Jeux de régression
La rĂ©gression est une pratique consistant Ă jouer Ă retomber dans un Ă©tat antĂ©rieur allant de l'Ă©tat de nouveau-nĂ© Ă l'adolescence, Ă un Ăąge qui peut varier ou non selon les pratiquants et pratiquantes[1]. Une sĂ©ance de rĂ©gression se dĂ©roule communĂ©ment entre deux adultes, lâun qui joue au bĂ©bĂ© et lâautre qui joue Ă la nounou, mais elle peut Ă©galement se rĂ©aliser en solitaire. La rĂ©gression fait appel Ă des comportements, Ă des mises en scĂšne et Ă des accessoires ordinaires destinĂ©s aux bĂ©bĂ©s ou aux jeunes enfants, dans le but de renforcer les conditions du jeu de rĂŽle et la sensation de dĂ©pendance recherchĂ©e par ceux qui pratiquent la rĂ©gression[2] - [1].
Les accessoires utilisĂ©s sont essentiellement des copies adaptĂ©es Ă taille adulte de vĂȘtements (barboteuses, bodies), d'accessoires (biberons, tĂ©tines), de couches, de culottes impermĂ©ables en plastique, de mobilier (table de change, lit Ă barreaux, parc de jeu). Des objets rĂ©ellement destinĂ©s aux enfants tels que de la nourriture (petits-pots), des jouets (poupĂ©es, cubes, puzzles), des livres pour enfants ou des dessins animĂ©s peuvent Ă©galement ĂȘtre utilisĂ©s[3]. Les expressions little, ageplayer ou adultbaby sont utilisĂ©es dans le monde anglo-saxon pour dĂ©signer ceux qui pratiquent la rĂ©gression, tandis que les termes Big ou Daddy dĂ©signent ceux qui la font subir, bien que ces rĂŽles puissent ĂȘtre optionnels[1]. Le terme « infantilisme » est parfois utilisĂ© de façon erronĂ©e pour dĂ©signer les jeux de rĂ©gression.
Description
L'individu jouant le rĂŽle de l'adulte ou qui supervise la sĂ©ance de rĂ©gression s'applique Ă traiter la personne qui rĂ©gresse comme un vĂ©ritable bĂ©bĂ©, un enfant, ou un adolescent, en sâoccupant au goĂ»t des participants de sa toilette et de ses changes, en lui donnant Ă manger, en lui faisant faire une sieste, en lui lisant des histoires et en lui parlant comme Ă un enfant. Une nounou peut ĂȘtre un homme ou une femme qui s'occupe d'un autre homme ou d'une autre femme, en fonction de ses prĂ©fĂ©rences personnelles. Les nounous sont le plus souvent des femmes et ceux qui pratiquent la rĂ©gression sont le plus souvent des hommes[3]. Si les pratiquants de la rĂ©gression font gĂ©nĂ©ralement des sĂ©ances seuls Ă leur domicile, ils font souvent appel aux services de leur conjoint ou Ă des nounous rĂ©munĂ©rĂ©es travaillant dans des nurseries pour adultes. Il ne s'agit en aucun cas de prostitution et toute pratique sexuelle y est clairement proscrite. Le programme de la sĂ©ance de rĂ©gression est alors Ă©tabli Ă l'avance par le client qui souhaite rĂ©gresser et validĂ© par la nounou. Une sĂ©ance de rĂ©gression a une durĂ©e variable qui peut aller d'une demi-heure Ă un week-end entier. Il existe plusieurs de ces nurseries en France[4] et dans la plupart des pays occidentaux.
La pratique de la rĂ©gression est trĂšs souvent liĂ©e au fĂ©tichisme des couches. L'utilisation d'une couche pour adulte peut ĂȘtre un Ă©lĂ©ment important lors des sĂ©ances de rĂ©gression, bien que certains individus pratiquant la rĂ©gression puissent ne pas les inclure dans leur jeu de rĂ©gression[5] - [1]. Le fait de porter des couches renforce physiquement et psychologiquement la sensation de retomber en enfance et le sentiment de dĂ©pendance, d'autant plus lorsqu'elles sont rĂ©ellement utilisĂ©es[4]. L'intimitĂ© des sĂ©ances de change renforce par ailleurs le lien affectif entre la « nounou » et le « bĂ©bĂ© ».
