de l'enclave de Lado

Après la crise de Fachoda de 1898, Léopold II reprend l'idée d'occuper le nord de l'enclave de Lado du Bahr el Ghazal (le Soudan du Sud).

Figure protectrice nkishi découverte en 1897 par Henry, abandonnée selon lui sur le champ de bataille par des guerriers songye[1].

En , Léopold II demande à Henry de rejoindre l'enclave de Lado avec une colonne de 500 hommes, pour empêcher le retour des Arabo-Swahilis, avant du regroupement de la colonne de Dhanis. Henry fonde le poste de Kero à la limite nord de l'enclave. Le commandant de Lado est en fin de terme et remet à Henry le commandement de la région fin 1898. C'est à Kero que le capitaine-commandant Henry reçoit l'ordre de franchir les barrages du Nil blanc et dépasser la frontière nord de l'Enclave, fixée en 1894 avec la France au parallèle 5 et demi. Avec le prétexte de ravitailler Lado en la reliant à Karthoum. Mais Henry trouve le Nil obstrué par des herbes, et son steamer Van Kerckhoven doit rentrer à Kero, où il apprend par courrier que Chaltin va arriver pour prendre le commandement de Lado. Furieux de devoir abandonner le poste de commande, Henry tente une seconde fois le voyage avant l'arrivée de Chaltin. Pour ne pas donner de soupçons, Henry s'accompagne à un capitaine anglais et à des français de la mission Marchand; ils abandonnent le steamer pour continuer le voyage à bord d’allèges, et sont ensuite récupérés par le vapeur anglais du major Peake qui essaye d'ouvrir le Nil à la navigation, avec lequel ils arrivent à Khartoum en 1900.

La présence d'officiers belges à Karthoum crée un malaise diplomatique car l’intérêt de Léopold II sur le Bahr el Ghazal est désormais connu. À la suite des pressions britanniques, Henry reçoit l'ordre de remonter sur le Van Kerckhoven et de revenir à Kero, où il parvient le pour ensuite rentrer en Europe.

Retour en Belgique

En 1900 Josué Henry revient en Belgique pour se marier, et reste en garnison à Mons pour 11 ans, car les relations tendues avec la France et la Grande Bretagne ne permettent plus à Léopold II de justifier sa présence à l'est du Congo.

Henry profite du séjour en Belgique pour suivre les cours de géologie de Jules Cornet à l'École des mines du Hainaut, où il étudie la géologie du bassin de la Semois.

Grâce à l'aide du vice-gouverneur Malfeyt, du 1911 au 1913 Henry est à nouveau au Congo, où il est nommé commissaire général de la Province orientale. Il est chargé de prospecter la région. Henry revient à Kilo, où il avait trouvé le bloc de quartz aurifère; dès 1902, des prospecteurs australiens ont signalé l'existence d'un important gisement d'or. Dès 1912, on trouve dans les lettres d'Henry la revendication de la découverte de l'or de Kilo.

Henry rentre en Belgique en , et envoie à Cornet un Mémoire sur la géologie de l'Aruwimi-Uele, avec lequel il espère obtenir le diplôme d'ingénieur-géologue, mais em 1914 il repart au Congo sans avoir présenté sa défense publique.

La Première Guerre mondiale en Afrique

Josué Henry est à nouveau au Congo en , où il apprend du début de la Grande Guerre. Le vice-gouverneur Malfeyt lui confie le commandement des troupes de la frontière orientale. Henry repousse les allemands de Goma lors de la bataille du mont Lubafu le , étant ainsi nommé officier de l'Étoile africaine après la victoire.

Le gouvernement belge envisage d'attaquer le Rwanda allemand, avec le soutien britannique de l'Ouganda. Henry n'est pas d'accord, il considère que les troupes belges ne disposent pas d'assez de munitions pour mener une invasion. Mais le gouvernement belge ne considère pas son avis et nomme plutôt le général Tombeur à la tête des opérations. Henry doit préparer l'invasion du Rwanda, mais l'offensive est retardée. Le ministre des colonies Jules Renkin reproche à Henry un manque d'organisation; Henry remet son commandement le , pour incorporer le 2e régimes de Chasseurs à pied au front de l'Yser en 1916, participant à la libération des Flandres.