De nombreuses sociĂ©tĂ©s ont ouvert des boutiques sur Internet permettant d'acheter toute une gamme de vĂȘtements et d'accessoires destinĂ©s Ă ceux qui pratiquent la rĂ©gression[1].
RĂ©gression et BDSM
Les jeux de rĂ©gression peuvent s'apparenter aux activitĂ©s propres au BDSM Ă©tant donnĂ© les rapports de pouvoir que l'on retrouve dans ces deux pratiques. En effet, les participants d'un jeu de rĂ©gression peuvent dĂ©sirer subir et faire subir une humiliation en Ă©tant vu comme un enfant, d'ĂȘtre forcĂ© Ă agir comme tel ou de porter des vĂȘtements qui ne leur sont pas destinĂ©s. Selon les participants, on parle de sissification lorsque l'humiliation implique que l'individu subissant la rĂ©gression est un homme adulte jouant le rĂŽle d'une petite fille, bien que cette pratique puisse ĂȘtre critiquĂ©e pour ses implications sexistes[1].
Psychologie
Le manuel de psychologie amĂ©ricain Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-IV) nomme cette pratique sous le terme d'« autonĂ©piophilie » (du grec ancien αáœÏÏÏ / autĂłs (« soi-mĂȘme »), ÎœÎźÏÎčÎżÎœ / náșżpion (« bĂ©bĂ© ») et ÏÎčλία / philĂa (« amour »)[6], terme trouvĂ© nulle part ailleurs que dans ce manuel. ConsidĂ©rĂ©e par le DSM-IV comme une paraphilie, la rĂ©gression entre cependant difficilement dans cette catĂ©gorie, car elle n'implique pas nĂ©cessairement une quelconque forme d'excitation sexuelle. Plusieurs pratiquantes et pratiquants considĂšrent que le sexe n'a pas sa place dans une sĂ©ance de rĂ©gression. Par ailleurs, la littĂ©rature scientifique diffĂ©rencie clairement les jeux de rĂ©gression et la pĂ©dophilie sur la base de la participation d'adultes consentants[1] - [5] - [7].
La régression a également été utilisée en psychologie en analyse transactionnelle dans le cadre d'une thérapie appelée « reparentage »[8]. Le but est de faire régresser le patient de façon dirigée à des étapes antérieures de son développement pour surmonter certaines difficultés, en lui donnant notamment le biberon ou en lui faisant porter des couches.
Notes et références
- (en) Christina Richards, The Palgrave Handbook of the Psychology of Sexuality and Gender, Palgrave Macmillan UK, (ISBN 978-1-349-46671-9 et 9781137345899, DOI 10.1057/9781137345899_5, lire en ligne), p. 60â76
- (fr) « Diaper Alliance Foundation : Qui sont les adeptes des couches ? » (consulté le ).
- (en) Kaitlyn Hawkinson et Brian D. Zamboni, « Adult Baby/Diaper Lovers: An Exploratory Study of an Online Community Sample », Archives of Sexual Behavior, vol. 43, no 5,â , p. 863â877 (ISSN 0004-0002 et 1573-2800, DOI 10.1007/s10508-013-0241-7, lire en ligne, consultĂ© le )
- Mathias Tuosto, « Ces adultes qui aiment jouer au bĂ©bĂ© », Nouvo, Radio tĂ©lĂ©vision suisse,â (lire en ligne [vidĂ©o])
- (en) Paul Rulof, Ageplay : From Diapers to Diplomas, Nazca Plains Corporation, The, , 208 p. (ISBN 978-1-61098-190-3)
- American Psychiatric Association, Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, IV-TR, , 535â582 (ISBN 0-89042-025-4), « Sexual and Gender Identity Disorders »
- (en) Lee Harrington, The Toybag Guide to Age Play, Greenery Press, , 106 p. (ISBN 978-1-890159-73-3)
- (fr) Martine Maurer, « Le reparentage est-il thérapeutique ? » (consulté le ).