Le , il est nommé lieutenant-colonel et participe à l'occupation de la Rhénanie. Henry est nommé colonel en 1920. En 1927, il devient général à titre honoraire.

Henry géologue et vétéran colonial

Après la Première Guerre mondiale, la Forminière propose à Henry de prospecter pour elle. Il est alors détaché au service de la colonie et en 1920 il est mis à la disposition de la Forminière. Il reste 2 ans au Congo et note toutes les observations qu'il fait dans un mémoire publié dans les Annales de la Société géologique de Belgique.

En 1924, à 55 ans, il est admis comme membre effectif de la Société belge de géologie. Il prend la même année sa pension militaire. Il continue alors la prospection pour diverses compagnies minières et revient plusieurs fois au Congo.

Une manifestation se tient le à Mons en l'honneur d’Henri en souvenir du trentième anniversaire de la bataille de la Lindi.

En 1928, soucieux de défendre la mémoire des anciens vétérans d'Afrique, il devient président de l'Association des Vétérans coloniaux. Il donne de nombreuses conférences et écrit beaucoup d'articles sur l'État indépendant du Congo et les anciens officiers de la Force publique.

Ses travaux vont lui permettre d'être membre associé en 1930 puis membre titulaire de la Section des Sciences naturelles et médicales de l'Institut royal colonial belge en 1936. Peu après il devient membre de la Commission géologique du Ministère des Colonies.

Il revient au Congo en 1848 avec sa femme pour assister au cinquantième anniversaire du chemin de fer du Bas-Congo.

En 1952, il remporte un procès qu'il avait intenté au général Moulaert qui revendiquait la découverte de l'or de Kilo. À ce moment, sa santé se dégrade et il commence à rédiger ses mémoires qu'il n’achèvera jamais. La même année, Léopold III le décore de la Grand-Croix de l'Ordre de l'Étoile africaine.

Il meurt le à l'âge de 88 ans. Sentant sa mort prochaine, il avait demandé une faveur à son ami géologue Sluys : « Si jamais tu reprends la plume pour parler de moi, n'oublie pas d'écrire que j'ai beaucoup aimé les indigènes des pays que j'ai parcourus et que je sais qu'ils me le rendaient bien ».

Notes et références

Bibliographie

  • N. Laude, Le gĂ©nĂ©ral chevalier JosuĂ© Henry de la Lindi, dans Bulletin de l'AcadĂ©mie royale des Sciences d'Outre-Mer, vol. IV, Bruxelles, 1958, p. 155-164.
  • A. Parizel, Un Bohannais cĂ©lèbre : le gĂ©nĂ©ral chevalier JosuĂ© de La Lindi, dans Hebdo 2000 du .
  • M. Pignolet, Figure de chez nous. JosuĂ© Henry de la Lindi (1869-1957), dans Terres d’Herbeumont Ă  Orchimont, 1993.
  • M. Sluys, JosuĂ© Henry de la Lindi, gĂ©ologue, dans Bulletin de l'AcadĂ©mie royale des Sciences d'Outre-Mer, vol. IV, Bruxelles, 1958, p. 165-179.
  • A. Thuriaux-Hennebert, Henry (Jean-Baptiste, JosuĂ©), dans ARSOM, Biographie belge d'Outre-Mer, t. VI, Bruxelles, 1968, col. 479-487.
  • A. Thuriaux-Hennebert, Inventaire Papiers JosuĂ© Henry de la Lindi, Tervuren, 1964 (Inventaire des archives historiques du MusĂ©e royal de l’Afrique centrale, no 3).
  • A. Thuriaux-Hennebert, Les expĂ©ditions du capitaine-commandant JosuĂ© Henry de la Lindi sur le Bahr et Djebel, dans Revue belgo-congolaise illustrĂ©e, no 3, , p. 20-27.
  • G. Vanthemsche, Le Congo belge pendant la Première Guerre mondiale. Les rapports du ministre des Colonies Jules Renkin au roi Albert 1er, Bruxelles, 2009.

Liens externes

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